Chapitre 21 : Quand maman s’en mêle et que papa brise une paroi de verre

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Mickaël remplissait le lave-vaisselle petit à petit pendant que moi, je débarrassais la table en traînant. J’avais la tête dans les nuages, aujourd’hui. Je n’arrêtais pas de penser à ce que j’avais lu hier soir. Comment mon père… Comment mon oncle ?! Et comment avaient-ils pu nous cacher ça ? Cette histoire m’avait retournée. Je ne savais même plus quoi en penser. Après tout, cela s’était passé il y a des années. Cela ne me concernait en rien. Il fallait que j’oublie, que je fasse comme si je n’avais pas lu ce passage. Oui, décidemment, c’était la meilleure chose à faire. Et puis, mamie ne m’aurait jamais confié ce carnet si elle s’était doutée de ce que j’y trouverais, n’est-ce pas ? Mais ce que j’avais lu… C’était grave. Très grave. J’avais encore du mal à y croire.

Depuis le salon, papa nous lançait des regards noirs. Il était encore en colère après nous. À l’étage, on entendait les cris de Sophie. Elle se disputait avec un policier au téléphone. On l’entendait hurler que son fils n’avait aucune raison de s’enfuir. Trente secondes plus tard, elle recommençait à dresser la liste des éléments suspects. J’avais envie de me boucher les oreilles.

Je ne savais plus où j’en étais. D’un côté, il y avait la voisine — une psychopathe présumée — qu’Alexandre avait (peut-être) percée à jour à propos des mystérieuses disparitions en Afrique. Elle l’avait tué quand elle s’en était rendu compte et elle avait dissous le corps, ça se tenait parfaitement. Mais de l’autre côté, il y avait mon père. Mon père et sa colère quand il m’avait parlé d’Alexandre. Mon père qui avait cru que je sortais avec ce garçon bien plus âgé. Mon père, qui s’était déjà laissé emporter par sa colère dans le passé. Je persistais à croire qu’il était innocent. Mais après ce que j’avais lu dans le carnet… Il devenait évident que les crises de violence venaient de son père. Cet homme aux bras tatoués et aux yeux noirs ne m’inspirait pas confiance. Il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond dans la tête de ce type, un truc qui poussait mon père à frapper quand il ne savait plus comment réagir, un truc qui avait poussé mon oncle au meurtre. Et cet homme-là, je pouvais facilement croire qu’il avait retourné le cerveau lors d’une métamorphose de mon père pour tuer Alexandre.

— Mario ou Luigi ? m’a chuchoté Mickaël au-dessus de la table de la cuisine.

J’ai jeté un coup d’œil à papa. Il avait cessé de nous fixer pour se concentrer sur des factures.

— Mario, ai-je répondu.

Nous nous sommes éclipsés dès que possible dans sa chambre. Mickaël était le genre de garçon qui faisait la poussière à chaque fois qu’on revenait de chez maman. Les draps de son lit étaient toujours si bien tirés qu’on croyait qu’il venait de les repasser. Il détestait les plis sur ses oreillers et son bureau était vide, à l’exception d’une trousse toujours soigneusement fermée et d’un cahier de notes pour ne rien oublier. J’étais toujours choquée quand je m’apercevais qu’il n’y avait rien de plus que des meubles sur le plancher. Parfois, j’en venais à me demander si nous étions vraiment jumeaux. Comment était-il possible de partager la même enfance et de terminer avec deux cerveaux si radicalement différents ? J’étais persuadée qu’il avait une théorie du complot à ce sujet. Peut-être allait-il me parler du multivers ou d’une adoption cachée.

Je me suis affalée sur son matelas tandis qu’il rampait par terre pour attraper sa valise jaune canari (elle était planquée juste en dessous de mes fesses, ce qui ne lui facilitait pas la tache). Papa avait fait disparaitre toutes les télécommandes et tous nos câbles de recharges ; nos téléphones étaient en mode économie d’énergie maximale mais il restait une chose à laquelle il était incapable de toucher : Mario kart. On a installé la switch sur la table de nuit et on a commencé à choisir notre voiture pour la course.

— Alors ? m’a-t-il demandé.

— C’est bon, j’ai pris une moto. On fait la piste étoile ?

— Non, andouille !

— Pourquoi non ? Tu n’aimes plus cette piste ? Je croyais que c’était ta préférée.

— Ce n’est pas ce que je voulais dire. Ellie, je te demandais de me raconter.

— Te raconter quoi ?

— Ce qu’il t’est arrivé chez Léa ! À quoi d’autre veux-tu que je pense ? Tu as disparu toute la nuit et tu es revenue sans ta chemise.

— Il ne m’est rien arrivé du tout !

J’étais bien contente que la course démarre et que mon frère soit obligé de regarder l’écran. Sinon, je n’aurais pas assumé mon mensonge devant sa mine contrariée.

— Ne me prends pas pour un imbécile, s’est-il plain. Je sais qu’il s’est passé quelque chose. Agathe s’est excusée.

— Ah bon ?

— Oui. Elle m’a fait un message quand tu étais à l’hôpital. Rien d’incroyable, juste deux trois mots. Mais elle n’aurait jamais fait ça, avant. Et la dernière personne à l’avoir vue, c’est toi. Alors, explique-moi ce que tu as bien pu trafiquer dans le jardin de ta meilleure amie.

— Pas grand-chose. J’ai discuté avec Agathe, c’est tout. Je lui dis que je ne voulais plus lui parler à cause de ce qu’elle t’avait fait. Je te jure que je n’essayais pas de me mêler de tes affaires, j’avais juste besoin de clarifier ça avec elle, histoire qu’elle me laisse tranquille.

— Mais oui, bien sûr ! Garde tes salades pour quelqu’un d’autre.

J’ai changé de position pour replier mes jambes sous mon corps tandis que Mickaël restait figé d’exaspération, à l’exception de ses doigts qui slalomaient sur sa manette. J’ai enchainé des virages serrés sur l’écran et mon frère m’a poussé contre le mur de sa chambre. J’ai ri. Il était agacé, mais au moins il ne me faisait pas la guerre point d’arrêter de me taquiner.

— Ne te vexe pas, l’ai-je consolé, mais je ne peux rien t’expliquer tant que je n’ai pas tout raconté à Léa.

— Mais pourquoi ?

— Tu connais la règle : ma meilleure amie d’abord.

— C’est injuste.

— Parfaitement. Et ça aussi, c’est injuste.

J’ai lancé une attaque sur sa voiture qui était à deux doigts de franchir la ligne d’arrivée et je lui ai passé devant sans le moindre état d’âme.

— Je te hais.

— Désolé, mec. Il fallait être plus rapide.

Il a posé sa manette sur le matelas et il s’est roulé en boule sur le lit.

— Tu crois que les jeux vidéo peuvent nous bousiller le cerveau ?

— C’est maman qui t’a dit ça ? ai-je soupiré.

Il s’est tourné vers moi et il m’a forcé à lui faire face.

— Ellie, je veux la vérité.

— Tant que tu ne deviens pas un légume en jouant pendant plus de dix heures sur vingt-quatre, je pense que ça devrait aller. Tu veux que j’invente des fausses statistiques pour te rassurer et t’éviter de culpabiliser d’avoir désobéi à notre punition ?

— Oui, s’il te plaît.

Ce qui me faisait rire chez mon frère, ce n’était pas qu’il soit prévisible, mais qu’il ne s’étonne pas quand je lui posais ce genre de questions. Il me faisait délirer.

— Très bien. D’après l’Organisation des Nations unies, les dromadaires qui ont servi de cobaye durant leurs expériences ne présentaient aucun symptôme de dépendance jusqu’à la barre des trois heures de jeux vidéo consécutives. Quarante pour cent des sujets qui sont allés au-delà ont débloqué le dernier niveau avec plus de difficultés que ceux qui avaient fait une pause. Ça te va ?

— Ellie, je parlais de vrais risques.

— Et moi, je parle de vrais dromadaires.

Notre conversation est partie dans un débat fictif sur ce qu’étaient les vrais dromadaires. Nous avions à peine terminé de ranger la console dans la valise que papa est arrivé. Il a toqué à la porte et il nous a dit :

— Plus un mot de travers, votre mère arrive. Ellie, tu as rangé ta chambre ?

— Oups.

— Comment ça, oups ?!

J’allais passer un sale quart d’heure.

— Je l’ai rangé lundi.

— Et depuis ?

— Je ne sais pas.

Il s’est pincé l’arête du nez en inspirant profondément.

— Retourne dans ta chambre en quatrième vitesse avant que je ne t’encastre dans le mur. Tu me vires tes vêtements du sol et tu les mets dans le placard, je ne veux aucun livre de cours qui sert de cale-porte et tu vas me déblayer ton bureau. C’est clair ? Oh, et n’oublie pas les sacs qui traînent, les bouteilles d’eau presque vides que tu n’as toujours pas mises dans la benne en bas de l’immeuble et les stylos de toutes les couleurs éparpillés partout.

J’ai tout planqué sous mon lit. Je sais, c’était une option débile, immature et pas franchement efficace, mais je ne voyais pas d’autre moyen pour ranger plus vite mon bordel. Quand j’ai entendu maman klaxonner devant l’immeuble, j’ai couru jusqu’au séjour. J’ai recoiffé mes cheveux noirs et j’ai vérifié que je n’avais pas de taches sur mon jogging (je commençais à regretter d’avoir balancé mon jean sous mon lit au lieu de l’enfiler. Maman adorait me voir bien habillée). Je me suis tenue au garde-à-vous aux côtés de Mickaël. Il a commencé à se ronger les ongles. Papa nous a lancé un regard d’avertissement et il a préparé du café. Je m’attendais à ce que maman arrive avec un sac de voyage, mais à ma grande surprise, elle a débarqué dans l’appartement sans même frapper et elle nous a dit :

— Au revoir Gabriel. Les enfants, on embarque ! Vous n’avez pas fait vos valises ?

— Tu pourrais au moins leur dire bonjour ! a râlé papa. Et de quoi est-ce que tu parles ? Liliana, je croyais qu’on était d’accord pour que je les garde jusqu’aux vacances d’été !

Une vague de panique a failli me faire tomber à la renverse. Qu’est-ce que c’était que cette histoire ? Maman avait vraiment un problème. Pourquoi ne pouvait-elle pas nous prévenir, tout simplement ? J’ai écarquillé les yeux pendant qu’elle déboutonnait son manteau en jetant ses longs cheveux roux sur son épaule. Elle avait fière allure, comme toujours. Elle nous a annoncé que les plans avaient changé.

— Pas les miens, a rétorqué papa. Les jumeaux restent ici.

— Ils viennent avec moi ! Ne commence pas, a-t-elle soupiré. Mon fils s’est retrouvé bourré aux urgences et tu ne m’as pas appelé. Et je ne parle même pas d’Ellie ! Je suis leur mère, je devrais être au courant quand mes enfants risquent de mourir. Tu le sais très bien et pourtant tu persistes à me prévenir trois heures plus tard ! Alors, non, je refuse qu’ils restent ici une seconde de plus.

— Liliana…

— Ce n’est pas négociable. Ils sont aussi sous ma responsabilité, je te signale.

Papa avait très envie de lui mettre une baffe, ça se voyait. Il n’avait rien à voir avec le Gabriel Demir du carnet qui s’inquiétait pour elle. Il lui a tendu une tasse de café, comme pour la supplier de la fermer. Elle a fait une grimace en avalant le liquide fumant et papa s’est vexé.

— Surtout, ne fais pas semblant d’être heureuse de nous voir ou d’apprécier mon café. Ça fait chaud au cœur de voir à quel point nos enfants t’ont manqué.

Elle a levé les yeux au ciel.

— Arrête ton ironie, je trouve ça culoté venant de ta part. Et puis ce sont mes enfants.

— Seulement quand ils ne sont pas comme moi, lui a reproché papa en avalant son café d’un seul coup. Tu les réexpédies ici dès que tu as le malheur de regarder leur tache de naissance !

— Ça n’a rien à voir avec eux et tu le sais !

La voix de maman s’est faite plus dure et elle lui a balancé en pleine face :

— Mon problème, c’est ta famille, et uniquement ta famille !

— Ils font partie de ma famille aussi, je te signale. Ce sont des Demir !

— Et je regrette encore de ne pas avoir mis mon nom de famille à la place du tien sur leur acte de naissance.

Elle a pris ses distances tandis que papa jetait rageusement un torchon sur l’évier et elle nous a ordonné :

— Ellie, Mickaël, allez-vous préparer. On discutera dans la voiture, d’accord ?

— On ne peut pas partir, ai-je protesté.

Mes parents m’ont regardé avec des yeux plus gros que des soucoupes volantes.

— Pourquoi ? s’est étonné Mickaël qui s’était assis sur le canapé.

— Il faut qu’on aille chercher Alexandre.

Ils allaient surement me prendre pour une folle ou m’envoyer à l’asile, mais tant pis. Je tentais le tout pour le tout.

— C’est la voisine ! Alex a découvert une preuve de ses meurtres en Afrique quand il l’a aidé à ranger son appartement. Comme il allait souvent la voir dans sa serre, elle en a profité pour faire croire qu’elle l’appréciait et un jour, je suis sûre qu’elle a pris une pelle ou un autre outil et elle l’a tué sur le coup.

Maman s’est approchée de moi.

— Quoi ? Ma chérie, mais qu’est-ce que tu racontes ?

Papa allait lui expliquer que je me faisais des films, mais je l’ai devancé avant qu’il ne me décrédibilise :

— Je te jure, j’ai vu l’acide de mes propres yeux. La vieille en a acheté au supermarché le soir de la disparition et elle l’a rangé dans une cabane, à la verrière.

Prononcé cette hypothèse à voix haute transformait petit à petit Alexandre en fantôme. Cette fois, c’était rée, c’était du sérieux ; impossible de fermer les yeux. Il n’y avait plus d’espoir de vacances improvisées ou de monde sur pause. Cette fois, c’était la fin ; j’allais devoir accepter que mon meilleur ami était mort. Maman s’est approché de moi, la mine soucieuse, et elle a posé sa main sur mon bras pour m’encourager à vider mon sac.

— Il y a un endroit caché, ai-je soufflé, avec de la terre retournée, où elle nous a emmenés. Je suis sûr qu’elle l’a enterré là-bas. Papa, maman, je vous jure que je n’invente rien ! Cette femme a un problème. Arrêtez de me dire qu’elle est juste aigrie, elle a failli me tuer ! Et si ce n’est pas elle, alors ce serait qui ? Elle est la seule à avoir une raison de tuer.

J’ai ajouté en m’assaillant sur le canapé aux côtés de Mickaël :

— Si on retrouve Alexandre, alors notre famille ne craindra plus rien. Madame Choux sera déclarée coupable et hop, affaire classée. Mais si nous ne faisons rien, un jour ou l’autre, Sophie finira par convaincre les flics et on deviendra suspects. Et imaginer un peu ce qui se passerait si la vieille décidait de continuer à tuer !

Mes mains tremblaient. J’ai commencé à respirer de plus en plus fort. Mon frère a posé sa main sur mon épaule, il s’est levé et, quand il m’a dit qu’il me croyait, les larmes me sont montées aux yeux. J’avais envie de le prendre dans mes bras.

— Il faut qu’on aille vérifier, a dit maman.

Papa l’a dévisagée.

— Tu es devenue complètement malade depuis tes fiançailles, ou c’est le café qui te fait ça ? Liliana, on ne va quand même pas aller déterrer des pousses de pommes de terre dans une propriété privée !

Elle a pris un air choqué. Elle a passé son doigts sur les meubles pour voir s’il y avait de la poussière dessus, elle a lissé ses vêtement et elle a rétorqué :

— Et si Ellie avait raison et qu’on déterrait votre voisin ?

— Je ne veux même pas y penser, a grondé papa en serrant si fort la cafetière dans sa main que j’ai cru qu’il allait la brisée.

— Et pourquoi ? a insisté maman.

— Alexandre n’a pas disparu, d’accord ? Je refuse d’y croire !

— Donc, si je résume, tu es tellement lâche que tu préfères prétendre que tout va bien alors que vous avez failli être assassiné par une vieille dame. Décidément, tu ne vas pas revoir les jumeaux avant un long moment.

Il a claqué la cafetière sur la table et il s’est mis à crié :

— Tu te moques de moi ?! Que je sois lâche, si tu veux, mais je n’ai pas l’intention de te laisser kidnapper mes enfants !

— Parle autant que tu veux, mais si on trouve un cadavre, je ne te laisserais plus jamais seul avec eux. Comment veux-tu que je te fasse confiance si tu ignores le danger ?! Et en plus, tu me caches des informations importantes !

— Et si on ne trouve rien ?

— Je te ferai mes plus plates excuses et tu auras intérêt à mieux communiquer la prochaine fois.

Je me suis éclipsée dans ma chambre. Quand on aura retrouvé le cadavre d’Alexandre, me suis-je dit, on se débarrassera de la vieille, maman se mariera et nous, on restera avec papa. Yassine viendra me voir tout le temps et on pourra faire comme si tout allait bien. Ce sera surement dur de vivre après la mort d’Alexandre, mais je pouvais y arriver. Je voulais y croire de tout mon cœur. Mais ça ne m’a pas empêchée de pleurer toutes les larmes de mon corps. Plus jamais je ne reverrai Alexandre…

Quand la nuit est tombée et que nous nous sommes entassés dans la voiture de papa, l’ambiance est devenue étrange. J’avais ressenti la même chose lorsque mon père nous avait conduits dans la rue d’Agathe pour la tabasser avec une batte de base-ball. J’avais l’impression de rêver, comme si je n’osais pas croire jusqu’où nous étions capables d’aller. Quand nous sommes arrivés devant la verrière verrouillée, cette impression s’est renforcée.

— On ne va quand même pas défoncer la porte ? a demandé Mickaël. Est-ce qu’on peut rentrer à la maison ? Je n’ai pas envie de retourner là-bas. Déjà qu’en plein jour, c’était flippant… Ellie, explique-leur ! Les parois de verre sont prêtes à être brisées, n’importe qui pourrait se faufiler derrière l’usine désaffectée, nous surprendre et nous faire la peau, surtout dans ce genre de quartier craignos…

Papa lui a souri.

— Mon fils, tu es un génie.

Il a pris sa batte de base-ball dans le coffre et il nous a fait contourner le bâtiment. Il faisait si sombre que j’ai reconnu la partie la plus reculée de la verrière seulement quand nous sommes arrivés devant. Des gouttes de pluie ont commencé à tomber sur les vitres sales. J’ai remonté la fermeture éclair de ma veste et maman a resserré la ceinture de son trench beige. Papa nous a demandé de reculer.

— Tu ne vas quand même pas faire ça ? a-t-elle protesté.

— Et comment voudrais-tu qu’on s’y prenne ? C’est toi qui nous a forcé à venir. Je ne fais qu’ouvrir la voie.

— Gabriel, arrête de tout me mettre sur le dos !

— Et toi arrête de critiquer tout ce que je fais.

Il a pris de l’élan. J’ai retenu mon souffle. Ses bras se sont levés, l’air a sifflée et il a donné un grand coup dans la vitre. Le verre a explosé en mille morceaux. Le bruit nous déchirait les tympans. Les fissures étaient impressionnantes. Papa a reculé pour répété l’opération. Pendant qu’il agrandissait le trou, maman nous criait de couvrir nos yeux. Une fois le calme revenu et papa, essoufflé, elle a pété un câble :

— Tu es fou ! On aurait pu se prendre des éclats dans le visage ! C’est super dangereux !

— C’est bien pour ça que je vous ai dit de reculer. Et tout le monde va bien, non ?!

Ses cheveux noirs ont volé dans la bise. Il lui a lancé un regard noir… Un regard de tueur. Et sans se retourner en arrière, il est entré dans la verrière. Je me suis souvenue de ce que m’avait dit ma grand-mère : papa était capable de faire beaucoup de choses pour nous… Y compris défier notre mère et briser un mur de verre alors qu’un orage se préparait. Beaucoup, beaucoup de choses. Comme Jeremy lorsqu’il avait failli étrangler mon grand-père. J’ai repensé aux yeux noirs et j’ai frissonné. C’était une chose de savoir ce qu’il s’était produit par le passé, mais c’en était une autre d’ignorer jusqu’où mon père était maintenant capable d’aller.

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