Arnaud

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Arnaud… Rien que d’évoquer son prénom je frissonne. Rien que de penser à lui je suis toute chose, toute perturbée…


Comment pourrais-je décrire notre histoire, notre relation si atypique ?


Je connais Arnaud depuis ma tendre enfance. Je me dirigeais vers mes six printemps. C’était le jour de la rentrée des classes, chez les grands comme on disait, nous étions au C.P. dans la même école, dans la même classe.


Sans vraiment me l’expliquer, je fus attirée par cette petite tête blonde. Il était là, tout timide, assis seul à sa petite table, face à l’immense tableau sur lequel flottait la date du jour. Il attendait patiemment que les cris et les pleurs des autres enfants cessent. Il arpentais du regard ce nouvel environnement.


Je me suis assise à côté de lui, en lui souriant, et depuis ce jour, nous nous sommes jamais quittés. Nous faisions tout ensemble, des cours de motricité au collier de nouilles en passant par la réalisation des cartes pour la Saint-Valentin. Furtivement, nous attendions la sortie de l’école pour nous échanger timidement nos cartes. Oui, il était mon Valentin, j’étais sa Valentine.


J’ai le souvenir de nos longues après-midi de jeu dans le jardin de mes parents. Moi et ma fameuse dinette qui accompagnait ma gigantesque cuisine en plastique et lui toujours accompagné de ses petites voiture et de son sac de billes. Nos parents respectifs ne perdaient jamais une occasion d’immortaliser nos instants d’enfants insouciants.


J’ai également le souvenir cruel de son chagrin lors de la perte de son animal de compagnie. Je me remémore, que pour le consoler, j’avais pris ma tirelire pour offrir à son petit chien des funérailles et qu’il puisse bénéficier d’une sépulture.


Nous avons fait classe commune jusqu’à la fin du collège et son fameux brevet. L’époque du lycée fut plus douloureuse pour nous deux. Nos orientations différentes avaient eus raison de notre inséparable duo. Malgré cette divergence, nous trouvions toujours une solution pour se voir, pour se retrouver.


Au fil du temps, nous nous sommes vus évolués, avec l’apparition de mes formes, le développement de ma poitrine, le passage de fille à jeune fille. De petit garçon timide à jeune homme affirmé, j’ai vu Arnaud grandir, se forger une très athlétique carrure au travers du sport.


Indépendamment de l’évolution complexe de nos corps et du travail de nos hormones je n’avais aucun complexe de timidité à m’afficher en maillot de bain minimaliste ou en tenue légère. Je connaissais son profond respect pour mon intégrité, pour ma personne.


Je n’avais aucun doute, aucune crainte sur la nature de notre relation, elle était limpide même si inconsciemment nos regards évoluaient. Il était mon meilleur ami et cela malgré le fait qu’il devenait un charmant jeune homme attirant et séduisant.


Le fait que mon regard changeait pouvait-il se traduire que j’en tombais amoureuse? Non. A mes yeux, ce n’était que le résultat de notre évolution, de la perception d’une autre image du petit garçon qu’il était jadis, le fruit de notre parfaite connaissance. Rien de pouvait et ne devait bouleverser notre relation, notre amitié.


Entre nous il y avait de l’amour, cela était indéniable, mais un amour sain et profond. Un amour qui nous poussait à tout se dire, à tout se confier, nos joies, nos peines, nos doutes. Un amour sans jugement, sans arrière pensée, un amour platonique, sans peur de s’afficher bras dessus bras dessous, sans peur des ragots.


Autour de notre relation, on pouvait sentir cette osmose, cette délicieuse ambiance, ce doux parfum délicat et harmonieux. Elle était forte, puissante, invincible. J’ai en tête l’image de notre traité secret et de comment nous l’avions scellé. Avec le recul cela prêtera à sourire, mais pour nous, à l’époque, il avait un sens abyssal. Nous étions dans ma chambre, avec un plat de chips, nous devions avoir 14 ans. Nous venions de nous jurer d’être toujours là pour l’autre et pour officialiser cela nous avions mis sur nos index une goutte de ketchup, puis Arnaud a porté mon index à sa bouche pour concrétiser notre pacte avant que j’en fasse de même.


Devant notre jeunesse, notre insouciance, loin de comprendre le sens de certains mots, sans en prendre conscience, notre relation chavirait. Lentement, elle allait prendre une tournure différente, une tournure plus affective, un autre sens, une autre direction. Elle allait nous permettre de se découvrir autrement, dans un contexte éloigné du stéréotype sociétal en vigueur dans ces années.


A l’époque avions nous peur de ce bouleversement émotionnel et de ses potentiels conséquences? Oui. En avions-nous envie secrètement ? Je le pense sincèrement. Etions-nous déjà éclairés sur ce que nous allions décidés par la suite ? Probablement.


Si cette transition fut une réussite, je pense que nous la devons à notre droiture, à notre franchise, à notre équilibre, à la bienveillance que nous nous portons depuis toujours, à notre respect mutuel


A ce jour, nous sommes toujours les meilleurs amis du monde, des amis d’un nouveau genre, d’un nouveau style, d’une nouvelle façon de vivre, d’un nouvel ère.


A suivre.

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