Le Choix

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Ozanne suivait de près Baltazar. Sa jambe commençait à guérir et elle préférait passer des journées dans le froid qu’à supporter les questions incessantes de la famille de Peio. Néanmoins, les activités du démon se montraient des plus ennuyantes. Il ne faisait qu’éviter les citoyens et marcher pendant des heures en prenant des rues aléatoirement. La jeune femme aurait pensé que la vie d’une entité surpuissante serait plus passionnante. Celui-ci continua à prétendre qu’il n’arrivait pas à utiliser ses pouvoirs. Ozanne se méfiait qu’il ne tente de la livrer à Liosan quand celui-ci reviendrait pour l’accouchement de Léontine.

Au milieu d’une après-midi pluvieuse, une femme apparut à l’autre bout de la rue. Sa large capuche protégeait sa chevelure rousse. Une manche fantomatique flottait dans l’air. Ozanne tenta de s’en rapprochait dans l’angle d’une rue, mais ils s’échangèrent quelques messes basses sans qu’elle ne puisse entendre. Baltazar acquiesça d’un air concentré. La femme semblait épuisée, des larmes perlaient le long de ses cils. Elle secoua sa manche vide pour lui expliquer quelques choses. Baltazar porta son regard sur son bras absent et le démon lui glissa quelques mots à l’oreille, avant de partir. L’amputée s’en alla dans le sens inverse. Ozanne se décida à la suivre. Elle avait l’apparence de cette générale Ana qui les avait poursuivies durant des mois. Soit elle revenait bredouille, soit Peio était avec elle.

Ozanne eut sa réponse quelques rues plus tard, après s’être faufilé dans la verrière de fer mal fermé et que la voix de son ami résonne dans une petite pièce.

- J’ai réfléchi, commença-t-il derrière la porte. Je… je pense que je ne pourrais revenir… dans une vie en laquelle je ne crois pas. Cette Léontine, je n’ai plus de souvenir de nous deux et si elle me croit mort, c’est peut-être mieux ainsi… De plus, si Ozanne se trouve dans le coin, je ne veux pas la croiser.

L’historien voulut ouvrir la porte. À la place, il se la prit dans le visage. Il tomba sur le sol en se tenant son nez en sang. Ozanne le regarda de haut et s’exprima :

- Trop tard, on dirait…

Le regard de la jeune femme se confronta à celui morne de Cyrille. Lars la scruta d’un air perdu alors que la générale Ana la dévisagea un instant. Cette dernière reprit la parole pour s’expliquer :

- Mademoiselle Ozanne, Peio est malade. Il a été exposé aux charmes de l’hystérique. Il n’est pas dans toute ses capacités.

Ce dernier la regardait avec une grande crainte.

- Je… Oz… Ozanne…, bredouilla-t-il. Vous comptiez me vendre à Liosan Ferl !

- Quoi ? s’exclama-t-elle. J’ai commis beaucoup d’atrocités, ces derniers temps, mais je ne t’aurais jamais rendu à ton beau-père. C’est plutôt Baltazar et cette générale qui comptent le faire !

- Non, reprit Nathanaëlle. J’ai menti à Baltazar. Je vais le ramener dans ma dimension pour qu’il refasse sa vie.

Ozanne regarda le jeune homme. À terre, il ne ressemblait plus à la personne qu’elle avait connue. Des larmes silencieuses arpentaient ses joues et sa barbe broussailleuse lui recouvrait le menton. Elle en eut un pincement au cœur. Effectivement, il n’était plus le jeune homme joyeux qu’elle avait rencontré ni celui qui l’avait voulu mort sur le pont de son navire. L’aventurière se calma et tenta de lui parler un peu :

- Aller ! Lève-toi !

Ses yeux apeurés la regardaient avec hébétude. Elle lui tendit sa main, mais celui-ci ne la prit pas. Ozanne reprit à voix haute :

- Tu comptes prendre la poussière ? Peio, ta femme va accoucher dans quelques semaines. Elle va avoir un enfant qu’elle élèvera seule, en croyant que son père est mort alors que ce dernier se dore sous le soleil des tropiques.

- Je ne me souviens plus vraiment de cette vie ! se défendit l’historien.

- Le savant pédant que tu étais dans la dimension des océans voulait ma mort. Si tu fais ce choix, tu ne me verras plus jamais !

Peio se redressa de lui-même et la regarda dans les yeux.

- Je ne veux plus vous voir ! Vous avez ruiné ma vie ! s’exclama-t-il.

Ozanne le fixa avec brutalité avant de lui tourner le dos pour partir à travers la verrière. Elle se faufila dans les ruelles, fonçant sans regarder où elle allait. La colère l’emplit avec brutalité avant qu’elle disparaisse soudainement. La jeune femme s’écrasa dans le coin d’une ruelle et enfonça son visage dans ses bras. Des larmes amerrir dans les sillons remplis d’eau.

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