Choc et douleur

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Je contemple la capitale de Forestisle à travers la fenêtre de la chambre : les clochers de la cathédrale sont clairement visibles au milieu des toits des innombrables maisons et autres bâtiments. Les rues sont pleines de monde, comme d'ordinaire et le tout est éclairé par un brillant soleil printanier. Je sais que mon mari et ses compagnons ne doivent pas revenir bientôt, mais tous les jours, je regarde à l'extérieur dans l'espoir de les voir arriver sains et saufs.

Je remarque soudain, au milieu de la foule, des cavaliers portant les couleurs du roi : il s'agit des hommes chargés d'escorter nos amis ! Ils seraient donc déjà de retour ? Je tends le cou, mais n'apercois pas ceux qu'ils étaient sensés accompagner. L'appréhension et l'inquiétude forment une boule dans mon estomac et je me questionne dans un murmure :

- Où sont-ils ? Pourquoi les hommes du souverain reviennent-ils seuls ?

Mes paroles n'échappent pas aux oreilles de mes compagnons et Calista me demande :

- Que se passe-t-il ?

- Les hommes du roi sont de retour, mais je ne vois pas les autres.

- Ils vont sûrement aller à la rencontre de leur monarque pour lui faire leur rapport. Rejoignons-les pour tenter de comprendre la situation, propose Fidel.

- Bonne idée ! Allons-y !

Nous marchons tous à grands pas jusqu'au bureau d'Éric et l'atteignons au moment où les trois hommes entrent à l'intérieur. Je bloque la porte avec ma main et glisse ma tête dans l'entrebâillement de la porte pour m'adresser au maître des lieux :

- Pouvons-nous entrer, Votre Majesté ?

Il échange un regard avec ses serviteurs, puis nous autorise :

- Faîtes donc.

Une fois la porte refermée, celui qui semble être le chef des escorteurs déclare :

- Nous étions en route vers le port où nous attendait le bateau qui devait nous emmener à Fieldisle, lorsqu'un terrible accident s'est produit. . . Le duc de Westforest est tombé dans le ravin que nous longions et, en tentant de lui venir en aide, ses hommes se sont condamnés au même sort. Nous avons aussitôt rebroussé chemin pour vous prévenir.

Mes yeux s'écarquillent et ma respiration se saccade. Je porte une main à mon ventre et dois m'appuyer au meuble qui me fait face pour rester debout. J'entends déjà les sanglots de notre médecin adorée et, en me tournant vers mes amis, je constate que Fidel soutient la pauvre Aurélie, dont les jambes ont flanché à l'entente de cette terrible nouvelle.

- Quel drame. . . lâche le roi de Forestisle de son habituelle voix impassible.

Il s'assied sur son fauteuil, pose une main sur son front en fermant les yeux et pousse un long soupir, puis les rouvre plusieurs secondes plus tard sur moi et commence :

- Si seulement. . .

Il secoue ensuite la tête en poussant un autre soupir et déclare :

- J'aimerai rester seul pendant un moment.

Ses hommes hochent la tête et s'éloignent aussitôt, suivis par Fidel, qui guide doucement la vieille femme jusqu'à la sortie en l'encourageant d'un simple :

- Allons.

C'est le premier mot qu'il prononce depuis que nous avons appris ce qui s'est produit et l'on peut entendre dans sa voix toute la douleur qu'il éprouve.

Je me redresse doucement, les larmes aux yeux, et puise dans toutes mes forces pour marcher d'un pas tremblant jusqu'à Calista, dont je prends le bras pour l'entraîner avec moi hors de la salle. Elle passe ce dernier autour de mes épaules et je l'imite. Nous nous rendons ainsi dans la chambre que je partageais avec mon époux et nous laissons tomber sur mon lit.

Mon coeur est si serré que j'ai l'impression qu'il va exploser et je ne peux empêcher les larmes de couler abondamment sur mes joues. La jeune femme aux longs cheveux noirs pose sa tête sur mon épaule en sanglottant et je la serre dans mes bras, joignant mes pleurs aux siens, tandis que l'homme aux yeux bicolores réconforte Aurélie du mieux qu'il peut en caressant affectueusement son dos en silence. Pourquoi parler ? Nous n'avons besoin d'aucun mot pour partager nos ressentis et nos pensées. Il nous suffit de nous regarder mutuellement pour comprendre ce que ressent et pense chacun d'entre nous. Pour l'instant, ce n'est que choc et douleur.

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