CHAPITRE XCI

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Mercredi après la piscine, je suis allé voir Stéphane. Je n'ai pas pu lui rendre visite hier soir puisque j'étais à la réunion du Geography Club aussi j'étais impatient de le revoir. Je crois que je culpabilisais un peu d'avoir manqué la visite hier.

Quand je suis arrivé dans le hall, je me suis dirigé vers l'accueil pour m'annoncer. Il y avait deux jeunes devant moi, un peu plus âgés que moi peut-être, mais des lycéens à coup sûr. J'ai attendu qu'ils aient terminé derrière la limite de courtoisie que l'on retrouve maintenant partout où il y a des guichets. J'ai patienté en vérifiant sur mon téléphone si j'avais reçu des messages pendant que j'étais à la piscine et quand je l'ai remis dans ma poche de blouson, j'ai compris qu'il y avait un problème au guichet. Je sais que j'aurais dû respecter la confidentialité des visiteurs mais malgré moi j'ai tendu l'oreille et j'ai compris qu'on leur refusait l'accès à la personne qu'ils venaient voir. Ils étaient très déçus et se sont écartés du guichet. Je me suis alors approché de l'employée et lui ai annoncé que je venais voir mon père, Stéphane Brisset. Elle m'a reconnu et avec un sourire m'a fait signe que je pouvais y aller et a noté mon nom sur le registre des visites. Je l'ai remerciée et me suis éloigné. J'ai fait quelques pas quand on m'a interpellé.

-"Heu s'il te plaît ?"

Intrigué, je me suis retourné. C'était la fille qui était devant moi au guichet à l'instant qui venait de parler.

-"Heu bonjour, excuse-nous mais on a entendu que tu venais voir monsieur Brisset ?

-"Bonjour, oui c'est bien ça...

-"En fait, monsieur Brisset est notre prof de français et on était venu le voir mais comme on n'est pas de la famille et en plus mineurs, elle a refusé de nous laisser passer !

-"Oh d'accord, oui j'avais cru comprendre qu'il y avait un problème. Je suis son fils..."

J'ai jeté un regard vers le guichet, l'employée était en train de parler à une dame âgée et nous n'étions plus dans son champ de vision direct. Je n'ai pas vraiment réfléchi et ai fait signe aux deux lycéens de me suivre. Nous nous sommes éloignés d'une dizaine de mètres et je me suis retourné vers eux.

-"Je m'appelle Diego, vous êtes des élèves de mon père ?

-"Oui, moi je m'appelle Floriane et lui Ludwig, on est en 1ère L au lycée Malherbes et c'est notre prof de français. On a appris mardi qu'il avait eu un accident en rentrant du lycée et on voulait le voir parce que... parce qu'on l'aime bien et puis pour prendre des nouvelles parce qu'au lycée personne ne nous dit rien.

-" Oh je comprends... c'est très sympa. Je ne sais pas si..."

Je me suis interrompu, derrière son guichet, l'employée parlait toujours avec la vieille dame et peut-être ne nous verrait-elle pas passer...

-"On va essayer d'y aller discrètement, suivez-moi !"

-"Oh merci !"

On s'est écartés en faisant quelques pas sur le côté comme pour aller vers la salle d'attente et puis au dernier moment j'ai bifurqué vers la grande porte qui menait vers l'escalier. La chambre de Stéphane est au troisième étage mais ce n'est pas un problème et bien sûr la majorité des personnes prennent l'ascenseur situé au centre du hall d'accueil donc c'est beaucoup plus discret.

Nous avons rapidement disparu sans que personne n'intervienne et avons gravi les marches jusqu'à l'étage.

-"Ouf, ça a marché !

-"Oui, j'avoue que j'étais un peu nerveux !" répond le garçon.

-"Merci, c'est vraiment très sympa de ta part !

-"Non, c'est plutôt vous qui êtes à remercier de venir le voir ; de la part d'élèves c'est pas très courant...

-"C'est parce qu'on l'aime beaucoup, c'est un super prof !

-"Tant mieux, je suis heureux d'entendre ça ! Heu... on ne vous a rien dit à son sujet ?"

Je leur ai alors expliqué l'état de Stéphane et ils étaient très surpris et un peu choqués aussi je crois.

-"Si vous le permettez, je vais rentrer d'abord pour voir s'il n'y a pas de visiteur pour son compagnon de chambre et puis vous pourrez venir.

-"Oui bien sûr..."

J'ai ouvert la porte et comme toujours l'odeur d'hôpital m'a sauté à la gorge.

-"Bonjour ! Bonjour monsieur Delporte, Bonjour Stéphane, c'est Didi !"

Bien sûr, personne ne m'a répondu mais j'ai pris cette habitude quand je rentre de faire comme si quelqu'un pouvait le faire. J'ai entrouvert la fenêtre pour essayer de chasser cette odeur entêtante et puis j'ai fait le tour du lit de Stéphane.

-"Salut Steph', c'est Didi !"

J'ai déposé un baiser sur chacune de ses joues et j'ai caressé son visage doucement.

-"Aujourd'hui tu as deux autres visiteurs ; je vais les faire entrer ; ce sont des élèves de 1ère, Floriane et Ludwig. Ils sont venus prendre de tes nouvelles parce que tu leur manques..."

Je n'avais pas fermé la porte aussi je leur ai fait signe de rentrer. Ils étaient un peu intimidés je crois parce qu'ils marchaient sans faire de bruit et sont restés silencieux. Sur leur visage, j'ai lu une forme de crainte ou de respect peut-être.

-"Approchez-vous !"

-"Heu merci... c'est un peu...

-"Impressionnant et bizarre ?

-"Ouais c'est ça. Il va bien ?

-"Oui... enfin d'une certaine façon parce qu'il est quand même dans le coma...

-"Et il nous entend ?

-"A priori non mais les médecins disent que parfois il y a des personnes qui entendent certains sons donc c'est aussi pour ça que je viens. Je lui parle, je lui passe de la musique qu'il aime bien. On sait jamais, ça peut peut-être aider...

-"Oh c'est dur ! Et il va se réveiller bientôt ?

-"J'espère ! Oui, j'espère !"

Ma voix a un peu dévissé et pendant quelques instants, nous n'avons plus parlé. Ils ont compris bien sûr que c'était difficile pour moi. Je leur ai dit de s'asseoir sur les chaises et de raconter à Stéphane leur journée et je les ai écoutés. Puis nous avons discuté tous les trois de Stéphane, de leurs cours, du lycée et de ce que nous faisions comme activité. C'était sympa. Ils sont vraiment gentils et pleins d'attention, seraient-ils venus, si ce n'était pas le cas ? J'en doute...

Ils sont partis une heure plus tard environ ; je les ai remerciés d'être passés et nous avons échangé nos numéros de téléphone pour rester en contact.

-"Je lui dirai que vous êtes venus le voir quand il se réveillera et promis je négocierai pour qu'il vous donne des points de bonus !

-"Ah ah ah ! Merci Diego, dans ce cas, on va venir souvent !

-"Merci d'être passés, ça m'a fait super plaisir de voir que ses élèves l'aiment bien.

-"Merci à toi de nous avoir permis de le voir !

-"Bon courage et tiens-nous au courant !

-"Promis, salut !"

Quand ils sont partis, j'ai mis de la musique, Simon et Gardfunkel, le concert à Central Park et je lui ai raconté ma journée à mon tour. Rien de palpitant, une journée ordinaire, une journée sans lui...

'S'il te plaît Stéph', réveille-toi ! On a tant besoin de toi !'

...

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