7.6 * JAMES * CHASTETÉ IMPOSÉE
J.L.C
30.10.22
01 : 05
♪♫ ??? — ??? ♪♫
Je viens vraiment de pondre ce délire de chasteté imposée ubuesque de mon plein gré et sans triper sous champis en plus ?! C’est quoi cet éclair sadique ? Une erreur cosmique à tous les coups...
Une heure... Une heure entière à simuler le moine Shaolin de la frugalité, le flagellé du calfut, le puceau du club d'échecs, sans rien tenter ? Moi ? Un gars avec un passif chargé, certes, mais pas débile… doté jusqu’ici d’un cerveau à peu près fonctionnel — enfin... plus depuis que mes doigts ont caressé sa peau de pêche et que ma raison s'est transformée en chant de baleine...
Sans flingue sur la tempe, sans extorsionn ruse ou hypnose, j'ai trouvé ça malin de jouer au roi des abstinents alors qu'en face, j'ai une nana sublime, une bombe atomique, littéralement sculptée pour le péché, et qui, cerise sur le kilt, me livre des confessions dignes d'un roman érotique. Non, mais matez-la, dans sa fichue robe minimaliste : le tissu luit, colle, cisèle, suggère, épouse ses seins sans soutif, s'écrase contre ses pointes durcies par le froid — ou l'excitation va savoir. Et plus bas, oufff... Le message est... humide et... évident. Voilà... Mes mains fourmillent, à l’arrêt. Un massacre neuronal s’organise dans mon crâne en ce moment et j'applaudis la débandade. Je suis complètement barjo. Ou j’aime souffrir. Ou je suis fou d'elle. Ouais, les deux, avec supplément fouet.
— Et pendant cette petite trêve, t'as prévu une activité ou on y va à l'impro ? lance-t-elle, mi-figue, mi-raisin, entre ironie et curiosité.
Euh... Je cligne des yeux. Erreur.
Elle lève les bras, dénoue sa queue de cheval trempée, l’essore, puis fait voler sa crinière blonde d’un mouvement lent qui semble conçu pour m’achever, genre muleta juste avant l'estocade finale, moi qui racle déjà le sol du sabot. Ses coudes se haussent, ses courbes s'étirent sous le satin — surtout ses deux sommets affolants — son bassin pivote, creusant cette cambrure de prédatrice. Bordel, même un réflexe capillaire devient une scène interdite.
— Je t'écoute, Monsieur le roi du silence aguicheur.
Elle me pique, batifole et je suis à deux secondes de plaquer ma bouche sur la sienne pour faire taire cette reine du désastre hormonal.
— Tu proposes quoi ? Une séance de décollage tactile ? Ça te dit de la méditation tantrique ? J'ai vu une vidéo sur Youporn où...
Oh ! Wow... Youporn ?! Elle a décoché sa réplique, mon instinct reproducteur a carjacké ma conscience direct. Elle s'interrompt, les yeux ronds, stupéfaite, puis rétropédale à vive allure dans son flot de paroles.
— Euh... You-tube... une vidéo qui... C'était sur Youtube... En fait, ça parlait surtout de... de techniques de... respirations et puis de... postures... artistiques, d'harmonisations, tu vois et euh... bah ça avait l'air chouette. Mais, j'ai paumé la réf... je veux dire, j'ai zappé de la mettre en favoris, enfin, c’était pas vraiment pour moi, hein.
Mon sourire me mord les joues. Son système se dérègle. Elle bafouille, pêche à la ligne, s’enfonce, fixe le sol, toute penaude, enveloppée dans ses bras et je suis suspendu à ses lèvres comme si elle récitait un poème sacré. Tandis que le rouge inonde ses pommettes, une vague brûlante me remonte dans mes reins. Ma petite Victoria en mode cinéphile du X, ça me... ça me... je frôle la syncope cognitive. Putain, comment j’ai pas vu ça venir !
Pourquoi c’est sexy ? Pourquoi tout est sexy chez elle, même sa panique ? Et pourquoi le nom d'un site pour adulte sonne adorable dans sa bouche ? Quelqu’un, quelque part, aurait un bouton « désactiver pulsion » ? Non ? Tant pis, je vais imploser proprement.
— Y a pleins de trucs cool sur Youtube, des tutos, des DIY, des... et puis zut, à ton tour, vas-y ! s'affole-t-elle. Sauve-moi de moi-même, je t’en conjure.
Je suis censé répondre quoi ? Namasté ? Ma langue colle à mon palais. Ma main me démange. J'aimerais respirer sans érection... Impossible. J’ai le self-control d’un cookie face à un gosse. Ou l'inverse.
Une seconde, j’étouffe de rire. La suivante, j’ai une envie dévorante d’elle. Vraiment d’elle. Pas que son corps — bien que, bordel, son anatomie appelle à la délinquance. Et elle me cause Youporn ?! Nom de Dieu...
Sinon... Note pour plus tard : allez fureter en éclaireur lesdites vidéos de machin tantrique — sûrement une version glam de yoga orgasmique... Faut que je m'éduque, ou qu'elle m'initie. On ne rigole pas avec les ambitions sexuelles d'une femme...
— On peut faire, tout ce que tu voudras. Même ton truc... euh... le tantra, c'est ça ?
Oeillade fuyante, joues écarlates, incandescentes. Une pivoine embarrassée déguisée en tentation. Elle se barricade derrière ses bras, et aligne des mots effilochés :
— Non, non, ça ira... c’était juste... une idée en l'air, une manière de... rester... enfin... de se connecter...
J'ai failli dire Kamasutra. Ça m’a chatouillé le bout des lèvres… mais j’ai mordu dedans à temps. Manquerait plus qu'on se mette à déblatérer sur le Lotus machin, l'Equerre Divine, la Torsion du Cobra ou le Sandwich de l'extrême. Y aurait plus assez d'oxygène sur ce toit-terrasse pour notre excès de passion...
En vrai, je pourrais souligner son lapsus à voix haute, mais je préfère me retenir et avaler l'allusion de peur qu'elle me claque la porte au nez — ou pire, aux reins. En revanche, la voir rougir jusqu'aux omoplates ? Appel d’offre accepté en 0,2 seconde. Activation du mode punchline Tinder de l'enfer.
— Après, j'ai rien contre les pratiques... à l'horizontale... Je trouve ça inspirant.
— Je me doute, oui –
— De celles qui font grimper le taux d'endorphine.
— Mmh, mmh, y a le chocolat noir aussi. Le tricot. Les vidéos de chats, les –
— On peut tester ta méthode de connexion, j’ai une très très bonne prise de terre.
— C’est pas… c’était pas une vraie méthode, plus une... un bafouillement métaphorique et –
— Non, non, redis-moi. J'ai mon portable, je suis tout ouïe. Des exemples concrets, visuels même, ça pourrait m'aider à nous projeter.
Elle se fige net. La panique chic dans toute sa splendeur. Lèvres entrouvertes, mirettes affolées, main levée dans un geste clair : stop tout de suite ce carnage.
L'air de rien, je dégaine mon arme digitale. Concentration fictive, libido très réelle. Un œil distrait sur l’écran, l’autre vrillé sur sa bouche, je fais mine de vouloir m’instruire — curiosité académique, bien sûr.
Mes doigts pianotent avec un zèle d’adolescent candide :
— Je tape quoi ? Té-tris-me en cou-ple ?
Avec mon vice aux commissures, forcément, je jubile, comme un gosse qui a déclenché l’alarme incendie juste pour voir. Je me compose une tronche de bon élève, prêt à réviser le Tantra pour les nuls — niveau avancé, version immersive.
— C'était une saillie malheureuse, James... Un dérapage verbal, dit-elle en se reculant vers le canapé de la tentation avortée.
Mon focus ne la lâche pas. Elle attrape la couverture en boule et s'emmaillote dedans, tout en poursuivant sa ligne de défense :
— C'est sorti tout seul, pas de message subliminal, promis. En plus, franchement, c'est surcoté, ce truc.
Surcoté, peut-être. Mais pas autant que cette foutue couverture qui vient de me faire perdre l’accès au meilleur panorama du coin.
Regard faussement méditatif, posture du gourou en plein Karma-souci, comme si je ne l'avais pas entendu, je l'interroge :
— Je pourrais débloquer de nouveaux skills d'après toi ? Genre souplesse ? Endurance ? Résistance à la crampe ? Mode furtif ? Pour rester discret quand il faut.
Un pouffement me répond, suivi d'une phrase marmonnée à la va-vite : apparemment, sauf erreur de ma part, la fonctionnalité duo est verrouillé par défaut avec elle, pas de multijoueur. Dieu, merci !
— Pardon, Vi tu as dit quelque chose ? Une règle du jeu que j’ai loupée ?
— Non, non, juste, c'est tantrisme, James... Pas Tetris...
— Ah... rien à voir avec des bidules à emboîter dans ce cas ?
Nouveau gloussement.
— En quelque sorte, si...
— Tu crois que je saurais y faire ?
— Mmh, mmh... c'est une histoire de concentration, il me semble.
— Bien sûr. Tout est affaire de positionnement précis aussi, non ? Rotations contrôlées, combos soignées, éviter le tir prématuré.
Elle explose de rire. Un vrai, un franc, un sauvage. Tête rejetée en arrière, épaules secouées, cœur mis à nu. Pas un petit gloussement de surface — non. Un rire de ventre, du genre à tout emporter sur son passage.
— OK. Stop. Stop. Je retire tout. Oublie. On efface la conversation, on repart à zéro. Je vais… je vais trouver une autre idée. Quelque chose qui n’implique ni yoga, ni joystick, ni chakra du plexus solaire. Donne-moi deux secondes, d'accord ?
Elle essuie une larmichette au coin de l’œil, calme les battements fous de son cœur — ou de son imagination — en respirant à fond. De mon côté, je savoure ma victoire silencieuse.
— Je reste en stand-by, Capitaine. Prêt à redémarrer dès que t’as besoin d’un assistant pour ta connexion énergétique.
Elle m’abat du regard, à la fois menaçante et complètement hilare.
Ça me ramène à l’été dernier, quand on se cherchait à tâtons, juste pour le frisson, sans tracas ni contraintes. On jouait à ce jeu muet, où chaque geste réveillait l’autre sans jamais forcer le trait. Cette alchimie-là, je brûle de la faire renaître.
— Dommage, j'étais en train de échafauder une posture sympa dans ma tête, un truc entre le Guerrier Passionné et le Boa Mystique. Une version modernisée. Je peux te faire une démo, si tu veux.
— James...
Elle glisse mon prénom d’une voix basse, filée, un mix entre la tendresse grondante d’une réprimande et un rire nerveux en détention provisoire.
— Je pensais qu’une bande-son chill, tu sais, bols tibétains, remix de Marvin Gaye, ou… de la deep house à 150 bpm, ça pourrait caler la vibe idéale pour –
— Tais. Toi. James.
Main sur ma bouche, elle tente de m'étouffer gentiment. Ma fontaine à connerie est priée de couper le débit. Trop tard : mon sourire s'étale et s'épanche hors de contrôle, à la manière d'une mousse de champagne après le pop du bouchon. Impossible de contenir cette joie brute, elle déborde comme un torrent. Vi feint le sérieux, mais ses yeux pétillent de malice. Elle se marre.
— Deux secondes, j’ai dit. Deux ! Tu peux survivre deux malheureuses secondes sans exhiber ton quotient pitre ou c’est trop demander à ton karma ?
Mimant la discipline la plus rigoureuse, je hoche le menton très solennellement, lèvres toujours coincées sous sa justice tactile.
Silence.
Je me dandine pour enfouir mon téléphone dans ma poche de pantalon. Un, deux… impossible de résister. Ma langue dérape sur sa paume ouverte, juste assez pour la taquiner. Elle craque.
— T’es chiant, souffle-t-elle, une lueur complice dans la voix.
— T’es belle.
Un flottement d'étonnement passe sur ses traits, avant qu’elle ne riposte tout de suite.
— Toi aussi, t’as ton petit charme, l’Écossais.
— Et quand tu t'y mets, toi aussi, t'as le don de faire vriller les nerfs.
... et les reins...
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