Le Temple de Hoysaleswara
Nous avons passé la nuit dans un parc, dans un buisson. Notre peur est bien réelle. De bonnes heures le matin, nous quittons Tokyo pour Yokohama, Marie me précise :
— Située à environ 30 km au sud de Tokyo, elle est facilement accessible. De là, nous irons à l’aéroport de Haneda, qui dessert des vols nationaux et internationaux. Nous ferons une escale par Bangkok pour rejoindre Bangalore en Inde.
— Oui, je vois, il vaut mieux être prudent.
Le train vers Yokohama est presque vide. Marie regarde par la fenêtre. Mais elle ne voit pas le paysage. Elle écoute.
Jean tient le boîtier contre lui. Le signal est faible. Mais stable.
Jean a un flash. Le portable, je l'ai mis dans le sac avec le boîtier, il cherche et le trouve, voyons voir ce que tu peux nous apprendre.
Jean fouille le portable du commando. Un dossier crypté. Il l’ouvre. Quelques lignes. Pas besoin de plus.
“ Sphère :
- Découverte : ligne 9, secteur enfoui.
- Interface neuro-fréquentielle sur une taxonomie étendue. Contrôle cognitif.
- Expérimentation en cours depuis 5 ans. Recherche bloqué : programmation incompréhensible.”
Jean reste figé. Le monde autour continue. Mais en lui, quelque chose se fissure.
Il relit. Pas de détails. Pas de schéma. Juste une certitude :
La sphère agit sur les esprits de tout être vivant.
La sphère, c'est là que se trouve la Mémoire.
Ils sont bloqués, ils en savent bien moins que nous.
Heureusement, la neutralisation de la Mémoire est irréversible.
Il pense à Marie. À la spirale. À " UTILE ". Et comprend : Ils n’ont pas trouvé un artefact. Ils ont réveillé un système.
Ce n’était pas une théorie. C’était une orientation. Une réponse en attente d’action.
Jean reste immobile, le regard fixé sur l’écran. Puis il murmure :
— Si la sphère agit sur les esprits… alors elle doit émettre en continu. Pas seulement stocker. Transmettre.
Marie s’approche.
— Tu veux dire qu’elle influence les pensées ?
— Pas directement. Mais elle pourrait moduler l’attention, la mémoire, les intuitions. Comme une fréquence sous-jacente.
Marie réfléchit.
— Et si les temples étaient des relais ? Des amplificateurs ?
Jean hoche la tête.
— C’est possible. Et si c’est le cas… alors chaque activation locale pourrait réveiller une partie du système global.
Marie murmure :
— Une cartographie vibratoire. Un réseau enfoui.
Jean se lève.
— Il faut retrouver les autres sites. Il faut bien commencer, tenons-nous en à ce qui était prévu.
À Yokohama, ils marchent sans se presser. Comme s’ils voulaient diluer leur présence. Le monde semble normal.
À Bangkok, au cœur du marché Chatuchak et dans une échoppe de Soi Sukhumvit, nous cherchons des vêtements sobres. Du lin froissé, des couleurs ternes, des chapeaux à larges bords... Le vendeur vous observe sans poser de questions. Le but est clair : Passer inaperçus.
Une fois à Bengaluru, nous avons loué une voiture, nous sommes en route vers Halebidu. La voiture roule sous le ciel cotonneux du Karnataka. La route serpente entre champs de canne à sucre et collines parsemées de palmiers. Marie, silencieuse, lit une carte froissée. Moi, les mains serrées sur le volant, ne peux m'empêcher de scruter les rétroviseurs.
Au bout d’un chemin de pierre, le temple se dresse comme un livre ouvert en stéatite, chaque mur sculpté comme une fresque silencieuse. Nous descendons lentement de la voiture. Aucun bruit, hormis le chant lointain d’un paon. Et dans l’air, cette étrange impression... Comme si l’histoire nous attendait.
Jean questionne :
— Que va-t-on trouver dans ce temple . Il n'est pas si vieux.
— En Inde, le temps est perçu comme cyclique, non-linéaire. On parle de Yugas : Quatre âges cosmiques qui se répètent en boucle.
On est actuellement dans le Kali Yuga, l’ère du déclin moral et spirituel, censée durer 432 000 ans.
Le dieu Shiva incarne le destructeur du temps, celui qui dissout le passé pour permettre la régénération.
Les temples, les sculptures et les fresques conservent le souffle des siècles. Le temps s'y dépose comme une poussière d’or.
Le Temple de Hoysaleswara n'a pas d'âge en fait. —
Nous avons fait le tour du temple, pris le temps de bien tout observer, la pierre est sculptée comme de la dentelle, avant de franchir la porte, nous contemplons les statues, il y a beaucoup de musique invoquée.
Nous franchissons enfin le seuil. Le sol est tiède. Comme s’il gardait la mémoire des pas. C’est une musique figée, gravée dans la matière. Les motifs sculptés semblent pulser très légèrement. Un frémissement presque imperceptible, comme si la pierre se souvenait. Marie s’arrête devant une frise. Des musiciens. Des danseurs. Mais leurs gestes sont impossibles. Trop précis. Trop fluides. Comme s’ils rejouaient une fréquence.
Jean, regarde leurs mains. Elles ne tiennent rien. Si, elles invoquent.
Le silence devient dense. Le temple ne parle pas. Il exprime.
Dans la salle aux colonnes, Marie est en admiration, elle frôle les colonnes du bout des doigts.
— Tu as vu le travail sur les colonnes ? Jean hoche la tête.
— Elles ont été tournées. C’est évident.
— Mais à cette époque, aucun tour. Aucun mécanisme connu. Alors quoi ?
— Oui, c'est vrai, tu as raison, mais alors comment ? Ici aussi, nous sommes dans l'irrationnel. —
La pierre est sculptée comme de la dentelle… mais impossible à reproduire, même aujourd’hui, malgré les machines, les lasers, les scanneurs.
Marie murmure :
— Peut-être qu’il ne faut pas penser en technologie… mais en fréquence.
— Je vais faire une photo. Dit Jean.
Il se baisse pour fouiller dans son sac pour prendre son appareil et dans cette position, il relève la tête et regarde la colonne devant lui, elle se découpe sur la lumière de l’entrée. Ce qu'il contemple est pour lui une évidence. La courbe de la colonne et une fréquence.
Il se déplace devant d’autres colonnes toutes sont différentes, mais d'une précision remarquable.
Il se lève et observe une colonne, il n'en croit pas ses yeux. Il demande à Marie.
— Marie, dans ce recoin personne ne peut me voir, je monte, toi quand je te le dis, tu tournes le fût de la colonne.
— Que vas-tu inventer, les colonnes sont fixes ?
Jean monte près du sommet du pilier, il examine le chapiteau, celui-ci est très ouvragé. Il y a une pièce qui lui semble mobile, il appuie dessus, elle se déplace facilement.
— Marie, tourne le fût de la colonne.
— Il tourne, c'est fabuleux.
Jean redescend et dit à Marie.
— Tous ces pylônes tournent, regardons, cherchons à comprendre ce qui nous entoure. —
Marie et Jean avancent entre les colonnes. Chacune semble unique. Chacune semble accordée.
Nous cherchons, mais quoi chercher, je me penche sur la partie inférieure, souvent décorée, qui repose sur le sol, le piédestal. Rien.
Jean pose sa main sur un fût. Il le tourne doucement. Un léger crissement. Puis… un changement dans l’air.
Marie s’arrête.
— Tu sens ça ?
— Oui. Comme si le temple répondait.
Ils tournent une autre colonne. Puis une autre. À chaque rotation, une modulation subtile. Le silence se densifie.
Marie s'étonne :
— Ce n’est pas un temple.
— Non. C’est un instrument comme un orgue.
Ils s’arrêtent devant une colonne plus sombre. Jean la touche. Elle ne tourne pas. Mais elle pulse.
Il ferme les yeux. Un son intérieur. Une fréquence. 417 Hz.
Marie murmure.
— Là, regarde.
Marie est tête en l'air, elle regarde le plafond, il y a une fresque une sorte de mandala.
— C'est quoi ce truc, regarde, il y en a un peu partout et aucun identique.
— On dirait des générateurs de fréquence en trois dimensions. Je n'ai jamais rien vu de semblable...
Il y a forcément une salle de contrôle.
Faisons le tour de la pièce prend à droite moi à gauche.
— Je cherche quoi au juste ?
— Marie, cherche un passage, une dalle qui peut pivoter, une salle cachée... —
Les voilà partie chacun dans une direction, seulement quelques minutes passées.
Marie s’éloigne, longe les murs. Jean reste au centre, attentif aux pulsations. Chaque pas semble moduler l’espace.
Marie frôle une dalle. Un léger souffle. Elle s’arrête.
Marie l'appelle :
— Jean, viens voir.
Marie découvre une dalle étrange : Elle semble banale, mais sa surface vibre légèrement, et lorsqu’elle pose sa main, elle ressent une pulsation, comme un cœur enfoui dans la pierre.
— Je suis sûre que la porte est là, mais il n'y a rien pour l'ouvrir.
Jean réfléchit, nous ne sommes pas dans une société technologique, il faut résonner... Oui, c'est ça raisonné, une fréquence. Il sort aussitôt son émetteur. Jean affiche la fréquence 417 Hz, rien ne se passe.
— Quelle fréquence d'après toi ?
Marie, sans hésiter dit :
— Essaye la 311. —
Jean s'exécute, il sélectionne, 311 Hz en tournant le curseur. Une pierre banale, un souffle enfoui… Et la fréquence. 311 Hz, le mur ne s'ouvre pas. Il s'efface, comme si l'espace reconnaissait enfin son esprit.
Jean et Marie pénètrent dans une salle ovale, haute, obscure et silencieuse. Elle n'est pas vide.
Marie murmure :
— Ce n’est pas une salle de contrôle.
— Non. C’est une chambre d’accord.
— Un lieu où la mémoire ne s’archive pas. Elle s’accorde. Elle se joue.
Les cônes... Disposés en spirale, de tailles variées, certains lisses, d'autres nervurés.
Chacun semble orienté selon un axe distinct, avec un alignement non-aléatoire.
Une faible lumière bleutée s’échappe de leur pointe, pulsée… Pas constante.
Marie s’approche d’un cône aux motifs géométriques :
…Elle tend la main, sans le toucher. Le cône pulse plus fort. Comme s’il reconnaissait sa présence.
Jean observe en silence. Il comprend : ce lieu ne réagit pas à la force, ni à la logique. Chaque cône semble émettre une fréquence propre.
— Ils émettent. Pas du son, pas de lumière. De la monographie.
— Oui… une mémoire vibratoire. —
Ils avancent lentement. Au fond, une niche circulaire avec un pupitre en stéatite noire en arc de cercle il y a des protubérances, Marie se penche sur cette table de mixage d'un type inconnu.
Ce motif ressemble à une onde figée. Une onde sculptée dans la matière
Elle hésite, puis pose sa main sur une bosse. Son esprit est aussitôt connecté, elle dirige, se dirige, elle commande, gouverne, choisi, interprète. Ses mains se déplacent d'elle-même sur des commandes comme les commandes d'un organe gigantesque, mais intelligent...
Jean est ressorti de la pièce.
Le temple, autrefois figé dans la pierre, s’anime en pulsations. Les colonnes tournent comme des rotors quantiques, les fresques du plafond diffusent une lumière fossile, fluorescente, oui, mais mémorielle. Jean ne peut plus supporter l’onde. Elle est trop pure, trop brute. Il rampe, guidé par l’instinct, par l’appel de Marie, par le murmure du cœur enfoui sous la dalle. Les fûts des colonnes tournent à une vitesse incroyable, mais surtout, les plafonds sont fluoresçent. Jean tombe à genoux les mains sur ses oreilles, les fréquences sont insoutenables.
…Jean rampe, le corps traversé par des ondes qu’il ne comprend pas, mais qu’il ressent jusque dans ses os. Chaque rotation de colonne semble déclencher une modulation du réel. Les plafonds vibrent, les murs respirent. Le temple n’est plus un lieu : c’est un système en activation.
Il atteint l’ouverture de la chambre, franchit le seuil, et soudain…
Le silence.
Marie est là, debout, les yeux mi-clos, les mains en mouvement sur le pupitre, toujours connectée à la console en stéatite, elle semble fusionnée. Ses gestes ne sont plus humains, ils sont géométriques, chorégraphiés. Ils suivent une logique venue d’ailleurs. Elle ne pilote pas. Elle interprète. Le pupitre réagit à ses intentions. Des cônes s’illuminent, d’autres vibrent à peine, certains tournent lentement sur leur base.
Jean murmure, haletant :
— Marie… arrête… Mais elle ne l’entend pas. Ou plutôt : elle entend autre chose.
Le pupitre pulse. Les cônes s’illuminent. Une onde traverse la pièce. Pas une lumière. Une mémoire.
Jean se redresse. Il comprend. Ce n’est pas Marie qui pilote. C’est la mémoire qui la traverse.
Elle parle enfin, d’une voix étrange, presque désaccordée :
— Jean… je vois.
— Tu vois quoi ?
— Le système.
— " UTILE " ?
— Non. Avant.
Jean, épuisé, se redresse.
— Marie… Que fais-tu ?
— Je crois… Que je trie.
— Tu tries quoi ?
— Les mémoires. Les couches vibratoires. Je crois que chaque cône est une période, une strate… Un âge.
— Tu veux dire qu’on peut accéder à un temps ?
— Non, Jean… Ici, le temps répond. —
Elle pose ses deux mains sur le pupitre. Un cône central s’ouvre. Une spirale s’élève, lente, silencieuse. Elle ne tourne pas. Elle lit.
Et dans ce silence, une pensée traverse Jean :
“Ce que nous appelons activation… Est parfois une lecture inversée.”
La spirale s’élève. Elle ne tourne pas. Elle lit.
Autour d’eux, les cônes vibrent à l’unisson. Une fréquence globale s’installe. Pas une note. Un état.
Le pupitre affiche soudain un motif triangulaire en rotation lente. Trois fréquences apparaissent : 311 , 417 , 852, des phases déjà connues. Mais une quatrième surgit. 999 Hz, elle ne pulse pas. Elle absorbe.
Marie hésite.
— Si je suis " UTILE ", j’ai accès à… —
Le mur en face d’elle est constitué d’un cristal noir poli. Il s’illumine. Les images défilent. Nous voyageons dans le temps et l’espace.
C’est hallucinant. La planète semble entièrement domestiquée. Nous reconnaissons certains sites : les pyramides, majestueuses, brillent d’une blancheur irréelle sur fond noir. Les édifices sont fonctionnels, achevés dans une architecture vertigineuse. D’autres sont en construction : les mastodontes déplacent des blocs de centaines de tonnes, accompagnés de musiciens qui jouent une partition que personne n’entend… Mais utile.
Et surtout… nous comprenons.
Jean me précise :
— La fréquence est une caractéristique intrinsèque des ondes, déterminant leur tonalité, leur énergie, et parfois leur couleur dans certains spectres. Mais lorsque nous explorons une autre dimension, cette fréquence cesse d’être une simple onde : elle devient particule. Dans le domaine quantique, certaines ondes semblent même défier la gravité.
Marie interroge :
— Dans notre dimension, la gravité n’est pas abolie.
Jean répond :
— Non. Elle est… contournée. L’apesanteur devient un langage. Une fréquence.
— Tu peux être un peu plus clair.
— Cette civilisation possédait un savoir oublié : non seulement, elle pouvait déplacer des blocs de pierre colossaux, mais elle savait aussi les façonner avec la seule puissance des ondes. Un art vibratoire, ancestral, échappant aux lois connues de la physique moderne.
— Tu es sérieux ?
— Nous sommes dans un monde dirigé, où chaque individu a sa place. C’est difficile à comprendre, mais j’ai compris que si chacun est bien employé, ses dons sont amplifiés. Le gaspillage devient inexistant, la surveillance permanente. Les loisirs sont valorisés, l’implication récompensée.
— Ce sont des robots.
— Non. C’est une société sans hasard. Tout est utile. Valorisé. Optimisé. Muté.
Il marque une pause. Puis :
— Tu sais, Marie… Le cerveau ne stocke pas les souvenirs comme des archives. Il les reconstruit.
À chaque appel. Et à chaque reconstruction… il les modifie. Un souvenir n’est jamais pur.
Il est réminiscence d’une réminiscence. Et si la Mémoire minérale agit sur ce processus…
Alors elle organise. Elle module. Et parfois… elle substitue. Elle impose une vérité vibratoire. Et les vivants… s’y accordent sans le savoir. Ainsi… elle peut contrôler tout le reste.
Marie est sans voix.
— Imagine, c'est ordre des choses entre les mains de voyou, c'est une dictature où tout le monde est sous contrôle.
— C'est pour cela que j'ai lancé le doute dans leurs programmes quantiques.
— Il faut détruire tout ce système.
Un souffle traverse la salle juste avant que Jean s’approche du pylône. Marie lève la tête brusquement.
— Attends… il se passe quelque chose. Les touristes sont mécontents.
— Retourne au pupitre, je vais voir ce qui se passe. —
Jean se dirige vers la sortie, il se fige derrière une colonne juste à temps. Des hommes en noir cagoulés font sortir le public.
La visite vient juste de commencer.
— Police évacuez les lieux, c’est pour votre sécurité…
Je rebrousse chemin et rejoins Marie. Je lui explique la situation.
Nous décidons de sortir et de refermer la salle. Pas plus tôt la porte close.
— Ne bougez plus, mains derrière le dos. Attachez-les. —
Nous sommes entourés par une demi-douzaine d’individus vêtus de noir, en tenue d’intervention :
Bottes, genouillères, gilets pare-balles, casques.
Leurs gestes sont secs. Leur silence, total. Leurs armes parlent pour eux.
Sans ménagement, ils nous entraînent vers l’extérieur.
Ils nous propulsent hors du temple. Le ciel du Karnataka est lourd.
Le chef des récupérateurs sort une carte officielle et prend la parole.
Il n'y a plus de souci, les malfaiteurs sont arrêtés, la visite peut reprendre. Ils nous enferment dans la camionnette. Les véhicules démarrent dans un nuage de poussière.
Le voyage est très inconfortable, les mains attachées dans le dos impossible de se maintenir en place à chaque virage, nous roulons sur le plancher de la camionnette, nos têtes heurtent les montant de la carrosserie. Le temps ne s'écoule pas vite, mais plus de deux heures après le véhicule stoppe enfin, nous sommes fourbus. Le sol tremble encore sous nos genoux. La poussière du plancher s’est déposée sur nos vêtements, mais le mystère n’est pas effacé.
Nous sommes conduits dans une salle, assis sur des chaises, toujours ligoté.
Un homme rentre et prend place en face de nous. Il entre de suite dans le vif du sujet.
— Votre métier, vous a permis d'avoir accès à des informations ultra-secrètes, l'état est prêt à fermer les yeux sur vos débordements, il faut en échange, nous fournir toutes vos notes et surtout la rosace.
Jean n'est pas prêt à céder.
— Sinon ? Lance-t-il
— Vous allez croupir dans une sale geôle pour le restant de vos vies.
— Le musée est au courant de tous nos déplacements, ils sauront nous retrouver. Dit Marie
— Nous avons eu du mal à vous suivre, malgré les moyens mis en œuvre, le musée ne retrouverait pas une portée de chatons dans son hémicycle. Où se trouve la rosace ? Le ton a changé !
Le personnage, officiel sans doute, quitte la pièce et en sortant annonce :
— Je vous les laisse taché dans tirer quelque chose.
Le plus costaud s'approche de Jean et lui décoche une terrible droite. Contre toute attente, l'homme est projeté en arrière.
Le second veut s'en prendre à Marie, mais ses jambes ne le portent plus du tout.
Hors d'atteinte, nous sommes propulsés dans une cellule insalubre.
La porte claque. Le verrou glisse. Silence.
La cellule est humide, les murs suintent. Jean s’assoit lentement. Marie se met debout, elle défroisse ses vêtements.
— Tu as vu ce qui s’est passé ? Demande-t-il.
— Je l’ai senti. Pas vu. Comme une onde. Une réponse.
Jean hoche la tête.
— Je l’ai simplement pensé. Tu comprends ?
— Tu veux dire que le fait de le penser l’a provoqué ?
— Je n’en sais rien… —
Allonger sur le sol, Jean réfléchit,
je me suis déjà retrouvé dans cette situation, rappelle-toi, tu peux y arriver.
Marie intervient.
— Que fais-tu ?
— Je me remémore mon immersion dans ce monde quantique. Il y sûrement un moyen, laisse-moi faire. —
Jean, se concentre à nouveau, il doit sortir, il regarde le monde différemment, comment, ou avec des facettes.
La cellule est exiguë, mal éclairée. Une ampoule clignote, suspendue à un fil comme une étoile mourante. Les murs suintent une humidité oubliée. Mais Jean ne voit plus la pièce : il la recompose.
— Je ne regarde pas l’espace qui m'entoure… je regarde ses facettes.
Marie observe, inquiète. Mais elle sent qu’il n’est plus tout à fait là, ni tout à fait ici.
Jean bascule dans sa cartographie vibratoire.
Il ferme les yeux. Visualise la rosace, ses motifs fractals, ses angles impossibles. Puis les résonances : les fréquences qui avaient révélé le passage dans le temple. Il murmure, lentement, avec précision :
— 143… 285… 417… la clef n’est pas dans l’énergie… elle est dans le pli. Oui bien sûr. —
Le pli du monde de la matière. Une torsion dans l’espace-temps.
Jean voit le mur non comme une surface, mais comme une séquence d’intervalles de la matière et beaucoup de vide.
Il choisit une zone : là où la peinture s'est craquelée en motif hexagonal.
Il concentre sa pensée :
— Résonne… Déplie.”
Le mur vibre très légèrement. Marie écarquille les yeux.
— Jean… Ce n’est pas une illusion. Le mur… Il respire ou il se liquéfie.
La cellule a un seuil. Mais il n’est visible que par eux.
Jean se redresse. Place sa paume contre le mur.
— Il ne faut pas pousser. Il faut incliner la réalité. Il accorde.
La surface craquelée pulse doucement. Et le mur, se dilate, presque liquide. Une ouverture fine comme une cicatrice s’ouvre, une brèche entre deux états. Comme une mémoire qui cède.
— Marie, vite. Avant que le système ne corrige la géométrie.
Ils glissent dans la faille. Le mur se referme lentement derrière eux.
— Comment cela est-il possible ? Demande Marie.
Jean murmure :
— C’est une chambre d’écho.
— De quel écho ?
— De ceux qui ont résonné avant nous.
Marie s’arrête. Elle tend la main. Un motif apparaît sur le mur. La rosace. Mais inversée.
— Nous devons nous enfuir. —
Le monde de Jean n’est plus celui de Marie.
Dans l’obscurité, là où toute chose semble dissimulée, Jean voit à travers. Sa vision se fragmente en spectres thermiques, reflets d’un monde invisible. Il perçoit les ondes de chaleur comme des courants dans l’air, des éclats derrière les murs, des présences dissimulées dans les profondeurs.
— La nuit est un voile pour les uns… pour moi, c’est un parchemin. —
Marie titube dans le labyrinthe, s’oriente comme elle peut. Elle s’accroche à Jean, qui suit des sentiers que nul n’a cartographiés que lui seul peut trouver.
Le programme " UTILE " du monde quantique a reconfiguré son cerveau :
Jean est devenu un intégrateur, avec les perceptions d'un insecte.
Il anticipe les gestes, les pièges, les battements du système, les détecteurs de présences.
Il lit la température les courants d’air, le son du métal, la structure du silence.
Il décode chaque seuil comme un schéma multidimensionnel.
Marie demande :
— Comment peux-tu voir tout ça ?
— Je ne vois pas. Je traverse. Je serpente jusqu'à la sortie.
Jean soudain s'arrête, derrière une vitre, une salle. Vide. Mais chargée.
Des écrans. Des pupitres. Et au centre, une sphère. Noire. Pulsant. Presque vivante.
Jean allume les néons par sa simple volonté.
Marie recule.
— C’est elle. Oui. La source. Le noyau. Le cœur du système " UTILE ".
— Ils l'ont reproduite, mais elle n'est pas active. Partons. —
La porte, la sortie est là.
Dehors, un garde, une ombre, un battement, une chaleur fugace.
Jean s’approche. Calme. Chirurgical.
Il neutralise. Silence.
Le garde s’effondre sans bruit. Jean le dépose doucement contre le mur.
Marie le regarde. Elle ne reconnaît plus l’homme qu’elle aime. Mais elle le comprend.
Ils avancent jusqu'à la porte du garage pas verrouillée. Mais codée par fréquence.
Jean pose sa main. Il ne cherche pas à ouvrir. Il s'accorde. La porte s’efface vers le plafond.
Les clés du véhicule sont froides, leur métal encore vierge de contact humain. Il les fait glisser à Marie sans un mot. Ensemble, ils poussent la voiture. Pas un bruit, sauf celui du monde qui attend leur sortie. Marie ouvre le portail qui donne sur la rue.
Ils montent et démarrent.
Jean conduit tout phare éteint, Marie ferme les yeux, elle attend le choc qui ne vient pas.
— Comment peux-tu voir ? Oui, pardon
Ils montent et démarrent. Jean conduit, tout phare éteint. Marie ferme les yeux. Elle attend le choc… Qui ne vient pas.
— Comment peux-tu voir ? — Oui… Pardon.
À peine cent mètres parcourus. Des phares surgissent derrière eux. La chasse est lancée.
Jean serre le volant. Il conduit comme en transe, comme dans une course de voitures, mais sans public, sans ligne d’arrivée. Les virages sont avalés, les creux du terrain absorbés. Le moteur hurle. Le souffle court. Marie s’accroche, mais ne dit rien.
Les poursuivants gagnent du terrain. Ils sont rapides. Organisés. Mais Jean ne suit pas une route. Il suit une fréquence.
Un chemin qu’il ne voit pas, mais qu’il sent. Comme si le disque, quelque part, guidait ses gestes.
Un virage brutal. Un talus. Un passage entre deux rochers. Les phares derrière eux s’éteignent un à un. Le piège a fonctionné. Ils ont perdu leur trace.
Silence. Ils roulent encore, dans le noir. Le monde semble suspendu.
Jean ralentit.
— On ne peut pas fuir indéfiniment. Il faut retourner au temple. Le détruire.
Marie ouvre son terminal. Elle analyse les données.
— Ce ne sera pas si simple. Le complexe est protégé contre toute forme d’annihilation. Mais… il doit bien y avoir une procédure. Un protocole. Quelque chose qui le rende inopérant. Vérolé.
— Tu es géniale, tu as trouvé, tu te rappelles le film où à la fin le héros injecte un virus dans le programme des extraterrestres.
— Oui, Independence Day. Tu comptes mettre un virus dans le programme ?
— Non, ce n'est pas possible, mais une antiparticule.
Marie se rappelle que les systèmes du temple sont sensibles à une forme de résonance quantique instable, que l'antiparticule pourrait provoquer. Pas une explosion, mais une déstructuration de l’information elle-même.
Elle pose ses mains sur la console, les yeux encore fermés, mais son esprit est en ébullition.
— L'antiparticule… Elle ne détruira rien. Elle... effacera.
Jean freine enfin, le véhicule glisse, poussière stellaire sous les roues. Il la regarde.
— Tu veux le rendre aveugle.
— Non. Je veux le rendre hors d’accès, hors mémoire. Une résiliation ne suffit pas. Il faut un effacement vibratoire, un glissement dans l’oubli cosmique. Je veux le désintégrer.
Pas l’effacer. Le briser au cœur de son existence. Que ses particules refusent de se souvenir d’avoir été liées.
— Jean redémarre.
Jean conduit silencieux. Il comprend. Ce n’est pas une guerre. C’est une résonance inversée.
Marie ouvre les yeux. Son regard est calme. Mais chargé. Comme une onde prête à se libérer.
Elle murmure :
— L’antiparticule n’est pas une arme.
— Non. C’est une négation de la mémoire.
Ils roulent vers le temple. Le ciel est noir, mais chargé d’éclats. Comme si les étoiles elles-mêmes attendaient.
Jean ralentit. Le temple apparaît. Pas comme un monument. Comme une présence.
L’entrée du temple est gardée.
Jean compose le numéro du chef des gardes.
Qui décroche aussitôt.
— Oui, Patron.
La voix du Patron résonne, métallique, autoritaire :
— Rentrée. Vous couchez. La situation est sous contrôle.
— Oui, Patron. Merci, Patron. Les gardes se dispersent sans un mot. Le silence revient. Le temple attend.
Marie regarde Jean.
— Tu es incroyable.
Jean ne répond pas. Il écoute encore la résonance du mot “Rentrée”. Comme si le système venait de se parler à lui-même.
Une fois dans la salle. Marie prépare le dispositif. Elle ne programme rien. Elle accorde.
— Il faut que la fréquence soit instable. Comme une faille.
— Comme un doute.
Marie entre les valeurs. 999 Hz. Modulation inversée. Un pli. Un glissement. Le temple pulse. Mais rien ne se passe.
Jean murmure :
— Je vais bloquer un pilier… Et lui demander… De retrouver la fréquence 999… Avant sa naissance.
— Tu penses que ça va marcher.
— Essayons, nous verrons bien.
Marie retourne vers le pupitre. La console vibre encore sous ses doigts, ses gestes guidés par une intelligence qui dépasse les sens.
Jean, lui, s’agenouille près d’un des pylônes rotatifs. Il bloque sa rotation, comme pour marquer un point fixe dans le chaos vibratoire.
— On a figé l’axe… maintenant, demande-lui, Marie. Demande-lui où était la fréquence 999… avant ta naissance.
Marie hésite. C’est une phrase étrange, presque paradoxale. Mais elle comprend : ce n’est pas sa naissance biologique qu’ils questionnent, c’est celle de sa conscience, celle qui a été traversée, utilisée.
La salle change. Les cônes résonnent à l’unisson. Le pupitre s’assombrit légèrement.
Une onde intérieure monte, plus ancienne que le temple lui-même :
L'esprit de Marie résonne : “La fréquence 999 était positionnée dans l’ombre de l’éveil. Elle précède l’intention, elle est ce que vous appelez… le seuil d’oubli.”
Marie frémit.
— Jean… je crois que 999 n’appartient ni au passé, ni au futur.
— Tu veux dire…
— Elle était là avant tout. Peut-être qu’elle n’a jamais été émise
— Juste attendue.
Et maintenant ?
Le système commence à réagir. Le pupitre affiche des lignes inconnues. Les colonnes frémissent. Une onde nouvelle s’apprête à traverser le lieu. Une onde hors du temps.
Jean sort un carnet, rugueux, tanné par les jours, et commence à lire.
1 - La fréquence 311 maintient l’indétermination.
2 - La rosace agit comme guide d’harmonisation quantique.
3 - La désintégration ne provient pas du choc, mais du relâchement du chant.
4 - Ne pas chanter = permettre la réduction = retour à la poussière.
Marie observe en silence, ses mains tremblent, mais son esprit non.
— L’antiparticule… Elle ne détruit pas. Elle efface. Elle ne combat pas. Elle désaccorde. Elle ne tue pas. Elle rend illisible. C'est la résonance avec l'onde.
— Jean, il faudra calibrer l’antiparticule. Si elle entre en résonance trop tôt, on sera pris avec.
— On aura une minute. Pas plus. La rosace donnera le signal.
— Et si elle ne réagit pas ? Jean lève les yeux.
— Elle réagira. Elle attend que quelqu’un la fasse cesser.
— La note n’est pas dans la voix. Elle est dans le souffle avant le chant.
Jean acquiesce. Ils respirent ensemble. Un battement. Un second.
Un chœur s’élève… muet. Des vibrations minuscules grésillent dans le sol. Le complexe entier semble soupirer.
Marie chante. Mais ce n’est pas un chant : c’est l’ombre d’un chant, suspendue dans la gorge, délivrée comme une absence.
Le temple vibre. La rosace se fissure. Jean observe les murs. Les glyphes s’effacent, lentement, comme si le temple se déchargeait de sa mémoire.
— L’antiparticule est prête. Marie baisse la tête.
— Elle nous oubliera.
— Peut-être… mais le chant, lui, ne s’oublie pas. Dernière note. Un souffle. La désintégration, la mémoire, l'intelligence, le monde antique se figent, puis le néant.
Ils sortent du temple. Le sol se colore. Le ciel, fendu d’ocre et de bleu, semble suspendu.
Le monde ne parle plus. Il écoute.
Et dans ce silence, un battement. Lent. Majestueux.
Un aigle descend, porté par les courants invisibles.
L’aigle ne plane pas. Il trace. Il ne regarde pas. Il se souvient.
Jean et Marie s’arrêtent. Ils ne bougent plus.
L’aigle se pose sur une pierre, à quelques mètres. Il les regarde. Pas simplement avec les yeux. Avec sa mémoire ancienne.
Marie murmure :
— Il sait.
Jean hoche la tête.
— Il a toujours su. C’est celui dont je t’ai parlé.
L’aigle incline légèrement la tête. Puis une voix intérieure, sans timbre, sans langue, traverse leur esprit :
“La mémoire dominait le monde du vivant.
Elle conservait.
Elle ordonnait.
Mais elle ne laissait pas voler.
“Nous avons eu raison de vous faire confiance.
L’homme est si égoïste… Mais parfois, il doute.”
Il devient alors un être aux talents prodigieux.
Jean baisse les yeux. Marie s’approche.
Ils savent que ce n’est pas un compliment.
— Alors nous avons brisé le lien.
Pas pour détruire.
Pour ouvrir.
Par amour—
Puis, lentement, il incline la tête vers le sol. Comme pour saluer ce qui fut. Et ce qui ne sera plus.
L’aigle déploie ses ailes. Un souffle traverse le lieu. Pas une brise.
Une libération.
Et dans ce silence, une pensée traverse leur fréquence commune :
“Ce que nous appelons liberté… Est parfois ce que la mémoire ne peut contenir…”
De retour à la voiture Jean conduit en silence, Marie est plongée dans ses pensées.
Nous choisissons un petit hôtel, un repas nous est servi. Nous mangeons en silence, les paroles sont trop fades en comparaison de ce que nous venons de vivre, revenir à la réalité du quotidien est difficile.
Jean allume le téléviseur.
Marie reste figée. Sur l’écran, les images défilent : des monuments millénaires s'effritent comme un vieillissement prématuré, des sites sacrés réduits à un voile. Les Moaï de Rapa Nui, les pyramides silencieuses, les remparts de villes oubliées… Tous ont l'aspect des millénaire passé. Seules les fondations résistent, comme si elles appartenaient à un monde oublié.
Personne ne s'explique ce phénomène.
— Qu’avons-nous fait ? Souffle-t-elle, les doigts serrés autour de sa tasse.
Jean ne répond pas tout de suite. Il note encore, sur une serviette cette fois, dans une écriture fine et inclinée. Ses pensées ne cherchent pas à comprendre, elles cherchent à préserver.
Jean repose son stylo. La serviette est couverte de symboles, des cycles, des phases, des lignes brisées. Mais il ne les lit pas. Il les ressent.
— Ce n’est pas nous, Jean.
— Alors qui ?
— Celui qui a chanté le monde. Nous avons juste… arrêté le chant.
Jean s'interroge.
— Ont-ils désintégré l’architecture ? Ou la mémoire ?
Comment le savoir ?
Marie a une idée.
— Utilise ton don de vision est transmet une information.
— Tu as raison, je vais faire un essai.
Jean ferme les yeux. Il convoque la rosace, l’éclat des pierres, le halo des glyphes… Mais rien ne vient.
Il visualise le couloir, il ne se passe rien, son don, son < UTILITE> est perdu.
— L’aigle a raison. Nous avons réussi. Plus personne ne pourra exploiter ce savoir comme une arme. Les temples ne seront plus des systèmes de surveillance ou d’asservissement.
— Oui, tu as raison. Pourtant… ils savent que cela fonctionne. Ils chercheront. Ils voudront comprendre. D’après toi, quelle civilisation a bien pu mettre au point une pareille invention ?
— Je pense que cela ne vient pas d’une civilisation. Mais d’êtres extra-terrestres.
Ils ont domestiqué la planète, modifié l’ADN de l’Homo sapiens… pour le rendre plus intelligent.
Ils ont sans doute mené de nombreuses expériences.
Notre planète… un laboratoire.
Silence.
— Mais aujourd’hui… nous, humains… Valons-nous mieux qu’eux ?
Marie ne répond pas tout de suite. Puis elle murmure :
— Ils ont semé l’intelligence. Mais nous avons cultivé la mémoire. Et parfois… l’oubli.
Jean regarde le ciel.
— Peut-être que ce qu’ils ont laissé… ce n’était pas une technologie. Mais une question. Une onde qui attendait qu’on l’écoute.
— Tu crois qu’ils avaient une technologie aussi avancée ?
— Aucun doute. Avec ce que nous avons vu, tout devient possible. « La Mémoire, comme ils l’appellent, est une version bien plus évoluée que nos intelligences artificielles. Imagine les progrès dans cent ans, en informatique quantique, en IA… Je n’ose même pas y penser.
— C’est pour cela que nous devons garder le secret. Détruire nos notes. L’artefact, lui, peut être rendu. Il est devenu complètement inerte.
— Il nous restera les souvenirs.
— Moi aussi, je t’aime.
Marie se lève. Elle s’avance vers la fenêtre. Le ciel est calme. Mais le silence du chant effacé s’étend, telle une onde sans retour.
Après une nuit paisible, nous préparons notre retour vers la civilisation ignorante. Dans la matinée, nous descendons à l’accueil de l’hôtel.
Dans une salle attenante, ouverte, des adeptes du yoga chantent le Om.
Jean me regarde.
— Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
— Ça me dit quelque chose, dit Marie.
Le chant s’est tu. Mais la fibre en nous vibre encore.
Nous marchons dans les rues, main dans la main…

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