Chapitre 2

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— Comment va Liam? demanda Alyssa à Nathan entre deux bouchées.

À la suite de la cérémonie, le commandant White avait organisé un grand festin pour célébrer l'arrivée des nouvelles recrues au sein de l’armée. Tout cela étant nouveau pour eux, les partenaires de parcours s’étaient automatiquement assis ensemble à une table, à côté des autres nouveaux soldats. La cafétéria du campus étant immense, ils pouvaient facilement passer inaperçus, car ils ne voulaient surtout pas devenir les victimes des intimidateurs du groupe dès leur première journée.

  • Il va mieux, la rassura Nathan, mais sa blessure semble s’être infectée. Les médecins font de leur mieux, mais ils ne prévoient pas de le laisser s’envoler de si tôt.

  • Tout ça est de ma faute, déclara Alyssa. J’aurais dû le laisser aux mains des gardes pour qu’ils le soignent plus tôt, au lieu de me penser son ange gardienne et vouloir à tout prix le sauver…

  • Dis pas ça, l’interrompit Éloïse. Il aurait très bien pu se rendre et abandonner par lui-même à cause sa blessure, mais il a décidé de continuer malgré cela et il a fallu qu’une des créatures lui injecte du venin et aggrave sa plaie. Tu n’as pas à t'en vouloir.

  • Tu as sûrement raison, admit Alyssa. Quelqu’un sait-il au moins qu’est-ce qui vous a attaqués dans le tunnel?

— Aucune idée, répondit Nathan en haussant les épaules.

Soudain, un jeune adulte s’invita à leur table et pris place au côté d’Alyssa, faisant face à Éloïse et Nathan, qui haussèrent les sourcils.

  • Moi, je sais, dit-il. On les nomme des scorpivolius. Il s’agit d’une mutation entre un scorpion et une guêpe noire. Ils en gardent une certaine quantité dans des cages au sous-sol du palais. Normalement, ils ont des ailes, mais ceux du parcours ont dû se les faire couper par les dresseurs pour les rendre moins dangereux,

  • Ce qui ne les a pas empêché d’infecter Liam avec leur poison, fit remarquer Nathan au nouveau venu.

— Tu es qui, au juste? voulut savoir Éloïse.

— Sergent Hathaway, pour vous servir, mais vous pouvez m’appeler Michael.

Alyssa manqua de s’étouffer en entendant ce nom, ce qui attira l'attention du sergent. Leurs yeux se croisèrent, puis la jeune femme détourna vite le regard, craignant qu’il ne la reconnaisse, avant de se souvenir que le Rebelle était le seul à avoir réalisé sa présence lorsqu’elle les espionnait, donc qu’aucun d’entre eux ne l’avait aperçue. Il était donc impossible qu’il ne se souvienne d’elle, puisqu’il ne l’avait jamais vue.

  • Et pour votre information, les scorpivolius de la grotte n’avaient aucun poison dans leur organisme, expliqua Michael.

— Les petits, non, mais la reine, oui, répliqua Nathan.

  • Étrangement, les scorpivolius ont un métabolisme assez particulier. La reine est peut-être la plus imposante et agressive, mais son venin a très peu d’effets et ils sont inoffensifs. Ce Liam à eu de la chance que les dresseurs aient extrait le poison de leurs pinces, car si votre ami avait été mordu par un des sujets de la reine, il serait déjà mort.

De ce fait, il quitta les trois amis et reparti rejoindre son groupe quelques sièges plus loin.

  • Alyssa, ça va? Ne me dis pas qu’il t'a tapé dans l'œil à toi aussi? fit Nathan en agitant sa main devant le visage de la jeune femme, perdue dans ses pensées.

Elle cligna des yeux et haussa un sourcil, ne comprenant pas à quoi faisait allusion son ami. Ce dernier pointa alors en direction d’Éloïse, qui n’avait toujours pas quitté des yeux le beau sergent. Alyssa sourit et se retourna vers Nathan.

  • Oui, désolée. C’est juste le fait d’être dans cette cafétéria, avec tout le monde… Ça rend le tout plus… réel. On est des Loyaux, maintenant, dit-elle, mentant sur la véritable raison de son égarement.

— En effet! Ça fait du bien d’effet pouvoir le dire tout haut! s’extasia Nathan en souriant.

— Hein? Dire quoi tout haut? lança Éloïse en reprenant enfin ses esprits.

Les amis éclatèrent de rire et passèrent le reste de la soirée à s'amuser ensemble, mais Alyssa ne pouvait cesser de penser; était-ce lui qu’elle avait entendu, ce jour-là?

***

Le lendemain matin avait lieu leur premier entraînement. Alyssa se réveilla difficilement après un dur sommeil et se dirigea vers sa nouvelle garde-robe afin d’y dénicher une tenue de combat appropriée. Le lit sur lequel elle avait passé la nuit n’était pas des plus confortables et son matelas dur avait réussi à heurter son dos, mais elle s’étira et ouvrit son armoire de vêtements. La chambre qu’il lui avait été assignée était plutôt simple, n'était composée que d’une pièce avec un lit et une salle de bain, mais elle ne s'attendait pas à davantage.

Il était prévisible que les quartiers des soldats ne soient pas les plus luxueux et spacieux, d’autant plus qu’Alyssa avait toujours été habituée à la simplicité dû au mode de vie monotone qu’elle avait adopté au fil des années passées sur le toit de ses parents adoptifs. Ses morceaux vestimentaires avaient été transférés la veille directement de ses anciens quartiers qu’elle occupait pendant le camp de sélection, qui se situait dans un autre bâtiment en annexe au château, ce fut donc avec satisfaction qu’elle n’eut donc pas besoin de voyager elle-même ses effets personnels.

Après avoir enfilé son costume, elle prit son sac et remarqua que quelqu’un y avait déposé une lettre. Elle la lut et réalisa qu’il s’agissait d’une invitation à ce qui semblait être un rassemblement secret prévu le soir-même, dans le sous-sol du château. Intriguée, elle la rangea dans la pochette extérieur de sa sacoche de sport et se dépêcha d’aller rejoindre le reste des troupes dans l’auditorium, qui s’était maintenant transformé en arène de combat.

Des armoires étaient disposées de chaque côté de la salle, contenant tous différents types d’armes et de flèches. Des cages de métal étaient aussi suspendues au plafond afin de faciliter les leçons de combats aériens, le lustre de la veille ayant probablement été déplacé dans une autre pièce. Elle repéra rapidement Nathan et Éloïse et se faufila entre les soldats pour les rejoindre.

— Toi aussi, tu as eu l’enveloppe? lui chuchota Éloïse.

— Oui, affirma Alyssa. Est-ce que vous y allez?

  • Je ne sais pas, ça m’a l’air suspect, déclara Nathan en empoignant un arc mis à disposition et faisant mine de viser Éloïse.

  • Nathan, il faudrait que tu commences à respecter un peu moins les règles, blagua cette dernière. En ce qui me concerne, je n’ai rien contre une petite sortie en douce. Je suis partante! Toi, Alyssa?

— Si tu y vas, alors j’en suis! confirma la jeune femme.

— Vous êtes tellement naïves, se lamenta Nathan. Qui dit qu’il ne s’agit pas d’un piège?

— Nous, naïves? s’indigna Éloïse. Tu vas voir ce qu’elle te dit, la naïve!

Elle prit un arc à son tour et fonça vers Nathan, prêt à l’attaquer. Ce dernier se protégea à la dernière minute et riposta, poussant les deux compagnons à se battre en duel. Alyssa les regarda s'entraîner et eut envie de les rejoindre, mais une main sur son épaule l’en empêcha.

— Tu es seule? demande une voix dans son dos qu’elle sut facilement reconnaître.

  • Allons, je ne suis qu’une recrue, il doit bien y avoir un autre soldat plus expérimenté qui pourrait prendre ma place, ne pensez-vous pas? répliqua la jeune femme en faisant face à son interlocuteur, qui, comme elle le soupçonnait, était en fait le sergent Hathaway.

La jeune combattante le regarda droit dans les yeux et le défia du regard. Son nom était peut-être le même que celui qu’elle avait surpris en train de menacer un enfant rebelle il y a cinq ans de cela, mais rien ne prouvait qu’il s’agissait de lui, elle décida donc de s’en méfier.

  • On a peur? fit Michael dans une tentative d’intimidation, qui, malheureusement pour lui, n’eut aucun effet sur Alyssa.

— Vous oseriez vous en prendre à une jeune soldate à son deuxième jour de service?

  • Si cela lui permet d’améliorer ses techniques de combat en avance sur les autres, alors je le ferai volontiers.

  • Alors, je crois que vous avez trouvez votre adversaire, conclut Alyssa un sourire en coin en agrippant un arc suspendu sur un crochet.

— En fait, il s’agit de mon arme, que vous tenez là, observa le sergent.

  • L’arme ne fait pas le combattant, n’est-ce pas? cita l’adolescent en prenant une position de combat.

— Vous avez du caractère, jeune fille.

Il arracha un arc des mains d’un de ses acolytes et prit place devant la jeune femme, avant de s’élancer vers elle. Alyssa esquiva le coup et contre-attaqua en lui infligeant un coup de coude dans les hanches. Le sergent absorba le choc, mais ne flancha pas pour autant, cognant son adversaire sur le tibia avec la pointe de son arc. Cette dernière perdit l’équilibre et agita son arme dans tous les sens, accrocha au passage le casque du soldat et le jeta sur le sol, découvrant le visage de Michael.

C’est alors qu’un détail sauta aux yeux d’Alyssa; une entaille sévère au niveau de la joue gauche du soldat. Au même endroit que le Rebelle avait coupé son ravisseur dans ses souvenirs. C’était lui. Ce dernier perdit patience et poussa la jeune femme sur le sol et lui ficha la pointe tranchante de sa flèche entre les deux yeux, ouvrant ses ailes en signe de dominance. Alyssa ne put se retenir:

  • Alors, c’est comme ça que vous l’avez menacé, le jeune rebelle, dans la ruelle, cinq ans plus tôt?! lança-t-elle en fronçant les sourcils.

Le sergent Hathaway se releva d’un coup et écarquilla les yeux. Il regarda autour de lui et vit que tous les regards étaient à présent braqués sur lui, les autres Loyaux chuchotant entre eux. Il prit panique et quitta la pièce en courant.

***

De retour à leur place habituelle dans la salle à manger, le trio prirent leurs cabarets et retournèrent s'asseoir pour dîner. La nourriture offerte par la cafétéria du campus n’était jamais très élaborée, mais avait tout de même bon goût et remplissait les estomacs des guerriers, ce qui suffisait amplement aux troupes. Alyssa prit sa fourchette et la plongea dans son assiette, mais elle n’avait plus très faim. Cette confrontation avec le sergent Michael lui avait complètement coupé l’appétit. Éloïse et Nathan, qui étaient demeurés silencieux jusqu'à présent, commencèrent alors à la bombarder de questions.

  • Qu’est-ce qui s’est passé avec le sergent, tout à l’heure? Pourquoi a-t-il pris la fuite? la questionna Nathan.

— C’est compliqué, répondit vaguement la jeune femme.

— J’ai entendu parler de menaces et de jeune Rebelle, qu’est-ce que cela signifie? insista Éloïse.

Alyssa ferma les yeux et hésita à l’idée de leur parler des événements d’il y a cinq ans.

— C’est une longue histoire… répéta la jeune femme. Je ne sais pas si je devrais vous en parler…

— Aller, tu peux nous faire confiance, lui assura Nathan.

La jeune femme soupira et commença donc à raconter son histoire n’oubliant aucun petit détail, des comportements arrogants des hommes jusqu’à la manière dont le rebelle lui avait permis d'éviter de s’attirer des ennuis. Ses souvenirs révélés, les adolescents restèrent muets quelques secondes, puis Éloïse rompit le silence.

  • Alors, c’est pour cela que tu as voulu rejoindre l’armée? Pour découvrir pourquoi le Rebelle t’a épargné? supposa-t-elle.

  • En partie, avoua Alyssa, mais surtout pour savoir pourquoi les soldats Loyaux l’ont épargné, lui. D’après les échanges de Michael et son partenaire, le tuer aurait frustré les autorités rebelles à un tel point qu’une seconde guerre aurait pu éclater.

— Je le savais! J’ai toujours soupçonné les dirigeants de nous cacher quelque chose, émit Nathan.

  • Calme toi, ce garçon pourrait être n’importe qui, répliqua Éloïse. N’invente pas de complot là où il n’y en a pas.

  • Peu importe, peut-on changer de sujet, maintenant? proposa Alyssa. On y va, ou non, à cette fameuse rencontre secrète? Moi, j’y vais et Éloïse aussi, alors il ne reste plus que Nathan. Tu viens avec nous?

  • Ne t'inquiètes pas, Alyssa, fit Éloïse en riant. Après la raclée que je lui ai fichue tout à l’heure, je pense que notre ami n’a plus vraiment le choix de nous accompagner!

Le principal intéressé détourna le regard et se frotta le nez avec un mouchoir, ce dernier ayant sûrement été assez amoché durant sa bataille contre Éloïse, ce qui fit rigoler les deux adolescentes.

***

Épuisée par sa longue et exigeante première journée au sein de l’armée loyale, Alyssa s’étendit sur son lit et regarda le plafond. Elle repensa alors à la promesse qu'elle avait faite à ses parents avant l’Envol et sortit du papier et un crayon pour leur écrire, mais fut interrompue par des coups dans sa porte. Elle se leva et observa à travers l'œil de bœuf, puis, reconnaissant les visages familiers de Nathan et Éloïse, ouvrit la porte.

  • Mais, qu’est-ce que vous faites ici à cette heure? les réprimanda-t-elle. Le couvre-feu commence dans à peine dix minutes!

  • Tu n’as quand même pas oublié? répliqua Éloïse en brandissant une lettre devant le visage de son amie.

  • Oh mon dieu, c’est vrai! se rappela Alyssa. Ça m’était complètement sorti de la tête! Attendez-moi ici, je vais me changer et je vous rejoins.

— Fais vite!

La jeune femme se précipita à l’intérieur et enfila une tenue décontractée avant de retrouver ses amis dans le couloir.

  • Bon, et comment faisons-nous pour nous faufiler au sous-sol du château sans se faire prendre? demanda Nathan.

  • Il est écrit dans les instructions d’emprunter des escaliers secrets situés au fond du couloir ouest, lut Éloïse.

— Le couloir ouest?! se lamenta Nathan. C’est du côté opposé du camp!

Alyssa roula les yeux en riant et suivit Éloïse vers l‘intersection des quatres corridors principaux du campus. Ils marchèrent une bonne distance tout en faisant attention pour ne pas faire de bruit, et atteignirent finalement le fameux couloir ouest. Ils empruntèrent discrètement le passage et le traversèrent rapidement pour enfin aboutirent devant les escaliers qu’ils devaient utiliser pour se rendre au rassemblement suspect.

Le petit groupe descendit les marches quatre à quatre et se rendit dans une grande salle éclairée par des torches, dans laquelle deux soldats se battaient l’un contre l’autre, sous les yeux amusés des troupes. Ces dernières étaient assises et profitaient des services du petit bar clandestin, dirigé par un soldat adulte aux cheveux bruns en bataille. Les adolescents s'immiscèrent dans le groupe et s’installèrent à une table en échangeant des regards intrigués.

  • Qu’est-ce que c’est que cet endroit? Un genre de club privé? supposa Nathan en élevant la voix, afin que les filles puissent l’entendre dans ce vacarme.

  • Aucune idée, répondit Alyssa en haussant les épaules. Il doit y avoir quelqu'un qui pourrait nous informer.

  • Tiens, justement, regardez qui voilà, fit Éloïse en pointant un soldat qui se dirigeait vers leur emplacement.

Alyssa le reconnut tout de suite: Michael Hathaway. Maintenant qu’il ne portait plus de casque et lui faisait face, contrairement au buffet de la veille pendant lequel elle n’avait aperçu que le côté droit de son visage, sa coupure était bien plus visible. Étrangement, elle était toujours présente et semblait marquée dans sa peau, alors qu’elle lui avait été infligée cinq ans plus tôt. Normalement, la marque aurait guérie par elle-même au fil du temps et serait disparue, mais elle était toujours là. Le sergent prit place à leur table puis, tout en évitant le regard de Alyssa, lança:

— Ah, vous voilà! Honnêtement, je ne croyais pas que vous viendrez!

— Où sommes-nous, sergent? voulut savoir Nathan.

  • Vous êtes dans un petit club secret que j’ai formé il y a quelques années, expliqua Michael. Nous y faisons la fête et organisons parfois des petits combats pour distraire la clientèle.

— La clientèle? Vous voulez dire les soldats? émit Éloïse.

  • Pas seulement eux, spécifia le sergent Hathaway. Nous invitons aussi des visiteurs de la ville. Le campus est situé tout près du palais royal, qui se trouve en plein centre de la capitale. Nos soirées attirent donc facilement des dizaines de personnes par semaine.

— Et pourquoi l’avoir créé, ce club? le questionna Nathan. À part pour distraire les troupes?

  • Pour l’argent, bien sûr! Tout le monde n’est pas aussi riche que toi, Nathan, déclara Michael. Bon, vous m’en voyez désolé, mais je vais devoir vous quitter. Le devoir m’appelle! Oh, et, un mot sur le club au commandant White, et vous êtes morts.

Puis, il se leva et retourna au bar, laissant les enfants seuls dans leurs interrogations. Nathan, prudent, fit signe aux filles de se lever et ils retournèrent dans les escaliers afin de pouvoir discuter tranquillement en privé. À peine eut-il le temps de proposer d’aller dénoncer le sergent qu’Éloïse s’imposa.

— Non, Nathan, dit-elle. Je sais ce que tu vas dire et il n’est pas question de jouer les rapporteurs.

— Mais c'est illégal! se plaignit l’adolescent.

— Légal ou non, on ne dira rien, répéta Éloïse.

  • Écoute, ce n’est pas parce que tu en pinces pour lui que c’est une bonne raison pour le laisser enfreindre la loi sans agir, répliqua Nathan en fronçant les sourcils.

— Pardon!?

— Ok, on se calme les amis, s'immisça Alyssa dans une tentative de détendre l’atmosphère. Je suis d’accord avec Éloïse sur ce point, nous ne les dénoncerons pas.

— Pour de vrai? s’étonna Éloïse.

  • Oui, affirma la jeune femme. Après ma confrontation avec le sergent ce matin, il est clair qu’il se tiendra le plus éloigné de moi durant les entraînements, ce qui m'empêchera de l'aborder pendant la journée. Mais, s’il dirige ce club, alors il y a de grandes chances qu’il y soit plusieurs soirs par semaines, ce qui me permettra de tenter d’avoir des réponses à mes questions.

  • Et s’il ne veut rien dire? suggéra Nathan. Des dizaines de soldats étaient présents et semblaient surpris quand tu a défié le sergent Hathaway ce matin, et je te rappelle que les événements ont eu lieu pendant la période d’armistice, alors il aura certainement des comptes à rendre au roi et au commandant s’il ne les en avaient pas informé à l’époque. En plus, le jeune Rebelle dont il est question a tout de même rompu les accords, ce qui rend le silence du sergent encore plus grave. Cela m’étonnerait donc beaucoup s’il accepte de te parler et de te révéler l'identité du Rebelle, surtout qu’elle semble assez secrète.

  • Nathan a pas tord, penses-tu vraiment qu’il voudra te revoir après tout ça? Il va sûrement se faire passer un savon intense par les autorités dès que cela va se rendre à leurs oreilles, fit remarquer Éloïse.

Alyssa baissa les yeux et réfléchit, mais elle devait admettre qu’ils avaient raison. Ce qu’elle avait fait à l'entraînement était irréfléchi et sa volonté de prouver aux autres qu’elle en savait davantage qu’eux sur la vérité lui avait ruiné toutes ses chances de la connaître. Elle s’en voulait terriblement pour cela, mais se dit qu’elle devait garder espoir. Peut-être allait-il un jour la pardonner?

***

Une semaine s’était écoulée depuis l’incident entre le sergent Michael Hathaway et Alyssa et pourtant, les autorités n’étaient toujours pas intervenues pour les aborder et aucun d’eux ne s’était fait réprimandé jusqu’à présent, ce qui intriguait grandement le trio. Malheureusement, Alyssa n’avait pas eu le courage d’approcher le sergent pendant cette période malgré ce qu’elle aurait voulu, d’autant plus que ce dernier était plutôt doué pour éviter la jeune femme. La tête dans les nuages, Alyssa fut surprise par la voix du commandant White qui commençait à s'impatienter.

  • Mademoiselle Manson, est-il si difficile de rester concentrée lorsque votre commandant vous parle? lança-t-il d’un ton grave.

— Quoi? Euh, oui… Désolée, monsieur, bafouilla la jeune soldate.

  • À présent, trouvez-vous un coéquipier et envolez-vous. Aujourd’hui, nous travaillerons les techniques de vol.

Alyssa obéit sur le camp et s’appaira avec Éloïse, s’élevant toutes les deux dans les airs. White donna quelques instructions et laissa ses élèves s'exercer, puis un messager lui transmit un mot de la part d’un haut-gradé. Il leva alors les yeux au plafond et fit signe à Alyssa de descendre, avant d’inviter son sergent à faire de même, ce qui alarma la jeune femme.

  • Qu’y a-t-il, mon commandant? demanda Michael en adoptant une posture droite et plaçant ses mains dans son dos.

— Notre roi aimerait s’entretenir avec vous, annonça le commandant. Maintenant.

Les deux soldats échangèrent un regard inquiet et suivirent le messager vers le bureau de leur monarque. Lorsqu’ils arrivèrent à destination, le serviteur fit signe aux gardes d’ouvrir et les combattants mirent pied dans la pièce, les portes se fermant alors soudainement derrière eux. Une ombre sortit alors d’une rangée de bibliothèques et désigna deux sièges de la main, invitant les invités à s’asseoir. Le roi s’installa à son fauteuil et croisa les doigts sur son bureau, fixant Alyssa et Michael droit dans les yeux.

— Je crois que vous connaissez déjà la raison de votre présence ici, commença-t-il.

— En effet, répondit Michael. Écoutez, je…

  • Vous ai-je permis de prendre la parole? le coupa le roi. Vous resterez silencieux tout le temps que prendra cet interrogatoire, et ouvrirez la bouche que lorsque je vous l'ordonnerai, est-ce bien clair?

Les soldats hochèrent la tête tandis que le vieil homme quitta sa chaise et se promena un peu partout dans la pièce avant de débuter son audience. Tout à coup, les portes de la salle s'ouvrirent violemment et un majordome y entra, l’air alarmé.

  • Monsieur! Une civile vient d'entrer dans le palais en panique et elle demande absolument à vous voir, cela semble urgent!

Inquiet, le roi quitta son bureau en trombe et se dirigea vers l’auditorium, où une dame âgée dans la cinquantaine pleurait toutes les larmes de son corps agenouillée sur le sol. En voyant son roi arriver, elle écarquilla les yeux et se mit à bafouiller des paroles incompréhensibles.

  • Madame, vous devez vous calmer, souffla un des gardes à la dame déboussolée. Comment vous appelez-vous?

La pauvre respira profondément et essuya ses larmes.

— Maria, dit-elle entre deux hoquets. Maria Constrellia.

— Constrellia? La clinique? demanda Nathan en se rapprochant du rassemblement de personne qui s’était formé autour de la femme.

— Oui, affirma cette dernière. Mon fils et moi en sommes propriétaires depuis maintenant huit ans.

— Et que s'est-il passé? la questionna le roi en se penchant à sa hauteur.

  • Je… Je revenais d’une course et j’ai entendu des bruits de combats venant de l’intérieur. Je me suis donc dirigée vers la porte et c’est là que je les ai vu s’envoler avec mon fils…

Elle leva les yeux vers le roi et son expression devint plus sérieuse.

— Majesté, ils sont de retour et ils ont mon fils. Vous devez faire quelque chose!

— Ils? De qui parlez-vous?

— Les Rebelles, monsieur. J’ai vu leurs ailes noires dans le ciel alors qu’ils amenaient mon fils inconscient dans leur repère. Une nouvelle guerre se prépare, mon roi. Ils ont franchi la frontière et plus rien ne les arrêtera.

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