Chapitre 8
Aleksandr
Le club est un espace clos où les ombres se mélangent aux éclats de lumière artificielle. L’atmosphère est dense, saturée de bruit et d’odeur, mais je n’y prête pas attention. Tout ici m’est familier, un décor dans lequel je suis maître, où chaque mouvement est mesuré, chaque interaction calculée. La musique, “Fein” de Toby Mai, vibre dans l’air, une mélodie basse et régulière qui rythme les mouvements des femmes sur les podiums. Les danseuses, avec leurs gestes précis, leurs corps sculptés et maîtrisés, se contorsionnent sur les barres de danse, attirant les regards des clients. Ils sont comme des prédateurs, leurs yeux fixés sur leurs proies, mais eux, ils ne savent pas que tout ici m’appartient.
Je me faufile dans la pièce avec la même assurance que d’habitude. Les regards se tournent vers moi instantanément, comme des insectes se retrouvant pris dans la lumière d’un prédateur. Ils savent qui je suis, ce que je représente. Un empire. La peur, bien que subtile, est toujours palpable. Mais ce soir, il y a quelque chose de différent. À ma droite, Milena.
Elle est là, un détail dans l’arrière-plan, une pièce dans un puzzle qui m’appartient, mais elle est toujours une inconnue. Je n’ai pas l’habitude de faire une entrée publique avec une femme. Les femmes sont des instruments, des objets temporaires qui servent à des fins précises. Elles viennent, et elles partent. Mais ce soir, elle marche à mes côtés, une constante que je n’avais pas anticipée. Ce n’est pas une femme avec qui je veux être vu. Ce n’est qu’un moyen de plus d’affirmer ma domination.
Milena ne croise pas mon regard. Elle évite mes yeux, une tentative maladroite, une résistance que je perçois sans y prêter attention. Je la laisse faire. Ses yeux se fixent sur le sol, sur les murs, sur n’importe quoi, mais pas sur moi. C’est une réaction prévisible, une tentative d’échapper à ce qu’elle sait inévitable. Les regards des hommes se posent sur elle. Ils la détaillent. Ils la jugent. Ils la trouvent belle. Mais leur jugement ne m’intéresse pas. Elle est à moi, et ce regard est le seul qui compte.
Sa robe noire en soie, un vêtement parfait qui épouse son corps comme une seconde peau, contraste avec l’anxiété que j’ai vue chez elle auparavant. Ses cheveux lissés tombent sur ses épaules, parfaitement alignés, lissés comme je l’ai exigé. La propreté de son apparence me satisfait, mais ce n’est pas cela qui retient mon attention. Non. C’est cette idée que, malgré tout, elle résiste. Que malgré son corps parfait et sa beauté soignée, elle tente de cacher sa peur, de la masquer. C’est cette peur qui m’attire.
Les hommes la regardent, mais ils savent qu’elle est mienne. Ils la désirent, mais aucun d’eux ne la touchera. Pas sans mon autorisation. Pas sans que je le décide.
Elle marche à côté de moi, comme une ombre à côté du prédateur. Un accessoire dans mon tableau de pouvoir. Rien de plus. Pourtant, je ressens quelque chose d’inédit, une tension, une différence dans l’air qui me perturbe. Je la sens. Elle me regarde encore une fois, brièvement, avant de détourner les yeux. Ce mouvement de fuite… C’est presque risible.
Je m’arrête quelques secondes, me permettant de la regarder. De l’étudier. Elle évite mon regard, mais je le sens. Elle est consciente de la scène qui se déroule autour d’elle. Elle sait qu’elle est observée. Les hommes la scrutent. Ils voient ce que je vois. Elle est belle. Mais ça n’a aucune importance. Elle est là pour une seule raison. Pour répondre à mes attentes. Rien de plus. Rien de moins.
Je prends une respiration lente, mes yeux glacés parcourant la pièce. Ce soir, Milena va apprendre sa place. Elle essaie encore de me fuir, d’éviter mon regard, de masquer la tension qui l’habite, mais ça ne changera rien. Elle va comprendre rapidement que le seul qui décide ici, c’est moi.
Le club continue de vibrer autour de nous, mais je me tiens parfaitement calme, détaché, froid. La foule, les regards, tout ça est insignifiant. Seule elle m’intéresse maintenant. Les femmes et les hommes qui remplissent cette pièce sont des pions dans un échiquier que je contrôle. Mais Milena... elle est différente. Pas en bien, pas en mal. Juste... différente.
Elle va finir par accepter sa place. Tout le reste n’a pas d’importance.
La pièce cachée, derrière une porte discrète et bien protégée, est un sanctuaire privé, un lieu réservé aux discussions les plus sensibles et aux décisions qui façonnent le destin de mon empire. Les murs sont capitonnés de cuir rouge, une couleur qui inspire la dominance, l’autorité. Chaque repli du cuir, chaque coutures parfaitement ajustée, porte la marque de ma volonté. Les lampes tamisées éclairent la pièce d’une lumière douce, accentuant les ombres, tout en donnant à l’espace une atmosphère feutrée et intime. Tout ici est soigneusement conçu pour donner l’impression de luxe, mais aussi de pouvoir et de contrôle. La table en marbre, imposante, trône au centre de la pièce, un meuble solide comme le roc, un témoignage de ce que j’ai bâti. La surface glacée du marbre reflète les éclats de la lumière, créant un contraste saisissant avec l’ombre qui englobe l’espace.
Lorsque la porte s’ouvre, le silence s’installe immédiatement. Les hommes qui se trouvent à l’intérieur de la pièce, toujours prêts à me montrer leur respect et leur allégeance, se lèvent tous simultanément. Le bruit du cuir contre le sol résonne alors qu’ils frappent du pied, un geste parfaitement synchronisé, une révérence. Ils savent ce que je suis. Ils savent qui je suis. Ce sont des hommes qui vivent sous l’ombre de ma décision, et cette révérence, bien que simple, est le reflet de leur soumission. Milena, à mes côtés, ressent cette tension dans l’air. Je le vois dans ses yeux, la façon dont ses muscles se tendent, comme une bête prête à fuir. Elle n’est pas habituée à voir cette obéissance, ce respect sans faille. Pourtant, elle doit comprendre que tout cela n’est que le fruit de ma volonté, de ma manière de diriger.
Je laisse la scène se dérouler devant moi, comme un maître qui observe son domaine. Mes yeux balayant chaque recoin de la pièce, chaque regard, chaque mouvement. Ils savent que je les surveille, que je les juge, et que leur vie dépend de la fidélité qu’ils me portent. Je n’ai pas besoin de leur dire quoi faire, ils connaissent leurs places. Mais je remarque, au fond de la pièce, une danseuse presque nue qui se meut gracieusement sur la table ronde en marbre. Ses mouvements sont fluides, presque hypnotiques, mais je ne m’y attarde pas. Ce n’est qu’une distraction temporaire. Un jeu qui n’a de valeur que pour moi, un instant de plaisir éphémère. Ce n’est pas pour cela que je suis ici ce soir.
Je fais un signe de la main à Milena, un geste sec et autoritaire. Elle comprend rapidement ce que cela signifie. Elle doit entrer avant moi. Elle doit suivre. C’est ainsi que cela fonctionne. Pas de questions, pas de résistance. Il n’y a pas de place pour la désobéissance. Et elle, elle doit l’apprendre.
Je la regarde un instant, observant l’incertitude dans son regard. C’est ce regard que je veux briser. Ce manque de soumission, de respect. Elle va comprendre, comme tous les autres, ce que signifie être sous mon contrôle. Elle est encore un déchet sauvage, mais elle sera façonnée à ma volonté. Elle n’aura pas d’autre choix que de se plier aux règles de ce monde.
Alors qu’elle avance, je me place derrière elle, la suivant avec calme, mes yeux ne la quittant pas. Tout ici est parfaitement orchestré, chaque mouvement, chaque geste, chaque instant. Rien n’est laissé au hasard, et c’est ce qui fait la force de mon empire.
Je prends place sur la chaise en cuir capitonné, le cuir s’enfonçant sous mon poids, me repliant contre le dos du fauteuil avec une facilité qui trahit mon total contrôle sur l’espace. Chaque détail de cette pièce, chaque objet, me rappelle à quel point tout ici m’appartient. Milena reste debout, à côté de moi. Elle n’ose pas s’asseoir. Son regard est vide, comme perdu dans le néant. Ses doigts tricotent nerveusement. Une petite réaction de stress qui ne m’échappe pas. Elle essaie de dissimuler ses émotions, mais ses gestes trahissent son angoisse, l’inconfort dans lequel elle se trouve. C’est pitoyable.
Je la regarde un instant, sans un mot. C’est à ce moment précis que je me rappelle qu’il faudra la briefer davantage. Mais j’aime l’idée qu’elle apprenne à ses dépens. Ces petites failles de contrôle me rappellent que je dois rester rigide avec elle, ne lui accorder aucune indulgence. Elle n’a pas encore compris les règles, mais elle le comprendra. J’avais été clair : ne parle pas si je ne t’en donne pas l’autorisation. Elle n’a pas encore vécu assez pour comprendre ce que cela implique. Sinon, tu sais ce qui t’attend. Un simple regard de ma part suffira. Mais pour l’instant, je la laisse se perdre dans ses pensées. La montrer faible et vulnérable est un processus que je compte manipuler à ma manière.
La pièce est emplie de l’atmosphère tendue que seule la présence d’hommes comme ceux-ci peut créer. Autour de la table en marbre, les membres de mon cercle restreint prennent place, leurs regards toujours rivés sur moi. Chaque homme est là pour une raison, un rôle précis dans l’organisation. Je les observe un par un, comme je le fais toujours.
À ma droite, Ivan, le bras droit, l’homme de main fiable. Son regard est toujours dur, mais il n’a aucune douceur dans les yeux. L’angoisse et la peur sont des émotions qu’il connaît bien, mais qu’il n’ose jamais montrer. C’est ce qui le rend utile. Il est l’exécution brute, l’ombre qui surgit au moment de faire le travail que personne d’autre ne veut accomplir. C’est grâce à lui que les menaces restent simplement des menaces et ne se transforment jamais en discussions inutiles. Ses mains ne tremblent jamais, même dans la situation la plus tendue.
De l’autre côté de la table, c’est Nikolai. Plus âgé, plus réfléchi, un esprit stratégique. Il est le cerveau derrière les plans complexes, mais son regard manque parfois de cette froideur nécessaire à la prise de décision sans émotion. Il a le pouvoir de manipuler les informations et les ressources à son avantage. Mais dans la salle, je vois la lueur d’hésitation dans ses yeux. Il a encore des doutes, il en aura toujours. Une faiblesse qui le rend dangereux à un moment donné. Je sais qu’il faut le garder sous contrôle.
Ensuite, il y a Kiril, un homme plus jeune, mais tout aussi impitoyable. Il a ses propres ambitions, mais il ne les manifeste pas ouvertement. Son rôle est de veiller à ce que l’ordre soit maintenu dans les endroits où les autres n’osent pas s’aventurer. C’est lui qui supervise l’intelligence et la surveillance, un œil dans l’ombre qui ne laisse rien passer. Cependant, je suis conscient que son ambition pourrait un jour le pousser à me trahir. Mais ce jour-là ne viendra pas, pas tant qu’il n’aura pas encore pris conscience que seul moi tiens les fils de cet empire.
Je me laisse aller dans le fauteuil, mes yeux se posant lentement sur chaque homme. L’atmosphère de la pièce est lourde, remplie de cette pression constante, que j’instille en eux sans même avoir à lever la voix. Ils savent qui je suis, ils savent ce que je fais, et ils savent ce qui arrive à ceux qui échouent. L’ordre est rétabli dans le silence, et bientôt, le sujet de discussion commence.
— On va parler de la dernière affaire, commence Ivan, le bras droit, sans même oser poser la question. C’est plus un ordre qu’une demande. Il sait que tout se passe sous mon regard. Le transport de la marchandise, comment ça s’est géré?
Je hausse un sourcil, analysant ses mots. Il parle de la cargaison, bien sûr. Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu. Je sens que Nikolai est sur le point de répondre. Je l’observe une seconde, avant de le laisser enchaîner.
— Le timing a été parfait, mais un problème avec les douanes à la frontière. Nikolai prend la parole d’une manière presque calculée, comme toujours, mais je vois la tension dans sa voix. Ce détail ne m’échappe pas. Il n’aime pas perdre le contrôle, et je ne le lui permettrai pas.
— Il n’y a eu aucun retard? Je parle froidement, sans attendre de réponse immédiate. Mon regard se fait encore plus intense, et dans le silence, c’est comme une pression invisible qui les étouffe.
— Non, répond Kiril, l’air assuré. Nous avons tout géré avec discrétion. Les routes étaient nettoyées.
Je prends un moment pour digérer ces informations. Pas de retard. Pas de problème majeur. Mais ce n’est pas suffisant. Un petit problème dans une situation comme celle-ci peut tout faire capoter. Je me tourne vers Milena, toujours debout à mes côtés. Elle semble si insignifiante ici, comme une silhouette dans un monde d’hommes, et pourtant, elle est la raison pour laquelle je vais devoir resserrer mes rangs et contrôler chaque détail.
La réunion continue, mais mon esprit commence déjà à tourner sur d’autres affaires. Des affaires qui ne peuvent pas être laissées en suspens.
Le silence commence à peser dans la pièce, malgré les mots qui flottent encore autour de la table. Je remarque tout à coup que Kiril ne détourne pas les yeux de Milena, fixant sa silhouette, la façon dont elle se tient, la robe qui la couvre, le moindre de ses gestes. Ce regard... Il est différent. Trop attentif. Trop intéressé. Ce n’est pas une simple observation. Il est en train de la jauger, de la mesurer. Une erreur fatale.
Je me retrouve, sans m’en rendre compte, figé dans cet instant. La colère, froide, méthodique, se propage lentement en moi. Je n’aime pas que mes hommes prennent trop de liberté. Je n’aime pas quand ils se laissent distraire. Milena, ce n’est pas une distraction. Elle est sous mon contrôle. Personne ne doit la regarder de cette façon, surtout pas un homme comme Kiril. Je le fixe toujours, son regard continuant à errer vers elle. Rien d’anodin, et pourtant il ose, il s’expose.
Je me lève lentement, sans un bruit. Mon mouvement est imperceptible, mais tout le monde autour de la table le remarque. Les murmures cessent en une fraction de seconde. Même la danseuse sur la table ronde, qui d’ordinaire ne prêterait attention à rien d’autre qu’à son propre public, semble suspendue à l’air qu’il y a dans la pièce. La tension est palpable. Ils savent que quand je me lève, c’est qu’il y a un problème. Je suis celui qui dirige tout ici, celui qui attend que les autres comprennent leur place.
Je fais quelques pas lents, détendus, me dirigeant directement vers Kiril. Mes mains plongent dans les poches de mon pantalon, et chaque pas que je fais semble plus lourd que le précédent. Une aura d’irritation glacée commence à m’envahir. Je suis calme, mais je ne ressens rien d’autre que du mépris. Le regard de Kiril ne me plaît pas, il n’a pas à regarder Milena comme ça. Je le vois enfin détourner les yeux, mais c’est trop tard. Il sait que j’ai vu. Et il sait qu’il est en train de me perdre. Mon regard, froid et impitoyable, s’accroche à lui alors que je m’arrête juste devant lui.
— Tu sais pourquoi je vous ai réuni ce soir ? Je commence, la voix basse, mais chaque mot semble résonner dans la pièce avec une autorité glaciale. Je sais exactement quels risques je prends en ce moment. J’ai toujours su. Je n’ai pas besoin que quelqu’un d’autre me rappelle les règles de cet empire.
Je le laisse parler à peine, mais je vois déjà son regard chercher un moyen d’argumenter, une excuse pour se justifier. Mais il n’y en a pas. Pas pour ce genre d’erreur. Je fais une pause, observant bien chaque homme autour de la table. Tous attendent, retenus, comme des animaux attendant qu’une proie tombe dans leur piège.
— Mais toi... Je laisse traîner le mot dans l’air. Tu as fait une erreur que je n’accepte pas. Tu crois que tu peux regarder cette femme comme ça, comme si elle t’appartenait aussi ? Tu n’es rien dans cette pièce, Kiril. Rien.
Je vois son souffle se bloquer, il a l’air d’essayer de retenir ses mots, de se chercher des excuses. Mais je n’en ai rien à faire. Je m’approche encore un peu plus de lui, mon visage si proche qu’il peut sentir la tension dans ma voix.
— Tu sais ce qui arrive quand les règles sont brisées. Je lui dis lentement, chaque syllabe comme un coup de couteau. Tu sais parfaitement où tu te trouves. Et je ne tolérerai pas d’autre insubordination. Pas d’autre erreur de jugement.
Kiril se redresse légèrement, un mouvement aussi minime que peut l’être un homme en pleine tension, mais je le vois. Il sait qu’il est à la merci de mes décisions. Le moindre faux pas, et il le payera. Il me regarde maintenant, non plus avec arrogance, mais avec une peur palpable. Et je l’apprécie. Parce que dans ce genre de situation, l’instinct de survie prend le dessus, et ça me rassure.
Je n’ajoute rien de plus. Les mots sont inutiles. Ils savent maintenant qu’il a franchi une limite. À partir de maintenant, c’est à lui de réparer ce qui peut l’être. Et si ça ne suffit pas... Je saurai m’en occuper.
Je me penche légèrement en avant, l’air aussi calme qu’il est terrifiant. La pièce semble se suspendre à chaque mouvement que je fais. Les regards se tournent, curieux, fascinés, mais tous restent là, immobiles, comme des spectateurs dans un théâtre de mort. Les hommes savent que ce qu’il va se passer maintenant marquera un tournant. Rien ne sera plus pareil après cela.
Je laisse mes yeux se poser sur Kiril une dernière fois, et il comprend immédiatement que le jeu a changé. Il ne bouge pas. Il sait ce qui arrive. Il se redresse. Tout devient silencieux, et je vois la pièce se tordre autour de moi dans cette lente danse macabre qui est la mienne, celle de l’empire que j’ai bâti avec des mains de fer.
Je prends lentement mon poignard, l’acier brillant à la lumière tamisée de la pièce. Il me suit du regard, comme tout le monde, intrigué par ce geste. Le froid du métal contre ma peau me rappelle à qui je suis, et ce que je peux faire. Je ne suis pas un simple homme d’affaires. Je suis l’incarnation de l’autorité et de la peur. Je me redresse, l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de chaque tête ici présente. Puis je fais un mouvement imperceptible de la main vers Milena, toujours silencieuse, figée, et je lève un doigt, montrant que cette annonce va marquer un point de non-retour.
Je brise le silence, d’une voix glaciale, mais profonde, comme un ordre :
— Cette femme ici présente... Je laisse planer le silence, mes yeux fixant les siens, observant chaque mouvement, chaque frisson qui traverse son corps. Un sourire presque imperceptible s’infiltre sur mes lèvres alors que je prononce son nom, Katerina.
Il y a une signification dans ce nom, quelque chose que seuls quelques initiés comprendront. Katerina. Ce n’est pas un hasard. Ce nom, ce choix, celui de la déesse de la guerre, ce nom que je choisi.
Je me redresse légèrement, le silence dans la pièce devient palpable. Je laisse quelques secondes s’écouler, les yeux braqués sur Milena, observant la décomposition de son visage. C’est une satisfaction froide, distante, mais percutante. Le choc est visible, mais je n’y accorde aucune attention. Ses émotions, ses réactions, ne m’intéressent pas. Tout cela fait partie du jeu. Le pouvoir que je détiens sur elle est désormais palpable.
J’avance d’un pas lent, mes yeux ne quittant pas sa silhouette, me posant sur chaque mouvement qu’elle fait, chaque respiration qu’elle prend. Puis, enfin, je brise le silence d’une voix implacable, sans la moindre once de chaleur :
— Elle sera mon épouse.
Les mots résonnent dans la pièce, lourds de sens. L’impact de ma déclaration est instantané. Le visage de Milena se décompose sous le poids de ce que je viens de dire. Je vois ses yeux s’écarquiller légèrement, une vague de confusion qui se mêle à l’horreur, mais je n’en ai que faire. Ce n’est qu’une étape dans son processus d’acceptation. Peu importe à quel point cela la perturbe, ce choix est fait, et elle n’a d’autre option que de l’accepter.
Autour de la table, les regards se tournent vers moi, une forme de respect déguisée en approbation froide et mécanique. Les applaudissements éclatent brutalement, brisant le silence comme un écho lointain. Ils félicitent, mais ces félicitations ne sont que des formalités, des gestes de soumission dans ce monde où seule la force impose le respect. Chaque homme ici sait que cette union, bien plus qu’une simple question de mariage, est un symbole du pouvoir que je détiens sur tout ce qui m’entoure. Les règles que j’impose, la manière dont je régis cet empire, cela fait d’eux ce qu’ils sont aujourd’hui.
Mais je ne laisse aucun sourire déformer mes lèvres. Je fixe toujours Milena, observant ses réactions de loin. Elle ne me regarde pas, évitant soigneusement mes yeux. Elle sait que son regard fuit le mien, et je le remarque. Cette fuite est une tentative désespérée de se protéger, mais il est déjà trop tard. Je ne me contente pas de la contrôler, je lui impose ma présence à chaque instant.
Tout autour de moi, tout le monde applaudit, s’incline même légèrement, comme des marionnettes suivant une chorégraphie bien rodée. Je les ignore tous. Je suis concentré sur Milena. Elle sait qu’elle n’a plus aucune issue. Ses yeux cherchent une échappatoire, mais il n’y en a pas. Elle est à moi maintenant, non seulement physiquement, mais psychologiquement.
Je ne me laisse pas emporter par l’euphorie de cette victoire. Mon pouvoir réside dans la peur que j’inspire, dans la domination que j’exerce sans le moindre effort visible. Mais je ne suis pas pressé de briser entièrement sa volonté. Je veux qu’elle comprenne lentement, qu’elle digère chaque instant, que son esprit accepte la place qui est la sienne, celle que je lui ai imposée.
Je me permets enfin un regard de côté, vers les hommes qui me félicitent. Ils ne savent pas, mais ils sentent le poids du moment. Ils savent que leur chef vient d’ancrer un nouveau pilier dans son empire. Un pilier fragile au début, mais qui, au fur et à mesure, deviendra plus fort, inébranlable. Mais pour l’instant, c’est un contrôle psychologique que je leur impose, à elle comme à eux. Un jeu silencieux où seul moi décide du rythme.
Et moi, je souris intérieurement, sans le montrer. Tout est sous contrôle.
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