17 flori 14
Les années sont passées depuis que je suis devenue une observatrice. Noran m'a placer en Mirina, tous les deux travaillent encore ensemble. Il a vingt-quatre ans, elle trente-six, nous sommes en l’an quatorze. Telius, le père de Noran, reste introuvable, Élise sa femme est très inquiète. Mes parents ont eu un fils, Éric. Ils me pleurent encore par moments.
Moi, comme d’habitude, j’observe le monde depuis les sens de Mirina. Je sais que Noran est amoureux d'elle, je vois les signes. Pouls qui s'accélère, hésitation dans le regard. En ce moment, ils travaillent sur un projet appelé 'firins'. D’après les notes, il s’agit d’insectes génétiquement modifiés qui ont pour base une luciole.
Il y a aussi un dossier sur les 'aquinas'. Une espèce aquatique qui permettrait de supprimer la pollution de l’eau. Un autre projet fascinant est le 'terranus'. Une sorte de ver de terre amélioré qui pourrait facilement fertiliser la planète. Cependant, l’oxygène absent de la surface, les radiations, le manque de soleil rendent tout cela impossible pour le moment.
Je suis pourtant convaincu que Mirina a déjà une idée derrière la tête et un plan concret. Quand Noran et moi on se parle c'est par la pensée, on appelle ça de la télépathie, c'est assez cool.
— Tes pensées sont constructives, Hana. Il me faut les exploiter au mieux pour comprendre Mirina.
Noran sait tout de moi, je ne peux plus avoir de secret pour lui.
— Dis-moi, Mirina, comment comptes-tu faire pour régler l’absence d’oxygène ?
— Très bonne question, Noran, réponse simple : les aquinas.
Mirina est souriante, Noran reste curieux malgré son savoir.
— Ils ne génèrent pas d’oxygène, leurs propriétés sont la régulation de l’eau et la gestion des polluants.
— Tu es plus intelligent que cela, Noran.
Elle a un petit rire moqueur.
— Si l’eau est dépolluée, les espèces qui créent de l’oxygène pourront y vivre.
— C’est la première clé.
— La vie commence par l'océan... Logique.
Elle joue doucement avec ses cheveux argentés. Mirina ne pose jamais de question sans avoir la réponse. Elle teste, jauge, manipule à sa façon. Une légère variation dans le ton de sa voix, presque imperceptible, mais je comprends ses intentions. Dépolluer l’eau est plus qu’un objectif environnemental pour elle, c’est l’avenir pour toutes les formes de vie qui existent et existeront.
— Tes pensées m’aident à comprendre Mirina, Hana. Pourquoi sont-elles si précises ?
— Je ne sais pas, Noran.
— Cela viendrait-il du fait que tu conserves ta conscience ? Est-ce une évolution des observateurs Une nouvelle forme de vie indépendante ? Je vais devoir étudier cela plus tard.
— Bien sûr, Noran.
Nos échanges sont toujours presque instantané.
— Qu’en est-il des radiations, Mirina ?
— Les plantes les absorberont rapidement, Noran.
— Sans lumière, aucune ne poussera.
— Pourquoi crois-tu qu’il est important de développer les firins.
— C’est vrai, ces insectes nocturnes pourraient donner la lumière et les nutriments nécessaires.
Mirina mène le débat avec autorité, tandis que Noran s'instruit à son contact. Elle ne se contente pas de créer. Elle pense le monde à long terme, anticipant l’avenir pour lui tracer une voie lumineuse. Les aquinas et les firins ne sont que le début d’une vision bien plus vaste.
Au fond d’elle, Mirina aime chaque vie, même si elle n’en laisse jamais rien paraître. Elle incarne l’espoir que mon rêve puisse un jour se réaliser. Vraiment, j’en suis convaincu. Pour elle, la science n’est qu’un moyen, pas une finalité. Ce qu’elle recherche, c’est la nature, la vie elle-même.
J'ai cette impression qu'avec Mirina, la ou il faudrait des siècles d'évolution naturelle, il ne faudra qu'une ou deux décennies pour que de nouveau le monde respire. Ses projets sont déjà en marche, je sais qu'elle pourrait échouer, mais je crois en l'avenir. L'espoir. Pas celui d'un monde meilleur, juste un monde ou on existe, heureux.
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