Les deux solaris suivant, Bastus et ses seconds étudient les possibilités de mater la rébellion Vulcae. Le prince essaie de se dégager autant de temps qu'il le peut pour retrouver Héphiane. Il n'a plus retouché à l'alcool. En sa présence, ses tourments se volatilisent, la vie lui paraît moins lourde et son coeur est apaisé.

Toutefois, les occasions sont peu nombreuses car Eklesia le suit de près, trouvant le moindre prétexte afin d'accaparer son attention : missives urgentes, propositions de plan d'attaque contre les rebelles,... Bastus est agacé et Héphiane jalouse même si elle cherche à le cacher. Cette tension est éreintante. Bastus finit par convoquer sa seconde ainsi que Teïos le lendemain matin :

— Eklesia, Teïos, cela fait deux solaris que nous étudions les possibilités de pouvoir mettre un terme aux rébellions Vulcae. Il est évident que, malgré la reconnaissance, nous disposons de trop peu d'informations. Allez sur place, étudiez le terrain, écoutez dans les tavernes, discutez avec les patrouilles pour trouver une faille exploitable. Vous connaissez la patience légendaire de mon frère et de ma mère ! Nous aurons des comptes à rendre sous peu, j'en mets ma main à couper.

— Mais mon commandant, qui surveillera le manoir ? interroge Eklesia.

— Nous avons des patrouilles, tu le sais aussi bien que moi.

Le visage de la jeune femme se rembrunit.

— Mais des personnes de confiance, il y en a peu. Les Vulcae pourraient viser une attaque de plus grande envergure durant notre absence et...

— Eklesia, c'est assez ! lâche Bastus avec fermeté. Je te remercie de te soucier de ma personne et je sais que c'est dans l'intention de bien faire, mais j'ai besoin de toi là-bas. Je sais qu'à vous deux, vous trouverez l'idée qui satisfera la Régente et nous évitera des remontrances, ou pire... Entre un déserteur, un prince alcoolique et son bras droit, elle a toutes les raisons d'en arriver à des mesures plus, disons, radicales.

Ses deux officiers se raidissent. L'idée était bien présente dans leur inconscient mais il la laissait tranquillement flotter dans les limbes pour éviter de voir la réalité en face : ils sont sur la sellette.

— Bien Bastus, nous partons !

Et prenant Eklesia par l'épaule, Teïos l'emmène vers la sortie. La seconde a les poings et la mâchoire crispés. Ses yeux lancent des éclairs alors qu'elle quitte la pièce. Elle n'a aucune confiance en la maîtresse de son supérieur. Elle devrait être heureuse pour lui, elle a bien noté qu'il ne buvait plus depuis leur rencontre mais elle sent un danger.

— Ne sois pas jalouse, lance Teïos avec un sourire taquin.

— Je ne suis pas jalouse ! s'emporte Eklesia, le visage empourpré de colère.

— Pourtant, tu es toute rouge.

— Oui, car je semble être la seule à me préoccuper de la sécurité du prince ! Il est trop familier avec elle ! Il est... différent et elle, c'est une Vulcae. Tu ne vois donc pas le danger ?

— Si Eklesia mais tant que Bastus est heureux, je veux qu'il en profite. Et puis, tous les Vulcae ne sont pas des rebelles, nombreux sont ceux fidèles à la Suprême Polémarque. Merci de veiller sur lui comme tu le fais.

Eklesia souffle, ses épaules s'abaissant au passage. Elle se met trop de pression mais depuis qu'elle est arrivée à Volos, un sentiment de péril lui colle à la peau. Est-elle devenue paranoïaque ?

— Tu ne serais pas tombée amoureuse ? demande Teïos.

Il la regarde avec sérieux cette fois. Elle lève la tête vers lui mais ne peut soutenir son regard.

— Non ! affirme-t-elle avec autorité. C'est mon prince, je me dois de le protéger. Il m'a fait confiance comme personne avant lui ! Je...

Sa voix se brise. Teïos la prend avec douceur dans ses bras. Elle frémit, le corps tendu, et le repousse en s'exclamant :

— Les hommes, vous n'y comprenez vraiment rien ! On part dans une heure.

Et elle disparaît au détour d'un couloir laissant Teïos perplexe.