2.
West Side Road, Gibraltar 8am.
Le britannique bourra encore un pantalon dans son sac élimé. Jamais il n’aurait cru recevoir un jour une telle somme ! Et ce n’était qu’une avance ! Voilà de quoi entrevoir une échappatoire à sa condition.
Fini pour lui les petits boulots dans la zone portuaire. Nick ajusta une dernière fois sa chemise en souriant à son reflet d’ébène dans le miroir.
Elle serait en bien piteux état après plus d’une journée de voyage pour la Belgique. D’un dernier regard il dit au revoir à leur appartement, ils l’avaient acheté avec sa mère à la mort de son père. Elle ne voulait plus de l’humidité permanente de Leeds.
Il allait fermer la porte quand il se ravisa. Il remonta quatre à quatre les marches. Le plancher grinça lorsqu’il déplaça un meuble. Il ouvrit ensuite une trappe murale d’où il extirpa un objet compact mais visiblement lourd enveloppé d’une feutrine. Après tout, on ne le fouillerait aux différentes frontières avec la voiture de location. On l’avait gâté, il serait surclassé !
*
Zaventem 10 am D+1.
Le calabrais trouva enfin du regard le panonceaux « Spartan.Inc. ». Le black qui le tenait eut un regard entendu à son encontre quand il comprit
lui aussi. Seraient-ils donc uniquement deux ?
-Nick. Dit le britannique en lui serrant la main.
-Frughia Renato lui répondit-il.
-Pas donner nom ! stupid’ macaroni interjeta un slave patibulaire qui se tenait en retrait.
Ni l’un ni l’autre n’avaient fait attention au colosse en survêtement suranné. Il le portait ouvert avec une grosse chaîne en or ostensiblement arborée sur un vieux teeshirt rouge visiblement porté depuis plusieurs jours. Sa nuit avait visiblement été courte.
-Moi, Pavel pour vous.
Le ténébreux italien lança un regard des plus noirs vers le russe et d’un signe de la main internationalement explicite lui rétorqua.
-Vai fan culo, me ne frega.
-Allons, allons dit Nick. Je ne sais pas pour vous, mais moi, j’ai vraiment besoin de ce job. Venez, sortons de la zone aéroportuaire, nous avons un véhicule à l’extérieur. Les deux arrivants lui emboîtèrent le pas en se toisant. L’italien laissait sa valise rouler sous sa main droite en réajustant son blazer.
Nick s’installa au volant de la berline allemande. Pavel quant à lui s’affala sur la banquette arrière jetant son sac de sport à côté de lui pour en occuper tout l’espace. Il en sorti une bouteille de vodka qu’il tendit immédiatement au britannique par-dessus son épaule. Celui-ci refusa malgré son insistance et les projections d’alcool qu’il recevait sur son veston.
-Dermo trezvyy angliyskiy ? Ha haha Anglais sobre et Italien bavard ?
Nous bien montés ! Pesta le slave en s’étalant de tout son long.
Cette fois-ci l’italien ne releva pas, il attendit que la voiture quitte la zone aéroportuaire et il sortit un téléphone prépayé. Il lut l’unique message qu’il contenait dans les brouillons.
« Bugatti 1935 ».
*
Ses pieds commençaient à être vraiment douloureux. Il courrait sans chaussure, n’ayant eu que le temps de bondir par la fenêtre du réduit à l’arrière de son appartement.
Heureusement qu’il avait été réveillé par le bruit de sa serrure qui allait céder. Ses poursuivants se rapprochaient…
Il pesta contre les chiens qui aboyaient dans les enclos alentours et qui indiquaient sa position aux chasseurs.
*
La terrasse surplombait le détroit du Bosphore, baignée dans la lueur argentée de la lune. L’eau était calme, à peine troublée par le passage silencieux d’un cargo chargé d’acier et de containers.
Le jardin embaumait l’odeur des orangers et du tabac blond, la fumée tourbillonnant doucement autour de Lisica.
Elle était installée sur une chaise longue en rotin, une robe légère fendant sa peau encore tiède de leur étreinte. Un verre de vin posé sur la table basse, son téléphone négligemment posé à côté. Son mari ne rentrerait pas de la nuit encore une fois. Elle regardait la mer, sans vraiment la voir.
Dans l’ombre, son amant était adossé contre la balustrade, torse nu, un verre de rakia à la main. Ils étaient bien. Ils étaient seuls.
Ou presque. Parce qu’entre eux, il y avait toujours cette chose invisible, cet équilibre fragile où elle n’était jamais sûre de qui tenait réellement le pouvoir. Puis, sans vraiment tourner la tête vers elle, il lança doucement :
-Dis-moi, Lisi… ton mari, avec ses relations, il pourrait retrouver quelqu’un ?
Elle arqua un sourcil, l’air amusé.
-Tu cherches quelqu’un en particulier ?
L’homme, à la mâchoire bien dessinée, but une gorgée de rakia, savourant le goût brûlant du fruit fermenté.
-Un vieil ami. Dario Savić.
Elle ne broncha pas, mais il vit ses doigts glisser inconsciemment sur le bord de son verre. Elle connaissait ce nom. Tout le monde dans leur cercle le connaissait. Dario Savić. Ex-officier des unités paramilitaires serbes. Boucher de Šamac. Un fantôme qui s’était évaporé juste avant que le TPIY ne mette la main sur lui. Elle posa son verre.
-Un criminel de guerre, donc.
L’homme sourit légèrement.
-Un ami qui a mal tourné. Disons que je lui dois un service.
Elle souffla une bouffée de fumée, réfléchissant.
-Si ton ami est vivant, il se cache bien.
-C’est justement pour ça que je te le demande.
Lentement, elle posa son regard sur lui.
-Tu veux que j’en parle à mon mari.
Pas une question. Une constatation glaciale. Zora se détacha de la balustrade, s’approcha lentement, s’accroupit devant elle, posant une main sur son genou nu.
-Non, pas lui.
Son regard se fit plus insidieux.
-Ses contacts.
Lisica retint son souffle une fraction de seconde. Elle était intelligente. Elle savait que cette demande n’était pas anodine.
Elle savait ce que cela impliquait. Elle savait que si elle demandait, elle serait remarquée. Elle s’enfonçait. Mais en même temps…
Elle se mordit la lèvre, pensive. Elle aimait cette sensation. Ce frisson de danger. Ce jeu où elle ne savait jamais si elle dominait ou si elle était dominée.
-Et qu’est-ce que j’y gagne ? demanda-t-elle enfin, un sourire feint sur les lèvres.
Son amant s’approcha un peu plus, l’effleura du bout des doigts, caressant la ligne de sa mâchoire.
-Tu restes précieuse à mes yeux.
Un murmure, une promesse vide, mais elle le laissa glisser en elle comme du miel empoisonné. Elle recula à peine, reposa son verre sur la table, les yeux mi-clos.
-Je vais voir ce que je peux faire.
Il sourit. Il savait qu’elle le ferait. Parce qu’il l’avait déjà gagnée.
*
Parc du Cinquantenaire, Bruxelles, 2 pm D+1.
-Je persiste à dire que nous faison fausse route. La Bugatti type 46 a été produite en 1933.
-N’entrons pas dans le musée alors. Séparons-nous, j’ai l’impression que ce duo là - en montrant du menton deux hommes sur un banc - nous suit depuis pas mal de temps. Essayons de les balader en ville.
-Retrouver nous Louise station 18h. Dit Pavel qui fut le premier à quitter le groupe quand ils atteignirent la place du Parlement, il se sépara des autres alors qu’ils croisaient un groupe compact de touristes suivant un guide blasé. Il semblait avoir raison, les deux hommes étaient déjà sur leurs pas.
Visiblement ils choisissent de filer l’italien et le britannique se dit-il.
Aussi, discrètement, il leur emboîta le pas en profitant des éternels chantiers mobiles de la capitale belge pour se fondre dans le paysage.
*
Bureau du BIS, Stodulky.
- Capitaine Valeska, votre portable n’a conservé aucune photo des deux hommes ; l’un d’eux devait avoir un système de brouillage. Regardez.
Gupa fit défiler toute une série de ligne de code de l’OS.
Anja Valeska semblait toujours aussi consternée par le capharnaüm du bureau des écoutes et surveillance informatique mais elle s’approcha de
l'ecran cerné de multiples Post It comme autant de pense bête à une pensée écartelée entre toutes les requêtes qui lui parvenaient.
-Là on voit très bien que votre appareil a été comme inhibé. Nous soupçonnons depuis quelques mois les Russes d’avoir mis au point une telle IA capable de détecter un smartphone passant en mode photo à proximité. Ici dans le service on suppose que c’est ce genre d’IA qui aurait empêché l’enregistrement. Très peu de nations doivent avoir ce genre de technologie à leur disposition.
Anja pesta
-Do predele, to není možné ! , merde c’est pas possible !
C’est donc cela qui explique que je ne retrouvais aucun cliché lorsqu’ils sont tous les deux. Là ! Regardez, c’est bien Zoran Morkzan dit-elle en faisant défiler frénétiquement les clichés de la pellicule.
-Donc, reprit-elle, quand il est seul, je peux le photographier. C’est l’autre, celui que je ne connais pas qui devait avoir ce truc sur lui.
La capitaine du BIS se leva. Elle récupéra son portable des mains du jeune spécialiste informatique et sortit du bureau, le regard animé d’une frénésie soudaine. La quarantaine, bien conservée, elle arborait cette détermination glaciale que l’on attribue aisément aux slaves. Elle devait contacter au plus vite Les Écoles se dit-elle.
*
Etterbeek 4pm D+1.
Discrète au possible sur son scooter électrique de location, Ana observait elle aussi, à distance, la filature. Agréablement surprise par l’audace et l’initiative de Pavel, elle ne comprenait pas pourquoi ils étaient déjà mis sous surveillance. Un léger sourire aux lèvres, elle poussa une accélération fluide, dépassant avec aisance les différents groupes d’hommes avant de se garer devant un de ces bars d’angle typiques de la capitale belge. L’air était chargé d’une douceur tiède et des effluves de café serré. Les façades « art déco » conféraient au lieu une élégance surannée, un décor parfait pour une scène de cinéma.
Elle s’installa sur l’une des rares tables libres en terrasse, un geste lent, maîtrisé, presque félin, croisant les jambes avec une sensualité naturelle. Ses yeux, sombres et brillants sous ses lunettes fumées, scrutaient la foule, cherchant à comprendre qui leur en voulait. Deux passereaux vinrent se poser tout près, quémandant quelques miettes, comme attirés par son aura, sa présence diffuse et magnétique.
Et puis, ils passèrent. Nick et Renato. Le black avait du style certes, mais l’italien devait être ce qu’on appelle, un homme à femme. Elle le sentit avant même de le voir, un frisson imperceptible effleurant sa peau comme un courant électrique.
Il la repéra aussitôt, son regard glissant sur elle avec la précision d’un connaisseur. Un homme habitué à jauger, à décoder, à posséder avant même d’avoir touché.
Ana ne détourna pas les yeux. Au contraire. D’un geste calculé, presque indolent, elle baissa légèrement la tête, le fixant par-dessus le bord de ses lunettes, son regard noir, profond, le happant comme une invitation silencieuse.
Renato ralentit à peine, troublé un instant. Il hésita, un demi-pas, un infime flottement dans son assurance habituelle. Il était doué, sans doute. Mais pas encore assez. Elle esquissa un sourire, imperceptible, une invitation invisible qu’il ne sut pas encore déchiffrer. Un instant il lui sembla que l’italien allait l’accoster, voilà qui n’était pas très indiqué lors d’une opération. Quoique… Malgré tout il faudrait qu’il apprenne.
*
Zaitunay Bay, Beyrouth 4pm D+1.
Le riva amorça la manœuvre pour contourner la jetée. Pedrag, sur la défensive, demanda comment ils allaient passer le filtre de la capitainerie.
Beyrouth avait gardé son aura d’antan. La perle du moyen orient exhalait son charme suave, la brise de fin d’après-midi donnant un léger roulis à l’esquif d’acajou. L’air marin été comme infusé des odeurs de la cuisine si subtile du Liban.
*
Etterbeek 4 :20 pm D+1.
-Mais où sont-ils passés ? Ana ne comprenait pas où étaient passés ceux qui avaient pris en filature ses hommes. Et où était le russe ? Elle laissa un bon pourboire sur la table et se leva prestement.
Perchée sur ses escarpins elle se faufila, sylphide, entre les touristes attablés. Sa jupe fendue ne la gêna absolument pas pour enfourcher son scooter. Casque ajusté, elle remonta la Chaussée St Pierre, dépassa le Théâtre de la Chute. Croisement rue Posschier rien…
E chato ! il y avait un commissariat sur la Chaussée St Pierre, Pavel y aurait-il été conduit ? Se dit-elle. Elle fit une embardée pour éviter une portière de voiture et soudain elle le vit.
*
Ses pieds saignaient, il sentait dans ses veines pulser sa douleur au niveau des tempes tant il était allé au-delà des limites physiologiques de sa carcasse ramollie par sa sédentarité et son âge. Il avait réussi à retarder l’échéance en sautant par-dessus des clôtures, se terrant un moment dans des potagers. Il avait la tour Nabamba en ligne de mire, elle ne paraissait pas si éloignée.
Mais à chaque fois, comme une bête traquée, il avait été rabattu loin du fleuve. Ce fleuve qu’il lui fallait atteindre, certes il était dangereux à traverser à la nage mais sur l’autre berge il y avait les Belges, c’était son échappatoire !
La dernière chose qu’il vit fut l’homme en complet blanc qui épaulait.
La déflagration de l’arme résonna contre les façades délavées. Il était mort avant d’atteindre le sol. Son sang fut recouvert de terre battue et son corps jeté dans les eaux boueuses de ce fleuve qui aurait dû être son salut.
Personne alentour ne broncha. Même quand l’homme en blanc lui avait tranché la tête et qu’il avait ensuite enfermée dans un bocal qu’il avait sorti d’un sac à dos en cuir blanc.
*
Beyrouth 6pm D+1.
-J’y vous l’avais bien dit Missiou Harald Lamkhoumn y connaît toute le monde à Beyrouth. Si vous voulez entrer ou sortir de cette ville sans être inquiété, c’est par lui qu’il faut passer.
Pedrag était impressionné, L’Agence avait mis les moyens. Embarqués de nuit sur un cargo géorgien au large des Dardanelles, ils avaient été dispersés sur des hors-bords pour entrer au Liban. Il soupira en pensant à l’ironie de la situation. Chaque nuit des centaines de personnes fuyaient la misère de leur condition en Syrie sur des radeaux de fortune improvisés et eux, ils avaient effectué le trajet inverse sur de puissantes machines telle une force d’invasion.
Mais étaient-ils ce bras libérateur ? Il n’en était pas sûr, même s’il avait une cible clairement désignée. Le Tchétchène, comme il se faisait appeler, était un de ces chefs de guerre qui se distinguait par des atrocités perpétrées sur la population civile de plus en plus abominables. Son groupe armé était entré dans une spirale infernale de violences dont la seule limite semblait être sa propre démence.
Il se revoyait avec Isle et Brigt, la femme de leur agent régulateur du Moyen Orient sur les rives du Bosphore. Son mari avait dû s’éterniser dans une zone touristique car il était surveillé et elle était venu assurer l’intermédiaire.
Dans la mission qui leur était assignée, leur commanditaire sollicitait leur implication afin de capturer et d’exfiltrer le chef terroriste pour le faire comparaître devant une cour de justice voire de l’éliminer dans la pire des extrémités. Isle avait souri quand Brigt avait parlé d’exfiltration pour le terroriste et avait demandé s’il était prévu quelque chose pour leur évacuation à « eux », trouvant le verbe bien mal à propos.
D’ordinaire on « exfiltre » un de ses agents avait-elle ajouté pour clore sa remarque.
Pedrag regarda Isle vérifier le matériel avec les deux autres hommes de son groupe. Ils attendaient le signal pour se déplacer. Pour l’instant ils étaient dissimulés dans un atelier, destiné à la plaisance haut de gamme, situé dans le port de la ville qui refuse de disparaître. Ils étaient silencieux mus par leur professionnalisme.
*
-Tu me manques, j’en ai marre du bruit de cette ville de ses odeurs. Le temps semble figé en permanence ici. D’une main elle se massa la nuque.
-Je suis très occupé, tu le sais. On entendait le bourdonnement d’une ville occidentale en arrière-plan.
-Oui, mais j’ai des nouvelles qui pourraient t’intéresser Zora.
-Pas ici ! Je… Je peux être là demain.
Elle réagit joyeuse, son regard s’illuminant soudainement.
-Ha ? Je te croyais débordé, chic alors !
*
-La bière belge est vraiment fameuse.
-Les bières belges veux-tu dire ? Ainsi que leurs frites !
Ils plongèrent à l’unisson leurs doigts dans la barquette qui occupait le peu de place qu’il restait sur le plateau de leur table ronde jonchée de bouteilles de bière vidées. La foule commençait à emplir la place médiévale. Il était temps pour eux de rejoindre leur lieu de rendez-vous.
Le Bugatti à Ixelles. Il y avait une réservation au nom du calabrais dans ce restaurant mettant à l’honneur la gastronomie belge dans une ambiance « art-déco ».
C’était le Britannique qui avait compris la signification du brouillon contenu dans le téléphone qu’ils avaient reçu. Pour fuir les potentiels agents en civil qu’ils avaient aux basques ils s’étaient en effet écarté de Bruxelles par l’Avenue Louise. Nick s’était frappé le front devant une publicité pour le restaurant gastronomique.
*
Hôtel Radisson, Anvers 2am D+2.
-La plaque sera opérationnelle demain mais nous avons un… enfin, non, deux problèmes de taille.
Ana demeura silencieuse de longues secondes. D’ordinaire elle effectuait un rapport avec le téléphone prépayé, destiné à ce seul usage, qu’après quatre ou cinq jours.
-Valkyrie, m’écoutez-vous ? Ana se lova en boule sur le canapé de velours verts de la suite.
-Oui Carioca, qu’y a-t-il ?
-On a, semble-t-il, la police judiciaire belge aux basques. Y aurait-il une réunion d’importance au Parlement Européen en ce moment ?
-Pas que nous sachions, non. Ana frissonna.
-Durant la dernière phase de sélection, les agents se sont fourvoyés et se sont intéressés à la voiture de collection, la Bugatti type 36 du musée de l’Automobile. Des inspecteurs judiciaires ont dû les trouver dignes d’intérêt et les auront pris en filature.
-Ont-ils eu leurs identités contrôlées ?
-Non, j’y viens, c’est notre second problème. Le russe, celui qui a décidé de se faire appeler Pavel…
-Igor Mickaïlov ?
- Oui, êtes-vous sûre des informations que vous avez sur lui ? Pour moi, il a déjà tué. Il sait se battre dans la rue.
-Écoute, les Finlandais le travailleront, maintenant il faut que vous obteniez des résultats. Avec Athéna, nous pensions que c’était dans tes cordes. Certes la Grèce a laissé des traces, mais pour nous, tu n’es pas finie. Nous t’avons remise dans le circuit. Hier encore, tu me demandais un gros bras au cas où il faille calmer des ardeurs. D’accord, il n’a pas encore eu de qualification « Krav maga » mais il se débrouille non ?
Valkyrie et Carioca eurent un sourire entendu. Ana mis fin à l’appel.
Elle ôta son peignoir en se contemplant dans le miroir. D’ordinaire satisfaite de son corps fuselé et gainé, elle soupira en se regardant de profil tout en gonflant son ventre. Elle s’approcha du miroir pour scruter le bord de ses yeux. « Rien ne va ! » Se dit elle avant de se glisser dans son lit. Le sommeil ne vint que bien tardivement et encore fût-il agité.
*
Chaussée Pierre quelques heures auparavant.
Enfin un des deux hommes sortit son portable. Pavel se mit à courir vers eux et d’un violent coup d’épaule déséquilibra l’homme au téléphone pour s’en saisir. Il partit en allongeant sa foulée. Malgré sa corpulence massive et son look ridicule dans un survêtement « d’haltérophile bulgare » il courrait suffisamment vite pour les maintenir à distance ; difficile en effet de courir en mocassins.
Cependant, plus jeunes et plus affûtés ils commençaient à gagner du terrain, il vira dans la rue des métaux quand enfin il vit de grosses bennes à ordures, c’était le moment !
Il se comprima sur sa jambe d’appui et rejaillit en arrière surprenant le premier de ses poursuivants qu’il bouscula rudement d’un coup de coude au visage. Le nez du policier éclata comme une tomate trop mure.
Avant même que le second ne puisse l’esquiver, il lui écrasa sa grosse main gauche sur la figure et lui rabattit le visage contre le bord d’un des containers à ordures. La tête rebondit en arrière, là aussi, avec une gerbe de sang elliptique.
Déjà, l’homme de gauche se ressaisissait et sortait son arme de service de son holster. Pavel le cogna de toutes ses forces sur la pomme d’Adam sans qu’il puisse faire les sommations d’usage. L’inspecteur tomba à genoux, laissant choir l’automatique en se tenant la gorge, étouffé.
Pavel se retourna contre son collègue quand il vit une femme stupéfaite qui assistait à la scène. Il relâcha son étreinte et entreprit calmement de faire les poches aux deux hommes inconscients maculés de leur propre sang.
-Der’ mo ! Police judiciaire fédérale…
Il récupéra l’automatique au sol et fit basculer les deux corps dans une des bennes à ordures. La femme médusée ne bougea pas. Mais, quand il revint vers elle, elle disparut sur son scooter électrique.
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