Sur la table d'opération

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J’étais seul, allongé sur la table d’opération. La lumière qui éclairait mes yeux m’aveuglait et je ne voyais absolument rien. J’étais attaché par d’énormes sangles qui m’empêchaient de faire le moindre mouvement. Un bâillon dans la bouche me retenait de tout hurlement, que ce fût de douleur ou de terreur.

Le plus terrible je devais l’admettre était ces longues périodes entre les expériences ; le fait de devoir me demander sans cesse quand ils allaient revenir avec tout leur matos me rendait anxieux. La personne qui faisait ces expériences sur mon corps si toutefois il s’agissait bel et bien d’une personne était, je pouvais le deviner, assez élancée d’environ deux mètres. Le plus souvent elle se contentait de me scanner au laser quand elle ne prenait pas l’un de ses outils tranchants pour m’ouvrir en deux, tentant de déceler quelque mystère avant de le refermer, tout cela bien entendu sans anesthésie générale.

Les expériences se multipliaient et j’avais arrêté de me demander quand elles allaient prendre fin, ayant perdu tout espoir de revoir la douce clarté du jour.

L’homme ou je ne savais quoi revint au bout de deux heures. Il avait amené avec lui une grosse machine. Il la brancha et posa deux grosses pastilles humides sur mes tempes. Lorsque j’entendis le ronronnement de la machine qui se mettait en marche, je commençai à suer du front, redoutant le pire. Il appuya sur un bouton et là, l’électrochoc. Si j’avais pu hurler jusqu’à la mort, je l’aurais fait tant c’était douloureux. L’appareil enregistrait mes stimuli.

Lorsqu’il eut fini, il rangea son matériel et disparut à nouveau, me laissant là dans ma forteresse de solitude. Au fur et à mesure que le temps passait, j’avais cette désagréable sensation que la pièce se rapetissait, faisant accroître un sentiment de claustrophobie chez moi qui ne l’avais jamais été. Entravé par ses sangles qui me brûlaient les poignets et les chevilles et ce bâillon j’avais l’impression de suffoquer. Je n’avais plus qu’une envie, qu’il en finisse.

Les jours passaient et je n’avais toujours pas pu poser un regard sur mon tortionnaire. Cette lumière braquée sur moi en permanence m’empêchait de voir. Tout ce que je pouvais me dire c’était qu’il n’était pas humain. Aucun homme n’infligerait un tel calvaire, n’est-ce pas ? Et puis même les doigts que je pouvais sentir de temps à autre sur mon visage ne me paraissaient pas humains.

Ce fut une nuit, alors que la lampe au-dessus de ma tête était éteinte et que la pièce était éclairée par quelques néons, que je le vis dans toute son horreur. Il était maigre au point de laisser paraitre son étrange ossature, son visage anormalement allongé et difforme devait laisser supposer un cerveau tout aussi hors norme. La chose qui se tint devant moi cette nuit-là n’avait pour sûr rien d’humain. Et à contempler cette hideur je crus que j’allais en perdre la raison. Si j’eus pu hurler je l’aurais assurément fait. Mais à quoi bon crier quand vous saviez pertinemment que personne ne vous entendrait ni ne viendrait à votre secours.

J’étais seul avec cette créature que même l’enfer, si j’y avais cru, n’aurait pu engendrer. Elle me scrutait de ses énormes yeux vitreux, sans dire un mot. D’ailleurs si elle eut pu parler je doutais que cela aurait été dans ma langue. Elle restait là à se contenter d’une simple observation qui provoquait en moi quelques spasmes nerveux que j’eus du mal à dissimuler. Puis enfin elle s’approcha de moi, son visage à présent à quelques centimètres du mien. Je pouvais alors sentir son haleine chaude et fétide, ce qui ne manqua pas de me faire évanouir de dégoût.

Je ne voulais surtout pas sombrer avec cette être effroyable à mes côtés. Dieu seul savait ce qu’il m’aurait fait sinon.

Les jours passèrent, les mois se succédèrent. Je l’observais, le voyais jouer avec mon corps comme si je ne fus qu’un pantin désarticulé entre ses doigts longs et frêles. Il fit abstraction de la souffrance que je pouvais ressentir lors de ses opérations avec une agilité déconcertante et inhumaine. J’avais beau hurler à la mort cela ne semblait en aucun cas le déranger dans ses expérimentations.

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