CHAPITRE CXLII

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-"Voilà Diego !" annonce Alexis.

-"Oh, cette tenue te va bien !" fait remarquer madame Winogravski.

-"C'est la chemisette préférée de Thibaud !"ajoute Hugo.

Thibaud n'a rien dit ; il me détaillait des yeux et souriait.

-"Merci Thibaud, je me sens revivre !"

On a joué à Taboo, un jeu qu'ils ont reçu à Noël. Par équipes de deux, il faut faire deviner un mot sans utiliser une liste de mots interdits. Alexis était avec son père, Hugo avec sa mère et moi avec Thibaud, bien sûr ! Dans cette version du jeu, il y avait des cartes juniors qui ont permis à Hugo de participer pleinement et il m'a surpris par l'étendue de son vocabulaire. C'était sympa, amusant, et rapidement le salon a été envahi par les cris et les rires de tous les participants. On a joué pendant plus d'une heure et après trois parties acharnées, toutes les équipes avaient gagné une manche. On a donc fait une dernière partie pour se départager et c'est Alexis et son père qui l'ont emportée brillamment.

-"Allez, on s'arrête là pour ce soir, bravo à tout le monde." déclare monsieur Winogravski avec encore le sourire de la victoire aux lèvres.

-"On peut pas faire une dernière partie, Maman ?"réclame le petit dernier.

-"Non, il est déjà tard. Allez Hugo, dis bonsoir à tout le monde et va te laver les dents, il est temps de te coucher !"

Bien sûr, le petit garçon a fait un peu la tête mais il a fini par embrasser tout le monde et est parti dans sa chambre.

-"Excité comme il est, il n'est pas près de s'endormir." commente sa mère en souriant.

J'ai éternué très fort et je me suis mouché à plusieurs reprises.

-"Excusez-moi, j'ai pris froid quand j'ai dormi dans les caves de l'immeuble et je me suis enrhumé.

-"Je vais te faire un grog, il n'y a rien de tel qu'une boisson chaude avec du rhum, parole de marin !

-"Oh merci, oui, je crois que ça pourrait me faire du bien..."

Nous sommes restés quelques instants dans le salon à discuter tandis que je buvais la boisson chaude préparée par monsieur Winogravski.

'Purée, c'est hyper fort !'

Il m'a remercié pour l'idée que j'avais eue pour la chambre d'Alexis et plus généralement pour mon "influence bénéfique" sur la vie de la famille.

-"Je crois que tu as réussi à faire passer quelques messages importants et je t'en remercie.

-"Oui, grâce à Diego, j'ai beaucoup réfléchi..." déclare Alexis.

J'ai rougi car cela me gêne toujours un peu que l'on me fasse des compliments mais je suis très content de constater à quel point Alexis semble avoir changé.

'Il a du discuter avec ses parents et il connait maintenant le calvaire qu'a vécu son frère !'

Thibaud n'a rien dit, il avait l'air d'être ailleurs. Tout au long de la soirée, il m'a paru sur la défensive sauf peut-être pendant le jeu où je l'ai senti plus libéré.

Il était plus de dix heures et demie quand nous sommes montés à l'étage à notre tour et je me suis senti très fatigué tout d'un coup.

-"Dis donc, c'est vrai qu'il a changé Alexis ! Il faut que tu le remercies pour ce qu'il a fait ce soir." dis-je à Thibaud une fois dans sa chambre.

-"Oui, c'est vrai, je n'aurais jamais osé proposer à mes parents que tu restes dormir...

-"Parce que tu as honte de moi ?" reprends-je en plaisantant.

-"Oh non ! Parce que... enfin parce que je suis gay...

-"Et tu penses que ça peut prêter à confusion que je dorme dans ta chambre ?" réponds-je en le regardant droit dans les yeux.

-"Heu peut-être..." dit-il en rougissant.

-"Oui, peut-être... heu justement... je voulais te parler de quelque chose..."

Je l'ai vu blêmir et fuir mon regard.

-"Heu il faut que j'aille m'occuper de ton linge, la machine doit être finie !"

A ma grande surprise et déception, Thibaud a sauté du lit sur lequel il était assis et est sorti de la chambre presque en courant.

'Qu'est-ce qu'il a ? On dirait qu'il a peur de moi...'

Je suis allé dans la salle de bain et j'y ai trouvé Alexis qui se lavait les dents.

-"Tu n'as qu'à prendre la brosse à dents de Thibaud." dit-il en me désignant la brosse verte.

-"Ah oui, merci...

-"Ca y est, vous avez levé les malentendus ?

-"Heu non pas vraiment, j'ai l'impression qu'il me fuit...

-"Oui, je l'ai trouvé tendu moi aussi, je pensais que ça lui ferait super plaisir de te voir et il est resté très en retrait comme s'il y avait un problème...

-"Peut-être qu'il m'en veut de ne pas l'avoir prévenu que je partais à Martigues ?

-"Non, pour moi, il a peur de quelque chose... il faudrait que tu lui en parles...

-"J'ai essayé mais il est parti s'occuper du linge !

-"Oui, c'est bizarre...

-"Merci en tous les cas, Alexis, c'était très sympa de ta part de proposer que je reste manger et puis dormir...

-"Oh ben de rien... tu m'as beaucoup aidé et je voulais un peu me rattraper auprès de Thibaud mais finalement je ne sais pas si c'était une si bonne idée...

-"Si, si, j'en suis sûr et je vais bien finir par comprendre ce qui lui fait peur..."

Je suis retourné dans la chambre mais Thibaud n'était toujours pas de retour. Je me suis déshabillé et j'ai mis le pyjama qu'il avait disposé pour moi sur le matelas. Un panta court bleu et un t-shirt blanc dans lesquels je me suis glissé avec bonheur.

'Enfin une vraie tenue et surtout une tenue propre pour dormir, ça fait trois jours que j'en rêve !'

J'ai éteint le plafonnier et j'ai allumé la lumière de chevet. Je me suis allongé sous la couette en me disant que nous pourrions peut-être parler plus facilement ainsi dans la pénombre sans nous regarder, comme nous l'avions fait quand il était resté dormir chez moi à la fin des vacances de la Toussaint.

Je sens le sommeil commencer à me gagner. Je me suis levé tôt ce matin et le voyage a été long, plus de huit heures au cours desquelles je me suis interdit de relâcher ma vigilance.

Il n'empêche que je suis très déçu. J'étais venu lui dire que j'avais des sentiments pour lui, que je voulais être son petit ami et je me retrouve seul dans sa chambre avec l'impression qu'il ne veut pas me parler ou qu'il me cache quelque chose...

'Ou alors, je n'ai rien compris, il sort avec Jérémy et ça le met mal à l'aise que je dorme dans sa chambre ?'

'Mais dans ce cas-là, pourquoi était-il si malheureux quand je n'étais pas là ?

Je sens que quelque chose m'échappe et que cela m'empêche de comprendre l'attitude de Thibaud.

'Pourquoi est-il si tendu ? Qu'est-ce que j'ai fait ?'

J'ai pris ma position pour dormir, sur le côté, en chien de fusil. Mes paupières se font lourdes, je crois que le grog de monsieur Winogravski est en train de finir de m'assommer...

'Tant pis, on discutera demain...'

'Je lui dirai que je l'aime et tout s'arrangera !'

...

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