Prologue

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La guerre contre l'Aeseria est finie depuis quelques années. Le Locquendech a su défendre vaillamment ses frontières. Les légions aeseriennes ont fui, la queue entre les jambes. Le Locquendech reste ce pays sauvage, couvert de forêts épaisses et parcouru de cours d'eau. Le climat y est doux, la population clairsemée. Le peuple continue à vénérer Mère Nature et les druides sont toujours les garants de la sagesse locquendienne.

Le Gardien, Valsoa Noreldon , est retourné régner en sa capitale de Gavundia, sur la côte nord du pays. Les Protecteurs ont chacun rejoint leurs places fortes et leurs terres familiales. Parmi ceux-ci, Hagrim Whorgram, protecteur parmi les plus réputés du royaume, est également rentré chez lui, à Fort Daenlorn, à l'extrême sud-est du royaume. Son héritier, unique fils de sa première épouse disparue depuis peu, s'est illustré dans l'armée du Gardien lors de la guerre contre Aeseria. Mais alors qu'il était l'une des étoiles montantes de la cour, il a disparu sans laisser de trace. Certains plaignent le protecteur qui a perdu son héritier et dont la seconde femme n'a pas pu lui donner de descendance. D'autres se rient de lui pour cette même raison, discrètement, dans la sécurité de leurs fiefs. Il ne fait pas bon provoquer la maison Whorgram. Hagrim n'a pas hésité à mener bataille contre plusieurs autres Protecteurs afin de s'approprier leurs terres, ainsi que le veut la coutume du royaume. C’est un tacticien de renom et peu sont prêts à risquer sa colère.

Ce que personne ne sait, en dehors de rares personnes parmi les Whorgram, c'est que des héritiers, Hagrim en a. Plusieurs. Sa seconde épouse n'est pas la femme stérile que l'on croit à la cour. Mais ces enfants, Hagrim les a cachés, a refusé de les reconnaître comme siens. Leur statut est presque pire que celui des bâtards des maisons nobles : ils n'ont pas de nom, pas de Maison. Ils n’existent pas au yeux du monde. Ils sont au nombre de six, cinq garçons et une fille : Réginald et Barthélémius les jumeaux, aînés de la fratrie, Lucian, Khordel, Balgor et Ombeline, la benjamine.

Ils n'ont pas eu une enfance heureuse. Non content de les cacher au monde et de leur interdire de se revendiquer de leur famille, Hagrim les a élevés plus qu'avec rudesse. Avec violence. Si les enfants voulaient manger, il leur a fallu très tôt chasser, pêcher, cueillir leur pitance. Si des invités se présentaient au fort, les enfants étaient relégués dans les caves, enfermés jusqu'au départ des intrus. La fratrie a très vite appris à se taire en présence de leur père, afin d'éviter les coups et les insultes. La seule personne à avoir osé leur montrer une affection discrète est leur mère et même elle ne s’opposait pas à son tyran de mari. Femme soumise, brisée, elle n’a pas pu, pas su, les protéger de ce dernier. Personne, dans la famille, ne s’est donné la peine de s’élever contre Hagrim, personne n’a jamais rien fait pour eux.

Un jour, quatre ans avant le début de notre histoire, sans que personne ne sache pourquoi, le protecteur a décidé de mettre la fratrie à la porte avec juste ce qu'ils avaient sur le dos et un petit baluchon contenant un peu de vivres, quelques piécettes et... rien de plus.

Passé le premier choc de se retrouver sans toit, sans famille, sans rien, la fratrie s'est peu à peu dispersée. Réginald et Barthélémius ont préféré trouver leur propre voie seuls. Lucian et Khordel sont partis à deux pour devenir mercenaires. Balgor et Ombeline sont restés ensemble quelques mois, avant d'être séparés un jour lors d'une cohue. Ombeline, incapable de retrouver son frère, a alors trouvé refuge dans une troupe de troubadours après quelques mois seule dont elle n’a jamais voulu parler. Elle a pris l'habitude, pour se protéger, de se travestir. Et si son déguisement n'a pas tenu longtemps auprès des troubadours, ceux-ci ont respecté ce choix et Balda, la meneuse de la troupe, l'a prise sous son aile.

Ombeline va passer trois ans et demi avec la troupe, avec plus de bonheur parmi eux qu'elle n'en a jamais connu auparavant. Mais les évènements vont les rattraper, elle et ses frères. Ceci est leur histoire, l’histoire des Enfants Whorgram.

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