Chapitre 1

10 minutes de lecture

Taberly Harbor était une ville portuaire de la région de Zohir. Située en bord de mer, elle possèdait un grand port où les marchandises arrivaient et partaient du pays, nommé Bergram. Ses habitants vivaient principalement de la pêche, mais aussi du transport et du commerce maritime. C'était ici que les voyageurs d'autres pays débarquaient et embarquaient car les autres régions étaient dépourvues de ports. Pour ce que qui était de l'aéronautique, une autre ville d'une région différente s'en occupait.

Dans chacune des régions deux villes y étaient situées, communiquant entre elles et seulement elles car les communication inter régions n'étaient pas de rigueur. Le seul moment où les habitants de Bergram se côtoyaient était pendant - pour les plus aisés – leur passage au seul et unique lycée du pays, le Hercules Central Academy. C'était d'ailleurs bientôt la rentrée et une adolescente originaire de Taberly Harbor s'était vue octroyer une bourse d'étude dans ce lycée pour sa deuxième année dans le secondaire. Comment allait donc se passer son année de première là-bas ? Bonne question.

Assise sur son lit miteux situé juste en-dessous d'une fenêtre crasseuse, l'adolescente fixait un miroir posé juste en face d'elle. Des traces de doigts y étaient exposés recouvrant ainsi toute la surface de l'objet. La lueur du soleil pénétrait dans la pièce permettant à la jeune fille de voir son reflet, malgré la saleté. Ses cheveux noirs, bouclés méritaient un bon nettoyage et ses yeux dont les iris étaient de la même couleur possédaient des cernes dû à la fatigue. Son visage de forme ovale avait les traits tirés. Seul son petit nez semblait en pleine forme. Elle portait un débardeur blanc – pas des plus propres non plus – et un pantalon dont les bretelles pendaient de chaque côté de ses hanches.

Elle détacha son regard du miroir et se mit à inspecter sa peau métissée. Elle aussi était couverte de saletés. Il lui fallait prendre un bain, mais elle était exténué par le travail de baby-sitter qu'elle effectuait tout les jours. En effet depuis que son père les avait abandonné sa famille et elle, elle avait vu sa mère sombrer dans l'alcool, délaissant ses enfants. Alors âgé de dix ans la jeune fille dû s'occuper de ses quatre frères et sœurs seule tandis que leur famille sombrait de plus en plus dans la pauvreté. Elle dû non seulement gérer sa fratrie et les tâches quotidiennes de la maison, mais aussi ses études pendant que sa mère se saoulait. La pauvreté n'aidait en rien et si sa peau était aussi sale c'était tout simplement car il ne fallait utiliser d'eau à outrance sous peine de sa la faire couper par manque de moyens. Heureusement que l'école était gratuite. D'ailleurs c'était le seul moment où elle pouvait penser à autre chose que ses problèmes de famille. Par ailleurs, elle était douée pour les études, chose qui lui avait permis d'obtenir une bourse d'étude pour les plus pauvres et travailleurs au lycée Hercules Central Academy. Car selon la politique de Bergram, tout le monde avait le droit aux études. C'est peut-être même cela qui lui permettrait de s'en sortir dans un avenir proche. Elle ne voulait certainement pas avoir la même vie que sa pauvre mère et cela se comprenait. C'est ce petit espoir qui lui permettait de persévérer.

Toute personne née sous le signe du Phénix ne pouvait s'empêcher de garder espoir, même quand il n'y en avait plus et ceux malgré que ces même personnes voyaient le verre à moitié vide. Cela faisait partit intégrante des natifs de ce signe. Ces mêmes personnes étaient souvent très anxieuses de naissance et la jeune adolescente ne faisait pas exception. L'anxiété était un point commun que partageaient les natif du Phénix avec ceux du Dragon, le signe avec lequel ils cohabitaient. Mais ceux-là cachaient un manque de confiance derrière une grande arrogance. Autrement dit ce n'était pas la joie de vivre tout les jours dans la région de Zohir qui est pourtant la région symbolisant l’Été et donc la lumière. Les habitants de Zohir étaient donc des natifs de l’Été et bien évidemment pour que les naissances aient lieu durant cette saison, il fallait calculer le bon moment pour les accouplements féconds. Et cela s'appliquait à toute les régions de Bergram.

Ce qui préoccupait la jeune fille c'était sa rentrée prochaine. Elle allait pour la première fois côtoyer des adolescents de signes différents car seul au lycée Hercules Central Academy, les élèves de tout le pays se rassemblaient en un même point. Alors assise sur son lit, dans sa chambre complètement en désordre, la jeune fille ne cessait de songer à cela. Le bruit extérieur des travailleurs portuaires raisonnait jusqu'à ses oreilles. Chose dont elle avait aussi l'habitude. Peut-être devrait-elle aller prendre son bain de la semaine ? Cela lui ferait le plus grand bien. La crasse s'accumulant sur elle commençait fortement à l'agacer. Elle se décida donc et se sortit de sa chambre pour se rendre la salle de bain.

Il n'y avait que le stricte nécessaire. Un lavabo ainsi qu'une baignoire en cuivre. Tout deux reliés par des tuyaux – eux aussi de cuivres – parsemés sur les murs pour permettre la venue de l'eau. Une chaudière à vapeur installée dans la maison permettait à la famille de se baigner avec de l'eau chaude dont il ne fallait pas abuser sur la consommation. Il n'y avait même pas miroir pour pouvoir se refaire une beauté. Le seul miroir dont disposait la famille était celui dans la chambre de la jeune fille, ce qui voulait dire que tout le monde y passait pour s'arranger ou plutôt y faire des grimaces avant de repartir.

Elle ouvrit le robinet de la baignoire et enleva ses vêtements sales pour les jeter à terre. Une fois la baignoire remplie, elle ferma les robinets et entra dans l'eau chaude du bain. La chaleur de l'eau détendit ses muscles et la jeune adolescente ferma les yeux et cala sa tête en arrière contre la paroi de la baignoire afin d’apprécier son moment de détente. Le silence régnait, seul le bruit de l'eau se faisait entendre, et cela était apaisant. Mais son moment de détente s’avéra de courte durée. Des coups à la porte raisonnèrent et sortirent l'adolescente de sa bulle. Une voix encore enfantine ce fit entendre de l'autre côté, brisant totalement le silence.

— Neven ! Tu es là ?

L'adolescente soupira de fatigue avant de répondre.

— Qu'est-ce qu'il y a Altaïs ?

Altaïs était le dernier de la fratrie et donc le plus jeune. Il était seulement âgé de 11 ans et bien que son prénoms soit féminin, c'était bel et bien un garçon. Leur mère avait décidé de nommer son dernier enfant Altaïs que ce soit le sexe de celui-ci. Alors voilà, le garçon se tenait derrière la porte de la salle de bain et le son de sa voix indiquait à Neven que quelque chose n'allait pas.

Après quelques hésitations, Altaïs se décida à parler :

— C'est Astrée. Je crois qu'elle est encore malade...

Neven se dépêcha de se nettoyer et sortit de l'eau prestement. Astrée était la seule fille de la famille avec Neven et leur mère. Elle était âgée de 13 ans et s'avérait avoir une santé fragile. Peu de temps après sa naissance, elle développa une pneumonie et une fois, alors qu'elle était seulement âgée de 6 ans, elle contracta un virus qui lui fit avoir une fièvre abominable et manqua de la tuer. Depuis, Neven et ses frères redoutaient qu'une chose pareille ne se reproduise. Neven surveillait constamment sa petite sœur, épaulée par ses frères cadets. En temps normal, Astrée attrapait des mal de gorge ou encore des rhumes, elle avait aussi quelques allergies. La pauvre fille n'avait pas été épargnée par la vie et ce depuis sa naissance.

Après s'être habillée avec des vêtements propres et veillée à vidée la baignoire, Neven sortit de la salle de bain. Altaïs l'attendait sagement en jouant avec un vieux jouet mécanique constitué d'une multitudes de rouage. Un genre de casse tête auquel Neven n'avait jamais réussi à résoudre l'énigme.

Son jeune frère mesurait à peine 1m43, Neven le dépassait largement du haut de ses 1m65 et pour regarder sa sœur aînée le jeune garçon dû lever la tête. Ses yeux bleus se posèrent sur elle, mais il ne s'arrêta pas pour autant de tripoter son jouet. Il semblait inquiet. Neven s'accroupit face à lui et remit une mèche de ses cheveux noirs bouclés, derrière son oreille.

— Ne t'en fais pas. (Elle lui sourit). Je vais m'occuper d'elle et tout ira bien.

Altaïs expira de soulagement. Neven était la seule sur laquelle ses frères et sœurs pouvaient compter et elle le savait. C'est pour cela qu'au départ elle ne voulait pas les quitter pour la Hercules Central Academy. Ce sont ses frères cadets, Hercules et Izen, âgés de 14 ans qui lui ont fait changer d'avis et lui ont assuré qu'ils prendraient la relève.

« Tu dois penser à toi aussi » leur avaient-ils dit.

Ce n'est pas pour autant qu'elle allait partir l'esprit tranquille, bien qu'elle leur faisait confiance. Elle se releva et traversa le couloir, suivit de son petit petit frère en direction de la chambre d'Astrée ou du moins la chambre d'Astrée, Hercules, Izen et Altaïs. Ils étaient trop pauvres pour se permettre d'avoir une maison avec des chambres individuelles. Ils devaient déjà s'estimer heureux d'avoir une maison voir même un toit sur la tête. D'ailleurs leur chambre faisait face à celle de leur mère qui devait très probablement cuver. La majorité du temps elle était soit saoule, soit endormit dans n'importe quelle pièce de la maison, l'alcool encore dans le sang.

Arrivant dans la chambre de la fratrie un éternuement accueilli Neven et Altaïs. Hercules et Izen étaient déjà sur le coup et s'occupaient de donner le traitement habituel de leur petite sœur. Lorsqu'ils aperçurent leur aîné, les jumeaux affichèrent une moue des plus joyeuse. Probablement un message qu'ils voulaient faire passer à Neven du genre « Tu vois ? On gère. Donc ne t'inquiète pas ». Quelque chose que Neven avait encore du mal à réaliser. Pour elle, ils restaient les petits dont elle s'occupait à chaque fois que l'école était terminée. Elle prenait soin d'eux depuis ses 10 ans quand même. L'âge à laquelle leur père les avait abandonné et leur mère sombré dans l'alcoolisme.

— Altaïs, dit l'un des jumeaux. On t'avais dit qu'on gérait. Tu aurais dû laisser Neven tranquille.

Le dernier de la famille baissa les yeux et ne répondit rien ou plutôt il haussa les épaules.

— C'est bon les garçon, dit Neven. Ce n'est pas grave. (Elle se tourna vers Altaïs). Tu veux bien nettoyer la chambre s'il-te-plaît ?

Altaïs accepta et commença à ranger l'étroite pièce qui leur servait de chambre.

— Izen, Hercules. Aidez-le s'il-vous-plaît.

— Ok, dirent-ils à l'unisson.

Ils s'occupèrent d'abord de faire leur lit. Les jumeaux avaient droit à un lit superposé et juste en face, collé au mur, Astrée possédait son propre lit sur lequel elle était actuellement assise. Quant à Altaïs, il dormait sur un vieux matelas non loin des jumeaux. Ils n'avaient assez d'argent pour procurer au dernier un lit décent. Neven se souvenait quand leur parents encore dignes de cette désignation avaient suffisamment de moyens pour subvenir aux moyens de la famille. C'était une famille modeste à cette époque, pas pauvre. Le pauvre Altaïs n'avait pas connu ça.

Pendant que les garçons s'occupaient de dépoussiérer leur chambre, Neven vint s'asseoir près de sa petite sœur. Le bruit extérieur se faisait encore entendre. Les travailleurs criaient pour communiquer entre eux et leur voix se portaient jusqu'ici. Un petit éternuement raisonna dans la chambre et Neven examina Astrée. Ouf. Elle ne faisait pas de fièvre. C'était déjà bon signe. Elle devait sûrement avoir un vilain rhume.

— Tu vas avoir besoin de beaucoup de mouchoir, lui dit Neven un petit sourire aux lèvres.

Astrée renifla bruyamment et releva ses cheveux bouclés en un chignon. Elle ne semblait pas en joie.

— J'en ais barre de tout le temps être balade, dit-elle le nez encombré.

Neven la prit dans ses bras.

— Je m'en doute, petite sœur.

Malgré ses 13 ans, sa santé fragile la rendait dépendante des autres et encore plus vulnérable qu'elle l'était déjà. Neven espérait de tout son cœur que tout ce passerais bien durant son absence. Elle ne souhaitait pas recevoir un message en plein milieu de son année scolaire, annonçant qu'Astrée ait développé une maladie grave.

— T'en fais pas, assura Astrée, comme si elle avait lu dans les pensées de Neven. On s'en sortira pendant ton absence. Hercules et Izen sont là.

— Je sais, répondit Neven toujours un sourire affiché sur ses lèvres. Je vous fait confiance. Et toi, promet-moi de ne pas tomber grièvement malade pendant tout ce temps et de bien travailler à l'école.

— Promis, répondit Astrée.

Quand la soirée arriva ce fut le train-train habituel. La mère de la fratrie recommençait à boire, ce qui énerva profondément Neven et commença à la sermonner. S'en suivit d'un énorme dispute entre elles avant que la mère s’effondre, fatiguée et complètement saoule. Neven dû alors préparer le repas – un mélange de plusieurs restes plus ou moins appétissants. En d'autres termes leur repas n'étaient pas digne de la haute bourgeoisie. Mais aucun d'eux ne s'en plaignit et se contentèrent de ce qu'ils avaient. Cependant, ce soir sonnait différemment. Un air de mélancolie régnait car le lendemain Neven embarquerait dans un zeppelin direction Hercules Central Academy. Alors évidemment, Neven sentait une pointe d'angoisse à l'idée de laisser sa fratrie livrée à elle-même et l'idée de retrouver nouvelle dans un lycée au milieu de nulle part. Hercules, Izen, Astrée et Altaïs devaient certainement ressentir la même chose. L'appréhension était présente chez chacun d'eux et sachant que Neven allait partir très bientôt, ils décidèrent tout d'abord d'aller coucher leur mère pour ensuite s'amuser entre eux et profiter des derniers moments réunit. Altaïs débarqua toute une panoplie de jouets mécaniques. Casse-tête, canard à remonter ou encore mini catapultes et tout cela construit de leur mains, mise à part les casse-tête. Il s'amusèrent à catapulter tout un tas d’objets et se classèrent en fonction de celui qui tirait le plus loin avant de finir par faire des courses de canard. Il s'avéra qu'Astrée les battait à plate couture à chaque fois. Malgré son rhume, elle arrivait à suivre le rythme jusqu'à ce qu'elle s'effondre de fatigue et finisse transporté par ses frères et sœurs dans son lit. Ils finirent tous par s'endormir auprès d'elle, oubliant leur rentrée imminente.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 5 versions.

Vous aimez lire D. Adams ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0