Partie 1 - Descriptio Puellae

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La tête ronde, comme tracée par le compas d’une divinité bien avisée, se tourne, interpellée par le chant d’un oiseau perché à sa fenêtre, faisant tinter les fils d’or qui encadrent son visage pâle. Les arcs de ses sourcils ébène se haussent alors que ses yeux laissent apparaître des pattes de mouches rieuses au coin de leurs joyaux d’émeraudes. La petite bouche s’élargit légèrement en un sourire, demi-cercle aux lèvres pleines et rondes, resplendissant d’un feu doux, laissant apparaître un éclat neigeux, des dents régulières à l’haleine épargnée de toute impureté. Le menton poli, encore plus que ne put l’être le marbre, s’abaisse légèrement alors qu’elle laisse échapper un rire de sa gorge de cristal. La colonne laiteuse qui soutient ce visage béni d’Aphrodite, se penche en avant, comme pour mieux observer l’oiselet qui fait l’objet de l’attention du corps. Les épaules parallèles restent droites alors que le bras lacté entame un mouvement délicat vers l’animal en s’étendant de toute sa longueur que la Nature a su si bien proportionner. La main, que les rayons chaleureux du jour réchauffent et dont ils font ressortir la couleur de lys, tend à l’oisillon un doigt fuselé. En se penchant ainsi, la poitrine, partiellement dissimulée sous un drap bleuté maintenu de la main opposée, laisse entrevoir deux cercles parfaitement formés à la peau adoucie par les vents. Plus bas, les tissus glissent sur la taille svelte et dissimulent les parties inférieures sous un voile de pudeur qui interdit de les évoquer. La jambe fine et albe, dans un mouvement gracieux, échappe à la prison d’étoffes et le pied menu se pose sur le parquet de la chambre.

Le corps échappe ainsi à l’obscurité, s’avance dans la lumière, le regard clair. Bien vite, la nudité est recouverte d’un vêtement apporté par une Tierce. Les lèvres forment un « merci » tandis que la main propose avec délicatesse à la concernée de s’éclipser.

« À vos ordres, madame. »

"Madame" ne se formalise pas du bruit des pas qui s’interrompt une fois la porte fermée, bien que l’oiselet, paniqué par la présence inattendue de la Tierce, ait ainsi décidé de s’envoler. Les émeraudes suivent sa forme sombre dans le bleu du ciel jusqu’à ce qu’il soit trop loin pour le distinguer, et que le soleil levant n’éclipse sa présence. La poitrine se soulève, emplissant les poumons d’un air pur, et le corps s’avance vers les étendues vertes du contrebas.

Le visage, qui fait concurrence à l’aurore, reste quelques instants immobile, à observer les terres qui s’étendent sous son regard, avant de prendre position dans la chaise qui avait été laissée ici à son intention, et de s’emparer avec diligence du métier à broder qui se trouve sur la petite table à ses côtés.

Reprenant le travail laissé en suspens la veille, les doigts s’acharnent à piquer encore et encore le tissu laiteux de l’aiguille de métal laissant sur son passage un fil violacé, suivant sans relâche le tracé de l’écusson que l’annulaire gauche porte comme autour.

En bas, le comté que domine la bâtisse de pierre semble reprendre vie. La longue saison que fut l’hiver vient de s’achever, et avec le levé du soleil se lèvent les animaux des campagnes de la cité. Les habitants sortent de leurs logis pour s’engager dans les travaux manuels. Les rues se remplissent alors que la journée avance. Le marché se met en place, s’emplit, se vide. Les cris des plus jeunes parcourent les artères puis se tarissent avant de reprendre de belle, simplement à ce qui paraît être l’autre bout du monde.

À l’entrée de la ville, les portes sont condamnées par le passage des soldats en armure qui la traversent sans repos. Du centre d’entraînement, ils s’avancent jusqu’au port, un peu plus au loin dans les terres, mais que les yeux émeraudes peuvent distinguer sans aucun effort, alors que les reflets d’or des cheveux qui les encadrent sont accentués par le soleil de midi.

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