Eon

15 minutes de lecture

- C’est bien, c’est bien, me dis-je. On va pouvoir continuer.

- Tu ne t’en sortiras jamais, on dirait que ça ne finit pas, j’en ai assez, me répondis-je.

- Un peu de retenue, s’il vous plaît. Juste une minute, j’ai besoin de repos, terminais-je.

Depuis quand est-ce que je dis ce genre de choses ? Depuis quand est-ce que je me parle à moi-même ? Dix ans ? Trente ans ? Cent ans ? Ou est-ce que c’est tout récent et que je m’imagine l’avoir toujours fait ? Il est difficile d’identifier les choses passées et présentes. On croit toujours savoir qui l’on a été, jusqu’au jour où une vieille photo nous trahit.

Là, c’est devant d’autres personnes que je me trouve. Mon esprit explose et je suis tantôt Christophe Garnier, le professeur, tantôt Arthur, le baroudeur et, plus loin, j’aperçois l’enfant que j’étais et qu’on appelait encore Jean.

Quelle folie a pu se produire pour que je l’abandonne et l’oublie ? Lui qui, de tout ceux que j’ai pu incarner en valait le plus la peine ? Pauvre garçon. Si c’était à refaire, je le prendrais dans mes bras et je le sauverais de ce qui l’attend.

Mais il n’y a rien à refaire. J’ai eu une deuxième et une troisième chance de partir dans d’autres directions, mais je ne peux rien annuler. Rien de ce que j’ai fait, rien de ce que j’ai pu penser, donner et dire. Je ne peux et ne pourrais jamais revenir en arrière. Je n’ai plus personne. Plus de chez-moi. Et de tous ceux que j’ai croisé, personne n’a jamais pu le comprendre.

Je revins soudainement à la lumière et me réveillais sur le sol. Venais-je de rêver ? Le choc avait été si important cette fois-ci que j’entendais un bourdonnement sourd dans mon oreille. La mémoire me revint peu à peu, même si j’avais du mal à réaliser que c’était la mienne. Il me fallut un moment pour recoller les morceaux.

Je me redressais alors et vis que la salle des professeurs était toujours vide. Une grande trace de suie se trouvait sur le sol, à l’endroit de ma renaissance. Mes vêtements, à la fois trop larges et trop courts avaient un peu brûlé à cause du feu blanc qui s’était échappé de moi. Je me hâtais d’aller devant le miroir de la salle de bain pour découvrir ce que j’étais devenu cette fois-ci.

Un adolescent.

Lors de mes deux précédents changements, je n’étais jamais redevenu aussi jeune. Au bas mot, j’avais l’air d’avoir seize ans.

La cloche sonna la fin de la récréation et je me hâtais de sortir de la salle. J’essayais tant bien que mal de me mêler aux jeunes, mais je ne passais pas inaperçu. J’avais quitté ma veste de costume, mais j’étais toujours en chemise, pantalon et chaussures chic. C’est alors que je vis Anne qui entrait en salle de classe. Elle me vit aussi, mais ne me reconnut pas.

Ca ne m’était arrivé qu’une fois, avec Claire. De redécouvrir le premier regard de quelqu’un. Un amer privilège.

Je sentis qu’une pulsion adolescente enrageait mon corps et mon esprit. Je n’avais pas envie de rester ici. Je m’empressai de sortir du lycée en courant et je sautais la barrière. Je courus encore et encore jusqu’à la rivière qui se trouvait en lisière de la ville. Là, je m’installai sous un grand arbre, haletant et regardant le ciel.

Je ne savais pas du tout si j’allais dire la vérité à Anne, la seule chose à laquelle je pensais pour le moment, c’était que j’avais chaud. Je retirai alors ma chemise, mes chaussures, mon pantalon et je plongeais dans l’eau.

Je me souvins de toutes les fois de ma jeunesse (ma véritable jeunesse) ou je rêvais de tout larguer pour sauter dans la rivière. Je ris comme un fou.

Personne ne me punirait cette fois, personne ne viendrait me chercher. Je n’avais peur de rien, puisque je ne pouvais pas mourir. Il n’y avait rien que je ne puisse pas faire et je ne l’avais jamais autant réalisé que maintenant.

Tant pis pour Anne, me disais-je à mesure que je me dissociais de mon ancienne vie. Qu’allais-je de toutes façons pouvoir faire d’une vieille prof de bio ? Allait-elle pouvoir me suivre, si je décidais de partir ? Sûrement pas.

J’étais plus rude, plus impétueux, et un poil plus moqueur, visiblement. J’avais bizarrement hâte de voir jusqu’où.

Dans l’eau, j’observais un peu les contours de ce visage : il était fin, allongé, et mes sourcils épais, noirs comme l’ébène dominaient des yeux d’un vert félin. C’était sans aucun doute le plus beau que j’avais eu jusqu’à présent. Je ressentis un peu plus d’arrogance qu’à l’accoutumée.

Ce garçon, me dis-je, méritait le destin le plus incroyable qui soit.

Après ma baignade, je rentrai chez Christophe Garnier pour y passer la semaine : là, je m’empressai de lire les carnets d’Arthur que j’avais gardé précieusement. J’avais l’espoir d’y trouver quelque chose que je n’avais pas encore fait.

Le téléphone n’arrêtait pas de sonner.

Au bout de trois jours, j’avais enfin trouvé ma prochaine destination. Pendant mon voyage au Cameroun en 2028, j’avais rencontré Adam, un homme des services secrets français. Quand il avait appris que j’allais et venais dans le monde comme je le faisais, il m’avait proposé de postuler. A l’époque, j’avais refusé, je me disais que la vie que je vivais était la dernière et que je ne pouvais pas me permettre de m’enfermer dans quelque institution que ce soit.

Mais aujourd’hui, je savais que c’était faux, que j’avais tout mon temps.

Alors c’était décidé : dans cette vie, j’allais devenir agent des services de renseignements du Royaume de France. Il faudra d’ailleurs que je vous explique comment j’ai assisté à la chute des Cinquième et Sixième Républiques, mais ce sera pour une prochaine fois.

Les gendarmes étaient en bas de chez-moi. Ca faisait trois jours que je n’avais ni répondu au téléphone, ni donné de nouvelles et je n’avais même pas pensé que l’on signalerait ma disparition. Il faut croire que Garnier était apprécié.

Je pris seulement un sac et sortis de chez moi pour me retrouver dans la cage d’escalier. Les gendarmes passèrent devant moi et frappèrent à la porte du professeur.

C’était drôle, jamais encore je n’avais joué de mon changement d’apparence. Je les entendis appeler « Monsieur Garnier » encore et encore, sans succès. J’appris peu de temps plus tard qu’ils avaient lancé un avis de recherche dans toute la région. Quand je m’arrêtais dans un hôtel pour y dormir, je voyais parfois le visage du professeur disparu aux informations. Plus je tombais dessus, et plus je me souvenais du mensonge qu’était ma vie. C’est ainsi que j’ai commencé à occulter Christophe Garnier de mes souvenirs, comme je l’avais fait, autrefois, de Jean Morel.

Arrivé à Paris, je n’arrivais pas à rester tranquille. Dans le métro, j’avais trop d’énergie et je tapais nerveusement du pied. Quel gamin.

En face de moi se trouvais un autre jeune garçon qui me regardait de temps à autres. Lorsque je le remarquai, je cessais de faire tourner mes clés sur mon doigt et je lui souris froidement, juste assez pour le mettre mal à l’aise.

Pas mal, Eon, pas besoin de parler pour dominer.

« Eon », c’était le nouveau surnom que je me donnais en pensant d’ores et déjà à mon avenir d’espion. Dans le civil, je me faisais appelait Lucas Santova. Non seulement je n’aimais plus celui de Garnier, mais il fallait surtout que personne ne fasse le lien entre lui et moi. Toute ma stratégie de recrutement reposait sur le fait que personne ne pouvait retracer mes origines.

Je regardais souvent mon reflet dans la vitre, hypnotisé. Je n’étais pas beau : j’étais magnifique. Sans blague, qui est-ce qui me refuserait ?

Lorsque je sortis, le vacarme parisien me sauta à la gorge comme un chien enragé : klaxons, cris, rires, odeurs de graillons et de sueur.

Putain, que c’est bon.

Je savais que j’étais fait pour ce genre de vie : nerveuse, brutale, tendue.

Je me mis à marcher dans les rues avec le vieux souvenir que j’avais en tête : « Rue Bartholomé »

Pourvu que ça se trouve encore ici.

On m’avait fait la description d’un vieil immeuble gris, banal, laid, noyé entre deux façades haussmanniennes et je devinais aisément duquel il s’agissait : il n’y avait pas de nom, pas de sonnette, seulement une vieille porte métallique et ce qui avait l’air d’une caméra.

Je posai ma main sur la poignée et je sentis qu’elle ne bougeait pas. La caméra s’inclina légèrement et je la regardai en face.

Tout au long du trajet, j’avais appris par cœur le code qu’Arthur avait soigneusement noté.

“AFRAID

VAGUE

SPATIAL

ADVANCE

INHERIT

LIMB

FLUSH

CHARGE

WEEKEND

CARD

MOVE

ORDINARY”

Vingt-sept minutes plus tard (le temps que l’on m’avait indiqué), un homme d’une cinquantaine d’années sortit de l’immeuble et me toisa de haut en bas.

- Entre.

A l’intérieur, ça sentait encore plus le renfermé que dans les caves les plus obscures du Népal. Un vieil homme nous attendait au bout du couloir : c’était Adam, le type que j’avais rencontré au Cameroun. Il avait l’air d’avoir pris un train dans la gueule.

- Je me charge de ton recrutement, viens, suis-moi.

Sacrée aubaine.

- Alors, on commence par les bases. Ton identité : nom, prénom, date et lieu de naissance…

Ni une ni deux, je lui sortis le petit dossier de faussaire que j’avais fabriqué : Lucas Santova, né en 2060 à Valence, pupille de la Nation, bons résultats scolaires, profil discret. Aucun antécédent médical ni psychologique.

J’étais d’habitude un peu plus appliqué pour les faux papiers, mais j’avais besoin qu’il voie que c’était trop grossier, je voulais qu’il reconnaisse la technique.

- T’as du culot de te pointer aux services secrets avec de la fausse paperasse.

- C’est si évident que ça ?

- C’est surtout vieux, comme technique, plus personne les fait comme ça. Même dans les années 30, c’était « has-been ». Où est-ce que t’as appris un truc pareil ?

- Au même endroit que là où vous avez vendu de l’alcool de contrebande pendant 15 ans, et où vous avez trompé votre femme au moins dix fois.

- Comment tu sais ça, toi ?

- Si vous m’embauchez maintenant, toutes les infos que j’ai sur vous ne sortirons pas de cette pièce.

Il ne me fallut que quelques minutes de plus pour le convaincre de m’embaucher. Le pauvre était dépassé.

Désolé vieux, pensais-je, mais je voulais ce poste.

Je devins Eon le jour même, mais au bureau, on m’appelait plutôt « Le Môme ». S’ils savaient.

Dès ma première mission, j’avais écrasé tous les doutes que pouvaient avoir mes collègues. J’avais piégé un diplomate congolais dans un hôtel. Il m’avait suffi d’une caméra, d’une conversation manipulée et d’un appel anonyme et j’avais révélé le plus gros scandale international de la décennie.

Et moi, impeccable, dans mon smoking, je m’étais allumé un cigare au balcon du quatrième étage pendant que l’ambassade brûlait.

A partir de là, je fus envoyé partout : Oslo, Tbilissi, Abidjan, Istanbul… Quelques villes que j’avais déjà vues et d’autres que je découvrais. Plus j’avançais, et plus je sentais grandir en moi cette énergie qui me donnait l’impression d’être invincible.

Peu à peu, mon regard devint plus dur, plus creux. Le visage du môme disparut pour laisser place à celui d’un véritable homme à femme. D’ailleurs, les femmes, je m’en étais fait quelques-unes sur tous les continents. Cette fois, pas de passion discrète, pas d’ascétisme, pas de petit sentimentalisme.

J’avais passé assez de temps à réfléchir sur ce que je devais faire ou pas, et maintenant, j’étais complètement au-dessus de tout. Il me fallait me rendre à l’évidence : j’étais un dieu. Et les dieux font ce qui leur chante.

Un jour, à Bucarest, je m’étais retrouvé complètement acculé. Eon commençait à avoir sa petite réputation et les membres d’un parti d’ultra-gauche révolutionnaire l’avaient pris en photo. J’ai du revenir sur mes pas et flinguer tous ceux à qui ils l’avaient partagé. Un à un. Le problème, c’est que dans le lot, j’ai du me résoudre à bousiller quelques gamins.

Le dernier, par contre, c’est pas moi qui l’ai tué. Un de leurs leaders se rendait dans un club échangiste du quartier rouge et elle, elle était déjà sur le coup. Pantalon, rangers et ceinture noire, marcel kaki, l’air rude et les yeux gris comme l’acier, Elise était une sniper de la DGSE et se hissait au sommet du classement.

J’avais entendu dire qu’elle détestait tous ceux qui se la ramenaient ou qui parlaient trop, et j’étais sans doute celui qu’elle supportait le moins. Non seulement elle savait que j’étais en Roumanie, mais elle avait fait exprès de me devancer pour m’humilier.

- Tu cherches un truc, Petit Prince ? m’avait-elle demandé en me passant à côté.

J’aurais sans doute dû répondre, mais je ne savais même pas qui elle était, à l’époque.

Je la revis deux ans plus tard à Novgorod, en Russie, et je ne supportais pas qu’elle me vole une nouvelle fois la vedette. Cette fille n’était pas dupe : elle ne me sous-estimait jamais mais ne m’évaluait pas plus que ce que j’étais. Elle n’était jamais impressionnée ni étonnée par quoi que ce soit que je puisse faire. De mon côté, j’avais épluché son dossier : trois langues parlées couramment (français, anglais et allemand), dix-sept opérations classées, trois assassinats politiques couverts par les diplomates et bien sûr, son véritable nom introuvable dans les registres (elle s’était donné le nom d’Elise en référence à Beethoven).

Je la vis entrer dans le bar miteux où elle avait trouvé refuge, quelque part entre la gare et les docks. Je la rejoignis au comptoir et sans attendre, elle me demanda :

- Alors, tu t’es pas encore fait buter ?

- T’es pas encore passée à l’acte, que je sache, lui répondis-je.

Elle ne rit même pas un peu.

- Tu sais, t’as pas l’air méchant, mais faut que t’arrêtes de fanfaronner, tu vas te prendre une balle, un de ces quatre.

- C’est pour ça que tu viens faire le boulot à ma place ? T’as peur pour moi ?

- J’ai peur que tu fasses tout foirer, surtout. Les gars comme toi, vous êtes toujours dans la magouille, la manigance. J’ai toujours trouvé qu’abattre nos ennemis, c’était plus honnête, au moins.

- Et aimer tes ennemis, ça te tente pas ? lui dis-je d’un ton charmeur.

Elle ne rit toujours pas, finit son verre et partit.

- Tu coucherais même avec ton ombre, toi. Guignol.

Ce fut le début de notre guerre froide. On se recroisa sur quelques opérations ci et là, et on essayait de s’éviter. Mais à chaque fois, j’admirais sa précision, son éthique. La minutieuse et travailleuse petite Elise me fascinait, elle était comme un rappel de ce que je n’étais pas.

C’est à Kiev que nous fûmes obligés de passer la semaine ensemble comme une punition. Notre mauvais comportement avait fini par révéler le projet du royaume de France de signer un contrat secret avec une organisation israélienne. Nous devions ensemble extorquer des informations à l’ambassade turque. Je me chargeais de la manipulation, et Elise de si tout cela tournait au vinaigre.

Arrivés à l’hôtel, elle me fit de vives remarques :

- Si tu viens dans ma chambre, je te tire une balle entre les deux yeux. Si tu me regardes de travers, je t’arrache les dents une par une. Si tu m’adresses la parole ne serait-ce qu’un peu trop fort ou bizarrement, je te jette par la fenêtre. J’hésiterais pas une seconde. T’as compris ?

J’avais compris. Mais dans tous les cas, je n’avais même pas envie de ça. J’avais juste envie de la faire un peu rire. Plus le temps passait, et moins elle était un simple objet de fascination pour moi. J’étais sincèrement attristé qu’elle n’ait jamais l’air heureuse, qu’elle ne me parle jamais, qu’elle ne me fasse pas confiance.

Je commençais à me dire que je l’avais mérité. Après tout, je m’étais fait une sacrée réputation. Mais je changeai. Lentement.

J’eus quelques jours plus tard l’occasion de coucher avec la femme de l’ambassadeur et ainsi me permettre d’accéder à certains dossiers secrets. Mais sans savoir pourquoi, je m’y refusais. Quand je rentrais à l’hôtel, je me sentis obligé de lui dire.

- Quel con ! me hurla-t-elle. T’avais tout ce qu’il fallait, pourquoi tu l’as pas fait ?

- J’avais pas envie.

En voyant comment je la regardais, je sentais qu’elle commençait à comprendre. Elle partit sans me dire un mot.

Moi, j’avais peur. Je m’étais bien dit que je ne tomberais plus jamais dans ce genre de saloperies sentimentales. Le soir même, alors que j’étais dans ma chambre, je me sentis enragé. C’était décidé, j’allais mettre un terme à tout ça. J’allais me lever, aller frapper à sa porte et lui dire. Lui dire quoi ? Je n’en savais rien. Ce qui me passerait par la tête. Que je voulais d’elle ou que je voulais pas d’elle. Mais il était hors de question que je reste dans cette zone de pudicité imbécile dans laquelle j’avais nagé avec Anne.

Mais en ouvrant la porte, je vis qu’elle était là. Elle venait me demander si elle pouvait dormir avec moi. J’acceptai.

Je sais ce que vous pensez, mais je ne vous dirai pas ce qu’il s’est passé cette nuit-là. Vous ne pourriez pas le deviner, et de toutes façons, je tiens à ce que cela reste un souvenir précieux, entre elle et moi.

Toutes nos prochaines missions, nous les fîmes ensemble : Elise et Eon. Je crois que j’étais tombé amoureux. Pour ce qui était de l’infinité de mon être, je préférai ne pas y penser. Pour le moment, j’avais envie de voir jusqu’où nous irions, elle et moi.

L’amour, chez Eon, se vivait comme tout le reste : sans limite. Je voulus tout d’elle. Son amour, sa vie, ses secrets. Elle, elle ne m’en donna qu’un peu. Pas seulement parce qu’elle restait pudique, mais parce qu’elle savait qu’il me fallait tempérer mes ardeurs. Je m’adoucis beaucoup à son contact, et je devins meilleur. Je me mis à regretter la démesure dont j’avais fait preuve.

Mais je fus vite rattrapé par mes forfaits. Un jour, à Alger, je me retrouvais dans une cave où auraient soi-disant été logés des terroristes afghans. Seulement, c’est avec surprise que je découvris une vieille photo de Christophe Garnier, l’homme que j’avais été il y a maintenant 15 ans. Plusieurs hommes essayèrent de m’attraper pour m’enfermer, mais je parvins miraculeusement à m’échapper.

Je compris quelques jours plus tard ce qu’il s’était passé : Adam était mort il y a quelques années mais son fils, Edmond, savait que je l’avais fait chanter. Il avait cherché partout qui je pouvais être et avait réussi à comprendre que j’étais lié à Christophe Garnier puisqu’une caméra m’avait vu sauter la barrière du lycée, le jour de sa « disparition ». Il avait enfin un mobile pour me faire arrêter, puisque mes nombreux meurtres étaient couverts par l’état.

Je compris que ce n’était qu’une question de temps avant que l’on ne puisse établir de lien avec Arthur, dont des traces devaient se trouver un peu partout au début du XXème siècle. Et si on retrouvait l’histoire de Jean Morel, pharmacien disparu en 2006 et « remplacé » par un autre, on finirait par me retrouver.

J’emmenais Elise au bout du monde sans lui dire où nous allions. Elle ne comprenait pas mais me faisait confiance. Mais partout où nous nous rendions, les services de renseignement nous traquaient. Mon visage était recherché et connu de tous. Un visage que beaucoup voulaient voir souffrir ou mourir.

N’avais-je pas le droit de vivre cette jeunesse violente et avare d’expériences nouvelles ? Non. J’étais allé trop loin et je le payais maintenant.

J’allais devoir dire adieu à l’enfant.

En Grande-Bretagne, j’avouais enfin toute mon histoire à Elise. Je lui parlais des vies que j’avais vécues et de tout ce que j’avais appris dans le monde. Je lui dis que je n’avais pas 31 mais 167 ans, et que je pouvais renaître quand je le voulais.

Elle ne comprit pas pourquoi je lui disais tout cela. Elle pensa que j’étais devenu fou.

- Si je te le prouve ici et maintenant. Si je te prouve qu’un homme peut mourir et renaître, est-ce que tu me croiras ?

- Qu’est-ce que tu racontes, Eon ? S’il te plaît, arrête.

- Prends ce que je te dis au sérieux, bon sang ! Est-ce que tu me croiras ?

- Oui, oui je te croirais.

Je sortis mon arme.

- Je t’en supplie, Elise. Me laisse pas tomber.

Et je me tirais dessus. Pour la première fois, je n’avais pas été poussé jusqu’à l’extrémité de ma vie. Je m’étais tué. J’avais fait mourir l’enfant pour que l’adulte puisse revenir une bonne fois pour toutes.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Childéric IV ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0