12.2 * JAMES * A GENOUX, LE MONDE
J.L.C
30.10.22
04 : 00
♪♫ ONLY GIRL (IN THE WORLD) — RIHANNA ♪♫
— Hé, la danseuse étoile !
Ah. La cavalerie. La voix de Leslie éventre la bulle, arrache les murs cotonneux où je m’étais calfeutré. Avec Vi. J’ouvre les yeux sur la réalité, son bruit, ses lumières, sa violence. Le sommet de son crâne repose sous mon menton, ses cheveux mouillés me chatouillent la gorge, et son parfum s’accroche, prisonnier volontaire de mes sens.
— Ouais, non, t’as plus l’air d’une strip-teaseuse de gala en fait, se poile Leslie.
Charmant compliment. Et si je détaillais le tableau qui vient de déflagrer dans ma tête à Madame Freud ? Nope, vaut mieux pas.
Mais, Vi, là, tout de suite ? Pelotonnée tel un chaton docile dans le creux de mon corps ? Y a dix minutes peut-être. Maintenant, c’est tout l’inverse. Elle a ralenti la cadence. Elle a vu clair en moi. Son front contre ma clavicule, son souffle chaud coule contre ma peau. Et voilà qu’elle gonfle ses poumons comme on cherche des forces, bascule de profil, sans me lâcher pour autant.
— Salut, joli cœur ! balance Leslie en me décochant un clin d’œil. File le colis. On va l’exposer sous les projecteurs.
Victoria expire bruyamment. Ses doigts m’enchaînent encore plus fort à ses hanches. Oui, serre fort, Vi. Dans deux secondes, on m’arrache à toi façon prise d’otage.
— Tiens, mets ça. J’ai graissé la patte au DJ, ça va être épique. Ambiance sur mesure. Remix 100 % toi.
Ma tigresse domestiquée — et toujours pompette — roule des yeux après avoir aperçu le diadème en plastique que sa pote lui tend. Ses prunelles accrochent les miennes une fraction de seconde. C’est écrit là, noir sur blanc : pitié, sauve-moi. Ouais, Vi, compte sur moi… sauf que tes ongles sont déjà plantés dans mes côtes.
— Le colis, figure-toi, va rester dans les bras du livreur sexy. Je suis très bien où je suis. Je bouge pas.
Elle est toute mimi quand elle bougonne. Je souris comme un con. Mon palpitant dégouline à ses pieds. Félicitations, champion : niveau contrôle émotionnel, t’es au ras du sol.
— Ah ouais ? réplique Leslie, minaudière et impériale, la paume vissée sur sa hanche, accessoire en toc au poing. T’as le culot de saboter un couronnement Beyoncé-style ?
Elle la happe par le poignet, sucre au timbre, fer dans la poigne et lui colle sa parure de princesse sur le crâne. Victoria l’ajuste d’une main maladroite.
— James, t’es chou, mais c’est l’heure de la star.
Grognement mental : efficacité 0 %, frustration 200 %. Pas envie de la lâcher. Pas maintenant. J’ai l’impression qu’on va me couper la bouteille d’oxygène alors que je suis coincé sous dix mille tonnes d’océan. Pourtant… c’est son anniv'. J’avale donc la morsure et me contente de la fixer en mode pitbull dépossédé de son nonos. Putain, voilà que je me compare à un cabot. J’ai touché le fond…
Victoria se dégage de mon étreinte avec une délicatesse traîtresse, mais m’épingle toujours du bout des yeux.
— Attends-moi, je reviens.
Oui, fait ça. Tu reviens. Point. Pas de négociation. Encore faut-il que t'arrives à mrcher droit...
Son regard ratisse la zone, débusque un talon au pied d’un tabouret, le second exilé plus loin.
— C’est quoi ce remix prodigieux, au juste ? demande-t-elle, en prenant place sur un siège pour enfiler ses escarpins dûment récupérés.
Motricité ? RAS. Élocution ? Nickel. Comment ça se fait ? Elle zonait dans mes bras, il y a deux secondes ! Elle déconnait pas quand elle se comparait à une pile en recharge alors.
— Hum… eh bien… Du girl power pur jus. De quoi faire baver les mâles, chauffer les sangs et réveiller les morts.
Victoria rit. Mon cœur se disloque. Parce que putain, elle est belle quand elle lâche tout. Je radote ? Et alors ?
— Isla ! Tu nous suis ?
Ma sœur relève le nez de son verre. Tiens, tiens, une autre. Les bulles de son prosecco ont migré droit dans ses prunelles.
— Oh, c’est gentil, Leslie, mais non. Il est tard et… je crois que mon ours a pris son billet pour l’hibernation.
Izy lance un coup d’œil oblique à Antoine, bloc inerte, la tête renversée sur le dossier du sofa.
— J’dors pas, marmonne-t-il, paupières closes. Je pratique le zen.
Isla ricane, caustique.
— Ouais. Génial. T’as inventé le yoga des ronfleurs.
Antoine se fend d’un sourire paresseux, agrippe son poignet et l’attire contre lui.
— Viens méditer avec moi, bébé, tu vas goûter au nirvana.
— On va plutôt te ramener au lit pour le gros dodo, se moque ma jumelle en lui ébouriffant les cheveux.
Victoria fronce à peine les sourcils. Direct, son visage, strié d’un vertige muet, se tourne vers moi. Éclair furtif. Traînée d’alarme.
— Vous partez… ? James aussi ?
Mon nom, fragile sur sa langue, mâché comme un sursis ou, une prière, me fait l’effet d’une décharge.
Mains dans mes poches, j’inspire avant de caler ma réponse, mais Izy tranche l’air avant moi :
— Lui ? Non, pas besoin. J’appelle un Uber, et on te laisse la caisse. À condition que tu décuves avant de prendre le volant, frérot. Sinon… taxi pour toi aussi.
Évidemment. Je la vois venir à dix kilomètres : ma frangine m’installe un boulevard, gyrophares allumés, et scénarise ma fin de nuit… avec Victoria sur le siège passager. Opération séduction par procuration. Merci, sœurette. Pas étonnant de sa part, puisqu’elle a déjà signé le premier acte en me balançant au milieu de son anniversaire. Sauf que je ne finirai pas dans ses draps. Non. Je la ramènerai chez elle, en sécurité, je souris, je me casse. Voilà le plan. Un plan parfait… qui me donne pourtant envie de me tirer une balle. Il sonne carrément comme des obsèques avec buffet froid. Quoi ? Je lui ai promis de la border pas de rester…
Je hoche la tête sans un mot. Mon regard se sangle à Vi. Elle souffle. Je jurerais que son cœur a piqué du nez en même temps que le mien. Ma chaleur la marque encore, je le sens. Et moi ? J’ai son odeur tatouée dans les poumons, indélébile.
Un riff sec, la salle vibre. Reconnaissable entre mille. Blondie. One Way or Another. Ah… Je pige le délire. Du coup, je flippe ou j'y vois un putain de présage ?
— Vic ! braille Leslie, hystérie en stéréo. Top départ !
— Allez, un dernier tour de piste, insiste Vi auprès d’Izy. C’est mon anniversaire. Tu peux pas me laisser en rade pour aller border ton ours.
Isla hésite. Ses yeux font des allers-retours entre Victoria et mon beau-frère. Soupir dramatique. Je connais : l’affaire est dans le sac.
— OK, Lass… Va pour une chanson. Une. Après, je déserte.
— Parfait, jubile Vi, traction immédiate, prête à l’embarquer.
— Attends… quoi ? réagit Antoine, ressuscité net, pupilles en feu. Toi, sur l’estrade ?
Il se marre, l’air beaucoup trop réveillé pour un type qui « méditait » y a deux minutes. Isla lui sert un regard calibre 12.
— Je raterai ça pour rien au monde.
— Retourne pioncer, toi.
— Oh que non. Je veux le live. Ça mérite bien que je sorte du coma.
Isla lui claque la cuisse, mais un coin de sa bouche trahit un rictus complice.
— En selle, les Coyotes Girls, s’écrie Leslie. Les gars : ouvrez grand les mirettes.
Les filles décampent. Antoine et moi, on verrouille nos coudes à la rambarde, comme si ça allait nous sauver du bordel à venir. Tour de guet stratégique, mon œil ! Plutôt première loge pour contempler mon supplice en HD… Camille, le meilleur pote d’enfance, rapplique, sa coupe brandie en drapeau blanc.
— On rend pas les armes, les mecs.
Il est marrant, lui !
En bas, la horde fend la foule telle une marée brillante. Nina en éclaireuse, Leslie en alpha et Vi, en escorte rapprochée. Flora — si je ne me trompe pas — Izy et Lauriane ferment la marche. Moi ? Solide comme un roc en papier mâché. La virilité en confettis.
Près de l’estrade, devinez qui rôde déjà ? Timing parfait. Une médaille pour le flair. Sir Mati, toujours prêt à sortir son épée. Qu’il la garde bien dans son froc, celle-là. Je rêve de lui botter le service trois-pièces en place publique.
Les six amazones escaladent la scène, talons claquant, cheveux en bataille, sous les cris de la meute en contrebas. Si je devais parier sur la plus sobre : Nina. Je crois ne pas l'avoir vu boire du tout d'ailleurs. Les cousines Saint-Clair ? Aussi déchirées l'une que l'autre, par contre. Pitié, faites que Vi ne se vautre pas.
Doja Cat déflore les enceintes. Victoria pivote, une seconde volée. Son sourire ? Une flèche en plein plexus. J’ai envie de la mordre. De graver mon nom sur elle.
Et nous, trois spécimens accoudés à notre barrière métallique, on mate le tableau façon étude des biotopes nocturnes et mœurs à paillettes.
« Dans la savane urbaine, trois mâles adultes, crispés et le poil hérissé, impuissants, observent la harde des femelles dominantes traverser la plaine — en réalité, une piste de danse saturée d’alcool et de testostérone — et affirmer leur suprématie sous l’œil affamé des prédateurs opportunistes reniflant leur proie. Le vieux lion serre la mâchoire. Va-t-il défendre son territoire ? »
Je cligne des yeux. Sérieux, j'en suis à imaginer un docu animalier ? Putain, ouais. Parce que ça y ressemble trop. Sauf que là, c’est Victoria, la lionne au milieu. Et les hyènes autour n’ont qu’une idée en tête : la bouffer.
— Si un seul s’approche trop, je mords, lâche Camille entre ses dents.
Ah, lui aussi sort les crocs. Bienvenue au club des frustrés.
Antoine ricane. Moi pareil.
Les basses vrombissent, agitant la salle jusqu’à faire vibrer la moelle des os. Showtime sur scène. En rang ajusté, les six déploient leur armure de satin et de vernis, prêtes à renverser la République patriarcale. Victoria au centre, lumineuse dans sa robe immaculée, sourire d’impératrice, hanches en orbite. Gimme More de Britney crache son poison enfiévré dans l’espace. Nul doute, la température vient de prendre dix degrés.
Elle pivote, descend jusqu’au sol en rythme, remonte. J’applaudis ? Leslie balance sa queue de cheval en mode fouet, la nana de Camille enchaîne un twerk qui ferait pleurer la morale publique. Isla. Putain ma jumelle… Antoine est à deux doigts de tomber raide. Et Vi ? Elle lève le menton, l’air de dire : à genoux, le monde. Et James, avec. Le pire ? Avec plaisir. Attends, attends, attends. Ce mouv là, il… Putain sa culotte !
Voilà. Voilà. Je découvre la paralysie totale. Son corps flotte, insoumis à l’attraction terrestre, libre et sauvage. La gravité a déposé un préavis. Bras au ciel, bassin qui ricoche d’une vague à l’autre, ce foutu sourire insolent qui me brûle les rétines. Arrogance pure. J’ai juste envie d’appeler le SAMU pour moi-même. Un pouls ? Négatif.
À côté, Antoine lâche un « oh wow » religieux. Camille, lui, immortalise déjà pour « les archives ».
— Vieux… tu crois qu’on peut postuler pour le rôle de barre attitrée ? souffle Antoine, les yeux rivés sur ma sœur.
— J’espère que t’as ton CV à jour, réplique Camille, mort de rire.
— CV ? Non. Mais j’ai la motivation, souligne Antoine.
— Ouais, t’as surtout la gueule de quelqu’un qui va finir aux urgences pour hyperventilation.
Antoine me lance un regard en coin.
— Toi, ferme-la. On dirait un détenu devant le parloir.
— Sérieux ? Tu te prends pour le juge d’application des peines ?
— Allez, avoue : t’as juste envie de la planquer sous un plaid ?
Je grogne.
— Un plaid ? Non, une armure intégrale, minimum.
Ouais, carrément. Et un cadenas de chasteté sur sa petite culotte fantôme. Comme si mes yeux n’avaient pas déjà signé le constat il y a deux heures.
— Oh, notez bien, me chambre Antoine. Minimum ? Ça se dégrade, Jamie. Ça se dégrade salement. Faut t’intuber.
Vlam, tape sur l’épaule. Merci, docteur Antoine. Merci pour le certificat : jalousie stade IV, métastases partout.
— Game over, frangin. Enterrement prévu à la fin de leur numéro.
Je fixe la scène, dents soudées, maxillaires qui grincent comme une charnière rouillée. Et évidemment, à ce moment-là, Victoria attrape le micro imaginaire pour mimer le playback de Only Girl de Riri, visage aux anges. Mon dernier neurone, héros tragique, se pend avec le câble invisible de sa chanson.
Camille rengaine son portable, m’adresse une œillade qui pèse une tonne.
— Sacrée déclaration, mec.
La seule à me faire sentir homme… Euh… plutôt deux fois qu'une, ouais.
— Au moins, Vicky a l’air heureuse, lâche-t-il, plus posé. C’était pas gagné, vu sa tête en début de soirée.
Je me fige. Un instant, je décroche de l’estrade pour zieuter son pote. Zéro sourire. Il est passé où, le gars sympa avec qui je parlais surf pendant qu’il me vendait ses trails dans les îles ? Là, il a perdu ses palmiers et sa positive attitude.
Antoine siffle doucement, affalé sur la rambarde, mine de rien. Je serre la barre métallique au point de faire blanchir mes jointures.
Camille reprend. Sa voix reste basse, tranquille, en surface. Mais la morsure s’entend.
— Elle revient de loin, crois-moi. Et toi, tu… tu débarques… à l’improviste.
Je ravale tout. Ma langue, du plomb fondu. Génial, j’entre pile dans la catégorie connard qui rajoute des orages.
Il appuie son propos, sans hausser le ton :
— Elle a traversé des tempêtes qu’on ne souhaite à personne. Elle mérite un peu de stabilité. Mais bon, c’est Vicky : elle a la fâcheuse tendance à se dégoter des mecs qui disparaissent à l’autre bout de la carte. J’espère qu’elle trouvera un type qui lui donnera envie de boucler ses valises, pour de bon.
J’essaie de parler, mais mes mots se bloquent dans ma gorge. Parfait. De muet, je passe à coupable.
— T’inquiète, Camille, James aussi court après la stabilité. Il en fait sa passion.
— Antoine, commence pas…
— Bah quoi ? C’est ce que tu veux, non ? Repartir de zéro, remettre les compteurs à blanc. Une page… clean, sans ratures.
Il vient vraiment d’ouvrir mon dossier médical en pleine foire à décibels ?
Camille ne relève pas. Il continue de m’observer.
— Juste… si t’es là pour jouer, t’es pas à la bonne table. Elle a assez payé comme ça.
Et toi, Camille, t’es le croupier ou le videur ? Putain, je me fais hacher menu par tout son comité de surveillance.
Son avertissement s’écrase contre mon sternum et ma nuque dégouline. En bas, Victoria rit aux éclats, les bras en l’air comme si le monde lui appartenait. Je vais exploser en mille tessons. Le bonheur d’une âme ne devrait jamais tenir dans la paume d’une autre, bordel ! Je devrais l’écrire sur un T-shirt. Et me le foutre dans la gorge.
Je pivote, la rage en bandoulière, et m’arrache vers le minibar. Besoin d’un feu pour éteindre l’incendie. Whisky. Double. Triple ? Filez-moi la cuve et un tuba.
Derrière moi, la voix de Camille flotte, étranglée :
— Il a quoi ?
Et Antoine, placide :
— Rien.
Je sens toujours leurs regards percer la peau de mon dos quand une ombre se cale à côté de moi.
— Molo avec l’alcool, James.
Mes doigts se referment autour du poison.
— Away an bile yer heid ![1]
Il ne bouge pas, se compose un visage de marbre, ses pupilles en mode diplomate. Impassible. Je surprends quand même un frémissement dans sa mâchoire — celui d’un homme qui avale ses vérités pour ne pas faire exploser le baril.
Antoine finit par cracher un souffle, bas et calculé. Il fouille le silence à la recherche d’une entrée en matière.
— Écoute… je sais que tu te sens pas prêt–
— So ye were in it tae ? Wi’ Isla ? Whit wis the bloody plan?[2]
Ma voix claque, venin au bord des dents. Il fléchit, capitulant d’un geste.
— J’étais pas au courant, James. J’te jure.
Je ricane, sec.
— Aye, that's pure shit ![3]
Il inspire, hésite.
— Isla… pense que–
— Whit’s she thinkin' ? Gie it tae me.[4]
Il ne prend même pas le temps d’arrondir les angles.
— Elle en dort plus, James. Elle s’inquiète pour toi. Ça la dévore de l’intérieur.
Ses paroles me traversent comme un putain de Taser qui me cloue jusqu’aux nerfs. Je reste vissé au sol une seconde, le verre tremblant dans ma main, avant de l’engloutir d’un trait, chute libre dans les poumons. Le brasier me lacère la trachée, mais c’est que dalle comparé à la fournaise qui me dévore sans demander l’heure.
Antoine plante ses yeux dans les miens, et lâche l’obus :
— Elle croit que Victoria peut t’aider.
Une bête aux griffes sanglées rugit dans mon ventre.
— Envoyer Victoria patauger dans ma merde, elle s’imagine que ça finira en conte de fées ? Isla ferait mieux de rester perchée dans sa tour dorée et d’arrêter de foutre son nez dans mes affaires. Et toi aussi !
Je parle au scalpel, froid, chirurgical, chaque syllabe affûtée pour faire saigner.
Une voix fuse derrière moi, claire comme un glaçon qu’on brise :
— Aye, mo bhrathair ? Is that whaur ye’re at noo ? Haud yer butcher’s growl, Jamie.[5]
Je me retourne d’un bloc. Isla. Bras croisés, regard au diamant, prête à me tailler en pièces.
— Right on time. Ye ne’er listen, huh ? [6]
— I tak heed even mair when ye start tae fash yersel'.[7]
Ses prunelles claquent contre les miennes, tempête en approche.
— Isla, dinnae ye dare–[8]
— Och aye, I dare. Time tae stop diggin’ yer ain grave wi’ a feckin’ digger afore it's too late.[9]
J’ouvre la bouche pour la réduire en miettes, mais mon champ de vision déraille.
Elle apparaît. Victoria. Droite sur ses talons. Clarté au milieu du fracas. Son pas épouse la basse, ses cheveux en bataille s’animent et ses pommettes enflammées trahissent l’étreinte électrique de la musique. Son visage s’ensoleille d’abord, un sourire éclot sur ses lèvres, puis ses iris effleurent les miens, et la lumière s’étiole, annihilant cette joie en un souffle. Game's up.
[1] Expression écossaise signifiant « va te faire voir ».
[2] T'étais dans le coup, toi aussi ? Avec Isla ? C'est quoi, cette saloperie de combine ?
[3] Ouais, c'est des conneries !
[4] Elle pense quoi ? Balance.
[5] Vraiment, mon frère ? T'en es là, maintenant ? Remballe ton ton de boucher, Jamie.
[6] Tu tombes bien. T'écoutes jamais, hein ?
[7] Et je t'écoute encore mieux quand tu te mets en colère.
[8] Isla, t'avises pas -
[9] Oh, si, j'avise. Va falloir que t'arrêtes de creuser ta tombe avec une putain de pelleteuse avant qu'il soit trop tard.

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