Chapitre 8

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Violette sentit la caresse d'un souffle frais glisser sur elle. Elle ouvrit les yeux. La lueur matinale inondait la pièce d'une teinte chaleureuse, colorant les murs immaculés de reflets dorés. Le salon était vide, Fred était parti. Elle avait dû s'endormir, bercée par cette guitare qui lui avait murmuré des accords de tendresse, et, lui, avait eu la délicatesse de ne pas la réveiller. Il s'était éclipsé en prenant soin de la couvrir de cette chemise qu'il était sensé récupérer. Elle sourit.

Au-dessus de la guitare posée sur la table du salon, Violette remarqua un papier représentant une note de musique pliée à la manière d'un origami. Elle souleva les pans du feuillet et découvrit quelques mots griffonnés dans une écriture ronde et gracieuse.

« S'endormir lors de mon tout premier concert ? Tu me dois une autre soirée ! »

Sous la phrase, Fred avait dessiné un smiley et noté son adresse. Elle lui envoya un message d'excuse et promit de se faire pardonner. La réponse de celui-ci fusa : il lui proposait de passer en début de soirée.

**

Arrivée à l'adresse indiquée, des éclats de rire percèrent la cloison. Fred n'était visiblement pas seul. Contrariée, Violette hésita à sonner. Elle avait apprécié la soirée chez Mylène. Rencontrer le groupe d'amis de Pauline lui avait fait du bien. Leurs regards chaleureux, leur humeur joviale l'avait happée dans ce tourbillon de joie amicale. Elle avait aimé qu'ils ne s'attardent pas sur sa personne et la considèrent aussi rapidement comme une des leurs. Son rapprochement avec Fred s'était fait tout aussi naturellement. Le courant était passé aussi rapidement qu'un éclair de lumière. La spontanéité du jeune homme la mettait à l'aise et sa compagnie l'apaisait. Pour la première fois depuis trois ans, elle était parvenue à se départir du masque qu'elle arborait chaque fois qu'elle devait plonger dans l'inconnu. Pourtant, les voix qui s'entremêlaient derrière la porte d'entrée réveillait son caractère farouche. La méfiance maquilla ses traits. Se protéger des autres était devenu une seconde peau, une question de survie.

Malgré tout, elle appuya sur la sonnette. Fred lui ouvrit, les jambes prises d'assaut par les mains d'une fillette aux cheveux bouclés et au regard aussi bleus que ceux de celui qui la fixait. Un sentiment de panique envahit Violette. Se pouvait-il que cette petite soit sa fille ? La tête lui tourna, elle ne s'était pas préparée à cette éventualité. Une douleur lancinante irradia dans son bas-ventre. Ses yeux se voilèrent tandis que les Ténèbres réapparaissaient de nouveau devant elle.

  • C'est qui Tonton ?

Tonton ?

  • C'est Violette, mon amie. On la laisse entrer ?

La petite se fendit d'un large sourire, lâcha les jambes de son oncle et attrapa la main de l'invitée pour l'entrainer dans l'appartement.

  • Ravie de te rencontrer ! l'accueillit une jeune femme aux yeux clairs elle aussi.
  • Je te présente ma sœur Julia et ma nièce Maya, répliqua Fred.

Mal à l'aise, Violette tentait néanmoins de faire bonne figure.

  • Enchantée.
  • Allez jeune fille ! On y va, va chercher tes affaires.

Maya fit mine de ne pas avoir entendu sa mère et poursuivit son dessin comme si de rien. Son oncle l'attrapa et la fit voler comme un avion ce qui déclencha un grand éclat de rire chez la fillette. Puis il l'entraina dans la chambre afin de récupérer son sac et ses doudous.

  • Un vrai Tonton Poule ! s'esclaffa Julia. On ne l'imagine pas comme ça au premier abord, pas vrai ? Si ses prétendantes le voyaient, elles comprendraient peut-être pourquoi un futur est impossible avec lui. Son cœur est déjà pris.

Violette sourit et regarda Fred et Maya revenir main dans la main. Prête à partir, la petite leva les bras et le jeune homme la serra si fort contre lui qu'elle dut le tapoter pour qu'il desserre son étreinte. Trois bisous plus tard, Fred et Violette se retrouvèrent enfin seuls.

  • Je suis désolé, ma sœur devait récupérer Maya plus tôt mais elle a dû rester à l'hôpital plus longtemps que prévu.

Le jeune homme dodelina de la tête comme pour s'excuser.

  • Elle est infirmière.
  • Aucun souci, le rassura t-elle. Vous avez l'air très complices tous les trois.
  • Le papa de la petite nous a quittés alors que Maya était sur le point de naitre. Accident de travail. Ça a été un moment très difficile pour Julia. J'essaie d'être présent un max et de l'épauler du mieux que je peux.
  • Elles ont beaucoup de chance de t'avoir.

Il se racla la gorge et Violette remarqua l'émotion faire scintiller l'eau claire de ses yeux.

  • Alors je suis un aussi piètre musicien que ça ? demanda t-il pour changer de sujet et recentrer la conversation sur la venue de son amie.

Elle s'esclaffa puis tira de son tote bag un objet emballé qu'elle lui tendit. Surpris, Fred saisit le présent, déchira le papier kraft et écarquilla les yeux en découvrant le vinyle.

  • Eric Clapton ! s'exclama t-il.
  • Tu as peut-être déjà ?
  • The Lady in the Balcony, non. Merci.
  • Rien de tel pour progresser que d'écouter cette pointure en guitare non ? lança t-elle en rigolant.
  • Tu as de la chance de savoir boxer !

Fred mit la platine en route, tandis que Violette détaillait l'intérieur du logement. Une large bibliothèque remplie de disques en tout genre habillait un des murs du salon tandis que des affiches de concerts tapissaient les autres. Des photos de Julia et Maya étaient disséminés aux quatre coins de l'appartement. Dans le canapé en cuir, des peluches et des crayons de couleur se disputaient l'assise. Elle les rassembla et les posa sur la planche du dessous de la table basse où une collection de cartoons et de comics y reposait, pèle-mêle. 

L'intérieur correspondait parfaitement à ce que Violette avait pu entrevoir de la personnalité de Fred. Il y régnait une sorte de nostalgie touchante qui prouvait que son ami était bien plus attaché aux relations humaines qu'il n'y paraissait de prime abord. Elle savait en tous cas que la famille était quelque chose d'important pour lui. Entourée des sourires mélancoliques de Julia, de l'écho des rires de Maya, et du regard pénétrant de Fred, Violette songea à sa propre famille et se sentit soudain moins seule.

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