Chapitre 40

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Son retour à bord fut ponctué d’un accueil chaleureux de la part de l’équipage. Ils avaient survécu, bien que certains soient grièvement blessés et alités. Les canonniers étaient ceux qui avait subi le plus de dégâts, les gabiers s’en étaient sortis avec quelques blessures légères dues à leur entré dans l’eau. Asan n’était pas présent sur le pont, Syllas lui expliqua l’étendue de ses lésions.

Il avait retrouvé Meribi, une main invalide, mais toujours joyeux. Il lui avait donné la responsabilité de veiller sur San tandis qu’il était emmené par le capitaine. Trainer à travers les corridors, ils arrivèrent dans une cabine spacieuse. La porte claqua dans leurs dos et il se retrouva coller contre le torse du phénix.

Arawn l’enveloppa de ses grands bras, comme s’il était la chose la plus précieuse de l’univers. Son corps exténué se détendit, il se sentait apaisé par sa présence. Quelques larmes perlèrent aux coins de ses yeux, mélange de fatigue et de joie intense. Il était de nouveau en sécurité avec l’équipage du Phoenix au complet.

— J’étais si inquiet… souffla le marin en caressant le dos de son protégé.

— J’ai cru que vous étiez mort…

Earl se recula pour poser ses mains sur l’abdomen du capitaine, à l’endroit exact de la balle.

— Comment avez-vous survécu à l’explosion ? J’ai entendu le coup de feu, j’ai vu la mare de sang ! Vous ne pouviez plus bouger, alors comment avez-vous fait pour vous échapper ?!

— Calme-toi.

Son vis-à-vis posa ses mains sur les épaules du garçon pour calmer son affolement.

— Earl, calme-toi, et écoute-moi. Je veux d’abord savoir si tu es blessé, ensuite je t’expliquerais.

— Je n’ai rien.

Le pirate n’était pas de cet avis. Il passa sa main sur le cou de son protégé, caressant la marque violacée qu’avait laissée le passage de la corde.

— Ce n’est rien de grave, ça partira avec le temps.

Le phénix le tira vers le lit pour s’y asseoir puis tendit sa main vers le jeune homme.

— Je vais tout t’expliquer.

La pièce fut plongée dans un calme rassurant. Alors que le soleil se couchait doucement, quelques lanternes étaient allumées dans la pièce. Il y eut un long moment de silence, sans que l’un d’eux ne parle.

— Lorsque… Mannles à tirer, j’ai cru que c’était toi qu’il visait, commença le capitaine. La douleur que j’ai ressentie dans la poitrine était indescriptible. Je n’ai compris que trop tard ce qu’il cherchait à faire.

— C’est-à-dire ?

— Il m’a mis à terre pour m’empêcher d’agir. Ainsi blessé, je ne pouvais rien tenter pour l’arrêter et te sauver. Lorsque le Neptune fut assez éloigné, Syllas et Ferum m’ont porté jusqu’au bastingage et nous avons sauté à l’eau. C’est comme ça que nous avons échappé à l’explosion.

— En vous éloignant à la nage… Mais comment avez-vous fait pour… Et bien, pour vous retrouver ici, et venir à Nelak ?

— L’attaque n’est pas passée inaperçue et une vieille connaissance qui faisait voile non loin est venue à notre rencontre.

— Un cardinal ou des pirates ?

— Un pirate de renommée. Son rôle est aussi important que ceux des cardinaux.

Earl pencha la tête sur le côté, pensif. Arawn le ramena doucement à la réalité en caressant sa joue.

— À quoi penses-tu ?

— J’étais si surpris de vous voir à Nelak…

— Nous avons eu beaucoup de chance d’arriver à temps. Opal m’avait interdit de prendre part à l’attaque et t’attendre à bord fut une véritable torture.

Le capitaine se rappela de l’angoisse qui n’avait pas voulu quitter son corps durant leur voyage jusqu’à Nelak, la crainte d’arriver trop tard et de récupérer un corps inerte. Il ne voulait pas revivre la même chose une seconde fois. Il avait laissé périr Sibel, mais s’était promis de protéger son fils.

— Où allons-nous maintenant ? Puisque le Phoenix n’est plus…

— Nous nous dirigeons vers Utlos. J’ai une vengeance à accomplir, et je sais où trouver ce chien.

— Sur ce navire ?

— Oui. Le capitaine est une vieille amie et souhaite prendre part à ce combat. Disons qu’elle a aussi des comptes à régler avec lui.

— Ce n’est pas un homme d’honneur…

— Tu l’apprendras avec le temps : peu d’entre nous sont des hommes d’honneur.




Le ciel était teinté d’un magnifique mélange de rose et d’oranges, la mer était calme et le vent gonflait doucement les voiles. Il se baladait en solitaire sur le pont de ce nouveau bâtiment — un galion à la coque claire et à la voilure coloré d’un bleu découpé de ligne blanche. L’emblème de cet équipage flottait en haut du grand mât et représentait deux fémurs surmontés d’un crâne de félin sur un fond noir.

Il avait croisé quelques membres de l’oiseau écarlate et de ce navire, mais resta curieux vis-à-vis de leur capitaine. Ce fut au détour de la dunette qu’il la croisa en compagnie d’Arawn, tous deux discutaient. Le jeune homme l’examina un instant, surpris par son accoutrement et de la compagnie qu’elle avait. Un long manteau descendait jusqu’à ses genoux, recouvrant ses deux sabres. Les deux ceintures qui se croisaient sur sa poitrine comportaient au total quatre pistolets, accentuant sa prestance. Un tricorne ornait sa tête, muni de plusieurs types de plumes — de paon, de faisan ou de buse. Mais le plus surprenant fut le félin qui se tenait assis sur l’une de ses épaules. Son pelage sombrement tigré et ses yeux émeraude le rendaient basique, mais il devait bien avouer que c’était la première fois qu’il voyait un matou à bord d’un navire, et sur l’épaule d’un capitaine.

— Earl, l’appela Arawn.

Le concerné monta les marches et se posta à côté d’eux.

— Je te présente Opal Lee, la capitaine du Kingstone.

— Alors c’est lui, le Mannred que tu as sauvé à mainte reprise. Tu es complètement fou… soupira la femme. Enfin, ça ne devrait même plus m’étonner venant de toi.

Elle examinant le garçon de la tête au pied et sourit.

— Je reconnais là quelques traits de Sibel. Il n’y a aucun doute, c’est pour ça que ce mec t’a protégé.

— Opal !

— Tu ne peux pas me mentir Arawn, ce gamin lui ressemble en tout point, seul le sexe change.

Largué. Earl était largué en l’espace de trois phrases.

— Fais gaffe petit, ce type avait en penchant pour ta mère, et ça ne m’étonnerais pas que ça devienne le cas pour toi.

— C’est bon, ça suffit.

Le phénix intervint en s’interposant entre eux, fusillant du regard son amie tandis que cette dernière éclata de rire face au visage rouge du plus jeune.

— Et si ont revenait à notre discussion initiale ?

— Nous serons à Utlos dans trois jours. Tu as donc tout ton temps pour finir de soigner cette vilaine blessure et de préparer ta vengeance.

Les capitaines restèrent silencieux un bref instant, se fixant comme pour juger qui des deux avait le plus à venger.

— Et après ?

Ils tournèrent leurs têtes vers le Mannred.

— Et après… quoi ? demanda Opal.

— Qu’est-ce qu’on fera après s’être vengé ?

— Nous irons à Basal. Comme convenu au départ.

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