Chapitre 1

4 minutes de lecture

Le surlendemain, lorsque Jean se rendit au travail, à peine avait-il mis les pieds dans son bureau que Virginie, sa plus proche collègue et amie, l'invita à la machine à café en prenant soin de respecter les convenances de la bonne année. Il commença juste à évoquer le début de sa soirée passée avec Marie que cette dernière embraya au quart de tour en bonne pipelette qu'elle était.

  • Tu peux me raconter ce que tu veux, Jean... Moi, je dis que vous êtes vraiment faits l'un pour l'autre... Et tu peux me croire... Au bout de trois mariages ratés et de quatre mômes, je sais de quoi je parle.
  • Bah, c'est peut-être pour cela que je devrais mettre en doute tes prédictions, aussi. Si tu vois ce que je veux dire.
  • Très drôle. T'as mangé un clown ce matin ?

Jean hésita à répondre puis finalement, il préféra se taire.

  • Bonne année, bonne année... Pfff... Tu ne peux pas savoir comment ça me gonfle !
  • Bah si. J'imagine.
  • Le truc qui me ressort par les yeux... C'est surtout qu'il n'y a pas la moitié de ces bouffons qui pensent un traître mot de ce qu'ils disent quand ils te la souhaitent. La bonne année...
  • Et encore... La moitié, je te trouve plutôt optimiste, ce matin...

Virginie lui donna un léger coup de coude dans le ventre.

  • Tiens, ça t'apprendra à te moquer des personnes âgées !

Virginie avait à peine cinq ans de plus que Jean mais elle en faisait une montagne. Une sorte d'idée obsessionnelle.

  • N'empêche qu'elle a de la chance cette Marie... Si elle ne t'avait pas mis le grappin dessus, c'est moi qui m'en serais chargé... Et elle n'aurait plus eu que ses yeux pour pleurer.
  • En même temps, ce n'est pas le nombre d'occasions qui t'ont manqué...
  • Ouais, ouais. Ça, je le sais. Mais tout le monde a ses mauvaises passes. Bon... Moi je fais exception car que je les collectionne... Mais bon... En même temps... Tu ne t'es pas jeté voracement sur moi non plus. Je te signale.
  • Tu aurais été fichue de me coller un procès au cul... Si jamais je t'avais fait cela...
  • Mouais... Pas faux... Mais ça... Tu ne peux pas l'affirmer vu que tu n'as même pas essayé !

Virginie avala son café d'un trait.

  • Bon, ce n'est pas tout mais je veux un rapport circonstancier de ce que tu as fait subir à la demoiselle d'ici ce soir. Tu viens manger à la maison ?

Jean réfléchit. Il avait promis à Marie d'aller au cinéma.

  • Oooh toi... Si tu fais cette tête-là...
  • Nan... Je vais voir... Mais je ne te promets rien.
  • Tu n'as qu'à venir avec elle, si tu veux...
  • Si je fais ça... Le rapport circonstancier, tu vas pouvoir l'attendre encore quelques jours...
  • Détrompe-toi, mon cher... J'aurais mes infos à la source. A la source ! Je te dis. Fais confiance à la "mère Ninie" ! Elle sait y faire dans ce genre de cas de figure !
  • Ouais... Cela ne présage rien de bon. Mais bon, je te redis cela en début d'après-midi.
  • Y a Elisa et Jérôme qui seront à la maison, ce soir... Si ça peut te rassurer. Leur paternel a soi-disant des rendez-vous d'affaires à l'autre bout de la planète et c'est "Maman" qui s'occupe de faire l'intérim. Dire qu'il m'a fait suer pour avoir leur garde. Dès qu'il a un petit pépin, c'est toujours moi qui suis là pour rattraper le coup.

Jean sourit.

  • Et tu ne vas pas me dire que c'est quelque chose qui t'ennuie. Non ?
  • Nan... fit-elle avec un sourire en coin. Au moins quand ils sont à la maison, je sais qu'ils sont entre de bonnes mains... Je ne t'ai pas parlé d'Alexia, la nouvelle élue de leur paternel ?
  • Si, si, tu m'en as parlé... Apparemment, tu ne la portes pas dans ton cœur.
  • Non, ce n'est pas cela... Ce qui me dérange, c'est juste qu'elle se croit obligée de jouer à la "Maman" bis alors qu'elle n'a aucune idée de ce que c'est. Mais bon. Elle a quoi ? Cinq ans de moins que toi ? C'est juste une gamine. Je lui donne six mois avant qu'elle déclare forfait. Et je vais te faire une confidence : je pense qu'Hervé l'aura épuisée ou bien l'aura remplacée par une autre d'ici-là. Il croit qu'il est majeur et responsable mais en fait, il est toujours en phase prépubère. Moi, je te le garantis. Je suis tombé dans le panneau, il y a dix ans. Je sais à quoi m'en tenir.
  • Tu dis cela mais, tu sais, les gens ont le droit de changer...
  • Ah oui, ils ont le droit mais ils ne le font pas. Ce sont des gosses. Des gosses avec la tronche d'adultes mais ce sont juste des gosses...
  • Peut-être, fit Jean.
  • Crois-moi... Et je ne dis pas cela pour te dégoûter de la vie. C'est juste une réalité qu'il faut accepter... Après, tu verras, tu vis bien mieux en ayant compris cela !

Jean hocha la tête. Il connaissait Virginie depuis le lycée. Elle avait beaucoup changé, année après année, dans sa manière de voir la vie mais finalement, fondamentalement elle était restée la même. C'était une maman. Elle l'avait toujours été. Un peu déjantée mais, une Maman avant tout.

  • Bon, faut que je file. J'ai une réunion. Je te rappelle en début d'après-midi pour te confirmer. Si je réussis à négocier la soirée.

Virginie partit à rire.

  • Je ne sais pas pourquoi tu mets des "si" partout. Je te parie que tu seras là ce soir. Je te connais comme si je t'avais fait ! Allez, file ! Bisous et à tout à l'heure !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Eric Laugier ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0