156 - la meilleure de toutes

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Mon mono m’échappe et le clavier virtuel apparaît avec le mur d’en face en guise d’écran. Je freeze. Je pourrais écrire, là. Mais quoi ? Danger. J’éteins prudemment l’application. J’entends d’ici crépiter la machine à écrire dans le manoir des Suburbs, là où je l’ai laissée, la maudite. Je me réfugie dans mon bureau pour me calmer. Je regarde le grand tableau noir. Une craie blanche brille, posée juste à côté. Écrire. À la main. En grand. Sur le mur qui s’efface. Là oui, pourquoi pas. Je saisis la craie : « Memento quias pulvis es et en pulverem reverteris ». Un mot invisible a disparu de cette incantation de mortel. Il s’agit de ne pas oublier. Il s’agit de poussière, de nous, de notre état véritable. Mais quelle poussières nous sommes ! Pas n’importe lesquelles. Et le temps éternel nous en préserve. J’écris mon Histoire avec Énola qui lit en moi comme elle boit tous mes fluides :

  • Tu as raison Jenna. Tous les mondes que j’ai connu où tu écris sont dystopiques. Ici, au contraire, tu construis les utopies. Chapelles, Ambassades, Riviera, la liste peut être longue j’en suis sûre même si tu privilégies la qualité à la quantité, enfin tu essaies notamment pour tes régulières, Pauline, Gloria, Paloma, Maëlle et moi. J’en ai oublié ?
  • Les régulières ne sont qu’un échantillon de mes plaisirs récurrents, j’ai eu tant de filles parmi les Pôles et autres rencontres intimes plus ou moins mémorables. J’en ai oublié une partie mais elles savent me le rappeler quand je les croise.

On ne se souvient pas de tous les repas qu’on a pris. Ni moi non plus. J’ai juste quelques repères, des préférences, une culture. Quoi que, avec Énola nul besoin de minibris ou autre. Elle sait y faire de mon corps.

  • Jenna, moi aussi j’oublie, pour ma santé mentale, tout ce que j’ai pu vivre ailleurs, dans des mondes sans intérêt. Je me laisse tout de même la possibilité d’y retourner, au cas quelqu’une disparaît.
  • C’est comme ça que tu as ramené Vivien Virein. Et il est mort à nouveau. Ça marche pas à tous les coups.
  • Si. J’aurais pu le ramener à nouveau mais son premier retour a eu l’effet escompté. En fait, ça ne marche plus pour les garçons dans notre monde. Je peux le faire mais c’est perdu d’avance.
  • Et pour ma fille, Arona ?
  • Si ça marche pas dans un sens, on peut faire le chemin inverse.
  • En passant d’un monde à l’autre, tu ne t’es jamais perdue ?
  • Si, je ne me rappelle plus de mon monde de départ. C’est pas grave parce que celui-ci est le meilleur de tous. Et tu es la meilleure de toutes.

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