Chapitre trois

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- Cameron ? demande une voix masculine à l’autre bout du fil.

- non, mais je ...

- qui êtes-vous bordel ?

- j’allais vous le dire, j’ai trouvé ce téléphone sur un homme blessé chez moi.

- grand, musclé, cheveux noirs, yeux verts. Des cicatrices un peu partout et des tatouages celtiques sur les bras et le dos.

- oui et il porte aussi une claddagh couronnée à l’index de la main droite.

- c’est lui, il va bien ?

- pas trop, il a reçu un coup de couteau à l’abdomen. Je l’ai soigné, mais je pense l’amener à l’hôpital ce matin.

- non, surtout pas. Vous êtes docteur ?

- oui, mais ma spécialité, c’est la gynécologie-obstétrique. Il serait bien mieux soigné à l’hôpital.

- gardez-le chez vous, d’ailleurs où vivez-vous ?

- je ne vous le dirais pas, qui me dit que vous êtes vraiment un de ses amis ? Et pas celui qui lui a infligé ça ? Je vais le soigner et il vous appellera quand il ira mieux. Pour ma sécurité, je vais me débarrasser de ce téléphone, il peut vous contacter à ce numéro ?

- oui, mais ...

- ne vous inquiétez pas, ce n’est pas la première fois que je fais ça. Je vous appelle si son état empire sinon il le fera.

Je raccroche, note le numéro de l’inconnu puis retire la batterie ainsi que la carte sim. Je file à la pharmacie du coin pour refaire mes stocks d’antibiotiques et matériels. Je jette le téléphone dans la benne du camion poubelle qui est arrêtée de l’autre côté de la rue. Puis je retourne à la maison voir comment va Cameron. Il dort, n’a pas de fièvre et son abdomen est normal à l’examen. Mais par sécurité, je relis mes livres de médecine après lui avoir posé une perfusion. Je passe ma journée à lutter contre ma gueule de bois et à faire le ménage. Il se réveille en fin d’après-midi, fatigué et un peu désorienté. Je lui souris et le réexamine, il me laisse faire.

- la tension est un peu faible, mais le reste est normal. Des douleurs ?

- un peu.

Il regarde son ventre et passe son doigt sur mes points de suture.

- un travail magnifique.

- merci.

Il me voit poser un haricot métallique contenant une seringue et des flacons.

- c’est pour moi ?

- oui, par sécurité, une dose d’antibiotique ne vous fera pas de mal. Sauf si vous y êtes allergique.

- pas d’allergie.

Il me regarde ajouter les antibiotiques à sa perfusion.

- j’ai dormi longtemps ?

- toute la nuit et une très grande partie de la journée. Votre blessure est moins grave qu’il n’y paraît, mais vous allez devoir rester quelques jours par sécurité. Je vais aller vous chercher à manger.

- merci. Où est mon téléphone ?

- je m’en suis débarrassé. Mais j’ai parlé avec un homme qui vous a appelé. Je ramène son numéro et mon téléphone.

- je peux me lever ?

- seulement si c’est nécessaire.

- je dois aller pisser.

Je soupire et l’aide à sortir du lit puis à descendre au rez-de-chaussée.

- laissez la porte ouverte, si vous tombez, je ne pourrais pas vous aider sinon.

Je vais dans la cuisine et réchauffe les restes du pot-au-feu. Je pose mon téléphone et le bloc note sur la table ainsi que son couvert. Il arrive en chancelant.

- ce ne sont pas mes vêtements, à qui, sont-ils ?

- à une personne qui ne viendra pas les récupérer. Appelez votre ami, il était très inquiet que je vous amène à l’hôpital.

Il compose le numéro et appelle. À la première tonalité, il pose sa main sur le micro du téléphone et me regarde.

- vous avez bien masqué votre numéro ?

- oui.

Je n’entends plus la tonalité, signe que son correspondant à répondu.

- docteur ?

- non, c’est moi.

- ah mon vieux, ça fait plaisir de t’entendre. On dirait que la doctoresse t’a bien soignée finalement.

- très bien même. Je vais rester quelques jours chez elle, je ne me sens pas encore au top. Tu pourrais m’apporter des fringues et aussi d’autres trucs.

Je le regarde et fronce les sourcils.

- pas d’armes et pas de drogues chez moi. Votre ami ne vient pas chez moi non plus. Je ne veux pas être mêlée à vos affaires.

- une minute Connor.

- pas de soucis.

Cameron me regarde.

- dans ce cas, vous allez devoir aller chercher mes affaires.

- pas de problème. Un petit sac et un rendez-vous dans un centre commercial. Si votre ami, pardon vos amis ou partenaires de travail et d’affaires me suivent, je vous expédie à la morgue.

- tu as entendu Connor ?

- aucun problème doctoresse, on ne vous suivra pas. Mais je vous préviens, s’il lui arrive quoi que ce soit, vous rejoindrez rapidement vos ancêtres.

- ok. Rendez-vous demain matin à onze heures au centre commercial du lac. À l’étage de la boutique Swan.

- comment je vous reconnaîtrais ?

- elle portera ma claddagh.

- et j’aurais un bonnet à tête de chat.

Connor et Cameron éclatent de rire et je retourne devant la gazinière.

- à bientôt Cam.

- pareil Connor.

Il raccroche et je lui sers à manger.

- vous ne mangez pas ?

- plus tard. Mangez lentement.

Je range la vaisselle d’hier soir puis m’installe en face de lui.

- c’est délicieux, merci.

- allez, au lit, vous devez vous reposer.

Je l’aide à monter puis à se recoucher. Il s’endort presque aussitôt, je vérifie sa température et sa tension, mais tout est normal. Je mange en regardant les infos, il y parle d’une bagarre au couteau, un seul des protagonistes aurait été arrêté. Je soupire en faisant la vaisselle à peut prêt certaine que l’autre participant est actuellement dans mon lit. Je prépare ma théière pour demain matin et ferme la maison pour la nuit. Je me couche, tôt, espérant récupérer de mes excès de la veille. Mais Cameron ne dort plus.

- vous dormez avec moi ?

- oui, je n’ai pas d’autre lit.

J’en ai d’autre, mais je ne peux me résoudre à dormir dans les lits des membres défunts qui composaient ma famille.

- nouvelle dans la ville ?

- non, je vivais dans un studio puis j’ai emménagé dans la maison de mes grands-parents après leur mort. Voilà pourquoi je n’ai pas encore d’autre lit. Je peux dormir sur le canapé si ça vous dérange.

- il faudrait être fou pour laisser dormir une belle femme sur un canapé.

- je peux savoir comment vous êtes arrivé dans mon lit hier soir ?

- l’échelle de votre voisin.

- je lui avais dit de la ranger, il va m’entendre cet abruti.

- pourquoi votre maison était ouverte aussi tard ?

- soirée entre filles et retour de boîte assez laborieux. Dormez, vous en avez besoin.

J’éteins la lumière et me tourne sur le côté. Je sens son bras dans mon dos et l’entends respirer. Je laisse le sommeil me prendre et dors comme un bébé.

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