Dimanche 16 août 1981

2 minutes de lecture

Un chapitre / Une musique

Matt Emery - Empire (Daigo Hanada Rework)

https://modernarecords.bandcamp.com/track/matt-emery-empire-daigo-hanada-rework

*

Ma tête va exploser. Les veines de mes tempes bouillonnent. Ma mâchoire me fait un mal de chien à force de se contracter. Mes sanglots se sont enfin arrêtés. Je suis recroquevillé sur moi-même. Mon t-shirt encore humide me colle à la peau. Ma veste en jean n’est plus sur moi. Je ne sais même plus ce que j’en ai fait. Mon short est mouillé lui aussi. Mon corps dégage un peu de chaleur malgré le froid qui règne ici. J’entends le vent siffler dans le puits de lumière de la grotte. Il est glacial. La tempête a dû se calmer dehors. Enfin. Les branchages sous la couverture sur laquelle je suis me râppent les cuisses. Je m’en fous. Je préfère rester ici encore un peu. Je suis bien. J’ai envie de faire comme si Alexandre était encore en face de moi à me sourire. L’image de son visage apparaît. Mes lèvres tremblent. Je suis prêt à pleurer de nouveau. Pourtant, les larmes ne viennent pas. J’ai vidé les stocks. Du moins pour le moment. Je préfère me concentrer sur son beau visage, ses yeux. Son parfum est encore là, à flotter dans l’air. Je sais que je suis en train de me mentir. Ça sent l’humidité, le bois pourri, l’eau croupie, la pisse.

Je regarde la montre d’Alexandre à mon poignet. Le cadre en verre est fissuré de partout. Les aiguilles se sont arrêtées. Impossible de lire l'heure. Je sors un mouchoir en tissu de ma poche. Il est trempé. Tant pis, je me mouche. Je renifle bruyamment. Je respire un peu mieux. Je ressens toujours une lourde douleur dans le plexus solaire. Elle n’est pas prête de s’en aller.

Soudain, j’entends des notes de piano. Elles sont là, tout près de moi. Je revois les doigts agiles d’Alexandre parcourir les touches du clavier. La mélodie est belle. Elle me berce. Me réconforte.

J’enlève une bestiole qui me gratte le crâne. J'ai mal aussi sur le côté de la tête. Je pose mes doigts dessus. Une croûte de sang s’est formée sur une large entaille. Je ne me rappelle même plus quand je me suis fait ça. La seule chose dont je me souviens, c’est d’avoir hurlé contre mon père. Je le revois enfin me lâcher la grappe. Il a bien compris que je ne partirais jamais d’ici avant qu’Alexandre ne revienne. Mon père était aussi terrorisé que moi. Je l’ai vu dans ses yeux. Il n'a pas insisté longtemps pour me convaincre. C’est un lâche. Il me l’a encore prouvé. Mais il sait, comme moi, qu'il est impossible de revenir en arrière. Tout est impossible de toute façon à partir de maintenant. Tout est fichu. Rien n’a plus d’importance. Je me replie encore davantage sur moi-même pour tenter de me réchauffer. En vain. Je grelotte. Et à la fois, j’ai chaud à l’intérieur.

Je veux mourir.

Annotations

Vous aimez lire Tom Ripley ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0