Chapitre 14.1 - BASTUS - Étincelle

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Bastus accompagne Teïos à la forge avant de partir en reconnaissance le lendemain, pour apprivoiser les alentours de Volos. Son ami a besoin de faire reprendre sa lame qui s'est émoussée. À leur arrivée, une jeune fille les accueille. Bastus est immédiatement subjugué par sa beauté. Sa taille fine met en valeur ses courbes généreuses. Elle a les cheveux blonds attachés en une large tresse posée sur son épaule gauche, Bastus imagine l'effet de sa chevelure cascader librement sur ses formes envoûtantes. Son visage délicat les accueille avec un sourire chaleureux et Bastus se perd quelques instants dans ses yeux bleus.

— Behrrey. En quoi puis-je vous aider ?

— Behrrey. Je viens faire réparer ma lame, répond Teïos. Combien en demandez vous ?

Son ami le regarde avec amusement. Losqu'elle part vers la forge, il lance un coup de coude dans les côtes de Bastus.

— Ta prochaine conquête ? Un peu jeune peut-être mais incroyablement belle malgré son pas claudiquant.

— Peut-être, répond Bastus l'air pensif.

— Sinon, je passerais volontier une soirée en sa compagnie !

La jeune fille revient accompagnée d'une femme vêtue d'un tablier de forgeron.

— Behrrey. Pour qui est-ce ? demande-t-elle.

— Behrrey, pour moi, répond Teïos avant que la jeune fille n'ait pu ouvrir la bouche.

— Il y a du travail mais elle est bien entretenue, deux pièces de cuivre.

Les deux hommes sont surpris. En Contrée Cybeline, le métier de la forge est exclusivement masculin. Les moeurs Vulcae sont bien loin de leurs habitudes sur bien des aspects.

— Je suppose que ce n'est pas négociable ? hasarde Teïos.

La femme le regarde de travers, de ses yeux sombres.

— Bon, d'accord. Quand sera-t-elle prête ?

— Dans un solaris, répond la forgeronne sur un ton tranchant.

Elle se tourne vers Bastus.

— Et votre arme ? demande-t-elle.

— Je n'ai pas besoin de...

— Montrez-la moi, le coupe-t-elle.

Bastus est tellement déstabilisé par son ton directif et son assurance, qu'il sort sa lame et la lui tend. Les deux hommes en profitent pour admirer la jeune fille qui s'est placée un peu en retrait.

— Laissez Zélia tranquille ! lance la forgeronne avec agressivité.

— Pardon ? prononcent en choeur les deux amis.

— Je vois bien comment vous l'observez. C'est mon apprentie. Elle a assez souffert des âffres de la guerre, laissez-la en paix !

— Nous n'avions aucunement l'intention de profiter... commence Bastus.

Il laisse sa phrase en suspens sous le regard noir qu'elle leur lance. Elle dégage un charisme où se mêlent autorité et instinct protecteur. Bastus est décontenancé. Le visage de la forgeronne s'adoucit d'un coup lorsqu'elle contemple l'arme. On dirait qu'elle observe un animal blessé ou un bébé. Ses yeux pétillent et son regard est d'une douceur infinie. Bastus se prend à l'observer avec attention, sa curiosité piquée au vif. Elle fait pâle figure en comparaison de Zélia. Elle est grande et musclée. Elle doit avoir à peu près le même âge que lui. Ses cheveux auburn ont été attachés à la hâte en chignon. Ses grands yeux sombres sont animés d'une passion et d'une concentration intenses. Le prince ne distingue pas ses formes, il ne peut que les deviner sous sa tenue de travail. Sa frustration ne fait qu'attiser son intérêt pour elle.

— Je dois préparer notre expédition. je vous laisse, annonce Teïos. Hafez !

— Hafez, répondent la forgeronne et le prince.

Elle se tourne ensuite vers Bastus en lui tendant son arme.

— Tenez. Vous en prenez grand soin, dit-elle alors qu'un sourire chaleureux s'épanouit sur son visage. Je vois que la poignée montre une légère fragilité qui risque d'abîmer prématurément l'arme. Je peux enlever ce défaut.

Bastus est surpris par ce soudain changement d'expression.

— Combien de temps vous faut-il ? Je pars demain à l'aube.

— Je peux le faire immédiatement, mais cela vous coûtera une pièce de cuivre supplémentaire, soit deux pièces en tout.

— Je vous suis.

— Pardon ? demande-t-elle surprise.

— Je tiens à observer votre travail, je ne confie pas mon arme facilement, répond Bastus.

— Je comprends, suivez-moi.

Elle ouvre la marche. Elle ne s'est pas vexée d'être ainsi surveillée. Au contraire, il a lu dans son regard du respect. Pendant qu'elle s'installe à la forge, il l'observe. Ses gestes sont fluides. Sa maîtrise de l'Essence déforme le métal selon son bon vouloir. Bastus est fasciné. Zélia lui offre un rafraichissement pour patienter, Bastus attrape l'infusion sans détacher les yeux de la forgeronne. Il a complètement oublié l'apprentie. Il n'a d'yeux que pour l'expertise et le visage radieux de la propriétaire des lieux ; les battements de son coeur s'accélèrent. Il a de plus en plus chaud, ce qui n'est pas étonnant vu l'atmosphère suffocante des lieux. La sueur coule de son front.

— J'ai presque terminé, l'informe-t-elle.

— Merci, euh. Comment dois-je vous appeler ?

— Héphiane, Monsieur l'Animae, répond-t-elle en lui tendant sa lame. Attention, elle est encore chaude.

— Merci Héphiane. Appelez-moi Bastus.

Le prince observe son épée. On dirait une arme neuve ! La précision du travail est incroyable.

— Je n'ai jamais vu un travail d'une telle qualité ! s'enflamme-t-il.

— Merci Bastus, répond la forgeronne en baissant la tête.

Il a lu de la reconnaissance dans ses yeux mais aussi une colère froide et une tristesse profonde. Il est l'envahisseur après tout. Des images remontent à son esprit. Il se prend la tête entre les mains. Pas maintenant ! Il tremble légèrement sous l'effort essayant de faire refluer le flot d'atrocités qui se fraie un chemin vers la sortie. Lorsqu'il pense céder à ses visions cauchemardesques, Bastus sent un contact chaud sur son bras.

— Est-ce que ça va ? demande la forgeronne avec inquiétude.

— Ce n'est rien, un mal de crâne, répond Bastus.

— Voulez-vous une infusion ? J'ai ce qu'il faut pour calmer la douleur.

Le contact de la main d'Héphiane permet à Bastus de reprendre pied avec la réalité. Les images ont à peine eu le temps de le hanter. Habituellement, elles restent un long moment à rejouer le fil des horreurs de la guerre. Seule la boisson amoindrit le mal. Comment fait-elle ? Le don Vulcae ne permet pas de soigner ainsi la douleur ! Pour l'instant, l'essentiel est de retrouver une contenance. Pour aider les ombres du passé à s'éloigner, il recouvre les doigts de la jeune femme de sa main libre. Elle se raidit à ce contact mais ne retire pas sa main.

— Merci, répond Bastus en plongeant son regard azur dans les yeux amandes d'Héphiane.

Il lit de la suprise dans son regard, mêlée à de la curiosité.

— Je reviens tout de suite.

Lorsqu'elle ôte sa main pour se rendre dans la pièce adjacente, Bastus attend avec angoisse le retour de ses souvenirs. Rien ne se passe. Le prince est encore plus déboussolé. Comment a-t-elle procédé ? Il faut qu'il découvre son secret ! Si ça peut l'éloigner de la boisson et lui permettre d'en finir avec les horreurs qui le hantent.

Elle revient une tasse fumante entre les mains.

— Tenez.

Leurs doigts se frôlent. Un frisson parcourt le dos de Bastus. Que lui arrive-t-il ? Elle lui a lancé un sort, c'est sûr ! Mais pourquoi apaiser son ennemi ? Il a vu dans ses yeux la rancoeur qu'elle voue aux Animae. Bastus est désorienté.

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