Les retrouvailles : Suite III.

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Elisabeth.

Une fois dans la cuisine, je pris de la soupe à l’oignon faite le jour même et la mis à réchauffer. Thaddée me passa ensuite un plateau sur lequel je disposai bol et couverts, ainsi qu’un morceau de pain. Puis je songeai à aller lui demander s’il souhaitait accompagner ce repas - quelque peu frugal - d’une boisson un peu plus forte. Un coup d’œil dans le salon me révéla qu’à présent c’était à son tour de se perdre dans ses pensées, et qu’il commençait à dodeliner de la tête. Je gardai alors le silence, et me rendis discrètement à l’étage en quête d’une couverture, attrapant au passage un châle dont je me couvris les épaules. Le reste du manoir avait tendance à être plus frais, sans parler des courants d’air…
 À mon retour dans le salon, mon ami avait cessé de lutter contre le sommeil et gisait désormais sur le sol. Heureusement qu’il y avait un tapis ! Je le couvris avec la couverture, attrapai un coussin, et le lui glissai doucement sous la tête. « Dors mon petit, tu es en sécurité ici, dis-je d’un murmure. »
 Je retournai ensuite m’asseoir dans mon fauteuil, mais à présent ce n’était plus la neige qui me captivait. J’observais le visage de celui que je n’avais pas vu depuis ce qui me paraissait être une éternité. Et j’étais curieuse. Je ne pouvais que deviner la rudesse de son périple en voyant son corps torturé par le froid, la douleur croisée dans son regard à son arrivée et, un sentiment… de peur. Mais en cet instant, il n’y avait plus que la quiétude qui pouvait se lire sur son visage. Il était venu jusqu’ici et avait abaissé toute défense là où d’autres n’auraient même pas osé entreprendre le voyage. La lueur du feu dansait sur ses paupières closes, accentuant la sérénité de son visage. Je savais à présent qu’il était la lumière traquée par la masse sombre que j’avais entrevue, même si je ne savais pour le moment rien de ce supposé ennemi. Cette épreuve l’avait mené jusqu’à moi, si loin de tout, et cela signifiait déjà beaucoup.

 - Que fuis-tu ? chuchotai-je pour moi-même.
 - Une ombre se rapproche, me chuchota Thaddée.
 - Tu n’as pas à chuchoter tu sais, lui répondis-je. Je doute fortement qu’il puisse t’entendre. Je l’ai sentie moi aussi, mais nous avons un peu de temps. Il doit d’abord se reposer.

 Il haussa les épaules en souriant. Thaddée était presque aussi vieux que le manoir. En fait, c’est son père qui l’avait fait construire, et il y était né, y avait grandit, et en avait hérité à la mort de ses parents. Et un jour il y est mort lui aussi, mais pour une raison étrange, il n’était pas complètement passé de l’autre côté du voile.
 Le plancher craqua dans le couloir et il me sembla voir l’ombre d’une silhouette y passer pour monter les escaliers. Mon colocataire n’étant plus à mes côté, ce devait être lui. Il se faisait tard, et je commençais moi aussi à ressentir le besoin de dormir, mais une part de moi s’agitait. Je devais m’élever pour en découvrir plus sur cette ombre qui approchait. M’installant plus confortablement dans le fauteuil, je portai un dernier regard à l’homme endormi, et fermai les yeux à mon tour. Mon esprit commenca alors à s'élever jusqu'au plafond puis, traversant les étages, au-dessus du manoir, de plus en plus haut. Je pus alors distinguer une masse sombre, informe, comme une vague déferlant à grande vitesse vers le manoir, détruisant tout sur son passage. Au loin, une voix commença à m'appeler.

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