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3 minutes de lecture

Un court fragment presque entièrement nouveau ! (Bénédicte l'a déjà lu quand je l'ai posté par mégarde il y a 10 jours)


***

– Le palais de Bastet n’est plus très loin ! Il est magnifique, vous verrez !

Parfois, Blanche profitait de ses pauses pipi pour crier des infos à tue-tête. Cela durait une minute à peine, durant laquelle on apercevait le haut de son crâne blond derrière un muret ou un buisson, et on entendait sa voix flûtée faire un rapide résumé de ce qu'elle avait vu. C'était un peu comme une longue-vue, mais une longue-vue avec audiodescription. Qui avait besoin d'aller aux toilettes toutes les heures.

– Et il est super original !

Elle repartit dare-dare avant que quiconque ait pu lui répondre.

– Reviens ici, éclaireuse ! tonna la voix d'Aaron. Pas de conneries aussi près de chez Bastet ! Reprends ta forme humaine !

La blondinette réapparut en traînant des pieds, juste à sa droite, ce qui le fit sursauter.

– Entre ces deux-là, ça s'arrange pas, commenta Danaé devant leur expression fermée.

– Tout passe par le regard, répliqua Gaspard en décapsulant une canette de bière. Ils se dévorent des yeux. (Il passa la canette à Cornélia.) T’en veux ? Elle est tiède comme de la pisse de rat.

– Non merci. Et ma sœur ne dévore pas Aaron des yeux.

– Ouais, c’est ça ! se moqua Danaé en s'emparant de la bière.

La canette fit le tour des boyards – qui observaient Blanche et Aaron avec la même passion qu’une bande de retraités devant Plus belle la vie.

Le chef leur avait bien dit de s’envoyer en l’air après Midas, commenta un soldat. Ils l’ont pas fait. Ben voilà.

– Ça ne tardera plus, répliqua Danaé. Le crocotta doit avoir les couilles bleues.

– Danaé ! gronda Cornélia.

Quand Blanche se remit à parler à Aaron, ils se turent d’un coup, oreilles grandes ouvertes.

– J’ai vu le portique dont tu m’as parlé. Grand et rouge, avec des lanternes. Il est droit devant nous.

Aaron hocha la tête, aussi raide et droit qu’un officier décoré.

– Bien. Je vais prévenir Aegeus.

Il se tourna vers les boyards et leur adressa un geste péremptoire.

– Vous ! Venez là. Je prends Cornélia, Gaspard, Beyaz et Danaé. (Gaspard ouvrit la bouche.) Pas Mitaine, elle sert à rien avec une jambe en moins. Les autres, vous resterez sur place pour garder le convoi.

– Garder le convoi ? répéta l'un des soldats.

– On va pas chez Bastet ?

Aaron inspira par le nez, avec un peu de mépris.

Nous, on y va. En petit effectif. On prend un seul camion, vous gardez tout le reste. Surveillez bien les nivées, qu’elles ne s’éloignent pas. Et appelez-moi Svadilfari et Uchchaihshravas ! Aegeus a un plan pour eux.

Les boyards se dispersèrent.

– Et moi ? Et moi ? demanda Blanche, anxieuse. Je viens avec vous, hein ?

Aaron ne se tourna pas tout à fait vers elle. Il lui glissa un regard en coin, brûlant et vif comme une flamme de briquet. Encore ce regard qui donnait envie à Cornélia de le mordre !

– Bien sûr que tu viens. Choisis le camion qui a le plus d’essence et fais chauffer le moteur. On n’ira pas à pieds.

Il la regarda s’éloigner. Puis il se tourna vers Cornélia.

– Tu peux la surveiller ? Qu’elle s’éloigne pas des camions. Qu’elle… qu’elle ne me voie pas.

– Pourquoi ? grogna Cornélia, sur ses gardes. Qu’est-ce que tu vas faire ?

C’était la première fois qu’il s’adressait à elle de cette façon. Presque comme s’il lui demandait une faveur. Elle le regarda faire craquer ses épaules, puis sa nuque. Il verrouilla son regard sur le lointain.

– Je vais marquer le territoire autour du convoi.

– Marquer le… ? Comment ça ?

Il déboucla sa ceinture en lui renvoyant un regard mauvais.

– Tu veux que j’te pisse dessus pour te montrer ?

Excédée, elle lui tourna le dos pour ne pas le voir se déshabiller.

– Au nom du Ciel ! T’es sérieux, là ?

– Trop de bestioles traînent chez Bastet. Et des grosses. Tant que je suis là, je les éloigne. Mais comme je viens avec vous au palais, vaut mieux que je laisse quelque chose de moi dans le coin.

Sa voix bouillit de douleur, se mua en râle, puis en grondement sourd. Quand Cornélia se retourna, il ne restait plus que son pantalon par terre et ses armes en grand désordre. Ainsi que toute sa peau humaine, qui jonchait l'eau en lambeaux déchiquetés.

– Beurk ! ronchonna-t-elle. C’est dégueulasse !

Sans bien savoir pourquoi, elle prit le temps de plier son pantalon et de le poser au sec, en évidence.

Puis elle alla distraire Blanche, histoire qu’elle n’aperçoive pas l’élu de son cœur en train d’uriner sur tous les immeubles de la ville.

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