La fontaine pourpre
Béatrice, l'impatience la dévorant, descend du carrosse avec vivacité et se précipite vers l'entrée du palais. Elle est littéralement subjuguée par la magnificence des lieux. L'architecture intérieure est encore plus surprenante que l'extérieur. Des couloirs sinueux s'entrecroisent, éclairés par des torches dont la flamme danse étrangement. Des fresques murales aux couleurs chatoyantes représentent des scènes mythologiques et des créatures fantastiques. Le sol est recouvert de mosaïques complexes, formant des motifs géométriques hypnotiques. L'air est parfumé d'encens et d'épices, créant une atmosphère à la fois mystique et sensuelle.
Au centre du palais, une vaste salle s'ouvre, illuminée par une lumière zénithale provenant d'une coupole de verre coloré. Au centre de cette salle trône une fontaine des plus singulières. L'eau qui jaillit de son bassin est d'un rouge profond. Elle murmure doucement en retombant, son bruit rythmique emplissant l'espace d'une présence étrange. Béatrice est fascinée par cette fontaine. Elle n'a jamais rien vu de tel. La couleur de l'eau est à la fois attirante et repoussante, évoquant à la fois la passion et le danger.
Poussée par une curiosité irrépressible, Béatrice s'approche de la fontaine et plonge sa main dans l'eau rouge. Elle la porte ensuite à ses lèvres, hésitante, puis prend une petite gorgée. Immédiatement, une grimace de dégoût déforme son visage. Le goût est horrible, acre et intensément ferreux. Elle recrache le liquide avec répulsion, toussant et crachotant pour se débarrasser de cette saveur désagréable. "Mon Dieu, quel goût affreux !" s'exclame-t-elle, le cœur battant la chamade.
Ambrose, qui déchargeait les bagages du carrosse, a été témoin de la scène. Alarmé, il accourt vers Béatrice, le visage inquiet. "Béatrice, qu'est-ce qui se passe ? Qu'avez-vous fait ?" demande-t-il, la voix remplie d'angoisse.
Béatrice, mortifiée, se sent terriblement coupable. "Je suis désolée, Ambrose," balbutie-t-elle. "J'étais curieuse et j'ai goûté l'eau de la fontaine. Mais elle a un goût affreux, comme du fer rouillé." Elle baisse les yeux, honteuse de son impulsion. "Je n'aurais pas dû faire ça. Je suis vraiment désolée."
Ambrose, visiblement soulagé de constater qu'elle n'est pas blessée, reprend contenance. Il esquisse un sourire rassurant. "Ne vous inquiétez pas, Béatrice," dit-il d'une voix calme. "L'eau de cette fontaine a une composition particulière. Elle contient des minéraux rares qui lui donnent cette couleur et ce goût si spécifiques. C'est une eau médicinale, en quelque sorte. Elle n'est pas destinée à être bue par plaisir, mais plutôt pour ses vertus curatives." Il ajoute, d'un ton plus léger : "Disons simplement que votre palais n'était pas préparé à cette expérience gustative inhabituelle." Il lui tend un mouchoir en dentelle. "Tenez, essuyez-vous la bouche. Et ne vous en faites pas, cela arrive à tous ceux qui découvrent cette fontaine pour la première fois.”

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