Chapitre 23 : Josh et le dragon

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Le sol était vraiment étrange. Visuellement, il semblait composé de nuages, et physiquement, lorsqu’ils marchaient, il était très mou, comme s’ils avançaient sur un épais tapis de coton. Cependant, le plus surprenant n’était pas là : à chacun de leurs pas, le sol s’illuminait de couleurs différentes et de petites étincelles jaillissaient sous leurs pattes.
Au niveau sonore, des sifflements d’oiseaux formaient une symphonie digne des plus grands compositeurs de musique classique.

- J’ai beau savoir que ce monde est fabriqué de toutes pièces, je reste toujours aussi surpris, marmonna Josh.
- J’avoue que cet environnement est très étrange, renchérit Traqueur.
- Vous pensez que le sol se mange ? demanda Rêveur. Je commence à avoir faim et je n’ai pas vu de gibier. Même les oiseaux, on les entend depuis tout à l’heure, mais impossible de les voir.
- Pense à autre chose qu’à ton ventre, grogna Ombre. On a des choses plus urgentes à penser. J’ai l’impression qu’on file droit dans un piège. Soyons prudents.

Les compagnons continuèrent leur avancée quand Josh et Traqueur se mirent à humer l’air avec insistance. Ils se regardèrent et se confirmèrent d’un simple signe qu’ils avaient perçu la même chose.

- J’ai trois informations pour vous, commença Josh. D’abord, la mauvaise nouvelle : je sens une ville humaine droit devant. Ensuite, une autre ville sur la droite, habitée par des créatures diverses. Au vu des odeurs, j’ai pu identifier au minimum gobelins, orcs et nymphes.
- Il y a également des elfes, des fées et, plus surprenant encore, un dragon, compléta Traqueur.
- Je ne les avais pas sentis, ceux-là, mais rien d’étonnant : je n’en ai jamais croisé. Bref, ce qui est étrange, c’est que les deux villes semblent reliées par une route commerciale menant à un village où vivent à la fois des humains et des créatures, mais en nombre bien moindre. Enfin, sur la gauche, je perçois une petite meute d’une dizaine de loups… sauf qu’ils ont une odeur particulière. Un peu comme celle des loups de feu, mais différente.

- Conclusion : on va à gauche, trancha Vent-Furieux. Je n’ai aucune envie de croiser des humains et encore moins un dragon.

Tous les loups approuvèrent. Ils se dirigèrent donc vers l’odeur de leurs prétendus congénères. Après un bon moment de marche, Josh fronça les sourcils :
- C’est étrange… Les “loups” que je sentais devraient être ici. Pourtant, il n’y a rien.
- En effet, répondit Traqueur, et pourtant, rien ne peut tromper ma truffe.

Pris d’un doute, Vent-Furieux lança une bourrasque de vent sur le sol. La surprise fut totale : un trou se forma, révélant un autre décor à plusieurs centaines de mètres en contrebas.

- Waouh !! C’est quoi ça ?! s’écria Rêveur. On était sur du sol, on a marché tout droit et voilà qu’on se retrouve sur des nuages qui flottent au-dessus d’une autre zone ? Mais c’est quoi ce délire ?! Et pourquoi on ne tombe pas ?!
- Je l’ignore, mais maintenant que les nuages se sont dissipés, je sens nettement mieux l’odeur des loups… et même celle d’autres créatures, fit remarquer Josh. Quoi qu’il en soit, on va éviter d’y descendre, vu qu’on ne sait pas voler.

À peine avait-il fini sa phrase que le trou se referma, bouché par la masse cotonneuse. Tout à coup, Josh et Traqueur se figèrent, le regard inquiet, ce qui ne rassura pas le reste de la meute.

- Le dragon a dû nous repérer, murmura Traqueur. Il vole droit vers nous.

Quelques instants plus tard, un grand dragon rouge surgit des nuages et atterrit devant eux.
- Bien le bonjour, jeunes loups, fit-il dans la langue des hommes, tout en fixant surtout Josh. Accepteriez-vous de venir dîner dans ma ville ?

Dans la communication télépathique des loups, Rêveur lâcha :
- Tant que ce n’est pas nous, le dîner…

Josh répondit alors :
- Avec grand plaisir, vénérable… Dragon ?

La créature sourit, du moins autant qu’un dragon peut sourire, en comprenant son hésitation.
- Vous pouvez m’appeler Lod-Da-Grum, répondit-il. Et vous, comment dois-je vous nommer ?

Josh présenta l’ensemble de ses compagnons. Puis, suivant une question de Vent-Furieux transmise par télépathie, il demanda :
- Avant de venir dans votre ville, pourriez-vous nous expliquer pourquoi nous pouvons marcher sur ces nuages, et comment il se fait qu’il y pousse des fleurs et des arbres ?

- Je ne saurais trop vous dire, répondit Lod-Da-Grum. Disons que notre environnement est… particulier. Nous vivons dans une immense cuvette par rapport au reste du monde. Les nuages denses forment une barrière naturelle au-dessus de nous. J’ignore pourquoi elle est si massive, ni pourquoi elle produit de la lumière. Quoi qu’il en soit, seuls un coup de vent violent ou un dragon peuvent la traverser.

À sa demande, les loups montèrent sur son dos. Lod-Da-Grum plongea dans les nuages et les emporta vers sa cité.

Depuis les hauteurs, ils découvrirent une vision irréelle.
Des arches de pierre colossales reliaient les falaises, formant des ponts aériens parcourus par toutes sortes de créatures. Des cascades jaillissaient de la paroi, mais, au lieu de s’écraser plus bas, l’eau se fragmentait en myriades de gouttelettes lumineuses, suspendues comme des étoiles figées.

Les rues principales semblaient taillées dans une roche noire veinée de cristaux brillants. Des nuages condensés formaient des terrasses naturelles, utilisées comme places ou jardins. Des arbres nymphiques déployaient leurs feuillages translucides, teintés d’argent et de bleu, tandis que des fées, semblables à des lucioles vivantes, illuminaient les sentiers.

Au centre, dominant la cité, s’élevait une immense tour creusée à même la roche, dont le sommet s’ouvrait en corne inversée. C’était là que résidait Lod-Da-Grum.

Il atterrit doucement et fit descendre ses invités, avant de se métamorphoser. À présent, il avait l’apparence d’un homme roux, d’une trentaine d’années, robuste et musclé. Ses cornes réduites, semblables à celles de son corps draconique, ainsi que ses yeux flamboyants trahissaient toutefois sa nature.

Devant leur étonnement, il expliqua :
- Une petite magie que j’ai apprise il y a longtemps. Plus pratique pour circuler dans ma tour. Je pourrais vous l’enseigner, un jour. Mais seul Josh a les réserves magiques suffisantes. Et encore… juste de quoi tenir deux ou trois heures par jour.

- Ça pourrait m’intéresser, admit Josh.
- Nous en reparlerons au dîner.

Le dragon les conduisit alors dans une vaste salle, où des serviteurs disposèrent un buffet monumental. Pendant qu’ils mangeaient, Josh transmettait à Lod-Da-Grum les propos de ses compagnons. Le dragon proposa d’enseigner à Josh la métamorphose humaine et à la meute l’art de parler la langue des hommes. Tous acceptèrent avec enthousiasme.

Six mois passèrent ainsi, entre apprentissage et découverte de la ville. Finalement, Josh et les siens reprirent la route, non sans avoir remercié Lod-Da-Grum. Ce dernier les porta jusqu’à la sortie sud de la cuvette.

Ce qui surprit Josh, c’est que, pour la première fois depuis longtemps, tout semblait… normal. Le ciel était bleu, les arbres verts et bruns, la pelouse bien verte, le sol d’une texture ordinaire. Rien d’extravagant, rien d’étrange. Josh avait presque oublié ce que cela faisait d’évoluer dans un environnement traditionnel.

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