4.1 Charogne increvable

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PDV INES (de retour) Peu de temps après le colloque des Alphas.

Ça y est. Je suis prisonnière. Déborah et moi sommes conduites à la prison de l'État de Sophie. Mon plan a fonctionné. Je suis là où je pensais. Maintenant, je vais voir qui tire vraiment les ficelles. En plus, les complices de Cassandra sont au pouvoir, elles vont relâcher leur attention. Elles vont se concentrer sur leurs nouvelles fonctions et se révéler telle qu'elles sont en réalité. Elles ne feront plus attention à moi.

Le réseau de sœurs espionnes va pouvoir dévoiler leurs secrets. Le réseau conçu par Cassandra avait un but simple. Des filles étaient formées depuis la naissance à être des espionnes. Dans des orphelinats centres de formation, on leur apprenait plusieurs langues, l'art du combat, à se cacher, à écouter, à trafiquer des ordinateurs ou des machines, ..... L'art de l'espionnage de haut niveau. Elles devenaient des fantômes, capables de rentrer n'importe où et de se fondre dans n'importe quelle identité. Elles sont aptes à s'adapter à toutes les situations. Les filles étaient élevées dans la solidarité entre elles. Des sœurs ayant toutes confiance entre elles.

Des sœurs solidaires qui au fur et à mesure des années se plaçaient à des postes stratégiques. Elles captaient les informations et les faisaient toutes remonter à Cassandra. Les rebelles étaient infiltrés. Les autres Alphas aussi. Cassandra a mis en place ses centres dès sa première année de règne, en récupérant des orphelines ou en en créant elle -même en retirant des filles à leurs mères. Il a fallu cinq ans pour que les premières espionnes sortent des centres. Au début, elles ont infiltré les rebelles et les groupes de Zêtas, des missions faciles. Au fur et à mesure des années, elles montèrent en grade. Infiltrant les armées puis les proches des autres Alphas. En vingt-cinq ans, Cassandra surveillait tout le monde.

Cassandra faisait croire que c'était pour protéger la vie et pour relancer la natalité. Mais elle n'a pas pensé que sa mère avait déjà créé un réseau identique au sien. Un réseau qui la surveillait elle, Cassandra. La fille folle ignorait que les directrices de ses centres de formation, les reines, n'étaient pas endoctrinées dès le départ. Nous appelions les professeurs, nos mères. Les mères et les reines se méfiaient de Cassandra qui se faisait appeler Reine Suprême. Elles observaient Cassandra et son attitude pour le compte de ma grand-mère.

Les délatrices obéissaient et transmettaient ce qu'elles découvraient. Le discours et les actes de Cassandra ne coïncidaient pas. Alors les délatrices gardèrent certaines informations secrètes vis à vis de Cassandra et dissimulèrent des données pour préserver la vie. Elles ne poussèrent pas l'endoctrinement au culte de la personnalité de Cassandra, mais nous apprirent à garder notre libre-arbitre et à nous méfier d'elle.

Nous ne devions avoir confiance qu'en nos reines, mères et nos sœurs. Lorsque j'ai pris le pouvoir et remplacé Cassandra, j'aurais dû avoir accès à la totalité des informations. Je suis une sœur. Je suis devenu la Reine Suprême à qui les autres reines et les mères ont prêté serment d'allégeance. J'ai juré de protéger la vie. Il y a un souci dans le réseau. Des incohérences. Des informations qui m'arrivent erronées ou incomplètes. Je sais que cela provient du réseau de délatrices. Je n'ai pas la confiance de ma grand-mère.

Très tôt, j'ai piraté l'ordinateur de Déborah un soir où je mangeais chez elle. Les données de son État et celles qu'elle détient sur d'autres ne me sont pas arrivées correctement. Une délatrice est donc auprès de Déborah. J'ai donc conçu très vite un plan pour essayer de parasiter et court-circuiter les femmes de l'ombre. J'avais peu de temps, je le savais.

Pour piéger ma grand-mère, je me suis faite des « amies » hors réseau d'espionnes, sans le dire à mes sœurs. Je corresponds avec mes informatrices par émail avec un autre ordinateur et une autre adresse, inconnu du réseau d'espionnes et de celui des délatrices. Une de mes informatrices a trouvé des mouvements de troupes ou des actions militaires qui m'ont été cachées et que les rebelles ont vu. Une autre, des réunions de Deltas proches de Cassandra dont les sœurs infiltrées ne m'ont rien dit.

Cassandra est en prison, dans un lieu connu de moi seule et sans accès à l'extérieur. Elle ne peut plus diriger le réseau. Quelqu'un a pris le relais. Quelqu'un qui veut toujours renverser Déborah. Quelqu'un qui veut me destituer. Ma grand-mère. Au sein même du réseau d'espionnes, elle a étendu ses tentacules. Cassandra était un leurre, ça, je le savais. Je ne peux me fier à personne même pas à mes sœurs. Mes dernières informations me confirment que Mamie est un despote et qu'elle ne me veut pas en bras droit. Elle veut régner sans contestation possible.

Il n'y a qu'en Keira et Nadia que j'ai confiance. Je n'ai pas pu tout déballer. J'ai donné des pistes à mes amies. Je leur ai dit avoir perçu un problème et que nos mères nous mentaient. Keira remontera toute la piste si j'échoue. C'est la seule aussi charogne que moi. J'aurais dû leur dire plus tôt. Je n'étais pas sûre et me méfiais de tout le monde, y compris mes amies. J'ai peut-être perdu un temps précieux. Keira m'aurait aidé. Nous aurions progressé davantage. Je ne pouvais pas.

À nous trois, nous avons conçu un stratagème. Le premier constat pour nous est simple. Si nos mères s'aperçoivent que je sais pour leur duplicité, mes amies seront les premières interrogées. Nous devions tout faire pour garder nos secrets.

Alors, on s'est entraînées toutes les trois à résister au sérum de vérité, en ingurgitant des doses de plus en plus fortes chaque jour. Il le faut. Nous devons résister au poison et savoir le détecter si on tente de nous en faire prendre à notre insu.

Nous avons poursuivi notre plan. J'ai simulé devenir tyrannique et vouloir utiliser le réseau pour régenter le monde. J'ai simulé devenir comme Cassandra. Il fallait rassurer les délatrices, leur faire croire que j'étais comme elle. Un monstre en puissance. Je devais me faire bien voir de leur chef, que je sais être ma grand-mère. Je n'ai jamais pu le dire à mes amies. Keira aurait compris mon but final en sachant mon lien de sang.

Keira, Nadia et moi nous nous sommes disputées violemment devant plusieurs sœurs. Mes deux sœurs devaient pouvoir dire que j'ai changé, que notre amitié est ébranlée, détruite. Il fallait que les espionnes et les délatrices pensent le lien rompu. Pour protéger Keira et Nadia, nous devions passer pour fâchées aux yeux de nos proches.

J'ai envoyé des messages injurieux via le réseau. J'ai parlé avec colère de mon ancienne amie Keira. Nadia m'a grondée et a pleuré devant tout le monde. Des cris et des injures ont été échangés. Keira a fait mine de tenter de me tuer. Nous nous sommes battues sauvagement. Notre instructrice de combat et plusieurs sœurs ont dû nous séparer.

Keira s'est enfuie. J'ai ordonné de faire arrêter Keira pour trahison. Personne ne sait où elle est aujourd'hui. En réalité, elle protège mes arrières. Le réseau pense que nous sommes fâchées. Cela fait trois mois que je ne vois plus mes amies. Plus aucun contact. Des sœurs ont tenté de me réconcilier avec Nadia. Je me bute, pour la protéger. Je présente des fausses similitudes de plus en plus troublantes avec Cassandra, pour que mes sœurs et mères se posent des questions. C'est notre plus grand bluff. Mentir à nos sœurs espionnes entraînées à détecter le mensonge, pour trouver le grand méchant loup, ou plutôt la salope qui nous manipule toutes, Mamie.

Déborah est dans la cellule à côté de moi. Elle est terrifiée. La pauvre. Elle ne mérite pas ce qui l'attend. Les complices de Cassandra vont nous interroger, nous torturer. Je le sais. Je suis prête. J'ai des années d'entraînement à la torture. Déborah non. Elle va morfler grave, mais je n'ai pas le choix.

Dès le lendemain de notre arrivée, nous sommes conduites dans la salle d'interrogatoire. Parfait, je saurais ce que Déborah raconte. Comme prévu, des coups. Des chocs électriques. Déborah ne tient pas longtemps et déballe tout. Elle ne simule pas. Déborah est une faible. Je ne peux pas lui en vouloir.

Je reste silencieuse, toute la semaine. Je suis entraînée et je sais encaisser les coups. Je n'ouvre pas la bouche, fidèle à ma réputation. Je résiste comme le soldat que je suis. J'attends quelqu'un de mieux placé qu'une simple soldate endoctrinée. Si je me tais, Mamie fera venir une délatrice, plus apte à la torture et bien moins pétocharde face au sang.

Les troupes des lieutenants de Cassandra ont fouillé ma maison, mon bureau, tous les lieux où j'allais. Elles n'ont rien trouvé, que des informations vides qu'elles avaient déjà. J'avais prévu et tout préparé. Si les délatrices veulent des infos, il va falloir qu'elles viennent les chercher à la source, dans ma tête et c'est là que ça se complique. J'ai posé un verrou blindé sur mon esprit depuis mes dix ans. Elles ne sauront rien.

Une jeune femme s'avance pour nous torturer. C'est l'assistante de Déborah. Une de nos sœurs. Elle sait que j'ai vidé mon ordinateur. Les informations du réseau n'y étaient plus. C'est elle que j'attendais. Elle me cachait des choses sur Déborah. Je veux en savoir plus. J'ai enfin une délatrice confirmée sous la main. Elle va m'interroger en ignorant qu'en fait, c'est moi qui vais récupérer des informations.

Elle nous fait ingurgiter des drogues pour que Déborah et moi disions la vérité. La pétasse veut qu'on révèle ce que l'on sait. Elle ignore que je me suis entraînée, que j'ai absorbée des doses de plus en plus fortes de ce poison depuis des mois, pour résister au sérum de vérité. Elle va vite comprendre que je ne suis pas une bleusaille.

Déborah se met à délirer. Elle ne fait pas de nouvelles révélations. Déborah est innocente. Elle ne sait rien. L'ex Suprême n'apporte aucun élément concret. Les coups qu'elle reçoit ne m'émeuvent pas. Je continue de fixer avec rage la délatrice. La jeune femme fait arrêter les tortures de Déborah. Cela ne lui est plus utile.

Elle se concentre sur moi. Moi qui ne parle toujours pas malgré une quantité astronomique de sérum. Moi qui arrive encore à raisonner malgré les drogues. Moi qui subit coup de fouet et chocs électriques en serrant les dents. Enfin. Je vais apprendre ce que je veux savoir.

- Allez sœurette, dis moi ce que tu sais. Où est Cassandra ?

- Va te faire foutre connasse. Crève avec cette salope. Nos sœurs vont comprendre. Elles te tueront. T'es pas de niveau mauviette.

Je résiste deux heures à sa torture. Je sais qu'il y a une espionne dans la salle, qui racontera tout à mes sœurs. C'est moi qui l'ai placé là, sans faire remonter l'information. Les délatrices ignorent la présence d'une espionne ici même. Nous ne sommes pas censées nous faire du mal entre nous. La pouffiasse vient de jeter une graine de doute chez les espionnes et cette idiote l'ignore, trop absorbée par son sadisme. Je m'en fiche de ses coups. Ils ne font que confirmer à l'espionne mon innocence.

Elle peut me torturer autant qu'elle le veut. Depuis mes six ans je résiste à cette forme d'interrogatoire. Elle devrait le savoir. Je suis une teigne, l'une des deux meilleures de toutes les espionnes. Keira et moi sommes capables de supporter les pires tourments sans sourciller.

Je me rappelle encore mon premier bain d'eau glacée à mes six ans. Mon instructrice au combat me tenait la tête et je devais retenir ma respiration. Elle me remontait en me tirant par les cheveux en m'aboyant dessus. Jamais ne n'ai dénoncée la sœur coupable du vol de gâteau. Plutôt mourir que de trahir. Je suis tombée dans les vapes et me suis noyée. J'ai été réanimée cinq fois avant que la coupable ne se dénonce, par pitié pour moi. J'aurais tenu encore.

Keira et moi, protégeant nos sœurs, prenions tous les coups, subissons toutes les punitions. Sans jamais faillir et se soutenant du regard l'une l'autre. Serrant les dents pour ne pas mordre. Les chocs électriques, la privation de nourriture ou d'eau, l'abus de substances illicites, la privation de sommeil ou être attachées sur un poteau en plein soleil pendant des jours étaient chose courante. Keira et moi sommes imbrisables. La mauviette n'a qu'à bien se tenir. Elle ne me fera pas plier.

Je suis ramenée en cellule, traînée par deux soldats. Déborah est en pleurs. Elle se sent coupable. Elle a reconnu son bras droit. J'essaye de lui remonter le moral comme je peux. Cela fait un mois que je résiste. Déborah me supplie de parler. J'ai tenu suffisamment longtemps pour être crédible. Keira a dû avancer de son coté. L'eau adoucie d'anti-douleurs que m'offre l'espionne me confirme que le réseau est ébranlé. C'est le moment.

Alors, je monte un gros bobard. Lors de la torture suivante, je dis que Cassandra m'a échappée et que j'ignore où elle se trouve. Je dis avoir caché mon ordinateur lors de mes vacances avec Peter, dans le village de montagne, à l'intérieur de la grange d'une ferme que l'on a visité. J'avoue avoir tout dissimulé pour que les complices de Cassandra ne puissent tomber dessus. Je voulais protéger mes sœurs. L'espionne tombe dans le panneau et cette pouffiasse de délatrice aussi. Mamie ne lui a donc pas révélé toutes les informations. La pouffiasse ignore que j'ai connaissance du réseau de délatrices.

Je fais semblant de craquer. Satisfaite de son petit effet, la traîtresse me laisse tranquille. On me reconduit à ma cellule. Plusieurs jours passent sans qu'on me réinterroge. Elles ont fouillé le soit disant lieu de captivité de Cassandra et la ferme. J'avais anticipé. Keira a maquillé les lieux depuis bel lurette. Elle a laissé les empreintes de Cassandra à la ferme.

Mon bobard est crédible. Ma sœur menteuse croit que Cassandra est en liberté et en possession de mon ordinateur. Je la vois fulminer. Elle n'aime clairement pas Cassandra. Au moins une preuve d'intelligence de sa part. Elle veut savoir ce que contient l'ordinateur et me torture de nouveau.

Je lui révèle les données du réseau. Les fausses données, celles envoyées par le réseau d'espionnes, mais trafiquées par quelqu'un. Je fais celle qui ne tient plus. J'avoue à demi-mot l'existence des délatrices. La traîtresse coupe court à mon déballage. J'ai raison. Elle ignorait que je savais pour les délatrices. Elle risque gros si l'information filtre.

Je sais que je suis filmée et que quelqu'un regarde. Mamie est là. Je le sais, je le sens. Pouffiasse reçoit un texto. Elle soupire de contrariété. Quelqu'un vient de lui ordonner d'arrêter l'interrogatoire. Je suis reconduite dans ma cellule. Ma sœur menteuse n'est qu'un pion. Quelqu'un dirige dans l'ombre. Il y a bien un cerveau qui se dissimule et doucement, je l'oblige à se montrer.

Je veux voir Mamie, que ce soit elle qui vienne me torturer. Je veux voir son visage avant de la tuer. J'approche du but. A mon grand étonnement, je subis des électrocutions, mais ma sœur ne revient plus. C'est la directrice de la prison qui m'interroge et elle est bien moins douée. Mamie semble avoir cru mon bluff. Cela m'étonne d'elle.

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