Auto{bio}psy

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 Je rêvais de nuit en plein jour.

 À la danse des cieux, je zigzaguais, parfois sur les sentiers abîmés, d’autres encore entre les ruches au labeur bourdon. Je devinais en de rares crépuscules votre présence, à deux ou trois occasions, guère plus j’imagine ; à vrai dire, je n’en sais plus trop rien ; or, ce soir, les abeilles vrombissaient, fatiguées, pourtant inlassables ouvrières, ruchées d’ambre et d’ébène au service de la Lune pour que le miel borde à flots dorés les âmes endormies. Vous cabrioliez au sein des magnoliers endeuillés. Au chœur de la nuit silencieuse, j’ouïs vos drageoirs semer la discorde à l’ataraxie de ma promenade, vos fumignons attirants envoûtaient l’essaim, enfumaient le tracassin un peu con à présent.

{Vous ne répondez pas.}

 Eût-elle été seulement posée.

 Subtile entrée en matière de Celui de la nuit. [goɛko]. Vous vous jouiez de mon physique limité en ces landes ésotériques, ballé-ballant le ballet qui ne cède à mes yeux que la trace fugace de sa décadence, traînée d’obscurité et de pollens désorientés en tristes lucioles blafardes sur fond d’opacité.

 Mon ennui lutte avec les effilés crépuscules, s’éfaufilant au fil des songes en un filet qui m’ampute, ficelé, confiné, il me persécute, puis la nuit vint. Avec elle, vous. Et vous chantiez pour moi.

{Étranger à votre venue, je ne suis ni dieu ni rien. Vous ne répondez toujours pas.}

 Et pour cause, dieu n'existe pas, si ce n'est dans l'incarnation que quelques âmes errantes décidèrent des éons révolus de prononcer. Un mot accolé à un autre, une sorte de code, une révolution, néfaste, qui ensemble et bout à bout, lors que les hommes se trouvaient des questions plein la tête, en avance sur leur temps, disaient euh. Tu ne sais pas, tu réfléchis, mais tu dis euh. Ainsi dieu naquit, nul autrement que par la misérable soif de comprendre, davantage en bête qu'en quête, tandis que moi, j'angoisse des rétorsions cueillies ainsi que de votre sorguiale sacerdoce.

 Elles me noient, les réponses, j'étouffe, car elles ne riment à rien. Le monde me parle et je m'ennuie. On voit en moi un déprimé, alors que dans le fond, je loge juste le fruit des sentiments que j'ai réprimé.

{Quels émois habitent Celui du jour ?, pour qu'il se sente obligé de fouler les terres qui ne sont pas les siennes. Si je ne suis pas dieu, pourrais-je être votre ennemi.}

 Le plus coriace. Il va sans dire. Je suis nombreux dans ma tête. Pour autant, d'aucuns n'en soupçonne ne serait-ce qu'une.

{Une ?}

 Voix.

{Vous brassez. Une coutume qui vous sied, tergiverser, alambiquer, Celui du jour, le maître des détours qui se perd dans l'ombre ? Vous ne répondez pas, vil coquin, et je me lasse ; quittez l'ambage.}

 Est-ce ici les ordres de la nuit ?

{Pour une fois, qu'elle n'en soit pas coutume m'importe peu, mais dites, répondez, que vous ne reveniez jamais fouler le domaine qui est notre.}

 Sans baume aux blessures, sans beaux mots ni censure, alors que les maux scissurent, sussurrent, le cerveau du grimaud migraine de syllabes et de sons, Ceux que je suis débat, Celui que je sont éclatent. Au grand jour : non. Nul ne sait et là farde le tort d’un décor blafard.

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alade. Il est malade. Elle est malade. suis malade. s{uis malade. suis malade. suis malade. suis malade. Tu es malade. Tu es malade. suis malade. suis malade. suis malade. suis m}alade. malade. malade. Je

. Tu es malade. Tu malade. Ils sont malade. ils suis malade. sommes suis malade. Tu suis êtes malade. Voussont malade. Tu est malade. e suis ma{lade. suis malade. Elles suis malade.

J malade. malade. malade.

Tu malade. elle suis malade. Vous suis ma}lade. Nous suis malade. Ils suis malade. Tu êtes malade. Ils suis malade. Sommes tu malade. Ils êtes malade. êtes nous malade. J sommes malade. suis malade. {malade. malade. malade. is malade. e suis malade. alade. ade. mae.sui}s }maladeis malade.s mde. s malade. Tus malade. Vousis malade. Nouss mal

ade. suis mala

de. Ilse suis malade.Tu es malade.s malade. suis malalade.

suis malade. Tu suis malade. Il suis malade. V}ou {suis malade. Noussuis malade. Elles es malade. Il su

is malad{e. d}e.

Je suis malade. ʒə sɥi maladəʒə sɥi maladəʒə sɥi maladəʒə sɥi maladə

ʒə sɥi maladə

 Je suis malade.
 J’en suis conscient depuis un âge où mes primaires intérêts s’animaient candides. J’en suis conscient depuis un âge où mes accointances s’échauffaient intrépides. J’en suis conscient depuis un âge où ma sagesse goûtait la verte sève. Je fuis le monde, et entendons-nous, le monde s’arrête aux vies jouxtes, car j’ai peur, anxieux, épouvanté, des répercussions que la vérité se sache. Ils n’en savent rien pourtant, car je parviens encore à jouer des tours à la folie, mais. En débâcle sur l’orée du vertigiabîme, j’observe avec neurasthénie l’amour, à la fois enfler et flétrir, hésitant à me déclarer, parce que je le sais apte à comprendre, lumineux d’empathie, cependant fragilisé par l’érosion du mensonge. Le temps s’égrène et des années sont passées et le drame gronde. Je n’ai pas d’excuse. Tenter d’expliquer tout de même en serait ?

{Est-ce utile. Ce n’est pas moi qu’il faut convaincre. Néanmoins, cela serait une esquisse de réponse.}

 À organiser les regrets, m’aideriez-vous ?

{Quel serait le premier, que la nuit se termine enfin.}

 Je provoque l’illusion, trompe l’exact. Rien de particulièrement grave, des détails à l’intérêt limité qui ne servent même pas le crime, mais, qui pourtant, me sont impossible de tenir juste. L’esbrouffe fonctionne un temps avant que les réflexions s’éveillent. Ainsi l’embarras s’ajoute au méfait ; fin de la vétille ; rien en comparaison des revers du cœur.

  Sucer c'est tromper. Oui, non, qu'importe l'adage. Qu'en est-il de faire jouir ?, mécanique des fluides connue sur le bout des doigts, les sources passionées en émoi et le corps transcandé. Le mensonge croît lorsque le pal au coeur s'évertue à suivre le rythme de la chorale, pique-boutant de son corps entier afin que décolle le râle, puis que là-haut, à l'énième ciel, les yeux humides de charme et charmés, s'appliquent à entretenir l'ardente étreinte. Or, je sombre dans les abysses. Et Elle, elle poursuit son ascension sans imaginer l'affadie indélicate de mon amour pâle, et Elle, je la regarde s'essorer à l'ombre de mes carreaux. 

  J'ai longtemps considérer qu'Elle avait cessé de sourire. Une méprise aveuglante, arrangeuse de ma lâcheté, pleutre que je suis, abordons le regret second, çui-là même régent toutefois sur les autres, aux conséquences plus pernititeuses encore que l'artifice révélé, je manipule les émotions, je m'ennuie et je ne sais pas l'exprimer. Mon silence enterrine chaque jour les efforts d'hier. Tout serait si simple si j'osais témoigner de sincérité. Alors même qu'il me serait aisé d'évoquer point par point avec vous, nous-mêmes vous sachons, le triste constat d'une mortelle et grandissante envie de s'éteindre.

{Celui du jour est habile bonimenteur. Lâche face à l'amour. Vous}

 Nous. Cessons, nous somme entre nous.

 Je suis pervers lorsque je détruis la vie d'humains en mal de vie, lorsque je les confronte aux maux similaires aux miens. Combien d'hommes, combien de femmes ai-je terrassé en vidimiant mon reflet terne dans leurs actes ? Si bien que j’en deviens voyeur voyou lorsque je creuse en substance la valetaille afin d’en extraire la juteuse honte. J’aime à agiter l’embarras sous leur nez et faire monter en eux l’humiliation de leurs vils actes. Je me délecte de leurs bafouilles. Une ripaille immorale. Jouissive et empoisonnée. Je me capillarise dans les moindres méandres aux lais fertiles, disparais puis, la brume d’un couperet flottant au-dessus des nuques persiste, le fil imperceptible camouflé dans le frimas de sentiments givrés et d’actes gelés. Ces hommes ne trompent plus leurs femmes, ces chiens n’exposent plus leurs femmes, ces monstres cessent et ils vivent et ils vivront dans l’épouvante d’un soubresaut de réalité, ainsi ils guettent les yeux de leurs femmes, ainsi ils épient les frissons de leurs femmes, dans l’attente couarde du jugement. Là se trouve la récompense des raclures, seulement, mon fiel tâche parfois mon entourage.

 Je suis un fléau pour les purs alentours. J’en est conscience et lorsque les voix tonnent, Celui de la nuit, l’Abject et le Magicien m’appellent, moi, le porteur de masque, Celui du jour, je réagis et me dissipe de leur quotidien. Et si je ne répond pas, et si je suis distant, et si je coupe les ponts, réjouissons-nous de ma lucidité, car je les aime et qu’ainsi, je les préserve du mal qui les menace.

{Merci de votre sollicitude.}

 Je parle d'eux, les hors de nous, les êtres aimants qui gravitent à nous. Je veux du mal aux gens que j'aime. Je le sais. Alors, avant que le drame se décoiuvre, je préfère m'allonger sur les terres arides de ma folie et observer la nuit étoilée, pleurer des larmes chaudes d'amour et emplir les sillons de mon coeur infertile puis dormir un temps. Je me réveillerai certainement, où ? au milieu des soleils de nuit.

Pourquoi pas ici, au milieu d'un champ nouveau ?

 Sans vous. Seulement moi, Celui du jour, sans ombre au carreau, sans envie de magie, sans folies abjectes. Juste moi.

 La thérapie commence ici.

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