Chapitre 2
Sentiment de tournoyer dans l'espace temps. Lumière chaude qui enveloppe, comme une couverture. Vent qui m'attrape et m'emporte.
Je perds pied.
Mon lit a disparu, et je flotte quelque part à mille lieux de là où j'étais. Pourquoi ? Je l'ignore.
Je suis monté très haut, maintenant, je chute. Le vent hurle à mes oreilles. Je crie. Il fait froid, l'air est lourd et humide. Je redoute l'impact. J’ai des millions de petits papillons dans le ventre. Je me répète que c'est juste un cauchemar, tel un merveilleux mantra.
Mes poumons se vident soudainement.
Puis plus rien.
Je crois que j'ai perdu connaissance pendant l'impacte. À moins, que je sois revenue à la réalité…
Les yeux clos, je tente déséspérément de rependre ma respiration. Mon corps tremble de partour, et mon cœur tambourine à cent à l'heure contre ma poitrine. Je halète pour reprendre ma respiration. J'ai la chair de poule.
Un cauchemar, c'était juste un cauchemar. Une brise de vent froids, souffle dans mes cheveux.
_Pourquoi il fait aussi froid, ici ? je murmure en me levant.
Sous mes pieds, le sol est humide et doux. Je me penche et l'effleure. Cela ressemble à… De l'herbe ?
C'est bien ça. Je glousse, malgré la boule qui serre ma gorge. Le faîte d'imaginer des gens faire un tapis d'herbe sur le sol, en plein milieu de la nuit. Est certes drôle, mais aussi très invraisemblable.
Mon cerveau est en surchauffe. Il imagine tous les scénarios possibles : C’est un cauchemar, une blague, ou alors je me suis fait enlever… Avant de toutes les éliminer : Si c'est une blague, où est-ce qu'il m'aurait mis ? Et puis je ne suis pas attachée donc on ne m'a pas enlevé…
J'ai déjà mal à la tête.
Je me mets en marche, pour me réchauffer. Je garde un bras tendu pour prévoir les obstacles, mais le terrain a l'air plat. Où est-ce que je suis, punaise ! J'ai envie de croire à un cauchemar. Mais tout est tellement réaliste. Et puis… Dans mes cauchemars, je ne suis pas aveugle.
Là, oui.
Mes pieds nus sont gelés, à force de marcher. J'ai mal et je ne cesse de bâiller. Pourtant je ne m'arrête pas. Mon instinct me dit de courir le plus vite possible. Mais la peur de tomber m'en empêche.
À peu près une heure après que je me suis mis en marche, un rugissement retenti derrière moi. Mon cœur s’emballe. Je me mets à courir, malgré la crainte de rencontrer un arbre.
Cette prairie semble sans fin.
Les rayons du soleil réchauffe ma peau. Les jambes tremblante, je finis par m'assoir, et j'enfuis mon visage dans mes mains
Mon pantalon de pyjama est mouillé, à cause du sol, il me colle à la peau. J'ai mes pensées qui défilent, et pourtant je me sens comme arrêter. Mon cœur bat vite. Je ne sais pas contre qui il fait la course. Peut-être ma respiration ? Mes joues sont humides, mais la rosée n'y est pour rien.
C'est trop pour moi, en si peu de temps
Si ça se trouve je rêve encore. Pourtant tous semblent si réalistes. Mon cœur se serre, pendant que je me relève. Mes doigts de pied doivent être bleus de froid. Quelle idée de dormir sans chaussettes aussi !
Je marche comme un métronome, au rythme du chant des oiseaux. Un bourdonnement c'est installée dans mes oreilles. Je ne cesse de frissonner, et mes jambes sont de plus en plus lourdes.
Combien de pas ai-je fait ? Et surtout : où suis-je ?
J'ouvre la bouche. J'ai des fourmis dans les bras, et mon pyjama est humide. Je suis allongée sur une espèce de couverture, chaude et moelleuse. Je n'ai pas envie de bouger, et je n'en ait pas la force. J'entend un bruit près de moi. Des pas.
Il y a quelqu’un.
Depuis combien de temps suis-je là ? La dernière chose dont je me souviens c'est de tomber. Me serais-je évanouie ?
Je me décale, et mon pied touche le sol froid, qui contraste beaucoup avec la chaleur que je ressent.
De l'herbe.
Je suis toujours dans ce fichu rêve !
_Tu es réveillée ? s’exclame une voix calme et douce.
Je me retourne en tremblant.
_Oui, répondis-je d'une voix éraillée. Où sommes-nous ?
_Sur le bord de la Prairie sans fin. Près de la forêt qui la borde. Je t'ai trouvée évanouie en plein milieu de nulle part, sur mon chemin. Alors je t'ai récupéré et on a avancé vers le nord. Rassure-moi tu n'allais pas vers Siripus ?
_Quoi ?
Mon cerveau est à deux doigts d'exploser. La prairie sans fin ? Une forêt ? Siripus ? Mais où ai-je atterri ! Et qui est cet individu ?
_OK... On va y aller doucement alors, reprit-il un peu amusé. Tu te souviens de ton nom ?
_Ina, je m'appelle Ina.
_Super ! Moi c'est Soa. Tu te souviens de ce que tu faisais ici ?
Je secoue la tête et balbutie même si je suis consciente d'être ridicule.
_Je dormais tranquillement dans mon lit… Et là quand je me suis réveillée… POUF ! J'étais en plein milieu de nulle part. Alors j'ai marché. Et puis à un moment j'ai entendu un rugissement.
_Ça devait être un chat roux…
_Un quoi ? m’exclamais-je surprise.
_Non, t'inquiète continue…
_Alors je me suis mise à courir. Un peu après, j'ai fait une pause. Mais le sol était mouillé. Alors je me suis remise à marcher. Je crois que c'est à ce moment que le soleil c'est levé. Après... Je me suis évanouie.
_Euh ? Et donc avant t'était où ? Sur la planète Deria ?
Je lève un sourcil. La planète Deria ? Mais de quoi il parle ? Puis avec une moue désabusée je réplique.
_Sur Terre. J'étais sur Terre ! Sur quelle planète voulais-tu que je sois ?
_Ben… Sur Livnea !
J'ouvre la bouche et la referme de suite : C'est pas possible ! Il n’était pas sérieux quand même ? Je secoue la tête.
_Alors, d'abord tu vas m'expliquer ce qu'est Livnea ? Et profites-en pour arrêter de te moquer de moi...
_Question blague pas drôle, tu as l'air de t'y connaître plus que moi : Livnea c'est Livnea, quoi ! La planète sur laquelle on vit… Dans notre système solaire… Tu es sûr que ça va ?
Je serre les dents. J'ai l'impression qu'il se fiche de moi. Mais en même temps il a l'air si sérieux... J'aimerais tellement pouvoir voir de nouveau. Pour saisir juste un tout petit indice. Un tout petit peu le paysage.
Soudain j'ai un énorme doute. Et si ? Mes mains sont saisi de tremblement incontrolable, alors je les plaque contre ma jambe. La boule dans ma gorge, ne cesse de grandir.
Et puis soudain je craque. D'énormes larmes dévalent sur mes joues. Je ramène mes genoux contre mon front. J'en ai marre.
Marre d'être forte, d'aller de l'avant, d'être positive, de prendre sur moi… Même si, je sais que pleurer ne va pas m'aider, ça fait un bien fou.
_Non... Attends ! Pleure pas, balbutie Soa.
Je le sens s'asseoir près de moi. Il ne dit rien. Et c'est peut-être mieux comme ça. Je sanglote sans pouvoir m’arrêter. Je dois être ridicule, à voir.
Tant pis.
Cinq bonnes minutes plus tard, c’est fini. J'ai épuisé mon stock de larmes. Mais, je ne sais pas si je me sens mieux qu’avant. Je n’ai plus aucune force.
Je relève la tête et essuies mes larmes du revers de ma manche de pyjamas.
_Désolée, je chuchote.
_Ça va mieux ? me demande-t-il.
Il ne semble pas juger. Alors j'acquiesce, et je me détends. Pourtant est ce que je me sens vraiment mieux ? J'ai un énorme doute.
Je ferme les yeux et grimace. Alors, c'est vrai. Je me suis téléportée dans un autre monde. Pendant que cette affirmation s'impose à mon esprit, je reste immobile. Tout ce que j'ai appris est en train de se détruire. Soa a réussi à me convaincre : La magie existe.
Il vient en effet de faire apparaître une flamme devant moi. Je sens encore la chaleur du feu, près de ma main. Le crépitement ne trompait pas !
_Je suis un manieur de feu, je contrôle le feu, finit-il par me dire quelques minutes plus tard.
J'ouvre la bouche et la referme.
_Logique, un manieur de feu ne va contrôler l'air, ironisé-je.
J'essaye d'être drôle pour faire face à mon désarroi.
_Pas faux, avoue Soa. Il existe aussi d'autre manieur : ceux qui contrôlent la terre, l'eau, l'air, la glace, les plantes… Et, je crois que c'est tout… Ah oui, il y a aussi les manieurs de mots. Mais ça, c’est autre chose, expliqua-t-il en continuant de préparer à manger.
_Comment ça ?
Un long moment passe avant qu'il ne réponde. Seul le bruit régulier de son couteau sur les aliments résonne dans l'air.
_Il n'y en a eu que trois dans l'histoire. Ce pouvoir c'est élever au rang de légende. Sachant qu'en plus il est apparemment très puissant.
Je hoche la tête, et il reprend.
_Après il y a aussi les magiciens, les voyants et les guérisseurs... Mais ça c'est autre chose. Tu aimes les nars ?
_Les quoi ? dis-je surprise.
_Les nars. Il n’y en a pas sur… Comment tu l'appelles déjà ? La Terre ?
Je secoue la tête.
On s'installe pour manger. Je fais attention, je n'ai pas encore l'habitude de manger comme ça. Sans regarder, je suis maladroite.
La soupe est délicieuse. C'est une explosion de million de goûts différents. Je n’ai encore jamais goûté une telle chose.
_Tu cuisines super bien ! m’exclamais-je.
_Merci, réponds-il seulement.
Les hésitations flottent maintenant entre nous. Le soleil tape déjà très fort. Un long filet de sueur dégouline le long de mon cou. Mes mains sont moites, et mon pyjama colle à mes jambes.
Soa rompt en premier le silence.
_Il…, commença-t-il avant d'hésiter. Ils n'ont pas pu soigner tes yeux, chez toi ?
Je grogne. J'ouvre la bouche et la referme. Je n'ai pas envie d'en parler. C’est bien trop récent. Pourtant les mots finissent pas glisser hors de ma bouche. Il coule. Et à chaque mot que je place, je sens mon cœur se délester d'un poids qui m’était inconnue.
Je lui raconte tout ce qui c'est passé il y a une semaine. L'accident, mon père, l’hôpital. Bien sur, avant il faut lui expliquer ce qu'est une voiture... Mais ce n'est qu'un détail.
Je ne sais pas pourquoi je lui dis tout ça, je ne le connais que depuis une heure. Mais, je me sens en confiance.
Quand j'ai fini le silence s'éternise.
_Je suis désolée pour toi. Ça ne doit vraiment pas être facile c'est dernier temps.
J'hoche la tête.
_Et toi ?
La question est vague, mais c'est pas grave.
_Je peux te parler de moi. Même si ma vie n'est pas très intéressante comparée à la tienne. Elle te permettra de connaître à peu près là où tu as atterri. Je vais à un village qui se nomme Vayn et qui se trouve à une journée et demie d'ici. Je te propose de venir avec moi, et qu'on partent maintenant. On parlera sur le chemin. Après il fera trop chaud et on cuira littéralement sur place.
_D'accord, ça me va.
Je me relève et l'aide comme je peux, à ranger le campement de fortune, qu'il avait installé. Puis on se met en route.
Je marche à coter de Soa et de son cheval, qui porte des sacs. Je tiens sa bride, le terrain est plat et Soa m’a assurée que pour l'instant nous allons en ligne droite. Alors je suis réussi à me détendre un peu. J'avance tout de même avec hésitation. Les bruits de sabots, rythme notre marche.
Soa finit par commencer à parler.
_J'ai grandis dans une ville près de la campagne plus au nord. Comme tu le sais, je suis un manieur de feu. La plupart du temps, notre magie se déclenche vers dix, onze ans. Après on l'entraîne. Et quand arrive le moment de notre orientation. Eh bien... on choisit.
_Quel rapport ? demandé-je.
_Beaucoup choisissent leur futur métier à partir de leur magie. La magie que tu as, correspond souvent à tes capacités et à ton caractère. Alors pour être le plus utile à la communauté. On s'oriente souvent vers là où notre magie nous sera le plus utile. Par exemple… Tu te doutes bien, que quelqu’un qui a reçu un pouvoir de guérisseur, ne va pas travailler dans un champ ! Ce serait du gâchis.
_Et toi ?
_Je suis marchand caravanier. Pour résumer mon métier. Je voyage seul, ou en groupe avec des marchandises de ville en ville. J'ai toujours aimé voyager, cuisiner, chasser et camper à la belle étoile ! Et le feu m'aide beaucoup en excursion.
_Mais quel âge as-tu ? Si ce n'est pas indiscret, bien sûr.
_Seize ans.
Je hausse les deux sourcils, on est pas si différend que ça. Il a un an de plus que moi.
La conversation continue. On parle de nous, de nos parents, de notre vie, et de nos mondes respectif. Soa est drôle et calme. Eh puis, quand il parle, il m'embarque tout de suite dans ce qu'il dit. Il a un réel don de conteur.
On marche et de temps en temps, il me guide pour que je ne tombe pas. Il me décrit les paysages et m'explique la géographie de Livnea. C'est compliqué de tous comprendre, car je n'arrive pas à me représenter la carte dans ma tête. Mais j'apprends tout de même des choses.
Sur Livnea, ils ont trois continents. Astrar, Oyst et Wey. J'ai atterri dans le sud d'Astrar.
On finit par se poser, la chaleur du soleil décline sur ma peau. Soa me montre comment préparer un camps. À l'aveugle ce n'est pas facile, mais je trouve ça drôle. On s'assoit et il commence à préparer le dîner. Tandis que j'en profite pour étendre mes membres endolories. On a marché toute la journée dans la prairie. Je suis lessivée.
Soudain, mon compagnon de route reprend la discussion là où on l'a arrêté. Il m'explique :
_Très peu des habitants d'Astrar sont déjà partis dans les terres de Wey et d'Oyst. Surtout dans les terres de Wey, précisa-t-il en riant, leur empereur sont en froids depuis des années avec les souverains d'Astrar !
Je tique.
_Vous êtes toujours en monarchie ?
_En quoi ? m'interroge Soa.
_En monarchie… Vous êtes toujours dirigée par des rois ?
_Ben oui ! Tu voulais qu'on soit dirigée par quoi ? Un mouton ?
Je glousse.
_Non mais par un président, une constitution, une république, quoi...
_Oula, je n'ai rien compris, vas falloir que tu m'expliques tous ça, dit-il en riant.
Je souris, contente de pouvoir lui apprendre quelque chose. Puis lui explique le principe d'un président, d'une république et de tout le bazar. Il écoute concentré. Il m'avoue ensuite n'avoir jamais entendu parler de ce genre de régime politique.
On mange et on va se coucher. Demain, pour ne pas subir la chaleur de plein fouet, on devra partir tôt.
Je ferme les yeux et m'allonge sur la couverture qu'il m'a prêtée. À peine un ans plutôt, j'aurais sauté de joie à l'idée de dormir dehors. Aujourd’hui c'est différent, car je ne peux plus voir les étoiles
Mais bon tant pis.
Tant que les moustiques ne viennent pas se rajouter dans cette histoire. Je promets de ne pas me plaindre de rater les étoiles filantes.
Promis juré.
À peine deux minutes plus tard, comme pour me contredire, un moustique se pose sur mon nez. D'un grand geste de la main, je le chasse. Mais, il se reposer sur mon bras.
La nuit s'annonce longue.
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