187 - le poids du passé

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Paloma m’interrompt. Je me sens prise en flagrant délit.

  • Désolée, c’est fascinant ce bouquin. Il y a vraiment 7 parties ?
  • Le Vatican a un très bon service de renseignements. SSV4.
  • Je peux la garder ? Je n’en ai pas en fait. Pas de vraie comme celle-ci, estampillée Sainte-Claire.

Elle me la reprend, sort une tige, ouvre la première page et griffonne dessus. C’est une dédicace. Elle signe. C’est une consécration je crois. Elle me la rend, avec le sourire. Je regarde son texte mais c’est en latin, j’ai oublié cette langue, enfin je crois.

  • J’accepte ton pardon, Jenna.

Je me lève, je m’approche d’elle, elle a un mouvement de recul. Bisou sur la joue. Et je tente une accolade qui finit en hug. On expire, ensemble. Elle sent bon mais je ne reconnais pas cette odeur. Je me sens si bien, si légère. Elle aussi on dirait. On se met à rire, les grands murs autour de nous aussi, de notre écho. Je serre la Bible contre ma poitrine.

  • Merci Paloma, Sœur Paloma XVI, SSV4. Entre autres, je suppose.
  • De rien Jenna, Jenna Jenkins, AZU. Entre autres, je suppose.

Que la Paix soit avec nous. Et avec notre esprit. Mais surtout notre cœur. Sa main est dans la mienne mais je m’en vais et elle me laisse repartir. Je me retourne avant de sortir, elle est restée plantée, là où on était. Je sais que ça aurait dû continuer en galipettes dans la sacristie. Mais je garde la contrôle, avec le prétexte de l’oubli, je peux m’en passer, comme de savoir qui sont les inconnus qui viennent me voir. Je rentre ranger précieusement la Bible de Paloma dans mon bureau. C’est un énorme trésor pour moi, ça a du sens. J’en suis l’anti-autrice. Je trouve un stylo pour y ajouter mon paraphe sous la dédicace, comme pour en valider ma propriété : « L’Amour ne se subit plus. Il se choisit. » Signé Jen Jen. J’aurais voulu trouver mieux sur ce que je ressens dans l’instant. J’espère que ce n’est pas trop en contradiction avec ce qui est écrit au dessus. Mais je ne cherche plus à savoir, je ferme la Bible et je la mets en bonne place dans mon étagère, pas trop haut pour qu’elle reste accessible facilement, dans mon champ de vision pour que je ne l’oublie pas. Car même si ce n’est pas une âme, elle en est pleine, et j’y ai contribué, sur la fin. Pour beaucoup, l’important, c’est de croire. Pour moi maintenant, l’important, c’est d’oublier. Et avec l’arrêt des calendriers et de la Bible, impossible de se souvenir des faits. Rien ni personne ne reste pour témoigner d’une Histoire non écrite, juste vécue, par les unes et par les autres., légèrement, sans le poids du passé.

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