Mathieu s'agenouille devant l'autel. Il est vêtu d'un costume argenté et d'une longue cape verte. Il prie en silence la déesse Diane de lui confier une partie de sa force et de sa sagesse pour faire de lui un bon roi. Tous ceux venus assister à cette cérémonie, nobles comme roturiers, riches comme pauvres, hommes comme femmes, adultes comme enfants, l'acclament :

- Le roi est mort, vive le roi !

Cette phrase est significative : quand bien même l'individu meurt, le roi, lui, est éternel. Il se réincarne en la personne de son successeur.

Quand il a été annoncé que Mathieu serait couronné roi de Forestisle pour succéder à son aîné, personne n'a contesté cette décision, malgré la mort brutale d'Éric. Tout le monde est témoin : il a perdu à son propre jeu. Il a cependant été enterré dignement en raison de son rang et parce que mon époux tenait à cela.

Maintenant que l'héritier du trône a été acclamé par son peuple, le Pape de Forestisle peut poser la couronne sur sa tête. Elle est en argent incrusté d'émeraudes. Les spectateurs l'applaudissent chaleureusement en criant :

- Vive le roi !

Tous les visages sont enthousiastes et les regards brillants d'espoir. L'espoir que ce jeune roi nous guide vers la paix et la prospérité. Mon mari se remet debout et se tourne vers la foule, qu'il gratifie d'un sourire, puis il tend sa main vers moi pour m'inviter à le rejoindre. Je descends du balcon réservé à la famille royale et à son entourage et avance tranquillement vers mon bien-aimé. Je suis habillée d'une longue robe argentée brodée de plantes vertes et mes cheveux tressés sont relevés en un chignon maintenu par un ruban couleur émeraude. Mes mains sont posées sur mon ventre qui commence à s'arrondir. Je m'agenouille devant mon époux et ce dernier pose sur ma tête une couronne identique à la sienne. Les personnes présentes s'exclament aussitôt :

- Vive la reine !

Mathieu me tend sa main pour m'aider à me relever. Je l'accepte et me place debout à côté de lui, souriant à mon tour à mon nouveau peuple.