CHAP 6 3

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Je suis réveillé par un gros coups de langue baveux et fétides, le clébard qui me roule une pelle. Cette fois-ci, je ne rêve pas. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là, mais suis ancré pour de bon. La fièvre est tombée, je sens mon corps endolori de crampes et de courbatures. Un filet d’air frais passe par la porte entre-ouverte. Je frissonne, observe en me demandant le pourquoi de l’état de ma cellule, dont le sol et les murs sont aspergés de sang et de gerbe. J’essaye de protester alors que le bestiau n’en finit plus de couvrir ma trogne de sa bave épaisse, je ne produis qu’une sorte de grognement faiblard inefficace. Des tentatives de mouvement ne donne pas plus de résultat, les jointures de mes mains sont douloureuses, je n’arrive même pas à soulever les bras. De toute façon, la migraine me rappelle à l’ordre dès lors que j’esquisse un redressage de trogne.

— Oust !

Je fais le point sur Brunette, qui arrête de récurer en se rendant compte que j’émerge. Le chien obéit partiellement, s’assoit en ouvrant une gueule béante, laissant pendre sa grosse langue sur le côté. Je tente de saluer la donzelle sans que rien d’intelligible ne sorte. Elle n’en attend pas tant de toute façon, s’agenouille à mes côtés, s’emploie à humecter mes lèvres craquelées de déshydratation. Une grosse balafre la défigure de la tempe à la lèvre, suturée de gros points, couverts d’un onguent vert familier. De l’autre côté, un cocard a désenflé en hématome verdâtre. Je me décompose à mesure que son visage défiguré s’illumine d’une mine réjouie. Elle s’anime joyeusement, au bord de l’hystérie :

— Bonjour, Guy !

Elle porte une bouteille d’eau à mes lèvres, je m’étouffe en gargouillements douloureux avant d’avaler de grosses goulées revigorantes, qui me font retrouvées un filet de voix croassant.

— Bordel, Nattie, je suis désolé.

— Ne le sois pas, Guy. Toutes ces souffrances, toutes ces douleurs, n’étaient qu’une étape vers le Tout ! Mon cœur flétri d’égo s’est épanoui d’amour pour Nous.

Une flamme fiévreuse éclaire son regard, elle détrousse un sourire transi, à la limite de se faire sauter un point de suture. Je ne relève pas ses propos incohérents, j’ai des informations primordiales à obtenir.

— Ça fait combien de temps que je suis dans le coaltare ?

— Cinq jours.

Je défaille un peu plus en me pinçant les sinus. Je suis à un jour du délai imparti par Vic.

— J’ai besoin de mon téléphone, Nattie. C’est une question de vie ou de mort.

Ses yeux s’arrondissent de stupeur, comme si j’avais proféré une insanité :

— Tu peux tout dire, ici. Nous sommes unis. C’est par cette union que s’instaure la confiance et que nous nous élevons. L’extérieur souille notre unité. Pas de téléphone.

Je n’insiste pas. Le changement opéré dans son attitude est trop radical, cette gonzesse est totalement azimutée.

— Aliénor m’a fait l’insigne honneur d’être ta référente, moi qui suis encore novice ! Toi qui l’as déjà servie, c’est formidable !

Il a dû se passer un truc quand j’étais dans les vapes, j’ai du mal à raccrocher les morceaux. Je panique, quand le souvenir des bottes merdeuses sous mes lèvres revient :

— Servi qui, Nattie ?

— La Déesse, voyons ! Elle m’a soigné ! Son touché était pur et lumineux, elle a fait disparaitre la douleur avec ses pouvoirs ! Te rends-tu comptes ? Et maintenant elle te place entre nos mains, pour te guider sur le chemin de l’Elévation !

Je ne vois qu’une personne qui puisse correspondre au signalement. Nouveau pincement de sinus pour refréner mon désarroi. J’ai loupé Brunette, qui s’est téléportée sur le pas de porte.

— Repose-toi, Guy ! Je viendrai cette nuit pour la Communion.

Décidemment j’ai du mal à percuter. Communier en pleine nuit ? J’évacue vite la possibilité d’un plan cul. C’est forcément autre chose, peut-être une possibilité de me faire la malle.

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