L'an 370

Je me souviens de ces années passées avec Liyan, chacunes furent pleines de bonheur, mais le temps s’écoule inexorablement sans que je ne puisse agir, tel le dévoreur de l’existence. Comme tous ceux que j’ai connus il est mort, entouré d’êtres chers, paisiblement, de vieillesse, dans son lit. J’erre de nouveau d’une personne à l’autre, seule et isolée, mais dans ce village que j'aime et chérie.

Le temps n'est pas un être cruel, il m'a également offert une naissance. Émilie est joyeuse, pleine de vie, farouche. Au fil des années ou je perçois le monde depuis ses sensations, tout me paraît plus beau. Elle sait comment faire pour que les gens l’écoutent, elle est une oreille attentive. Comme avec Liyan, tout me semble plus vivant, même si on ne communique pas.

Les années s'écoulent encore…

L'an 400

Émilie s'occuppe patiament des gardénias dans le vestibule, soudain la voix colérique de Kenji retentit depuis l'extérieur. Émilie entrouve la porte et observe cet aventurier un peu bourru. C'est Mattews, son père qui la fait venir afin de chasser des bandits qui se sont installer dans la grotte de Hana.

Pourquoi Liyan a-t-il donné mon prénom a cette grotte qui nous servait de refuge ? Je lui ai dit non de nombreuses fois. Il a même nommé le village Hanakaze... Soudain, Kenji plaque fermement Matthew contre le mur de la maison.

— Vous m’aviez assuré du paiement si je protégeais Hanakaze des bandits. Où est-il ?

— Ce… Ce n’est pas ma faute, il y a eu des imprévus ! Je ne peux pas vous payer !

Kenji lève son poing, Émilie sort de la maison furieuse. La porte claque derrière elle. Ses cheveux

volent au vent, ses yeux brillent d’une colère froide. Elle avance à grands pas.

— Je vous interdis de frapper mon père ! Je vous paierai ce qu’il vous doit !

Kenji baisse son poing, surpris. Il tourne la tête vers elle, l'air qu'il affiche, je le connais. Il est sous le charme. On appelle cela un coup de foudre.

— Allons, inutile de faire cette tête stupide ! Je ne mens pas, laissez-moi juste une semaine.

— Dix pièces d’argent en une semaine ! Je n’y crois pas une seconde, mademoiselle !

Émilie sourit, détendue, elle fixe le regard de Kenji sans peur ni doute.

— Je les aurai ! Quitte à vendre mon corps !

Kenji ouvre grand les yeux et recule d’un pas.

— Quoi ! C’est ridicule, vous ne pouvez pas faire ça !

— Pourquoi ? Mon corps m’appartient, donc j’en fais ce que je désire !

Un silence court plane entre eux. Kenji détourne brièvement le regard, tandis que Mattews s'éclipse silencieusement dans la maison.

— M’accorderez-vous ce délai ?

— Laissez tomber ! Disons que j’ai fait ça bénévolement.

Elle secoue la tête, catégorique. Son regard brille d’une détermination presque intimidante.

— Hors de question ! Cela entacherait l’honneur de Hanakaze !

Kenji soupire, puis croise les bras. Elle lui sourit sincèrement.

— Dans ce cas, échelonnons le tout, disons, sur un an, comme ça je passerai de temps à autre.

— Pourquoi ne pas rester ! Vous pourriez travailler comme garde ?

— Désolé, mais mon rêve est d’être un célèbre aventurier, pas un garde.

— Parfait ! Il est important d’avoir des rêves, commencez par être célèbre à Hanakaze.

— Je m’appelle Émilie Katsunaga ! »

— Kenji Ashura ! »

— Le célèbre aventurier ! C’est un honneur de recevoir votre protection ! »

Kenji rit doucement, amusé malgré lui.

— Ok, je me rends ! Je resterai jusqu’au remboursement complet. »

— Bienvenue à Hanakaze, mon cher protecteur. »

Elle tend sa main. Kenji la saisie. Un contact bref, chargé de promesses.