CHAP 4 2
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Pour l’instant, j’ai de quoi m’occuper l’esprit. À savoir chercher des infos, le cul vissé dans mon fauteuil : Big Brother voit tout.
Mais Big Brother voit tout. Je passe en navigation privée et active un VPN sans me faire trop d’illusion : si ils veulent me tracer ils le feront, ça me fera juste gagner du temps. Rien sur Claire Lefloch, rien sur l’adresse où nous l’avons débusquée, rien sur Léon ou Grand Jean ; une fois écarté le flot d’informations sur ce que les médias ont baptisé « Le massacre de Scrignac ». Reste Aliénor. Elle n’apparaît nulle part dans l’enquête, elle a couvert nos traces et les siennes. Briac avait raison, elle est louche, c’est sûrement le cerveau de l’affaire.
À nous deux, vieille bique. J’entre « Aliénor » et « Scrignac » dans la barre de recherche, ça me renvoie à une ostéo dans le 56. Pourquoi pas, rien ne l’empêche de cumuler les activités, même si c’est tiré par les cheveux. La piste meurt quand je trouve une photo de la susdite sur Doctolib, elle est moche aussi, mais ça n’est pas elle.
Alien n’est pas une mondaine 2.0. Aucune trace sur les réseaux sociaux, rien de probant non plus dans les annuaires.
Ok… Les pistes s’amenuisent, mais c’est trop tôt pour me décourager. Le rade à Scrignac est de facto ma dernière chance. Je n’ai qu’à taper « Restaurant Scrignac » pour le trouver. « Le Chaudron de Dagda ». Aucun résultat sur les sites de sociétés.
Dernière chance ; une recherche par l’adresse et le grand Oracle me crache une réponse « SARL Dana », « Restauration Traditionnelle », immatriculée en 2002, gérant : Madame Monique Barbe… Ou cette garce n’est pas gérante, ou elle a mis un gérant de paille pour couvrir ses miches, ou elle s’appelle Monique… et se fait appeler Aliénor. Prénom qui colle parfaitement à son délire new age. Je trouve la date de naissance de Monique, âgée de 56 ans : ça cadre, je valide mon hypothèse.
Maintenant que j’ai son état civil, j’entre « Monique Barbe » avec sa date de naissance dans la barre de recherche de mon site de référencement. Ça y est, le Grand Oracle parle et il ne s’arrête plus. Alien s’est monté un véritable business : « Madame Monique Huguette BARBE », « Commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés » ; « SARL Dana », « Culture de légumes, de melons, de racines et de tubercules » ; « SCI Dana », « Hébergement touristique et autre hébergement de courte durée ». Recherche sur Dana, c’est une vielle divinité celte.
Conclusions probables : en plus de posséder son rade, Monique cultive des fruits légumes qu’elle revend sur les marchés et possède plusieurs biens immobiliers qu’elle loue via une SCI. Monique ne travaille certainement pas seul.
Toutes les boites, hormis le restaurant, sont domiciliées à une adresse à Commana, située à quelques bornes de Scrignac. Je passe sur Maps pour une vue aérienne : ce qui pourrait être une ferme, paumée au milieu des champs, quelques véhicules garés dans une cour intérieure. Une surveillance qui s’annonce coton, mais la piste est bonne.
La SCI m’intéresse particulièrement, ça veut dire que la vioque possède des biens immobiliers susceptibles d’abriter la sorcière. Mais je ne peux pas passer commande des relevés cadastraux depuis mon compte sans que ce soit visible et je suis coincé ici. J’ouvre une boîte mail créée en commun avec Briac. Rien de son côté. Je balance les infos et lui demande de s’occuper des hypothèques : il est dehors et peut donc faire intervenir un tiers. J’enregistre en brouillon et sort.
Nouveau passage sur Google, je lâche l’état civil de Monique dans la barre de recherche et trouve une association à Scrignac : « Les enfants de Dana » ; « Accueil, écoute, informations, accompagnement, toutes violences faites aux femmes ». Femmes et enfants à Scrignac n’étaient pas là par hasard. Monique est une grande philanthrope, à n’en point douter.
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