Le Retour d'Aloïs

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Note de l'auteure :

Ce chap a été divisé en deux donc désolée s'il s'y passe pas grand chose !

Au petit matin, Léontine se vêtit d’une belle robe faite sur-mesure que lui avait offert son père. Après avoir prévenu les domestiques de son absence, elle se dirigea vers la grande place du Théâtre qui, dans la fraîcheur des premières heures de la journée, ramenait par leurs odeurs alléchantes un peu de chaleur dans les cœurs. La jeune fille aimait sa ville, s’y sentait chez elle et voyait le cirque rocheux qui l’entourait comme un cocon précieux. Seul lui manquait son amant qui empreignait beaucoup de ses souvenirs. Ses yeux parcoururent l’impressionnante architecture du Théâtre qui s’imposait dans la cité de ses murs circulaires protégeant les artistes des yeux des passants.

Léontine entra par l’une des multiples portes consacrées aux intimes du Théâtre et se retrouva devant une pièce de comédie où les acteurs se couvraient le visage de maquillage blanc et opaque. Dans un coin, sous les impressionnantes voûtes des loges, elle reconnut les traits mats et tirés de la mère de Peio supervisant, malgré la tristesse, la qualité des représentations. La vie reprenait son cours.

En la voyant, la dramaturge se rua vers elle :

- Ma Léontine, comment vous sentez-vous ? Ressentez-vous des contractions ? Il est important d’être attentive !

Léontine tenta de répondre le plus amicalement possible. Elle avait toujours eu un peu de mal avec l’étouffante atmosphère que cette dernière amenée avec elle. Tout de même, la jeune femme restait douce. Elle avait perdu son fils et même si elle ne l’évoquait jamais, Léontine savait qu’elle souffrait de l’intérieur.

- Ou est Alida ? finit-elle par demander.

- Alida ? Elle doit être à l’écurie ! s’exclama la comédienne. Elle m’a dit qu’elle devait aller faire des emplettes dans les villages aux alentours.

Léontine la remercia pour cette information et guida ses pas sur la pierre grise du Théâtre. Arrivée dans l’écurie, elle fut surprise de ne pas la trouver. La jeune femme demanda au palefrenier qui l’informa qu’elle avait emmené les cheveux sur la scène pour les entraîner. Face aux escaliers étroits et abrupts, elle peina. Son ventre se faisait de plus en plus lourd et son souffle était ténu. Elle se demanda si elle pourrait tenir le trajet jusqu’à la Kiolasse.

Le toit de pierre finit par disparaître et le ciel grisâtre se dévoila. Ne manquait plus qu’il pleuve. Un parfait demi-cercle de pierre prenait place autour d’une large étendue de sable. Léontine vit Alida échauffer les chevaux non loin. La jeune femme s’assit dans les tribunes prises de vertige. Un homme imposant apparu derrière elle :

- Vous avez pris du poids depuis la dernière fois que je vous ai vu ! s’adressa doucement Aslan.

Léontine hocha la tête en souriant.

- Je ne vous le fais pas dire.

Aslan tendit sa main pour l’aider à se lever et l’enlaça pour la saluer dignement. Avec douceur, elle l’aida à descendre les escaliers pour rejoindre Alida. Celle-ci fut inquiète en voyant la tête de son amie.

- Si j’avais su, j’aurais apporté ta monture devant chez toi !

- Ça ne fait rien, Alida, la rassura Léontine. Cela m’a fait du bien de marcher dans les rues. Je ne l’avais pas fait depuis… depuis l’enterrement de Peio.

- Je suis désolé de remuer le couteau dans la plaie, reprit Aslan. Aloïs a eu le droit à une réduction de peine en vue de son état. Sa famille a de suite demandée à ce qu’il soit rapatrié. Ghazi, mon oncle, m’a ordonné de le faire traverser les grandes montagnes en signe de respect des Jurill au Horla. J’ai passé près de trois semaines avec lui et les propos qu’il tenait étaient… préoccupants.

Léontine écouta attentivement les dires d’Aslan.

- Que racontait-il ?

- Je… je préfère que vous l’entendiez par vous-même. Je dois avouer que j’ai de nombreuses fois voyagé entre Biloaï et la capitale. J’ai rencontré des bandits, des espions, mais ce que raconte Aloïs dans sa folie est bien plus effrayant qu’eux.

- Vraiment ?

Le cousin de Peio acquiesça mystérieusement. Alida voulut s’exprimer et se retint. Léontine le vit et l’invita tout de même à parler.

- Peio pris de crises d’hallucinations. Aloïs devient complètement fou après quelques jours en prison. Je n’aime pas poser de conclusion hâtive, mais nous venons toujours au même point : il y a quelques choses d’anormal dans toute cette histoire.

Léontine ne répondit pas. Elle fatiguait à vouloir défendre son père, de toujours se rattacher à la rationalité. Aslan continua :

- Je me suis dit qu’il fallait que vous entendiez cela de vos propres oreilles.

La jeune femme regarda ses pieds un instant puis, répondit avec détermination ce qui lui permit de faire fuir une partie de ses doutes.

- Alors, allons-y !

Aslan hocha la tête et l’amena jusqu’à un cheval de trait. Alida avait choisi les meilleurs équidés de l’écurie afin de transporter Léontine jusqu’à la Kiolasse. Elles montèrent à deux sur la monture alors qu’Aslan rejoignit le sien, plus adapté aux longues marches.

Ils partirent d’un pas lent dans les chemins qui traversait les petites montagnes. Les yeux émeraude de la jeune femme balayaient Biloaï dans ce matin hivernal. Les rues commençaient à se remplir de monde. Puis le paysage se décolora, delaissant les maisons, pour les remplacer en pierre grise. Des kilomètres et des kilomètres de rochers. Au bout de deux heures, ils atteignirent la villa de la Kiolasse.

Des hauteurs, la bâtisse semblait paisible. Les colonnes solides s’étaient dévêtues du lierre, les vignes avaient perdu de leurs couleurs violettes. Lentement, les chevaux descendirent en dégringolant sur des cailloux. Le sol se faisait instable. Les étendards accrochés au mur de la bâtisse se secouaient au gré des vents. L’endroit se faisait si calme, qu’on aurait pu le croire vide, habité par des fantômes.

Lorsqu’ils arrivèrent sur le devant de la Kiolasse, ils attachèrent les chevaux. Aslan et Alida aidèrent Léontine à descendre de la monture de trait. Une porte grinça et une petite dame ridée apparut devant eux. Sa voix rauque et calme se fit précise.

- Vous n’êtes pas la bienvenue…

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