La rencontre du duc de Westforest avec les jumeaux

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Allongé à plat ventre dans l'herbe, j'observe attentivement le lièvre qui broute tranquillement, ne se doutant pas encore de la menace qui plane sur lui. Je m'empare de l'un de mes couteaux, vise l'animal avec, puis lance un regard en direction de l'arbre où mon jumeau est caché, un arc à la main, prêt à tirer, lui aussi.

Je prends une grande inspiration et envoie mon arme sur le gibier, en même temps que Robin laisse partir sa flèche. C'est une stratégie que nous avons mise au point afin d'être certains de ne pas louper nos cibles : nous l'attaquons de deux côtés opposés. Ainsi, quelle que soit la menace qu'il cherche à fuir, il se fera prendre par l'autre. C'est une astuce qui fonctionne toujours. Le lièvre qui tombe au sol nous le prouve encore une fois.

Je me remets sur mes deux pieds et me dirige vers notre proie pour l'attraper par les oreilles, pendant que mon frangin descend de l'arbre où il était niché en s'exclamant :

- On l'a eu ! Bien joué, frérot !

- Bravo à toi aussi, lui adressé-je avec un grand sourire en frappant dans la paume qu'il me tend.

- Maintenant que nous avons notre souper, allons le faire cuir.

J'acquiesce et nous nous rendons sous le chêne où nous avons élu domicile. Là, Robin ramasse du bois pour allumer un bon feu, tandis que je me charge de dépecer l'animal. Une fois cette tâche accomplie, je pose la viande sur le feu et nous commençons à surveiller la cuisson tout en discutant de choses et d'autres.

Seules nos voix sont audibles dans le calme régnant sur la forêt par cette belle nuit étoilée, jusqu'à ce que j'entende distinctement des bruits de pas. Mon jumeau les perçoit aussi car il se tait pour tendre l'oreille. Je pose ma main sur le pommeau de mon épée, tandis que mon compagnon saisit son arc et ses flèches, prêt à tirer sur ce qui approche de nous.

Quelques longues secondes plus tard, une silhouette émerge de l'obscurité et nous distinguons bientôt, grâce à la lueur des flammes, un jeune homme à la chevelure châtain clair et aux yeux violets. Je déduis de ses beaux vêtements qu'il est fortuné et qu'il appartient donc sûrement à la bourgeoisie ou à la noblesse. Il nous observe tour à tour pendant quelques instants, avant de nous adresser calmement ces mots :

- Bonsoir. Puis-je me joindre à vous ?

J'échange un regard avec Robin, avant de demander à l'inconnu :

- Qui êtes-vous ?

- Je m'appelle Mathieu et je suis le propriétaire de ces terres.

Mes yeux s'écarquillent lorsque je réalise ce que cela signifie : c'est le duc de Westforest en personne qui se tient devant nous !

Il s'assied dans l'herbe sans plus attendre notre accord et déclare sur un ton impassible :

- Je vous ai surpris en train de braconner tout à l'heure. . .

Mes sourcils se froncent et je resserre mon emprise sur le pommeau de mon épée. Je constate en lançant un regard à mon frère qu'il s'est aussi à nouveau préparé à tirer. En voyant nos réactions, le duc éclate de rire, puis dit d'une voix rassurante :

- Ne vous en faites pas, je n'ai aucune intention de vous mettre à mort comme l'exige la loi dans ces conditions. Vous n'aurez donc pas besoin de me liquider, vous pouvez déposer vos armes. Si je suis venu vous parler, c'était tout simplement pour en savoir un peu plus sur vous. Dites-moi : que faites-vous dans ces bois ? Est-ce que vous êtes simplement de passage ?

En comprenant que cet homme n'a aucune mauvaise intention à notre égard, nous nous détendons et je lui réponds franchement :

- Non. Nous vivons ici.

- Pourquoi ?

- La vie en ville est devenue insoutenable depuis le début de cette guerre. La nourriture se fait de plus en plus rare et le banditisme a considérablement augmenté, lui explique Robin. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de vivre par nous-même, sans plus dépendre de l'État ou de la société. C'est bien plus simple ainsi.

- Qui vous a appris le maniement des armes ?

- Nous sommes autodidactes, lui répondé-je. Nous avons appris par nous-mêmes.

- Impressionnant. . . souffle-t-il.

Il attrape son menton entre son pouce et son index et ferme les yeux, tout en fronçant les sourcils, comme s'il réflechissait, puis il rouvre ses paupières en déclarant :

- J'ai une proposition à vous faire.

- Qu'est-ce que c'est ? lui demande mon jumeau.

- Est-ce que vous êtes tentés de vivre dans un grand château et d'avoir trois bons repas par jour ?

Nous le fixons avec des yeux ronds, sans vraiment comprendre où il veut en venir, mais je finis par lui répondre :

- Qui ne le serait pas ?

- Dans ce cas, votre souhait est exaucé, dit-il en souriant.

Nous levons chacun un sourcil et je commence à me demander s'il n'est pas en train de se moquer de nous, lorsqu'il poursuit :

- Tout ce que je vous demande en échange, c'est d'entrer à mon service. . .

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