Ce n’est que plus tard qu’elle comprit le lien avec son deuxième vol commis sur son lieu de travail. Alors qu’elle nettoyait une chambre d’hôtel, elle avait pris, sur un coup de tête, sans réfléchir, un maillot féminin destiné à rehausser la poitrine.

Des années plus tard, elle fit le rapprochement avec son enfance : les robes que sa mère subtilisait, ses cheveux coupés à ras, les vêtements, chaussures et fournitures scolaires réservés aux garçons, le maquillage et les habits féminins offerts par une camarade qu’on lui interdisait de garder — brûlés parfois sous ses yeux. Et puis ce cauchemar obsédant, semblable à un mauvais sort : ce cobra qui, dans le jardin maternel, lui cracha au visage…

Tout cela, sans doute, avait nourri ce passage à l’acte, malgré elle. La drogue, quant à elle l’aidait à se perdre, à s’autodétruire. Peut-être même l’hypnose y avait joué un rôle : elle se souvenait de son pseudo petit-ami et dealer, l’attendant à la sortie du travail avec un bouquet de fleurs à la main ; elle revoyait aussi un ami à lui, posté à la bouche du métro, comme s’ils l’avaient tous deux tenue sous emprise.

Était-elle vraiment responsable de ce qui s’était produit ?

Il lui fallut des années pour comprendre que c’était son inconscient qui, à travers ces gestes, cherchait simplement à crier à l’aide, à révéler la vérité sur sa famille et sur la détresse où elle se trouvait : seule, à l’étranger, sans autre ressource que le fruit de son travail, privée de soutien matériel, mais surtout privée de ce soutien véritable, sincère et digne de confiance, qui aurait pu l’aider à franchir le cap de la résilience et de la guérison.

Malheureusement, au lieu de ça, sa seule issue de secours durant toutes ces années fut le silence. Sur tout.