La récompense du dur labeur

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Une fois que les provisions ont été distribuées et que chacun s'est restauré, la duchesse de Westforest tape dans ses mains pour attirer l'attention de tout le monde et annonce :

- Bon, il est temps de commencer à labourer le sol. Nous allons procéder comme je vous ai montré la dernière fois : on retire les mauvaises herbes, puis on retourne le sol à l'aide des bêches. Une fois ce travail accompli, on pourra enfin semer les épis de blé que j'ai apportés.

Les villageois acquiescent et nous nous dirigeons vers l'espace dégagé qu'elle a désigné tout à l'heure comme étant idéal pour y installer un champ. Elle est la première à se pencher pour examiner les plantes et déterrer les mauvaises, bientôt imitée par tous les villageois en âge de travailler.

Je m'approche d'elle et lui demande :

- Pourquoi vous fatiguer de la sorte ? Ils sont déjà suffisamment nombreux.

- Un véritable seigneur se doit de montrer l'exemple. Il ne doit pas être au-dessus de ceux qu'il gouverne, mais à leurs côtés.

Mon coeur vibre à l'entente de ces paroles pleines de noblesse et de sagesse. Encore une fois, je me dis :

"Si seulement il pensait comme elle. . ."

Hélas, ce n'est pas du tout le cas !

La jeune blonde se redresse quelques secondes plus tard en déclarant :

- Félicitations ! Vous avez été plus rapides que la dernière fois ! Nous pouvons donc commencer à retourner la terre. Que chaque personne qui s'en sent capable prenne une bêche et se mette au travail !

Les hommes en bonne santé, ainsi que quelques femmes et adolescents, s'emparent d'un outil et commencent à l'enfoncer dans le sol. Bien sûr, ma femme participe activement à cette activité. Robin est sur le point de s'emparer de la dernière bêche restante lorsque je l'en empêche en l'attrapant en premier et en lui disant :

- Laisse-moi faire et monte plutôt la garde, au cas où.

Il s'exécute docilement, comme toujours depuis qu'il travaille pour moi. J'ôte ma veste verte et imite les travailleurs, mais n'ayant jamais pratiqué une telle activité, mes gestes sont quelque peu maladroits.

Mon épouse le remarque, car elle abandonne son outil pour s'approcher de moi et poser une main sur mon bras. Je suspends aussitôt mon geste pour reporter mon attention sur elle, qui déclare :

- Il n'est pas nécessaire d'y aller aussi brutalement. Que vous a donc fait ce pauvre sol ? ajoute-t-elle sur le ton de la plaisanterie.

- J'ai appris le maniement des armes, comme tous les autres hommes de ma condition, mais on ne m'a en revanche jamais enseigné à labourer la terre.

- Je sais, mais ce n'est pas grave. Tout s'apprend. Le labour, comme le maniement des armes, a besoin de force, certes, mais aussi d'habileté et de précision.

En disant ces mots, elle attrape mes bras pour guider mes gestes et me montrer ainsi la bonne façon de procéder. C'est alors que j'entends les gloussements des villageois. En levant les yeux vers eux, je constate que certains couvrent leur bouche de leurs mains pour camoufler leurs rires, tandis que d'autres se contentent de sourire. Je fronce les sourcils et demande à la princesse Linaë :

- Est-ce qu'ils se moquent de moi ?

Elle jette un coup d'oeil dans leur direction, avant de sourire et de rétorquer calmement :

- Non. Ils sont juste heureux que leur duc soit à leurs côtés, tel un véritable seigneur.

Je regarde à niveau les villageois et constate en effet que leurs sourires et leurs rires n'ont rien de moqueur. On y perçoit que bonheur et amusement.

Mon visage s'illumine aussitôt d'un large sourire et je me tourne vers mon épouse pour lui dire :

- Merci.

- Pourquoi ? me demande-t-elle avec étonnement.

- Pour m'apprendre à devenir un véritable seigneur. J'ai beau avoir été élevé dans une famille royale, jamais on ne m'a inculqué ce que vous m'enseignez aujourd'hui. J'ai vraiment de la chance de vous avoir rencontrée !

- Je suis tout aussi heureuse que vous de vous avoir rencontré, mais nous devons continuer de labourer cette terre si nous voulons finir cette tâche avant la tombée de la nuit.

J'acquiesce et nous nous remettons aussitôt au travail.

*

Je repose l'outil à sa place et essuie du revers de ma manche la sueur qui perle sur mon front en m'exclamant :

- Quel labeur !

- Maintenant que ce sol est labouré, nous allons pouvoir rentrer au château pour nous reposer, me rassure Robin.

- Oui, confirme la duchesse de Westforest, mais avant qu'on ne parte, je tiens à tous vous féliciter ! Vous avez fait de l'excellent travail !

Des applaudissements, des rires et des acclamations s'élèvent parmi les habitants du village. Je profite de la liesse générale pour demander à mon épouse :

- Est-ce que ça compte pour moi aussi ?

- Évidemment !

- Dans ce cas, je mérite une récompense, vous ne trouvez pas ? lui demandé-je en approchant mon visage du sien.

Elle a un léger mouvement de recul et je comprends à son regard qu'elle appréhende ce que je pourrais lui demander. Cette pensée me fait lâcher un petit rire, puis je m'écarte d'elle pour ouvrir mes bras.

Elle esquisse un sourire et vient se blottir contre moi. Je referme mon étreinte sur elle et ferme les yeux pour savourer la douce chaleur de son corps, sous l'oeil attendri de Robin et de tous les villageois.

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