Le paquet du destin
Le jour du rendez-vous approchait, et John sentait une nervosité qu’aucun masque ne pouvait contenir. Même le soir tombant n’apportait aucun apaisement. Ses gestes étaient automatiques, mais son esprit tourbillonnait.
Il quitta la maison pour prendre l’air, cherchant à calmer ses pensées, à distiller la tension accumulée. L’instinct de fumeur prit le dessus : en entrant dans sa poche, il constata que le paquet était vide. Le réflexe le fit marcher jusqu’au petit kiosque du quartier, déterminé à s’en procurer un nouveau.
Alors qu’il approchait du comptoir, il aperçut une silhouette familière : Marc, son vieil ami, également penché sur le comptoir pour acheter un paquet de cigarettes. John sentit son cœur s’accélérer.
— Johnny ? lança Marc, surpris mais souriant.
— Marc… salut… répondit John, l’air un peu crispé.
Un silence s’installa, chargé d’années passées à l’étranger, d’histoires non racontées, d’un lien qui n’avait jamais vraiment disparu.
— Tu es toujours fidèle à tes habitudes, hein ? dit Marc en désignant le paquet vide de John.
— On ne change pas si facilement, murmura John, un sourire forcé sur les lèvres.
— Trois ans loin de tout, et voilà que je te retrouve ici… Tu ne m’as pas attendu pour continuer tes rituels, j’imagine, dit Marc, moitié amusé, moitié curieux.
John hocha légèrement la tête, conscient que prolonger l’échange ne ferait que raviver son angoisse. L’instinct de fuite le poussa.
— Écoute… j’ai une urgence, dit-il, le souffle rapide, inventant un prétexte pour s’éloigner.
Marc sourit, compréhensif mais intrigué.
— Toujours pressé, hein ? Je vois que certaines choses ne changent jamais.
John continua sa route, le paquet désormais en main, chaque pas plus lourd que le précédent. La rencontre impromptue avait remué quelque chose en lui, un mélange d’amitié, de surprise et d’inquiétude. Il ne pouvait ignorer que demain serait un jour décisif, et ce paquet vide, ce détour imprévu, était la cause involontaire de cet accroc inattendu dans son plan.
En rentrant, le pas de John était plus lent, chargé de la rencontre et de la tension accumulée. Devant le bureau, le fauteuil l’attendait comme toujours, fidèle à son rôle. Il s’installa, laissant le poids du jour s’abattre sur ses épaules. L’ombre de Marc, le souvenir du paquet vide et la proximité du rendez-vous avec la psychologue se mêlaient dans son esprit. Mais malgré tout, le sanctuaire, ce fauteuil, restait son point d’ancrage. Ici, il pouvait respirer, réfléchir et se préparer à affronter ce qui allait venir.

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