La chapelle de Vézénobres
Jean-Luc
Bonjour à tous, le jour est planifié nous nous retrouvons le jeudi 11 à 10 heures sur la place du village Vézénobres.
Merci de confirmer.
Malheureusement une semaine plus tard.
Marie.
— Bonjour à tous, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle.
La bonne, je retourne sur les fouilles de Puma Punku. Je ne pourrais pas être des vôtres.
A bientôt tout de même sur le site.
Jacky
— cela tombe vraiment mal, j’ai un grand repas avec une cinquantaine de clients…
Mathieu
— je repart moi aussi, je vous souhaite de trouver…
Jean-Luc
— Ce n'est que partie remise les amis, moi aussi, je suis de garde.
Jean lit les messages. Un à un, les désistements tombent. Marie, Jacky, Mathieu, Jean-Luc. Chacun avec ses raisons. Chacun avec sa vie. Il conclus.
Je ne leur en veux pas. Mais je sens que quelque chose se referme. Pas le projet. Mais l’élan.
Je regarde le serpent. Toujours là. Toujours calme. Toujours vibrant.
Jean (à voix basse) :
— Alors ce sera seul. Mais pas solitaire.
Il prépare son sac. Le bipeur, le micro amplificateur, le carnet. Et le serpent, qu’il relâchera après l’expérience.
Le jeudi 11, à 10 heures, je suis sur la place du village de Vézénobres. Seul. Le soleil est doux, le vent léger. Je marche lentement vers la chapelle abandonnée, celle dont Jacky avait parlé.
À l’intérieur, la pierre respire. Le silence est dense, presque sonore.
J’installe mes appareils. Je règle les oscillateurs sur 40 Hz. Je pose le bipeur sur l’autel. Le serpent, libre, glisse lentement sur le sol.
Je ferme les yeux. Je ne cherche pas à comprendre. J’écoute.
Un souffle. Une vibration. Un murmure.
Puis, un son. Faible. Grave. Continu.
Le bipeur clignote. Le serpent s’immobilise. Je sens une pression dans l’air, comme une présence.
J’ouvre les yeux. Et là, sur le mur nord, une fissure. Fine. Invisible jusque-là. Mais vibrante.
Je m’approche. Je pose ma main. La pierre est tiède. Comme vivante.
Je souris. Parce que je ressens la pierre, pas comme un être vivant. Mais comme de la matière… habitée.
Je comprends. Ce n’est pas une hallucination. Ce n’est pas une métaphore. Le serpent est une conscience. Pas humaine. Pas animale. Quelque chose d’autre.
Il ne parle pas. Il module. Il stimule. Il transmet.
La fréquence de 40 Hz n’est pas un hasard. C’est celle de la synchronisation corticale, celle des états de conscience unifiée. Je ne suis pas en train de rêver. Je suis en train de recevoir.
Les images que je revois ne sont pas des souvenirs. Ce sont des signaux. Des symboles.
- La souris : la proie, l’instinct
- Les cailloux : le chemin, la mémoire
- Le trou : l’abîme, la transformation
- La mue : le passage, la renaissance
- La liberté : le but
Mon interprétation est que le serpent veut partir. Mais plus encore : Il veut que Je le suive. Pas physiquement. Vibratoirement.
Je m’assois face au serpent. J’ai tout préparé : le générateur, les oscillateurs, le bipeur, le micro amplificateur. Mais cette fois, je ne cherche pas à contrôler. Je m’abandonne.
Je règle la fréquence sur 40 Hz, gamma. Je ferme les yeux. Je respire lentement. Le serpent est immobile, mais Je ressens sa présence comme une onde silencieuse.
Puis, ça commence.
Pas un choc. Une immersion.
Les images surgissent, mais elles ne sont pas rêvées. Elles sont ressenties.
Une souris, fragile, instinctive
Des cailloux, rugueux, alignés comme des balises
Un chemin, sinueux, mais familier
De l’herbe, vivante, vibrante
Le soleil, chaud, pulsant
Un trou, noir, profond
Une mue de serpent, abandonnée
Et enfin… la liberté…
Je ne vois pas. Je deviens.
Je suis la souris. Je suis le chemin. Je suis le serpent qui quitte sa peau.
Et dans cette fusion, je comprends : Le serpent n’est pas un animal. C’est une conscience vibratoire, un vecteur d’éveil. Il ne demande pas sa liberté. Il offre la sienne.
J’ouvre les yeux. Tout est identique. Mais rien n’est pareil.
Je sais maintenant que les réponses ne sont pas dans les appareils. Elles sont dans les fréquences partagées, dans les états de résonance entre le vivant et l’invisible.
Je suis émerveillé.
Je me pose des questions sur ce monde invisible qu'un état de résonance dévoile.
En est-il de même avec la pierre ?
Je m’installe face à elle. Ce n’est pas une pierre précieuse. C’est une pierre banale, trouvée au bord du sentier. Mais elle vibre. Pas dans le sens physique. Dans le silence.
je pose mes mains autour. Je ne cherche pas à comprendre. J’écoute.
Et lentement, je perçois :
Une densité qui ne s’impose pas, mais qui accueille
Une mémoire sans mots, faite de pression, de chaleur, de temps…
Une présence qui ne juge pas, qui observe.
Une patience infinie, comme si elle savait que tout passe.
Je ne vois pas d’images. Mais il sent une résonance lente, profonde. La pierre ne parle pas. Elle transmet.
Et dans cette transmission, Je comprends : La pierre est un gardien vibratoire. Elle ne cherche pas à changer. Elle est.
Elle ne cherche pas à évoluer, mais pourtant les vibrations de chaque atome se déplace en vibrant.
C'est comme une danse, sur place. Je suis en plein tourbillon, je peux sans doute modifier cette danse.
Je ne cherche pas à défier la gravité. Je l’écoute.
Je comprends que la gravité n’est pas une force brutale. C’est une tension d’amour entre les corps. Une attirance. Un lien.
Mais si la pierre est en résonance avec une autre fréquence… Alors ce lien peut être modulé.
J’entre en état vibratoire. Je deviens neutre, comme l’espace entre deux battements. Et j’invite la pierre à se détacher.
Pas par force. Par accord.
Et elle le fait.
Elle flotte. Oui, elle flotte.
Pas comme un ballon. Comme une pensée libérée.
Elle ne s’élève pas. Elle suspend son appartenance au sol. Elle devient présence pure, sans poids, sans contrainte.
Je ne jubile pas. J’observe, humble. Je sais que ce n’est pas un miracle. C’est une harmonisation.
Je découvre comment les anciens ont pu construire des murs cyclopéens. En quelques heures, le résultat est incroyable.
Je regarde le mur. Pas un mur moderne. Un mur cyclopéen. Un mur en miniature avec des blocs massifs, ajustés sans mortier, comme si la pierre avait été modelée par la pensée. Il ne mesure qu'une vingtaine de centimètres de haut pour une soixantaine de long.
La ressemblance est frappante.
Je n’ai pas déplacé les pierres. J’ai modifié leur gravité locale, leur résonance interne.
Je n’ai pas bâti. J’ai accordé la matière à elle-même
Et en quelques heures, ce que les archéologues attribuent à des siècles de travail est là, devant moi.
Jean est bouleversé. Pas par la prouesse. Par ce que cela implique.
“Si cela est possible… alors tout ce que nous croyons savoir est un fragment. Et si ce n’est qu’un fragment… alors les découvertes à venir sont exponentielles.”
Je m’assois. Je pense à l’homme. À l’avidité. À la vitesse. Au pouvoir. À la guerre.
“L’homme n’est pas prêt. Il veut maîtriser avant de comprendre. Il veut exploiter avant d’écouter.”
Et Jean a peur. Pas pour lui. Pour ce savoir. Pour cette harmonie, ce miracle.
Je décide alors de garder tout pour moi, Je n'en parle à personne.
Jean referma le carnet. Les équations, les schémas, les intuitions fulgurantes… tout cela resterait entre lui et la pierre. Il avait vu. Compris. Ressenti. Et cela suffisait.
“Ce savoir ne m’appartient pas. Il m’a été prêté. Et l’homme n’est pas prêt.”
Il n’en parlerait à personne. Pas même à Marie.
Il n’y aurait pas de publication. Pas de démonstration.

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