7.    Saida

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Depuis quelques jours, Papi me parle de la guerre de sécession. Cela a commencé avec une question.

- Dis-moi Michael, que sais-tu au juste sur la guerre de sécession ?

- Tu sais, je ne suis pas allé à l’école bien longtemps, ma mère me faisait lire des livres, La Case de l’oncle Tom et des livres d’histoire, où il était question des États du Sud, hostiles au gouvernement fédéral et opposés au projet d’abolition de l’esclavage soutenu par le président républicain Lincoln. Quinze États décident de faire sécession de l’Union ce qui entraîna une guerre entre les États-Unis et les États Confédérés.

C’est bien, mais ce résumé est un peu sommaire, tu ne trouves pas.

- Si bien sûr, c’est du passé.

Et du passé, il faut tirer des leçons, Michael. C’est grâce à ces leçons qu’on évite de refaire les mêmes erreurs.

- Il y a quelqu’un ?

John Stanford est entré dans la pièce.

Papi leva les yeux vers son fils avec un sourire amusé.

- Tu arrives toujours au bon moment, John.

- Bonjour, vous allez bien, il y a un cheval qui rôdait devant l’entrée, nous lui avons passé un licol et nous l’avons mis dans l’enclos, il regardait vers ici, comme s’il voulait entrée.

- Comment est-il ce cheval ?

- Je devrai dire cette jument, sa robe est isabelle, elle présente des poils de couleur jaune sable. La crinière est noire tout comme l’extrémité des membres. La peau est noire et les yeux sont foncés. Je dirais une Appaloosa. C’est une belle…

Je me lève d'un bon et je cours jusqu’à la porte, mon souffle s’accélère et mes mains tremblent légèrement alors que je franchis la porte en courant.

- Saida, Saida.

Le soleil se couche lentement, baignant la prairie d'une douce lumière dorée. Le cœur battant, j’avance prudemment, là, dans l’enclos, Saida se tient fièrement, ses yeux noir brillant fixés sur moi comme si elle m’attendait. Sa robe isabelle semble scintiller sous la lumière dorée.

Cela faisait plus d’un mois que je n’avais pas vu Saida, ma jument bien-aimée.

Lorsque j’atteins enfin l'enclos. Je siffle doucement, un son familier qui résonne dans l'air calme de l’après-midi. Saida redresse aussitôt la tête, ses oreilles se dressent à l'écoute. Elle reconnait immédiatement ce sifflement et, sans hésiter, elle trotte vers moi.

J’ouvre les bras, les larmes aux yeux, alors que Saida s'approche. Elle pose doucement sa tête contre mon épaule, comme pour me dire combien je lui avais manqué, autant qu'elle m’avait manqué. J’enfouis mon visage dans sa crinière soyeuse, sentant la chaleur réconfortante de son corps.

- Tu m'as tellement manqué, Saida. Sa voix tremblante d'émotion.

Saida hennit doucement en réponse, comme pour lui dire qu'elle ressent la même chose.

Ils restent ainsi, unis dans un moment de tendresse et de retrouvailles, savourant la joie de se retrouver après une longue séparation.

Papi et M. Stanford sont venus me rejoindre, Papi m’a interpellé

- Saida, c’est ta jument.

- Oui, enfin celle que je montais au ranch Enroll.

- Va faire un tour avec Saida, car demain, il faudra la ramener.

- Je n’ai pas d’équipement.

- Je crois que tu n’en as pas besoin.

- Je peux la monter à cru.

- Il n’y a rien de plus enivrant.

- Ok, j’y vais.

Le lendemain, j’accompagne Saida pour l’aider à monter dans le van, c’est la première fois que j’en vois un, tiré en plus par une camionnette. Elle ne fait pas de difficulté pour monter. M. John Stanford conduit, mais quand elle a compris que je ne suis pas du voyage, elle s’est mise à hennir et à taper du pied. Heureusement, les vans pour chevaux sont conçus pour assurer le confort et la sécurité des animaux pendant le transport. Mon cœur se serre en entendant son hennissement plaintif. Elle semble me supplier de venir avec elle, et je me sens impuissant face à sa détresse.

- Elle sait que tu tiens à elle.

Dit Papi doucement en posant une main sur mon épaule.

Je me tapis contre Papi le cœur gros. Je n’ai plus aucune envie, si ce n’est me réfugier dans mon monde secret. Nous rentrons. Je m’allonge.

Une fois sur mon lit, le poids de la séparation me submerge. Mon refuge secret, ce monde que je n’avais pas revisité depuis si longtemps, devenait une échappatoire essentielle.

La chanson de maman me tient compagnie :

Tu es partie sans me dire pourquoi

Tu as laissé un vide dans mon cœur

Je ne sais pas quand tu reviendras

Tu me manques tellement, ma douceur

Tu es parti dans ton monde à toi

Tu as laissé un silence dans ma voix

Je ne sais pas comment te rejoindre

Tu me manques tellement, mon étoile

Je me souviens de nos moments tendres

De tes sourires, de tes gestes, de tes mots

De l'amour qui nous unissait sans fin

De la vie qui s’offrait à nous en cadeau

Je t'attends, je t'attends, je t'attends

Chaque jour, chaque nuit, chaque instant

Je t'attends, je t'attends, je t'attends

Reviens-moi, reviens-moi, reviens-moi...

Je m’endors…

Papi m’interpelle.

- Michael, Michael. Saida est là, Saida est là… S’exclame-t-il, sa voix tremblante d’excitation.

Je refais surface, que se passe-t-il, j’avais bien compris.

- Qui est là ?

- Elle est de retour, vient.

Je me lève précipitamment, effectivement le van est là dans la cour, j’aperçois la tête de Saida à travers la petite ouverture, Saida me fixe, sa tête inclinée comme si elle cherche à comprendre. Sa robe isabelle luit, et ses yeux noirs semblent briller d’une reconnaissance familière.

Une fois Saida installée dans un box, je vais voir M. John Stanford pour comprendre, me promettant de revenir plus tard.

- Oui, entre Michael.

- M. Stanford, je

- Plus de Monsieur maintenant appelle moi John. Dit-il avec un sourire sincère, signe d’un respect nouvellement acquis.

Assieds-toi, je vais tout t’expliquer.

Quand, je suis arrivé, le ranch Mac Enroll, normalement si animé, il semble étrangement calme. Les chevaux broutent tranquillement dans les pâturages, et les quelques ouvriers présents travaillent en silence, comme si une tension invisible flotte dans l’air. Il n’y a pas l’effervescence à laquelle je m’attends. Un employé m’a demandé d’attendre, que Jack n’est pas là et M. Liam allait venir.

Quand M. Liam entre enfin, il dégage une autorité tranquille. Ses gestes sont mesurés, et son regard scrute chaque détail, comme s’il pesait déjà les intentions de John.

Je me présente, il m’invite à le suivre, nous nous installons dans son immense salon, il prend le temps de nous servir un whisky et de s’asseoir en face de moi.

- Que puis-je faire pour vous ?

- Je vous rapporte Saida

- Oui, mais si je ne me trompe pas, votre haras se trouve à au moins 50 km d’ici et c’est chez vous qu’elle a atterri, je ne comprends pas.

- C’est pourtant simple, Michael travaille chez nous.

- J’aurais dû m’en douter, j’ai tellement de choses à me faire pardonner, une union comme Saida et Michael, c’est magique, ils se comprennent sans un geste, sans rien dire.

- Leurs retrouvailles, ainsi que l’allure de Michael montant à cru, je n’ai jamais rien vu d’aussi…

- MAGIQUE pas vrai.

- Oui tout à fait

- J’ai été fort injuste envers Michael, et je dois reconnaître que je m’en veux, il est arrivé ici et à part Jack tout le monde lui tournait le dos. Il a su se faire aimer.

Enfin, je ne vais pas vous ennuyer avec nos histoires.

En ce qui concerne Saida, c’est maintenant le cheval de Michael et de personne d’autre, pour me faire pardonner, je lui en fais donc cadeau ainsi que l’équipement et dites-lui qu’il sera toujours le bienvenu ici.

- Voilà l’explication, j’ai les papiers, Saida est à toi.

- À moi ? Mon cœur semble s’arrêter un instant, puis un sourire éclatant envahit mon visage. Je n’arrive pas à croire ce que je viens d’entendre.

- À toi, tu as de la chance.

- Il faut que je raconte tout cela à Papi…

Le soleil de l’après-midi baigne le ranch d’une lumière chaude, et un vent doux semble accompagner chacun de mes pas, comme si la nature elle-même célèbre ce moment.

Je fonce vers Papi, les papiers en main, incapable de contenir ma joie. Dès qu’il me voit, ses yeux pétillent, comme s’il savait déjà que quelque chose de merveilleux vient de m’arriver.

Papi est très content pour moi, Saida est une belle jument, nous allons pouvoir entraîner nos chevaux pour la piste sur de plus longues distances m’a-t-il dit.

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