Chapitre 10 : Reconnaissance
À 13h15, j'étais attablée dans la cuisine familiale, picorant dans mon assiette de gratin dauphinois réchauffé qui n'avait plus du tout le même goût que la veille. Dans quarante-cinq minutes, j'allais rencontrer Thom Keller au centre Horizons. L'homme de mes rêves qui détenait les clés de ce mystère qui grandissait en moi depuis l'accident.Ma jambe libérée du plâtre me permettait enfin de bouger normalement, mais l'anticipation me nouait l'estomac comme un poing serré. Je dessinais des spirales dans mon assiette avec ma fourchette, tentant de calmer mon cœur qui battait comme un métronome affolé.En face de moi, mon père terminait sa dernière bouchée en lisant le journal régional déplié à côté de son assiette. Il fronçait légèrement les sourcils quand il lisait un article qui l'agaçait, probablement encore un éditorial sur la politique fiscale.Ma mère s'affairait entre l'évier et le plan de travail, rangeant la vaisselle du déjeuner avec cette efficacité maniaque qui la caractérisait, elle portait son tablier à carreaux bleus par-dessus un pull en laine beige, et avait cette façon particulière de s'essuyer les mains qui trahissait toujours ses moments d'inquiétude.En regardant cette scène familiale si ordinaire, j'ai repensé aux changements de ces dernières semaines. Ma rupture avec Asher, il y a quelques jours à peine, m'avait laissée dans un état étrange. Au lieu du chagrin attendu, j'avais ressenti une libération profonde. Comme si cette relation appartenait à une autre époque, à une version de moi qui n'existait déjà plus. Cette pensée m'avait troublée sur le moment, mais maintenant, en route vers ce rendez-vous mystérieux, j'avais l'impression que tout allait enfin s'éclaircir.
— Tu n'as pas mangé grand-chose, a constaté ma mère en voyant que j'avais à peine touché à mon gratin réchauffé.
— J'ai pas faim.
— Tu fais une drôle de tête, a remarqué ma mère en s'arrêtant de ranger.
— Une drôle de tête comment ?
— Comme quelqu'un qui s'apprête à sauter à l'élastique. Excitée et terrifiée à la fois.Sa comparaison m'a fait sourire malgré moi. C'était exactement ça.
— Et si tu reportais ce rendez-vous ? a suggéré mon père en levant les yeux de son journal, une ride d'inquiétude creusant son front. Tu n'es pas obligée d'y aller aujourd'hui.
L'idée m'a fait froncer les sourcils. Reporter ? Non, quelque chose en moi résistait à cette suggestion.
— Je préfère y aller aujourd'hui, ai-je répondu calmement. Et j'aimerais y aller seule.
Le silence qui a suivi était éloquent. Ma mère a arrêté de ranger, les mains figées sur son torchon. Mon père a refermé son journal d'un geste lent.
— Seule ? a répété ma mère, surprise. Vera, tu sors à peine de ton plâtre...
— Maman, j'ai dix-huit ans. Et ma jambe va beaucoup mieux, vous l'avez vu hier soir.
— Ce n'est pas une question d'âge, a murmuré mon père. C'est juste que... depuis ton accident, tu as tendance à vouloir tout gérer en solitaire. Même les choses importantes, nous souhaitons juste t'épauler.
Sa remarque m'a touchée. Il avait raison, j'avais effectivement développé ce besoin d'autonomie ces dernières semaines.
— Au moins jusqu'à l'entrée du centre ? a tenté ma mère. On pourrait t'attendre dehors...
— Non, vraiment, ai-je insisté avec un sourire rassurant. J'ai besoin de faire ça toute seule. C'est important pour moi.Mes parents ont échangé ce regard inquiet qu'ils avaient développé ces dernières semaines.
« Il t'attend. Tu dois y aller seule pour que la reconnaissance se fasse. »
La voix était si claire que j'ai légèrement tressailli.
— Qu'est-ce qu'il y a ? a demandé mon père en fronçant les sourcils.
— Rien. Je ferais mieux d'y aller maintenant.Je me suis levée de la table, laissant ma chaise grincer sur le carrelage.
— Ma chérie, a-t-elle fini par dire, je ne sais pas ce qui se passe depuis ton accident, mais... tu as l'air de savoir où tu vas. Comme si tu avais trouvé quelque chose que tu cherchais depuis longtemps.
Sa remarque m'a touchée plus que je ne l'aurais cru. Avais-je vraiment l'air de quelqu'un qui avait trouvé sa voie ?
— Je ne sais pas encore ce que j'ai trouvé, maman. Mais j'ai l'impression que je vais le découvrir aujourd'hui.
— Alors vas-y, a dit mon père en se levant à son tour. Mais appelle-nous dès que c'est fini.
— Promis.J'ai embrassé mes parents, attrapé mon sac et ma veste accrochée près de la porte de la cuisine. Dehors, l'air froid de février m'attendait, mais pour la première fois depuis des semaines, je n'avais pas peur de ce qui m'attendait.
À 13h30, j'étais dans le bus 47 qui me menait vers le centre Horizons.Le trajet de vingt minutes m'a paru interminable. À chaque arrêt, je consultais l'adresse sur mon téléphone : 47 rue des Érables. J'avais cette sensation étrange de me diriger vers un lieu que je connaissais déjà.
Quand je suis descendue du bus, j'ai aperçu le bâtiment au bout de la rue. Mon cœur s'est arrêté. Il était exactement comme dans mes visions nocturnes : architecture moderne de verre et d'acier qui contrastait avec les maisons bourgeoises du quartier, arbres centenaires aux branches nues qui encadraient l'entrée, fontaine circulaire devant l'entrée où l'eau continuait de couler malgré l'hiver.
J'ai marché vers l'entrée sur le trottoir de pavés disjoints, sentant mes jambes trembler d'anticipation. Mes pas résonnaient contre les façades silencieuses.
L'entrée du centre baignait dans une lumière dorée qui filtrait à travers un puits de lumière circulaire. Le sol de marbre blanc veiné de gris réfléchissait cette clarté, créant une atmosphère presque céleste. L'air sentait légèrement l'encens et quelque chose d'indéfinissable.
Une femme d'une quarantaine d'années, cheveux châtains au carré impeccable, m'accueillit derrière un bureau épuré en bois clair. Elle portait un chemisier blanc immaculé et avait ce regard perçant de quelqu'un qui voit au-delà des apparences.
— Vera Destiny ?
— Oui, j'ai rendez-vous à 14h avec Thom Keller.
— Bureau 203, deuxième étage. L'ascenseur est juste là.
Dans l'ascenseur, une énergie étrange montait en moi. À chaque étage, je sentais mes cellules vibrer davantage. Une électricité qui transformait ma peau en conducteur cosmique.Le couloir du deuxième étage était d'un blanc immaculé, ponctué de portes numérotées en chiffres dorés. Bureau 201, 202... 203. Le silence était total, seulement troublé par le ronronnement discret de la climatisation. J'ai frappé trois coups, la main tremblante.
— Entrez.
Cette voix. Mon cœur a explosé. C'était exactement la voix de mes rêves, chaude et profonde, avec cette intonation qui me donnait l'impression de rentrer chez moi.
J'ai poussé la porte.
Il était là.Thom Keller. Debout face à la grande baie vitrée qui donnait sur un jardin d'intérieur, les mains dans les poches d'un jean sombre. Exactement comme dans mes visions, mais infiniment plus réel.
La trentaine, une silhouette élancée d'un mètre quatre-vingts environ, cheveux châtains qui tiraient sur le blond sous la lumière naturelle, épaules carrées sous un pull gris col V en cachemire. Quand il s'est retourné, j'ai découvert des yeux d'un bleu intense et perçant, un visage fin et harmonieux, avec cette expression de sérénité profonde que j'avais vue mille fois en rêve. Ses traits étaient réguliers sans être parfaits, avec cette beauté naturelle de quelqu'un qui rayonne de l'intérieur.Quand il m'a vue, son visage s'est illuminé d'un sourire qui m'a coupé le souffle.
— Enfin, a-t-il dit en s'approchant. J'ai cru que tu ne viendrais jamais.
— Je suis venue aussi vite que j'ai pu.
Les mots étaient sortis automatiquement, comme si nous reprenions une conversation interrompue. Pas comme des inconnus qui se rencontraient pour la première fois.
— Assieds-toi, a-t-il dit en désignant un fauteuil en cuir beige face à son bureau. Nous avons beaucoup à rattraper.
Son bureau était organisé avec un soin méticuleux : un ordinateur portable MacBook ouvert, des dossiers rangés par couleur, un carnet en cuir noir, et au centre, une étrange sphère de cristal de la taille d'une balle de tennis qui pulsait d'une lumière intérieure bleue hypnotique.
Je me suis installée dans le fauteuil, croisant les jambes. Lui s'est assis dans un fauteuil similaire de l'autre côté du bureau. Nos regards se sont croisés. Et là, l'univers a basculé.
Une décharge électrique a traversé tout mon corps. Pas douloureuse, mais... familière. Comme si deux aimants cosmiques se reconnectaient après des siècles de séparation. Une reconnaissance absolue, plus profonde que tout ce que j'avais jamais ressenti.
Dans ses yeux bleus, j'ai lu cette tendresse infinie que j'avais ressentie dans tous mes rêves.
— Tu me reconnais ? a-t-il demandé doucement, sa voix à peine un murmure.— Oui. Mais je ne comprends pas comment c'est possible.
Une part de moi refusait encore d'accepter l'ampleur de ce qui se passait. Comment un inconnu pouvait-il me sembler plus familier que ma propre famille ?
— C'est normal de résister, a-t-il dit avec une patience infinie. L'incarnation terrestre masque nos souvenirs profonds...
— Stop ! ai-je coupé.J'ai reculé vers le fond du fauteuil, les mains crispées sur les accoudoirs soudain méfiante.
— Tu es quoi exactement ? Un psychologue bizarre ? Un membre d'une secte ?
Thom n'a pas bougé, mais son regard s'est adouci.
— Teslia, je comprends ta peur. Mais au fond de toi, tu sais que je dis la vérité.
— Ne m'appelle pas comme ça ! Je ne te connais pas.
Sa main a effleuré la mienne posée sur l'accoudoir, et au contact de sa peau, j'ai ressenti cette décharge énergétique familière. Plus intense encore que la première fois.
— Je m'appelle Thom dans cette incarnation. Mais mon nom véritable... mon nom cosmique... est Darwos.
Ce nom a fait vibrer quelque chose de profond en moi, mais je me suis forcée à résister.
— Darwos ? C'est quoi, un nom d'elfe ?Il a ri, un son cristallin qui m'a réchauffé le cœur.
— Pas exactement. C'est le nom que je porte depuis que nous nous sommes rencontrés pour la première fois. Il y a très, très longtemps.
— Nous nous sommes déjà rencontrés ?— Oui. Et toi, tu n'es pas seulement Vera Destiny, étudiante de dix-huit ans.Il s'est agenouillé à côté de mon fauteuil, ses yeux bleus plantés dans les miens.
— Tu es Teslia. Une âme qui a vécu de nombreuses vies sur cette planète.Teslia. Comme une mélodie oubliée qui revenait en mémoire. Mais mon esprit rationnel se rebellait.
— C'est impossible ! Je m'appelle Vera ! J'ai dix-huit ans ! Je vis chez mes parents depuis ma naissance !
— Vera est le nom que tu portes dans cette vie, oui. Mais Teslia est... quelque chose de plus profond. Ton essence véritable.
— Comment tu peux me prouver ce que tu avances ?
Il a souri avec cette tendresse patiente que j'avais vue dans mes rêves.
— Tu veux des preuves ? Très bien.
Il a posé ses deux mains sur mes tempes. La chaleur de ses paumes a irradié dans tout mon crâne.
— Attends ! Tu ne peux pas juste... qu'est-ce que tu fais ?
— Je ne fais rien, Vera. Je t'aide seulement à baisser tes barrières mentales. Les souvenirs sont déjà là.
D'abord, rien. Puis, comme des fragments de rêves qui remontent à la surface...
Une image floue : des mains qui guérissent sous un soleil intense...
— Qu'est-ce que... qu'est-ce que c'était ?
— Continue de regarder. N'aie pas peur.
Les images se sont précisées progressivement. Une femme aux cheveux noirs tressés, vêtue de lin blanc, qui soignait des blessés dans un temple égyptien. Ses mains irradiaient une lumière dorée qui refermait les plaies. Le parfum des encens sacrés, la chaleur du soleil sur les pierres, le murmure des prières...
Un moine en bure brune qui copiait des manuscrits dans un monastère médiéval, ses doigts tachés d'encre mais son esprit brillant de connaissance. L'odeur du parchemin, le grattement de la plume, la sérénité de la prière...
Une suffragette qui haranguait une foule devant le Parlement britannique, réclamant le droit de vote avec une conviction inébranlable. Le froid de Londres, les cris de la foule, cette certitude brûlante d'avoir raison...
J'ai arraché mes mains de ses tempes, le souffle court.
— C'est impossible ! Ces images... elles ne peuvent pas être mes souvenirs ! Je n'ai que dix-huit ans !
Je me suis levée si brutalement que le fauteuil a reculé.
— Tu m'as drogué ! Ou hypnotisé ! Ces visions ne sont pas réelles !
— Teslia...
— ARRÊTE DE M'APPELER COMME ÇA !
Ma voix a résonné dans le bureau avec une force qui m'a surprise. Et à cet instant, quelque chose d'étrange s'est produit : la sphère de cristal sur son bureau s'est mise à pulser plus fort, synchronisée avec les battements de mon cœur.
Thom a regardé la sphère, puis moi, avec une expression de... satisfaction ?
— Tu vois ? Même en colère, ton énergie réagit. C'est la preuve que...
— La preuve de RIEN ! J'ai peut-être un don pour faire bouger les objets, et alors ?
— Au fond de toi, tu le sais. Ces images ne viennent pas de moi, elles viennent de ton âme qui se souvient. Et puis...Il a désigné mon bras droit. J'ai baissé les yeux et j'ai étouffé un cri. Sur ma peau, une marque dorée était apparue. Pas un tatouage, quelque chose qui venait de l'intérieur. Un symbole que je reconnaissais sans l'avoir jamais vu.
— C'est le signe de Teslia, a-t-il expliqué. Il apparaît quand une âme guide se reconnecte à sa véritable identité.J'ai touché la marque. Elle pulsait d'une chaleur douce.
— Une âme guide ?
— Oui. Tu as terminé ton apprentissage sur cette planète, Teslia. Tu as vécu assez d'incarnations pour comprendre toutes les facettes de l'existence humaine. Maintenant, tu es revenue pour une mission différente.
— Quelle mission ?Il s'est relevé, s'est dirigé vers la baie vitrée. Son visage s'est assombri.
— Cette planète... Terra-9, comme nous l'appelons... elle est en danger.
— Terra-9 ?
— C'est son nom cosmique. Terra-9 fait partie d'un système plus vaste, avec des centaines de mondes-écoles dans l'univers. Et Terra-9... elle souffre.
Cette information a résonné en moi avec une évidence troublante, mais je me cramponnais encore à ma logique.
— Qu'est-ce que tu veux dire par "elle souffre" ?
— Les âmes oublient leurs vies passées et répètent indéfiniment les mêmes erreurs. Ces cycles épuisent Terra-9
— Comment une planète peut-elle être épuisée ?
— Terra-9 est vivante, Teslia. Chaque guerre, chaque destruction la blesse. Le changement climatique, les catastrophes... c'est son cri de détresse. Elle ne peut plus porter ces cycles sans fin.
Pendant qu'il parlait, j'ai remarqué que la lumière dans le bureau changeait subtilement. Plus dorée. Plus dense.
— Tu sens ça ? a-t-il murmuré.
— Quoi ?
— Cette pression dans l'air. Cette électricité.
Maintenant qu'il le mentionnait, oui. L'atmosphère était différente. Comme avant un orage, mais en plus intense.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Tu commences à voir au-delà du voile physique. Tes capacités s'éveillent.
Les contours du bureau vacillaient légèrement, comme des mirages de chaleur. J'ai cligné des yeux, pensant à un vertige.
— Je ne me sens pas bien...
— C'est normal. Laisse-toi porter. Ne résiste pas.
Et progressivement, les murs ont commencé à devenir flous, translucides. À travers cette réalité qui se dissolvait, j'apercevais quelque chose d'immense et de... blessé.
— Je sens... quelque chose. Quelque chose de grand et de triste.
— C'est Terra-9, a murmuré Thom. Tu la sens maintenant. Sa conscience planétaire.
Une vague d'émotion m'a submergée. Une tristesse cosmique, ancienne, profonde. Comme si j'entendais les pleurs d'un géant.
— Elle a si mal...
— Oui. Mais regarde...Dans cette réalité alternative qui se superposait au bureau, j'ai vu d'autres lumières. Des milliers de points brillants qui pulsaient autour de la forme blessée de Terra-9.
— Qu'est-ce que c'est ?
— Les autres âmes. Celles qui évoluent encore, et celles qui, comme nous, sont revenues pour les guider.
— Com.. combien sont t'ils dans ton genre ?
— Tu veux dire des âmes guides ?
J'ai hoché la tête, encore sous le choc de ce que je venais de voir.
— Cent quarante-quatre mille exactement, éparpillées sur toute la planète.
— Cent quarante-quatre mille ?!
Le chiffre était si énorme que j'ai eu un vertige.
— Tu réalises ce que ça veut dire ? Ça fait... ça fait une personne sur cinquante mille qui serait comme nous !
— Et pourtant, la plupart ne se doutent de rien. Comme toi il y a encore quelques semaines.
Cette vision m'a coupé le souffle. Je faisais nous faisions... partie d'un plan cosmique gigantesque.
— Et qu'est-ce qu'on est censés faire exactement ?
— Réveiller les âmes pour qu'elles se souviennent de toutes leurs incarnations. Quand une âme comprend qu'elle a été à la fois bourreau et victime, elle cesse de répéter les mêmes schémas.
Progressivement, la vision s'est estompée. Les murs du bureau ont repris leur solidité, mais quelque chose en moi avait changé à jamais.
— Teslia, a dit Thom en prenant mes mains dans les siennes. Es-tu prête à accepter qui tu es vraiment ?
J'ai regardé la marque dorée sur mon bras qui pulsait doucement. Mes mains tremblaient encore du choc des révélations.
— J'ai... j'ai peur, ai-je avoué. Si c'est vrai, ça veut dire que toute ma vie était un mensonge ?
— Non. Ça veut dire que ta vie était une préparation. Tout ce que tu as vécu en tant que Vera t'a menée jusqu'ici.
— Et mes parents ? Asher ? Mes études ? Tout ça n'avait aucun sens ?
— Tout avait un sens. Mais pas celui que tu croyais.
— J'ai fermé les yeux, sentant les larmes monter.
Je ne sais pas si je suis assez forte pour ça.
— Tu l'es. Tu as survécu à des dizaines d'incarnations, Teslia. Tu es l'une des âmes les plus anciennes de Terra-9.
Quand j'ai rouvert les yeux, j'ai vu dans son regard cette tendresse infinie qui me poursuivait depuis des semaines.
— Oui, ai-je murmuré. Je suis Teslia. Et j'ai peur, mais... je suis prête.
— Alors bienvenue dans ta vraie vie, Teslia. Demain, nous commencerons ton véritable entraînement.
— Mon entraînement ?
— Tu as beaucoup à réapprendre. Tes capacités d'âme guide, les techniques de réveil des autres âmes, et surtout...
Il a marqué une pause, son regard devenant mystérieux.
— Comment naviguer entre tes différentes incarnations sans perdre ta santé mentale.
— Mes différentes incarnations ?
— Oh, Teslia, a-t-il souri. Tu crois vraiment que les âmes guides ne vivent qu'une seule vie à la fois ?
Sur cette révélation qui me glaçait le sang, il s'est dirigé vers la porte.
— Pour aujourd'hui, c'est suffisant. Rentre chez toi, digère ce que tu viens d'apprendre. Et demain... demain, je t'expliquerai le reste.
Je suis sortie du centre Horizons dans un état second, la marque de Teslia pulsant doucement sur mon bras, avec la certitude que ma vie venait de basculer définitivement dans l'extraordinaire.
Mais j'avais hâte de découvrir ce que Thom entendait par "le reste".
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