161 - l'art de la paix
Protégées dans notre Riviera, on attend la prochaine visite du passé. Après Marie et Marielle, c’est au tour de Maëlle de passer. D’une lignée majeure, une adolescence déviante au comportement dangereux de sorcière s’est calmée en ma présence et elle reprend le contrôle toute seule loin de moi. La voir revenir est un peu anxiogène.
- J’arrive pas à me définir. Mon âme égarée ne se retrouve pas. Et surtout, personne ne m’aime, à part ma mère, mon gémeau, Aline.
- Tu as oublié la plus importante, Pauline, ta grand-mère. Elle saura quoi faire de toi. C’est ce qu’elle a fait avec moi.
Je deviens comme Greta, quelqu’une qu’on vient voir pour être sauvée. Maëlle en est subjuguée d’évidence. Elle m’embrasse rapidement et se sauve. J’aurais aimé qu’elle reste un peu. Heureusement Énola est disponible pour moi pendant que Arona s’ébroue sur Eloa. Nous revoilà en unions régulières même si entre deux ébats Énola me rappelle que :
- Tu dois te définir sans moi. Même si je serai toujours là, pour toi.
- Forever is composed of nows. C’est le genre de trucs que les mortels savaient déjà. Mais pas n’importe quels mortels. Les poètes.
- Tu devrais te remettre à écrire, conjurer la malédiction. Avec ta poésie par exemple. C’est trop ambiguë pour que ce soit interprété par une quelconque medium du Vatican.
- La poésie peut être interprétée n’importe comment, je prends pas le risque.
Le reste, c’est encore pire. Les romans de Megan H, c’est que de la mécanique avec un déroulement de l’histoire, des rebondissements et une chute. Alors chut. Plus un mot sous ma plume. J’aimerais raconter une histoire dans connaître l’intrigue, dans l’ignorance de la phrase suivante, genre écriture automatique. Mais mon esprit n’est pas assez clair ou vide. Je fonce dans mon bureau et je regarde mon tableau noir et sa phrase blanche stupide en latin. Je crois qu’il m’en reste. Je cherche dans la vitrine. Non, c’est dans le placard. La voilà, une simple bouteille d’eau dans laquelle se cache, anonyme, de l’eau bénite. J’ouvre le bouchon, je sens l’intérieur, je ferme les yeux et en tournant sur moi-même j’asperge la phrase en craie qui fond et dégouline en pleurs d’ange. Les deux premier mots ont disparu comme des fantômes oubliés, il ne reste plus qu’une affirmation stupide que j’efface à la brosse. Adios les mots. J’éclate de rire. C’est drôle ? Non, je suis soulagée, de renoncer, à ce pouvoir. Mon arme secrète pour la prochaine menace. La dissuasion, il n’y a que ça de vrai. L’art de la paix.
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