CHAPITRE CLXIII

6 minutes de lecture

Avez-vous déjà dormi ou essayé de le faire dans une pièce avec quinze de vos congénères ?

Quelle expérience catastrophique !

Entre ceux qui arrivent tard dans la nuit et qui allument la lumière pour retrouver leur lit, ceux qui parlent fort comme s'ils étaient seuls au monde, ceux qui rigolent comme des idiots et ceux qui se lèvent trois fois dans la nuit pour aller aux toilettes, cette nuit s'est transformée en cauchemar !

Sans oublier Freddy ! Mais sur ce point je ne crois pas que si j'étais resté à ma place initiale, cela aurait changé grand-chose. Je pense que s'il y avait eu un vote pour décider quoi faire de lui, même ses amis auraient décidé de l'exiler dans le couloir ! C'est quand des envies de meurtre vous passent dans la tête que vous mesurez à quel point les relations sociales au sein d'un groupe peuvent être fragiles...

Quand Thibaud m'a secoué ce matin, j'ai eu l'impression que je venais juste de m'endormir.

-"Ohlala, petite forme ce matin !

-"T'as réussi à dormir ?

-"Oui, nickel ! Allez va prendre ta douche, ça ira mieux après !"conclut-il en me déposant un bisou sur la joue.

Il y avait la queue aux douches et nous nous sommes retrouvés une bonne dizaine de gars à patienter en petite tenue devant les portes des six douches de l'étage. Certains avaient du mal à réfréner leur impatience et râlaient contre ceux qui se lavaient.

-"Grouillez-vous, les gars !

-"On a dit pas plus de cinq minutes, dépêche-toi !" reprend un grand gaillard en tambourinant sur le porte devant lui.

Un autre élève de première s'est approché de la porte de douche située devant lui et y a collé son oreille.

-"Hé Martin, je t'entends ! C'est pas le moment de te branler, t'attendras d'être à Nantes !"

Tout le monde a éclaté de rire et quand le pauvre Martin a ouvert la porte une minute plus tard, il avait les joues rouges.

'Parce qu'il vient de se faire chambrer ou parce qu'il est encore excité ?'

Chacun s'est fait son opinion...

...

Heidelberg est une très belle ville, ancienne, avec de grandes zones piétonnes, elle a beaucoup plus de charme que Sarrebruck et je comprends que monsieur Zeiger ait voulu nous la faire découvrir.

-"Heidelberg est considérée par certains comme la plus belle ville d'Allemagne. C'est la ville du romantisme et de l'amour et je suis sûr que vous tomberez sous son charme ! Ce matin, nous allons visiter le château et la vieille ville et cet après-midi nous nous installerons à l'auberge Lotte dans une des plus vieilles maisons de la ville. Vous aurez quartier libre jusqu'à ce soir alors profitez de votre dernière journée en Allemagne !

-"Vous avez de la chance, Diego, monsieur Zeiger, vous a fait un voyage sur-mesure ! me glisse Léa.

-"Oui, on dirait mais j'espère qu'il y en a d'autres que nous qui en profiteront...

-"Oh et tu penses à qui ?"

J'ai vu les joues de Corentin s'empourprer et il a détourné le regard.

-"Oh, à personne en particulier, c'est juste que si c'est romantique, c'est parfait pour déclarer sa flamme..."

Le château est magnifique. Il date du 13e siècle et a été en partie détruit. C'est d'ailleurs justement parce qu'il est en ruine qu'il est devenu le symbole du romantisme allemand.

De la cour d'honneur, la vue sur le Neckar est superbe. Nous avons fait des photos Thibaud et moi et une bonne partie du groupe, y compris les profs, nous a demandé de poser sur leur photo souvenir comme si nous étions devenus à notre tour le symbole de ce voyage.

-"Quand je le disais que vous étiez devenus la mascotte du groupe !" fait remarquer Marine.

-"Je préfère ça à tête de turc, je t'assure !"lui répond Thibaud.

-"C'est la révolution des mœurs et les gays sont à la mode !" reprend Enzo.

-"Je crois entendre une nuance de regret dans ta voix, Enzo ! Tu as envie d'essayer ?"

-"Non, non ! Les filles, s'il y en a une qui veut bien se sacrifier avec moi ?"

Nous sommes ensuite redescendus pour visiter la prison des étudiants. Heidelberg a toujours été un centre culturel et universitaire majeur mais de là a découvrir qu'il y avait un cachot pour les étudiants, cela a de quoi surprendre. Bien sûr, les profs n'ont pas pu s'empêcher de faire des commentaires.

-"Ce soir, nous ne serons que 55 à dormir à l'auberge." déclare monsieur Le Bon.

-"Ah bon, et pourquoi monsieur ?

-"Car Joris, Alex et Mélina ont une réservation ici !" reprend-il en tentant de faire mentir son patronyme.

-"Qu'est-ce qu'ils ont fait ?

-"Non-respect de l'heure de couvre-feu et tapage nocturne !"

'C'est donc eux qui sont rentrés au milieu de la nuit en rigolant comme des idiots !'

Nous avons poursuivi la visite par la place du marché, avec ses superbes maisons aux façades colorées, où nous nous sommes désaltérés avant de repartir de l'autre côté du Neckar en empruntant le Pont Vieux pour nous promener sur le chemin des philosophes après avoir, péniblement pour certains, grimpé jusqu'au sommet de la colline qui surplombe le fleuve. La vue y est vraiment magnifique et c'est vrai que c'est très romantique ; enfin cela le serait si nous n'étions pas au milieu d'un groupe bruyant d'une soixantaine de personnes !

Après avoir déjeuné dans une Gasthaus (auberge) du centre-ville, nous avons pris nos quartiers dans l'auberge de jeunesse et cette fois, nous avons réussi à prendre deux lits côte à côte, bien situés, loin de la porte près d'un mur.

'Bon, c'est pas tout à fait idéal mais il n'y a que 8 lits et la pièce est grande. Je vais peut-être réussir à dormir, cette nuit !'

Je ne sais pas si les voyages produisent toujours cet effet mais je trouve que nous sommes plus proches que jamais, que les liens entre les élèves qui se connaissaient déjà se sont resserrés mais également que nous en avons tissé d'autres , avec les élèves des autres classes y compris les premières et cela crée une ambiance sympa, détendue, blagueuse. Avec les profs, c'est la même chose ; nous les écoutons et suivons leurs consignes, enfin la plupart de temps, mais surtout nous les voyons sous un autre jour ; ils sont décontractés et cela se voit rien que dans leur tenue ; ils plaisantent entre eux mais aussi avec nous, ce sont presque devenus des amis ce qui leur donne un caractère humain que nous ne leur prêtons que rarement quand nous sommes au lycée !

Nous avons mangé presque tous ensemble, en petits groupes, dans la Gasthaus que monsieur Zeiger nous avait recommandée avant de partir nous balader et puis aussi bien sûr faire les achats pour les cadeaux à ramener à toute la famille. Pour ma part, je n'ai encore presque rien acheté et je commence à ressentir la pression du touriste qui arrive en fin de séjour !

C'est Thibaud qui a voulu entrer dans cette chocolaterie et j'ai vite compris pourquoi quand j'ai vu la spécialité du magasin, le Studentenküss c'est-à-dire le baiser des étudiants ! C'est un petit médaillon de chocolat praliné emballé dans un papier rouge et or avec en son centre un dessin représentant un jeune homme qui embrasse une jeune fille.

-"Oh c'est mignon !

-"Oui, je vais leur demander s'ils ont la version gay !"

Cela m'a surpris que Thibaud se lance dans une telle démarche, il n'est pas toujours très à l'aise en allemand mais surtout, qu'il ose s'affirmer ainsi en tant que gay devant des inconnus, c'est une grande première. J'ai profité qu'il était en train de parler avec la vendeuse pour me rapprocher de Corentin.

-"Hé Coco, c'est le cadeau idéal pour faire ta déclaration à Marine !

-"Oui, je sais mais...

-"Il n'y a pas de mais, fonce !"

Il m'a regardé en hésitant alors j'ai pris un sachet de chocolats et je l'ai mis d'autorité devant lui.

-"Allez Coco, je te donne pas le choix !

Il a rougi en regardant autour de lui et finalement l'a pris et s'est dirigé vers la caisse. Pour ma part, j'ai pris plusieurs sachets en me disant que ça ferait un petit cadeau sympa pour Madame Faure ou Sophie.

'Oh purée, dans deux jours, je serai de retour à Nantes !'

Le séjour en Allemagne est passé tellement vite et il me faudra bientôt faire face à nouveau à une réalité que j'avais un peu oubliée...

...

Annotations

Vous aimez lire valdomar ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0