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Durant ces quelques jours merveilleux, nous nous sommes livrés complètement, dans la joie de nos retrouvailles et dans la découverte de l’autre. Nous ne nous connaissions pas et seul cet élan nous réunissait. Par la suite, jamais plus il n’y aura cet abandon total, cette ouverture sur les malheurs passés. Nous serons tournés vers l’avenir, oubliant ces chaines qui nous tiraient vers le fond.

Nos échanges vagabondaient d’un sujet à l’autre, d’un intérêt à l’autre. Nous avions tant à nous dire, nous étions si avides de nous retrouver pleinement. Mes sentiments pour ma petite sœur de cinq ans étaient intacts. Ils sommeillaient, enfouis sous la dureté de l’orphelinat.

Ces premières retrouvailles duraient, se renouvelaient chaque jour. Plus rien n’avait d’importance. Chaque fois qu’elle me réapparaissait, je la redécouvrais, ne me souvenant pas qu’hier elle était aussi superbe. Nous étions, tels des amoureux, ne pouvant nous passer l’un de l’autre. Ces années de séparation, de souffrances étaient bel et bien effacées.

Nous reprenions :

— Au téléphone, quand j’ai décroché, tu m’as dit que tu étais Hache, c’est ça ?

— Oui, tout le monde maintenant m’appelle H, comme la lettre, simplement.

— Pourquoi ?

— D’abord, Harry, je n’aime pas. Ce n’est pas le prénom donné par nos parents ni par mes vrais parents, mes parents biologiques. Il a dû m’être attribué par un fonctionnaire, dont le fils lisait Harry Potter, ou quelque chose de ce genre.

— Tu es sûr ?

— Je le sens. C’est pareil. Harry ou un numéro, c’est juste un identifiant.

— Pourquoi avoir gardé la première lettre alors ?

— Tu sais… non tu ne sais pas ! Je suis un spécialiste en cryptographie.

— C’est quoi ?

— La cryptographie, c’est la manière de coder et de décoder les messages pour qu’ils ne puissent pas être lus par n’importe qui. Ce n’est pas par hasard que j’ai été attiré par ces questions : je n’arrive pas à lire ma propre histoire ! Elle m’est hermétique !

— Tu as le sens de l’humour !

— Même pas ! Attends. Dans ce domaine, il y a une technique habituelle : le hashage. C’est une sorte de moulinette qui transforme un texte en une autre suite de caractères, le hash. Contrairement au chiffrage, qui convertit un texte avec une clé pour pouvoir le retourner, le hashage produit du hash, sans jamais pouvoir retrouver le texte d’origine. Une moulinette donnée produit toujours le même résultat pour le même texte. Par exemple, tous les mots de passe sont mémorisés par leur hash dans les machines. Tu es la seule à les connaitre et on vérifie que le résultat correspond bien au hash mémorisé dans la machine.

— Au moins, j’aurais appris quelque chose aujourd’hui !

— Moque-toi ! Tu as compris : je suis un hash, sans possibilité de remonter à ce que j’étais avant d’être mouliné par la vie. Je suis H !

— Harry, euh, H ! C’est vrai qu’il te manque le début…

— Pour la petite histoire, pour m’aider dans cette situation, comme tu dis, H évoque aussi une plante qui m’a bien soulagé…

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