En s'approchant du lieu où elle a quitté ses amies, Lelyâh ressent de nouveau un mal de crâne diffus. Plus elles avancent et plus la douleur s'accentue. Elle se retrouve bientôt les deux mains sur la tête à gémir. Avant que cela ne devienne insupportable elle entend la Naïadienne dont la voix flotte dans l'air :

— Ramasse de la mousse, mets-la en boule et enfonce-la dans tes oreilles pour atténuer le bruit.

Lelyâh s'exécute. La morsure reflue pour devenir une douleur latente mais supportable.

À peine sorties de la forêt, la soigneuse retrouve Zaphyne toujours en train de hurler, la boule lançant des arcs électriques aux alentours, et Diane tentant en vain de calmer l'enfant grâce aux chants de Saëlle.

— Lelyâh ! Tu es vivante ! J'étais morte d'inquiétude ! Merci Lahärva ! s'écrie la fille du lord en se précipitant vers ses amies , puis enlaçant la soigneuse avec force.

— J'essaie depuis tout à l'heure mais rien n'y fait. Je n'arrive pas à la calmer. Mais, tu n'as plus mal ?

— Tu peux répéter ? demande Lelyâh en forçant sur sa voix.

— Tu n'as plus mal ? crie alors Diane pour se faire entendre.

— Si, un peu, mais c'est supportable. J'ai de la mousse dans les oreilles. Je suis venue avec une Naïadienne, elle pense pouvoir aider Zaphyne.

— Oh, il est rare d'en voir, elles évitent la présence des humains en général.

Lelyâh ouvre en même temps la gourde d'où jaillit un petit geyser d'eau miroitante qui se transforme rapidement pour reprendre la forme d'Orséice. Diane a les yeux grands ouverts, la bouche bée. Elle fait une révérence avant de se présenter :

— Je suis Diane, fille du lord Olmo. C'est un privilège de vous rencontrer.

— On t'a appris les bonnes manières, c'est bien. Redresse-toi, je suis Orséice, Naïadienne de la rivière Ludine.

Puis la créature se tourne vers Zaphyne.

— Ce bruit est horripilant.

Des filaments éclatant de reflets arc-en-ciel partent de ses doigts pour venir envelopper la boule ténébreuse. Ils forment rapidement une pelotte d'ondes scintillantes autour de la Mage. La Naïadienne, se met à parler dans une langue étrange, aux accents gutturaux. Puis les cris s'envolent, plongeant les alentours dans un silence assourdissant. Orséice s'approche de la sphère noire en tendant ses doigts délicats vers elle.

— Pauvre petite, tu as dû beaucoup souffrir. Tu sais que ta place n'est plus ici désormais. Rejoins ta famille et sois en paix.

La boule se mue lentement en une fille opalescente dont le visage est fendu d'un large sourire. Elle irradie le calme.

— Merci Diane, merci Lelyâh de m'avoir aidée et de m'avoir offert la vérité. Merci Naïadienne de votre aide.

— Appelle-moi Orséice.

— Merci Orséice. Je pars rejoindre papa, maman, Annelou et Kelhi.

Une larme de cristal coule le long de sa joue alors qu'elle éclate en milliers de grains de poussière lumineux. Les deux amies se prennent par la main, les yeux embués.

— Merci à toi pour ta joie Zaphyne ! souffle Diane en serrant la main de son amie.

La Naïadienne se retourne alors vers les deux jeunes femmes.

— Rappelle-toi ta promesse. Quand sonnera l'heure, je te contacterai et tu viendras à moi pour t'acquitter de ta dette.

Un frisson glacé parcourt Lelyâh. À quoi s'est-elle engagée ?